
voit , d’après cela, que le platinéparoît diminuer
beaucoup la ductilité de l'étain ; cependant c’eft
un alliage analogue auquel on ajoutoit du cuivre,
qu'on a propofé pour la fabrication des miroirs de
télefcope. Lewis afiure être parvenu à oxider du
platine , & à le dilfoudre dans l’acide muriatique
au moyen de fon alliage avec l’étain. En général ,
on fait que les métaux, dans leurs combinaifons
réciproques, acquièrent louvent de la combufti-
bilité.
Le platine fe fond très-bien avec le plomb, cependant
en exigeant un feu plus fort que l’alliage
précédenr. La duftilité du plomb eft finguliére-
nunt altérée par fon union avec le platine : i’al-
liage qui en réfulte, à parties égales, .tire fur le
pourpre 5 il eft ftrié, grenu dans fa caflùre & fragile
; il s’altère aufli facilement à l’air. La coupellation
du platine par le plomb a été regardée par
tous les auteurs qui fe font occupés de ce métal
important , comme une des plus intéreffantes
opérations qu’ils eu lîent à tenter, parce qu’il étoit
permis d’efpérer qu’elle ferviroit à le purifier
comme l’ or & l’argent j ils l’ont eflayée un grand
nombre de fois, & ont obtenu des fuccès rares
à caufe de l’infufibilité de ce métal. Lewis a en
vain effaye un des premiers de coupellër le platine
dans les fourneaux de coupelle ordinaires,
malgré le grand feu qu’ il y a donné. L ’oXidation
& la vitrification, ainfi que l’abforption du verre
de plomb par la.coupelle, n’ ont lieu que dans le
commencement, .& à raifon de la furabondance
du plomb» mais bientôt le platine fe fige, l’opé-
rarion s’arrête, le métal refte uni à une portion de
plomb, & n’a aucune du&ilité. Macquer& Baume
difent cependant être parvenus à coupeller
complètement une once de platine avec deux onces
de plomb , placés dans l’endroit le plus chaud
du four qui cuit la porcelaine dure de Sèvres. Le
feu de bois y dure cinquante heures de fuite.
Après ce tems , le platine qu’ils ont retiré, étoit
aplati fur la coupelle, bien fondu; fa furface étoit
fombre & ridée : ils l’ont détaché facilement; fa
furface inférieure étoit brillante, & il s’eft laiffé
étendre très-bien fous le marteau. Ils févfant af-
furés que ce platine étoit très-pur, & qu’il ne
contenoit plus de plomb. Deux morceaux de platine
ainfi coupelles, rougis à blanc, frappés l’un
fur l’autre d’un coup de marteau , fe fontfoudés
fo!idement. M. Guyton a également réuffi à coupeller
un mélange d'un gros de platine & de deux
gros de plomb , en fe fervant du fourneau à vent
de Macquer, L’opération , faite en quatre repri-
fés, a duré douze heures. Ce chimifte a obtenu
un bouton de platine, non adhérent, bien homogène
d’une couleur femblable à celle de l’étain ,
un peu raboteux à fa furface , pefant jufte un gros,
& non attirable à l’aimant. On voit par le réful-
tat de ces deux expériences, qu’elles fourniflent
un procédé propre à donner 1 e platine pur fondu
en globules * malléable & facile à réduire en plaqties
fufceptibles d’être forgées, conféquemment
d’être employées à la fabrication de beaucoup
d’uftenfilest Mais il n’eft .pas moins évident que
ces procédés difpendieux & difficiles ne pourront
jamais être regardés comme appropriés aux arts ,
& ne ferviront tout au plus que pour quelques
opérations délicates des fciences.
Lewis a fondu de la fonte de fer avec dü platine;
il en a obtenu un alliage fi dur , que la lime
ne pouvoit pas l’entamer j il avoit un peu de ductilité,
mais il fe caflbit net lorfqu’il étoit rouge ,
en raifon de la différence de fufibilité entre fes
deux compofans. Le même chimifte n’a jamais pu
parvenir à allier le , fer forgé avec le platine ; il
efpéroit réunir par-là la dureté de l’acier trempé
avec la grande duâilité du platine. Cette impof-
fibilité d’union entre le platine & le fer éloigne
beaucoup l’idée que quelques chimiftes le font
formée du platine, qu’ils avoient cru être, ou
une efpèce dé fer, ou un alliage naturel de fer
& d’or. 11 n’y a pas d'exemple d’un métal allié
ui ne s’unifie pas avec l’un de ceux qu’il contient
éjà dans fon alliage. Il eft vrai que l’infufibilité
extrême des deux métaux à réunir dans cette combinaifon
eft un grand obftacle à la formation de
cet alliage. On l’obtient cependant fort aifément
à l’âideji’un troifième métal, & particuliérement
de l’étain , du plomb & du zinc.
Le platine lé fond mieux avec le cuivre , auquel
il donne de la dureté. Quand la proportion
du cuivre eft trois ou quatre fois plus grande que
celle du platine, l’alliage a de la duétifité; il peut
prendre un très-beau poli qu’il ne perd pas même
après dix ans d’expofition à,l’air. C’eft âvec^cette
combinaifon métallique à laquelle ils avoient
ajouté de-i’arfenic pour la rendre plus fulîble, que
MM. Rochon & Carochez ont fait des miroirs de
télefcope très-beaux, d’ùn poli parfait, d’un grain
très-fin, & prefqne complètement inaltérables
par le contaét de l’air.
Le platine s'allie aifément à l’argent par la fu-
fion , quoiqu’il coule allez difficilement avec ce
métal. Le platine augmente beaucoup la dureté de
l’argent, & ternit fa couleur. Quand on tient quelque
tems cet alliage fondu , les deux métaux fe réparent.
Lewis a vu, dans cette fufion, l’argent lancé
vers les parois du creufet avec une forte d’explo-
lion. Ce phénomène a été depuis obfervé dans
l ’argent feul chauffé fortement, par M. Darcet,
ainfi que tfà l’ai déjà dit dans l’hiftoire de ce dernier
méral. Tille t, dans les expériences qu’il a
faites fur l’alliage de ces deux métaux & fur leur
réparation par une efpèce de départ, à l’aide de
l’acide nitrique, a obtenu le platine réparé fous la
forme criftalline de feuilles de fougère , & en partie
attaqué par l'acide.
L’or fe combine bien au platine, quoiqu’il ne fe
fonde avec lui qu’à un violent coup de feu île
platine, altère beaucoup & affaiblit la couleur de
l’or 4 à moins qu’il ne fait en très-petite quantité.
On a obfervé que ce changement de couleur n’a !
lieu qu’au defiiis d'un dix-feptième, & qu’à cette
proportion, ainfi qu’à celles qui font au deffous ,
la couleur de l’or n’eft pas fenfiblement altérée. 3
Le platine ne modifie pas fenjiblemem la pefanteur
fpécifique de l’o r , non plus que fa du&ilité : c’eft
pour cela que la fraude en a abufé pour allier- &
fophiftiquer de l’or avec du platine. Le Gouvernement
efpagnol , en raifon de cette Facilite de la
fraude," a empêché l’impcrtation dé ce dernier
métal en Europe, & le fait je ter dans Us rivières
à mefure qu'on en extrait des mines d'or avec
lefquelles il eft difieminé. Mais j’ai.déjà dit, fe je
ferai voir bientôt plus en détail que la chimie
fournit des moyens analytiques aufli fûrs que faciles
de reconnaître l'alliage du platine, &" d’en
eftimer très-promptement les proportions par des
expériences aufli : exaétes, & qui peuvent devenir
aufli familières que celles qui conftituent l’art de
l’elfai.
Ceux des naturaliftes ou des chimiftes qui ont
penfé, avecl’ illuftreBuffon, que le platine étoit un
alliage naturel d’or & de fer, n’ont été conduits
à cette opinion que d’après des analogies qui peuvent
bien être regardées comme fort ingénieufes,
mais qui ne font fondéés fur aucune expérience
éxaéfe. Jamais on n’a obtenu d’un alliage artificiel
d’or & de fer, en quelque proportion qu’on
l’ait fait, un métal.analogue au platine, & jamais
on n'a féparé d’or ni de fer du platine bkn puri|fié1
Dire que la nature emploie dès moyens inconnus
pour opérer cette efpèce de combinaifon métaL
lique , de pour rendre cet alliage indécompofable
ou impoflfbleà détruire & areconnoïtre par l’art,
c’eft admettre une fuppofition quâucun fait avéré
d:ins toute l’analyle .chimique ne rend vraifem-
biâble j & l’on fent qu’avec de pareilles fuppofi-
tions y on feroit une fuite de romans où de fixions
qui ne feraient jamais que la fable & non i'hiltoire
de là nature.
. Ce que j’ai fait connoître jufqu’ici des propriétés,
du platine prouve que ce métal denfe eft
trop faiblement attiré par l’oxigène , pour qu’ il
piaffe être en aucune manière altérable par l’eau.
11 y a cependant un cas où l’ on pourrait croire
qu’il agit fur ce principe de l’eau : c’eft celui où
il s’oxide en s’enflammant dans un gaz qui ne corn
tient point d’autrte oxigène que celui.de l ’eau qu’il
recèle en vapeur. Mais cette eau n’eft décompo-
fée que par l’étincelle & la commotion électriques,
& ce n’eft qu’au moment où fon oxigène:ifolé de
l’hydrogène s’offre'au platine très-échauffé & très?
divifé par l’effet de l’éleCtrièité, comme je l’ai déjà
fait voir, dans l ’hiftoireide l’ot & de l’argent encore
cette! oxidation du platine e^-e\\e moins facile,
que celle de ces deux métaux* Inexpérience a
proyvé que le platine eft fufceptible de s’oxider à
froid dans l’eau par l ’influencé.de l’éleétiicité galvanique,
ou de la pile éleétrique de-Volta.
Par la même raifon que ce métal n’a aucune action
fur l’oxide hydrogéné del’eau, il h’en a également
aucun fur les oxides métalliques. Il n’y en
a point, auquel il enlève Toxigène .5 & ce font au
contraire la plupart des autr< s métaux qui lui enlèvent
communément ce. principe, qui le débraiera:
avec plus ou moins d’énergie, de promptitude
& de facilité.'
Le platine eft un dès métaux qui agiffent le moins
fur lies acide-s , 8c qui y fopt le moins dilfo lubies £
L’ac ide 'ulfurique ië plus concentré, & aidé de
la plus forte chaleur,' ne l'attaque en aucune manière,
& n’en, éprouve apçunealtération. 11 en eft
de même de. racide nitrique j & fi l’acide nitreux
paroît fufceptible de l’ attaquer légèrement, comme
if le fait fur l’o r , c’eft beaucoup moins lenflble-
ment que dansice.dernier metai : aufli tous les chi-
miiles-ont^ils. unanimement affuré que 1 e platine
n’étoit point diiioluble: dans l’acide du nitre. L’a-
cideimuriatiquede plus fart n’agit pas non plus fur
le platine ^mêitiéf à: l’aide^ d’une longue ébullition:
on fe fert:de cette eetière, inaétion fur le platine,
& de la farte, aétion de cet acide fur le/fer, pour
féparer ce; dernier,métal du .premier , & pour purifier:
celui-ci.' La.jdiÜillation , moyen fi puiflant
pour oxider & di.ffoudre la plupart des autfesmé-
taux,.ne favori fe pas davantage 'l’altération du platine
par tes acides > & l’on peut;dire que, de toutes
les fubftances métalliques} cqlle-ci eft la feule
qui n’éprouve ; aucun changement par prefque
tous les, acides. Aufli les acides, phofphoriq.ue ,
fluorique , boxacique carbonique, & Jes quatre
acides métalliques , beaucoup plus faibles que
les trois premiers, n’exercert ils abfolument au-
cune influence fur le platine pur & dans fon état
de^métal: il n’y a , comme-pù va le voir v‘que les
acides furçhargés d’oxigèn.e,, & qui tiennent peu
à.ce principe en excès/j qui puiflent le dilfaudre. :
Trois acides fèuljqment, pu l'acidè muriatique
dans la triple: circoiifiance de fa furpxigénation ,
oxident & diffplv.pnt \tpiétine. L’acide muriatique
oxigéné liquide agit priOmptement fur ce métal, ôc
à une chaleur de 15: à 20 degrés de la graduation
tb.ermométrique de Réaumur : : l’oxidation & la
diflplu.don du platine oxpt dieu fans effervefeence
fenfible,, parce qu’il enlève tacitement en quelque
forte: l’oxigène peu adhérent, à l’acide,muriatique-,
fans être obligé de le féparer d’aucune bafe fufceptible
de prendre; la-forme gazeufe ; circonf-
tance qui , commerje l’ai déjà expofé un grand
nombre de fois dans les articles précédens , eft la
feule caufe de Teffervefçence dont tant d’autres
diffolutipnsifont accompagnées. A mefure que lé
platine eft aufli tranquillement oxide, il eft différa,
s de mêmé par l’acide muriatique qui fe trouve
défaxigqné , |nais_ quj a autant d'attraétion pour
l’oxide de cé -métal, qu’il en a peu pour |e qiétal
lui*m,fnte.’ Lài diffojjUtfan qqi s’opère, dans, çe cas
n’eft, que trèsTpible^ fe très-peu chargée, 3 càufé
de la-îrès-pet'ite:(q!uantité d’acide muriatique qui
refte dans .Tçau, diaprés !.a portioa bien peu abon