
températures de fept à quinze degrés au deflous
de la glace, il fe paffe dans les liqueurs ou eaux
falines des phénomènes chimiques très-differens
de ceux qui ont lieu à des températures moyennes
au deffus de o.
5°. On oppofoit autrefois aux opérations chimiques
, laites par le feu , celles qu'on faifoit par
l'eau, & cependant il n'y a pas d'oppofition réelle
entre ces deux claffes cfopérations, puifque fouvent
on les fait concourir l ’une avec l'autre. Il eft
même rare qu'on fàffe des opérations par l'aétion
de Tenu fans employer celle du calorique pour fa-
vorifer la première , à moins que l'on ne veuille
entendre par les mots opérations par le feu , celles
ou l’on-emploie celui-ci dans fa plus grande énergie
j il ne poürroit être admis d’oppofition, au
moins apparente , entre les opérations par l’eau &
les operations par le feu, qu'en confidérant les premières
comme préfentant des moyensdoux te plus
fûrs de favorifer les aérions chimiques, & d’en
obtenir par-là des réfultats certains, tandis que
les fécondés ou les opérations par le feu, renfer
mees alors dans celles où l’on emploie toute l’énergie
de cet agent j font tellement fortes ou perturbatrices
, qu'elles détruifent tout à coup les
anciennes compofitions , & dénaturent entièrement
les attractions qui exiftoient avant cette action
énergique. Àu refte, il y a dans les opérations
par l'eau un effet général qui les fait différer
effentiellement de celles par le feu}. c’eft,
qu'elles agiffent à l ’aide d'un diffolvant d’autant
plus utile, qu’il n'attiré jamais les fubftances qui
lui font foumifes. A la vérité, plufieurs chimiftes
ont confié ère Laérion du feu bien ménagé comme
une diffolution , & la chaleur comme diffolvant}
mais en ce cas le mot diffolution ne fe rapportant
qu'à l'état liquide que prennent les matières chauffées
, n'empêche pas qu'il n'y ait dans le mode de
cette diffolution ou de liquéfaérion, une altération,
en un mot un grand changement d’attraction
dû à la violence du feu.
4°. On vient de voir par les deux derniers paragraphes,
qu'il peut y avoir, qu'il y a même
■ réellement des opérations chimiques par le froid.
C'eft pour cela qu’on profite defa faifan froide,
fortout lorfqu'elle eft plus ou moins forte, qu'elle
■ pnffej par exemple, 5 — o , pour faire des opérations
chimiques dont le fuccèseft dû à cette température
baffe, comme des criftaliifations impof-
fibles en été-, des allions mêmes entre des fels,
des échanges réciproques de bafes & d'acides.,
qu’on n’obferve point dans des températures au
deffus de o. Le même* genre d’opérations s'applique
aux matières dont «on veut modérer & affoi-
biï t- tellement î’aCtioji par le refroidiffémenc ,
qu'elles ne préfentent point alors ce mouvement
aéfordonné,: ce trouble, cette violence qui ont
dieu à des températures au deffus de o , ”& qui portent
le ré fui rat.'déjà décompofirion aù-del'à de ce
vqtfieft-néceffaire pour le fuccès du procédé. C ’eft
aln^,^ue> ^.ans ^ procédé de Woulf pour obtenir
l’éther nitrique , on refroidit à 5 degrés — o
l'acide nitrique & l'alcool avant de les mêler,
& pour éviter la violente effervescence que ces
deux corps produifent. C'eft encore ainfi qu'on
voit 1 4pide muriatique oxigéné & l'ammoniaque ,
tous deux en iiqueurs, s'unir fans mouvement violent
& fans décomposition réciproque, lorfqu'on
les refroidit à douze ou quinze degrés au deffous
de o. Il y a beaucoup d'autres opérations qui font
dans ce cas.
y°. La diftinérion faite depuis très-long-tems
entre les opérations par la voie feche , & les opérations
par ia -voie humide, a quelque rapport avec
les deux premiers genres déjà confidéres nos. 2°.
& 3 . En effet, on entend par la voie fèche toutes
les opérations qui fe pratiquent fans le fecours
de l’eau ou d’un liquide , te qui confiftent à favorifer
par le feu l’aérion de divérfes fubftances fè-
ches te falides, le plus fouvent pulvérulentes,
auxquelles, à la vérité, on communique ordinairement
pour favorifer cette aélion , la forme ou
l’état liquide par l'accumulation du calorique :
toutes les fnfions, les diftillarions fèches , toutes
les operations docimaftiques te métallurgiques font
de cet ordre. Au contraire, toutes celles où l’on emploie
de l'eau par macération , infufion, déccérion
ou fimplediffolution fans chaieur, apparriennentà
ce qu on nomme la voie humide. Celles-ci ont en général
lieu pour analyfer ou combiner des matières
qui ont des attractions plus ou moins prononcées,
tandis que la voie fèche eft confacrée à opérer, à
l'aide d'une forte chaleur, des effets dont la den-
fité des corps repouffe naturellement l'exiftence.
On a coutume déranger parmi les opérations parla
voie humide celles qui fe font à l'aide de l'alcool,
des huiles, des Ieffives alcalines & falines, parce
qa'en effet elles ont toutes lieu au moyen d'une
diffolution préalable opérée., foit par des liquides
qui agiffent à la manière de l’eau, fait par l'eau
elle-même ajoutée à dés corps qu’elle diffout d’a-
1 bord, Se dont elle écarte lés molécules de manière
à diminuer-leur propre attraction, & à.favo-
rifer par-là celle qu'elles exercent fur d'autrès molécules’
diffemblables.
Parmi les nombreufes opérations qui conf-
tituent les expériences chimiques , il en..eft beaucoup
qui ne font en quelque forte qu.e préparatoires,
& qui doivent être néanmoins faîtes avec
beaucoup de foin & d'exaCtitude fi l'on veut réufr
fir dans celles qui doivent leur fuccéder. On ne
faifoit autrefois que peu d’attention à cés opéra*
tîo n s préliminaires qui .préparent cependant le
fucces;, & d ou celui-ci -dépend le plus fouvent :
on les abandonnait à des aides ou à des fervi-
teurs, & c’eft pour cela qu'on jes nommoit opérations
ancillaires. Cependam il n'en eft aucune
de cette forte , qui ne demande des attentions te
des foins fans lefquels les „réfultats .qu’qn defire
nè' TerÔiènt qü*erronés. Saris ‘douté lorfqu'll ne
s'agit dans ce genre d'opérations, que de broyer,
de pulvérifer , de filtrer te même de nétoyer les
vafes , de difpofer les inftrumens te les appareils,
il femble au premier coup-d'oeil, qu’un fimple
aide, qu’un homme fans connoiffancepuiffe en être
chargé j cependant lorfqu'on réfléchit qu'un vafe
mal lavé, qu'une cornue mal lutée, qùTine liqueur
mal filtrée , qu’un filtre mal fait, peuvent
apporter dans les expériences des occafions ou
des caufes d’erreurs affez multipliées, on reconnaîtra
qu'il n'eft pas toujours prudent d'abandonner
ces opértfrio/zjprélimïnaires, préparatoires,
autrefois nommées ancillaires, à des perfonnes
inf (Variantes, & à plus forte raifon inattentives,
foitpar defaut de lumières, foit par manqued'inté-
rét pour la choie. Auffi au lieu d’hommes de peine,
de îërviteuYs ou de domeftiques, eft-il bien
fe râble d'avoir dans les laboratoires , & furtout
dans ceux qui fontdeitines aux recherches exactes
, des aides intelligens te même allez inftruits
pour favoir que les moindres négligences peuvent
lïnguliérement influer fur le fuccès des opérations
te des expériences de chimie. Ces aides intelligens,
ces élèves déjà inftruits , doivent joindre
aux premiers documens fur l'art de difpofer les
machines & appareils , des notions exaéies fur la
néceflké d'employer l’eau diftillée dans le lavage
des vaiffeaux, fur celle de ne laiffer aucun corps
étranger dans les vafes aeûinés aux expériences,
fur 1 importance des filtrations , des décantations
faites avec beaucoup de foin} fur l'avantage de
broyer long-tems lès corps durs qu'il faut enfuite
foumettre à l'analyfe, d'employer à cet effet des ;
mortiers te des pilons qui ne portent rien d ’étran- j
ger dans les corps qu'on fe propofe d’examiner.
Les chimiftes exercés ont tant d'occafions de re-
connoître que les réfultats de leurs opérations peuvent
varier par le défaut d’ateenrion dans les travaux
préliminaires, que fouvent & malgré la longueur
6c l'ennui qu’ils entraînent, iis croienr
devoir les faire eux-mêmes. Souvent cette mefure
leur a donné des fuccès qui leur avoient manqué
en la négligeant. J'ai connu des chimiftes très-
habiles qui ne vouloient fe faire aider par per-
fonne , qui travailloient conftamment feuls dans
leur laboratoire.
- 70. Il exifte dans le nombre très-confidérable
des opérations qui font du domaine de la chimie,
urLgenre de différences qui doivent influer fingU-
liérement fur le luccès, & qu'il faut par confé-
quent faire connoître; c'èft celui qui eft relatif à
l'habitude ou au défaut d'habitude qu’on a pour
telle ou telle efpèce de ces opérations. Les unes
en effet font en quelque forte communes par leur
nature même : on les répète fréquemment à caufe
de leur utilité} elles font tellement familières,
que tous ceux qui ont quelque tems vécu dans les
laboratoires, favent les faire exactement : telles
font les préparations des corps les plus employés,
comme ageris ou réaêtifs, en chimie, les acides nitrique
& muriatique, la potaffe, la foude, l'ammoniaque,
les terres pures, &e. On conçoit bien
qu'on doit être moins porté à furveiller celles-ci,
& cependant on feroit une grande faute de les
négliger dans un laboratoire de recherches, car
c'eft au premier fuccès de ces opérations, & de U
pureté des produits qu'elles fourni fient, que dépendent
tous les fuccès ultérieurs. Rien n'eft même
fi rare quedefe pouvoir procurer des réaClifs très-
purs. Il eft une claffe & opérations oppofées aux
précédentes, qu'on ne fait que rarement, & dans
la pratique defquelles le défaut d’exercice peut
faire commettre des erreurs qu'il eft fouvent difficile
d'éviter. Quant à celles-là ,il n'eft pas bofoin
d'avertir -qu’on doit les furveiller avec un grand
foin , quoiqu’en général leur rareté même fait
qu'on porte une attention foutenue dans leur pratique
: quelques-unes font prefque fecrètes. On
conferve dans plufieurs laboratoires une tradition
du manuel néceffaire pour les faire réuffir, &
voilà pourquoi quelques-unes portent le nom de
ficrets.
Il eft encore facile de voir que les opérations
connues rentrent dans la claffe des premières de
celles dont on vient de parler, & que quant aux
opérations inconnues ou nouvelles & différentes
de celles qu'on a pratiquées déjà plufieurs fois, il
eft d'autant plus important de les faire avec des
attentions particulières, que leurs phénomènes,
comme leurs produits, font fouvent ignorés ou
inattendus, & qu’elles peuvent conduire' à des
découvertes propres à enrichir la feience, à fournir
d'utiles réfultats pour les fabriques & ies ma-
nufadtures.
S®. On doit diftinguer auflï des opérations faciles
, difficiles, délicates, dangereufes.
Les premières font en même tems les plus communes
, les mieux connues devenues les plus
fimples par une pratique journalière.
Le fécondés , qui font fouvent ou rares ou au
moins peu familières, doivent être & (ont ordi#*
nairement furveillées avec une grande.attention...
Celles qui exigent le plus grand foin, fait pat
la conftruriion des appareils qu'on y emploie, fait
par la nature des fubftances qui y fervent, foit
parle genre des phénomènes qu’ellespréfentent/,
fait enfin par la petite quantité des matières donc
on ÿ difpofe, & des produits qu'on doit en obtenir,
font à jufte titre nomméés délicktes. C'eft
dans cet ordre qu'on doit placer par exemple,
i° . lé départ opéré entre des métaux précieux
compofant quelques alliages ou les mines, entre
des terres unies l’une à l'autre dans des composes
pierreux naturels, ou entre des fels terreux, al-
j câlins & métalliques, provenans dèTévaporation
des eaux minérales} 20. les expériences qui peuvent
être accompagnées d’inflammation , de dé1
tonation, de fulguration, & dans lefquelles on
peut évitée ces phénomènes en modérant U