Le même ouvrage , le Journal des Mines, dont
nous venons d’extraire le rapportée M. l’ingénieur
Miché, contient fur la préparation & les propriétés
des pièces pyrométriques de Wedgwood
( tome X IV , page 423) , des obfervadons judi-
cieufes , dues à M. Fourmy, fabricant de poteries
j qui a , fur les terres, leur mélange, leurs
propriétés de deflkcation, de cuiffon & de ré-:
traite , des connoiffances fondées fur une théorie
très-faine , autant que fur une pratique très-étendue.
J’inférerai ici ces obfervations comme très-
propres à perfectionner l’art de conftruire les pyromètres
d’argile.
Sur les thermomètres en terres cuites, appelés en
France pyromètres ÿ par M. Fourmy.
« Les phénomènes réfultans de l'aCtion du calorique
fur certaines fubftances diffèrent félon
que ia températureeft plus ou moins élevée, plus
ou moins foutenue.
; » Le befoin de comparer ces phénomènes fe
fait, fentir dans une infinité de circônftances , &
fpécialement dans la plupart des opérations pyrotechniques
} cependant on ne pourra les comparer
tant qu’on ne pourra calculer la puiffance de leur
caufe, c’eft-à-dire , l’ intenfité du calorique. I
» Le premier pas à faire eft donc de chercher
le moyen d’apprécier cette intenfité.
» Ne pouvant la mefurer par elle-même, on a
cherché à la mefurer par fes effets > de là divers
inftrumens plus ou moins ingénieux, connus fous
le nom de thermomètres.
» Ceux de ces inftrumens qui font fondés fur la
dilatation du mercure ou de l'alcool, ne peuvent
fervir que pour des températures affez foibles 5 il
en falloir d’autres pour des températures élevées.
§
» L’expanfîon que prennent la plupart des fo-
lideslorfqu’ils font pénétrés par le calorique, étoit
un phénomène trop connu pour qu’on ne fongeât
point à en faire, pour les températures élevées, le
même emploi qu’on avoir fait de Talcool & du
mercure pour les températures inférieures.
«Et les folidesles plus dilatables étant ceux qui
officient- le plus d’avantages pour cette deftina-
tion , les métaux durent les premiers fe préfenter
à l’efprit de ceux qui s’occupèrent de cette recherche.
• « Aufli n’a-t-on pas manqué de faire des tentatives
pour exécuter des thermomètres fondés fur
la dilatation des métaux.
»s Un phénomène diamétralement oppofé a paru
devoir conduire au même but.
33 On.favoit que les mixtes alumineux , connus
fous le nom Ü argiles > -.éprouvent, par l’impref-
fïon du calorique, une diminution de volume plus
.ou moins fenfible, à laquelle les gens du métier
ont donné le nom de retraite.
» L’illuftre Wedgwood imagina de faire fervir !
cette modification des argiles (1) au même emploi
que la dilatation des métaux. •
33 11 fuppofa qu’elle étoit proportionnée à l’intenfité
du calorique, & conclut qu’elle en pouvoir
devenir la mefure.
31 Dans un Mémoire adreffé à la Société royale
de Londres en 1782, cet artifte , après avoir parlé
de la dilatation du mercure & de l’alcool, s’exprime
ainfi :
« Les thermomètres qu’on offre actuellement au
33 public dépendent d’un effet tout oppofémais
33 également confiant, ..uniforme & mefurabiej
» favoir : d'une diminution occafionnée dans le
33 volume des terres & des pierres argikufes.
.33 Cette diminution commence à avoir lieu dans
33 une chaleur rouge inférieure , & croît régulié*
33 rement, félon que la chaleur augmente, jufqu’à
33 ce que l’argile parvienne à |a vitrification (2);
33 & par conféquent jufqu’au degré le plus fort
33 que les fourneaux ou vaiffeaux de terre puif-
33 fent fupporter.
» J’ai trouvé que de bonnes argiles 3 de l’efpèce
>3 la moins fujète à fe vitrifier j ont perdu, dans
»3 mes feux les plus vifs, une: partie confidérable-
39 ment plus grande que le quart de leur volume.
« La contradion donc de cette efpèce de ma-
33 tière fournit une auffi jufte mefure pour les de-
33 grés de chaleur fupérïeure, que la dilatation du
33 mercure ou de l’alcool le. fait pour les infé-
33 rieures i &c. »3
ec Telle eft en fuhftance l’opinion de cet artifte.
Je me propofe d'examiner jufqu’à quel point
elle peut qtre fondée.
>3 Le but ftérile de relever une erreur échappée
à lin fabricant aufli recommandable n’eft point ce
qui m’a fait prendre la plume.
33 J’ai vu cette erreur partagée par des hommes
très-inftruits fur tout autre fujet, mais qui n’ont
pas été à portée d’obferver les phénomènes réfultans
de l’aCtion du calorique fur les mixtes alü-
mineutf.
33 Le point fur lequel elle porte, m’a paru affez
(1) Le rédacteur des Annales des Arts a avancé que Mortimer
, q u i, vers lé milieu du dernier fiècle, s’oôeupoit de
thermomètres métalliques, avoir prévu que des baguettes
de terre de pipe poiirroient indiquer des températures plus
élevées que les initrumens bafés fur là dilatation des métaux,
& , à ce fu je t , il cite un Mémoire, dè Mortimer, qui fe
trouve dans les TranfaÜions philofophiques de 174-7- On ne
trouve dans ce Mémoire rien de relatif à cecte aiîèrcion.
(2) Cette manière de s’exprimer tend à établir qu’il eft de
l’enènce des .argiles" de parvenir à la vitrification j confé-
quemment qu’ il eft un point au-delà duquel les fourneaux
ou vailïeaux de terre ne peuvent plus fupporter l’aâ ion du
calorique.
Cette dcfuble erreur, dans laquelle il paroît que l’auteur
étoit encore lorfqu’il fit fes premières pâtes à thermomètre,
dut être néceîTairemènt leconnue par lui-même dans la, fuite,
puifque les pâtes qu’ai compofa quelques années après « ne
3>prenoient jamais, dit-il, la moindre.apparence.de côn.tex-
». ture denji-virreufe. >>
important
important pour être difcuté* & je me fuis livré
d'autant plus volontiers à cette aifcuffion , que
plufieurs des principes dont je tâcherai de l’appuyer,
font, ou abfolument nouveaux, ou très-
peu répandus.
; » Pour qu’un effet quelconque puiffe devenir
la mefure d'une caufe , il faut qu'il réfuite uniquement
& invariablement de,cette caufe, qu’il y
foit néceffai rement proportionné. . _
»Voyons fi ces trois conditions fe trouvent
dans l’effet adopté pour mefurer les hautes températures.
>3 i° . Plufieurs circônftances concourent à modifier
l’aCtion du calorique fur les mixtes alumineux.
. 33 II eft confiant qu’à une température quelconque
, ces mixtes éprouvent une retraite d’autant
plus conlidërable , qu’ils y font expofés plus long-
tems. Il eft même reconnu qu’à une température
foutenue, ils prennent autant de retraite qu’à une
autre plus élevée , mais appliquée moins long-
tems.
; 33 C’eft également un fait inconteftable, qu’un
coup de feu très-brufque ne lailfe pas aux molécules
terreufes la faculté de fe rapprocher auffi intimement
qu’elles le.feraient à un coup de feu
gradué. Auffi, à la température égale, l’aCtion
lente du calorique produit-elle plus de retraite
qu’une aCiion rapide.
33 II eft même des circônftances où l'aCtion précipitée
du calorique donne lieu à un dégagement
de gaz fi abondant, qu’au lieu d’opérer une retraite,
.il produit un gonflement très-marqué.
33 La retraite eft donc fufceptible d’augmentation
ou de diminution , fuivant que le calorique
a été adminiltré plus ou moins long-tems, plus ou
moins rapidement.
» Elle réfulte donc tout à la fois de l’intenfîté,
de la durée .& du mode d’application du calorique.,
. 33 Elle n’eft donc pas c a u f uniquement par l’in-
tenfité de ce fluide.
»3 20. Le plus ou le moins d’exaCtitude dans l’exécution
des petits folides argileux que Wedg-
v/ood appel 1 e pièces à thermomètres, donne lieu à
beaucoup de variations dans leur retraite.
„ 33 Quelques précautions qu’on prenne dans la
préparation de ces folidès, il s’en trouve dont la
pâte eft plus ou moins broyée , malaxée , humectée
, &c. &c.
» Or , autant de différences dans la manière de 1
fe comporter au feu.
33 On conçoit que la pâte broyée au,dernier de-v
gré doit prendre, toutes chofes égales d’ailleurs .
plus dé retraite que Celle qui elfpjus groffière, ;
33 On conçoit également que la pâte tres-ma-
iaxée, très-comprimée, & employée avec le moins
d’eau poffible, prendra moins dé retraite que celle
qui a été employée plus huméÇtée & moins pétrie.
. •
Chimie, Tome K.
> »> On conçoit enfin que celle qui- aura été defféchée
brufqüement, n’aura point .acquis cette
portion de retraite que donne une de-fficcation
graduée ; elle fe préfentera à l’-aétion du calorique,
remplie de vacuoles-, ,dont elle eût été exempte fi
elle fût parvenue à l’état de ficcité par une graduation
.convenable elle contractera une retraite
d’autant plus fenfible , conféquemment elle indiquera
üqé température d’autant plus élevée:
30 Je pâlie fous lîlençe, plufieurs autres caufes
d’inexaCtitude , dépendantes de l’execution des
folidés pyromëtriques : .celles qu^ je viens d’expo
fer fuffifen.t pour, démontrer que la ré traire n’eft
pas produite invariablement par l ’intenfité du calorique.
.
33 Relie à prouver qu’elle n’eft pas nécejfairement
proportionnée,_à cette caufe,.
33 9°, Soit un mixte alumineux, le plus fimple
poftible, celui qui ne contiendroit qu’une feule
terre jointe à- ^alumine?.Sc foit cette terre, la
filice.
» L’alumine eft fufceptible de dilatation au
moyen des liquides & des fubftances plus ou moins
volatiles dont elle fe charge j elle acquiert delà
retraite par l’évaporation de çes fubftances.
33 La filice. au contraire n’eft fufceptible d’aucune
dilatation ni d’aucune contraction fen*
fibleC' ^ -
• 33 Les molécules de celle-ci peuvent être confi-
dérées comme enveloppées par celles de la première
, qui les fixent en vertu de leur gluten , &
qui cependant les tiennent d’autant plus écartées ,
qu'elles-mêmes le font davantage par les fubftances
fugaces qui les divifent.
33 A mefure que l’aCtion du calorique diflipe ces
fubftances , elle diminue l’efpace qui féparoit les
molécules de l’alumine : celles de la filice fubiffent
un rapprochement proportionné, & 1a retraite du
mixte fuit une. progreflion plus ou moins régulière.
•
3? Mais lorfqne la contraction de ce mixte eft
devenue telle, que les molécules de la filice entrent
en contaCl, la retraite commence à changer
de progreffion.
33 Et: lorfque le contaCl entre lés molécules de
la filice eft devenu complet, la retraite ceffe totalement.
>3 II y a'plus : fi l'on prolonge l’aCtion du calorique,
l ’alümin&-continue de fe contracter au
point de ne pouvoir embraffer la filice.
. Dans ce cas, non-feulement il ne s’opère plus
de retraite, mais même il furvient un relâchement
caufé par la rupture des liens alumineux qui
coerçoient les molécules1 de la filice.
| 33 Alors le mixte devient plus ou moins foible.
33 D’où Ton voit que, non-feulement la retraite
n’eft pis né ceff alternent proportionnée à l’intenfité
du calorique, mais que même elle n’en eft pas
un effet confiant, puifqu après avoir augmenté fuivant
une proportion quelconque, elle peut dimi-
C c c c c