entièrement de la crédulité au grand oeuvre & à
la panacée, mettre cependant en oeuvre 8c rapprocher
avec plus ou moins d’habileté les observations
& les réfultats des, alchimifies , de manière
à en faire un effai de théorie ou de doctrine
fur les propriétés des fubftances métalliques.
6. La métallologie chimique a furtouc beaucoup
gagné par les ouvrages de docimafie 8c de mfetal-
lurgie, traitées comme arts ou comme Sciences,
qu’on a publiés depuis le milieu du Seizième Siècle
jufqu’à la fin du dix-huitième, & Spécialement
par ceux , fuccelhvement imprimés , de J. Q.
Agricola en 1546 , de Lazare Ecker en 1574, de
Modeft Fachfius en 1622, d’Ul. Aldrovande en
1648, d À-lonz. Barba en 16.40, de Borrichius en-
1674, de Fr. Henckel en 1725 , de Swedenborg
en 1734, de Shlutter en 1738, de Cramer en
1739 , de Gelier.c en 175-5 , de Lehman en 1761,
de Wa lerius en 1770, de Delius , de Gobet, de
Jars, de Bergman, de Diécrich, de Born , de
Ferber & de Pfingften dans les dernières années.
Dans tous ces ouvrages , le traitement des mines
& des métaux en grand ou en petit, dans la métal- ■
lurgie ou la docimafie, a été éclairé par la théorie !
la plus lumineufe-, 8c décrit comme une fuite |
d expériences chimiques, conféquemmentlié avec !
la marche générale de la Science.
7. Pendant ce rapprochement non interrompu
depuis près de deux cents ans des arts métalliques
avec la doétnne de la Science, fur la marche & le
perfectionnement de laquelle ils ont beaucoup influé,
il s’cn faifoit un autre non moins utile entre
la préparation, la nature & l ’adminifiration des
médicamens compofes avec les métaux, 8c l’art de
faire des expériences chimiques, ainfi que la méthode
de les comparer, d’en tirer des induètions
générales ou des résultats pour la théorie. A côté
des fingulières & vaines prétentions de Paracelfe,
de Digby, &c. on doit voir ici les utiles travaux
de Jacq. Sylvius, de Léon Fuchfius, de Val. Cor-
dus, de Quercetan, de Mynficht, de Crollius, de
Zwelfer, de Schroeder, de Fred. & de Gafp.
Hoffman , d’Angel ..Sala, de Glauber, de Charas,
de Nie. Lémery, de Barchufen, de Juncken , de
Shaw, de Hermann, de Wallerius, de Peiner, de
Poulletier de la Salle, de Lewis & de Spielman.
Dans les nombreux ouvrages de ces chimiftes-
pharmacologiftes , publiés depuis 1755 jufqu’ en
177S » on trouve méthodiquement dilpofées, Savamment
difeutées, nettement décrites, les di-
verfes altérations chimiques que les métaux font
Susceptibles d’éprouver par tous les agens à l’ aide
defquels on modifie leurs propriétés & on change !
leur nature.
8. C’eft dans ces recueils précieux de faits , j
d’expériences, de phénomènes bien décrits, que J
les chimiftes, écrivains fyftématiques, obligés î
d embrafler 1 en Semble des réactions réciproques |
de tous les corps de la nature les uns fur les au- |
très, ont trouvé les élémens des connoiflànces
exa&es, dont ils ont enfuite enrichi leurs ouvra-
| ges > 8c , fans les laborieux efforts de leurs prédé-
! ceffeurs, leurs traités, loin d'être auffi complets
j qu ils les ont rédigés, eulfent offert de toutes
parts des lacunes-immenfes ou des landes arides
dansl’expofé des matières métalliques, dont les
propriétés font conftamment la majeure 8c en
même tems la plus importante partie de leurs ouvrages.
9. A ces fources .multipliées de travaux & de
j recherches fur les matières métalliques, il faut 1 fur.tou.c j°*ndre, pour avoir une idée fuffifante de
| 1 hiftoire de la chimie qui les concerne, la connoiffance
des nombreufes découvertes de nouveaux
métaux3 faites fpécialement depuis le commencement
du dix-huitième fiecle. Alors on trouva
fucceiiivement l’arfenic', le cobalt, le .nickel, le
platine même, mal connu jufque-là. Depuis vingt
ans on y a ajouté le manganèfe, lfe molybdène ,
le tungftene, & plus récemment l’ urane, le titane,
le chrome, le tellure , le tantale, le cérium,
Je palladium, le rhodium, 1 ofmium 8c l’iridium.
Tous ces métaux, très-caffans & plus ou moins
difficiles à fondre, font reftés long-tems cachés 8c
enj quelque forte inconnus aux hommes , parce
qu on a été long-tems perfuadé que la ductilité
étoit le caractère inféparable des fubftances métalliques}
& depuis qu’une férié de quelques-unes
de ces fubftances fans dudtilité a été trouvée ,
tout annonce que leur nombre fera quelque jour
encore porté peut-être bien au-delà de ce qu’on
a reconnu jufqu?ici.
10. La marche des découvertes fucceffives &
des connoiflances graduellement acquifes que je
viens de tracer, ne préfentoit encore que des
incertitudes au milieu des faits nombreux qui eh
1 compôfoient l ’enfemble : on peut même ajouter
qu’un grand nombre de ces connoiflances offroit
de grandes erreurs, 8c que la plupart de ces faits
n’étoient que des apperçus inexacts avant que
Làvoifiér eût publié fes belles découvertes fur la
calcination des métaux, fur leur diffolution dans
les acides, fur la décompofition de ces derniers,
& furtout fur celle de l’eau, que beaucoup de cés
corps opèrent. Tous les efforts de Bergman pour
déterminer la proportion d’un principe imaginaire
, admis depuis le commencement de ce. fiècle
dans les métaux, n’étoient en quelque forte que
la confirmation d’une ancienne erreur, & ne lui
prêtoient qu’une force fimulée & faétice, lorfque
Lavoifier , renverfant par fes ingénieufes expériences
cette hypothèfe menfongère, créa & fit
fortir du fein de fes nouveaux réfultats fur la nature
de l’air , de l’eau 8c des acides, une doélrine
qui détruifit toutes les difficultés dont l ’hiftoire
métallique avoit été hériffée, montra la caufe de
leur augmentation fi fréquente de poids, celle de
leur rédu&ion , de leur diffolution, 8c les offrie
enfin aux chimiftes, comme des inftrumens indé-
compofables,paffifspar rapport à leur compofition
. intime %
Intime-, indélébiles , changeant feulement de
forme dans toutes les altérations qu’on leur fut
fubir, 8c agiffant comme moyens de decompou-
tion fur une foule de corps compofés , dont ils
fervent ainfi à déterminer la nature. Depuis cette
époque remarquable, 8c qui doit en être une pour
les progrès de l’efprit humain , la fcience a marché
d’un pas rapide dans la connoiffance des me-
taux 8c clans la détermination des phénomènes
qu’ils produifeni j les découvertes fe font fubite-
ment accrues; tout ce qui étoit obfcur s’eft entièrement
éclairci; & cette belle partie de la chimie,
enrichie d’une foule de faits nouveaux, a éclairé
tout à la fois, & les ateliers docimaftiques & métallurgiques,
& la minéralogie, & tous les arts
qui emploient les métaux.
Du nombre & de la clajfification des métaux.
1 1. Quand on ne regardoit comme métaux que
ceux qui étoient dudiles, quand leur nombre étoit
borné à fix ou fept, il n’étoit pas néceffaire de
chercher îin grand nombre de propriétés, ni d’examiner
aucune efpèce de méthode pour diftinguer
& reconnoître chacun de ces corps, & l’idée
même d’en former une claffification n avoit pas
dû occuper les chimiftes.
11. A l’époque où l’on reconnut l’exiftence de
plufieurs matières métalliques fragiles 8c caflàntes,
& où l’on fut convaincu que toutes leurs propriétés
fe rapprochoient de celles des métaux duétiles,
on commença à diftinguer les premiers par l’ex-
preffion de demi-métaux , comme fi le caraétere de
la du&ilité étoit le plus effentiel de ces corps dans
Ja nature, comme il l’eft dans les ufages dé l’art.
Ainfi l’homme, en rapportant tout à lui & à fes
befoins, donnoit aux êtres un rang 8c une place
déterminés par l’utilité qu’il en retiroit. Une âu
trè'idée, moins raifonnable fans doute , avoit fait
créer cette expreffion de demi-métaux. Les alchi-
miftes penfoient que tous les métaux n’étoient que
des ébauches de l’or, regardé comme le plus parfait
; que, par un travail fouterrain de la nature ,
inimitable par l’art, ils pouvoient, en fe perfectionnant
8c fe mûriffant, devenir de j’o r , 8c que
tous n’ étoient que des pillages fucceffifs d’un état
moins parfait à un état de plus en plus parfait,
jufqu’à l’aurification. Or, comme la duttilité eli
un des: caractères les plus prononcés de l'or, &
que les métaux proprement dits s’en rapprochent
plus ou moins par ce. caractère même, ceux qui
n’en joujflbient ppint leur paroiffoient être comme
les premiers effais de la nature, comme des
embryons ou des germes métalliques non encore
développés : de là l’expreflion de demi -métaux,
pour défigner les corps qui n’avoitnt encore
éprouvé pour ainfi dire qu’une demi-métallifa-
tion.
13. Mais la plus fimple réflexion fuffit pour
faire fencir que l’application dé la.même idée au- 1
Chimie. Tome y .
roit dû conduire à la diftinétion de quarts de métaux
, de tiers de métaux 8c de fraCtions métalliques
, qui exprimaient le rapport ou la proportion
des propriétés des métaux dont chacun de ces corps
comparés paroiffoit jouir. Cette fuppofition fait
voir la fa u fie té de l’expreffion de demi-métaux;
car elle montre qu’en manquant de termes de
çomparaifon pour exprimer le véritable rapport
des propriétés métalliques, la chimie fe.permet-
toit un langage erroné 8c ridicule, en fuppofant
même que les métaux puffent ainfi paffer de 1 une
à l’autre converlïon ; ce que l'art n’a jamais pu
opérer, & ce qu’aucune obfervation ne prouve
pas non plus être opéré dans le travail de la
nature. ^ % g
14. 11 n’eft pas moins évident qu’ il faut en dire
autant des mots de métaux imparfaits} qu’on avoit
adoptés pour défigner les métaux qui brûlent &
perdent facilement leurs propriétés métalliques,
& du nom de métaux parfaits, qu’on donnoit à
ceux qui font infiniment peu combuftibles 8c altérables
, comparativement aux premiers; car ces
expreflions font encore plus inhérentes aux chimères
de la tranfmutation, que celle de demi-métaux,
puifqu’elles rappellent une prétendue ^perfection
dans les uns, & une imperfection qui fuppofoit
dans les autres la propriété de fe perfectionner &
de paffer à l’état des premiers.
i j . En oubliant ces défignations hypothétiques
& infeCtées encore des opinions alchimiques, &
en fentant cependant la néceflité de difpofer méthodiquement
lés métaux., il faut puifer les dif-
tinCtions qui doivent être' admifes entr’èux dans
des propriétés qui puifient être facilement aj>pré*
ciées & qui foient comparables. Trois propriétés,
balancées entr’elles, me fervent à établir les claf-
fifications des vingt-huit fubftances métalliques
connues aujourd’hui ; favoir : l'acidification, l’oxi*
dation 8c la duCtilité. Je partage les métaux en cinq
claffes, de la manière fuivante.
16. Dans la première clafte font compris les
métaux fragiles & àeidifiables, ou qui font fufeep-
tibles dè prendre le caraCtère d’ acides par la com-
binaifon ü’une plus ou moins grande proportion
d’oxigène. Il y a cinq efpèces dans cette claffe ;
favoir :
L’arfenic,
Le tunsftène,
Le molybdène ,
Le chrome,
Le colombium.
Il ëft indubitable qu’on en trouvera un plus
grand nombre dans la fuite.
17. La fécondé, claffe renferme Es mé aux fragiles
comme les premiers, mais non acidifi blés
comme eux : ceux-ci retient toujours à l’état
H’oxides , quelle.,q.ue foit la quantité d’oxi^jène
qu’ils contiennent. Cette claffe contient fept e s pèces
bien c.opn.ues j favoir ;
Le titane,
K