
dimportance et employeles memes efforts à creuser Ja demeure des morts, qu’à
élever celle des vivans : les unes occupoient le bord du fleuve ou le milieu de la
vallée; les autres, le bord du désert au pied de la montagne.
En examinant en détail les objets que je viens d’indiquer, on trouve que la grande
enceinte (i) est un carré d’environ 6^0 mètres de côté, 9 mètres de hauteur,
et 1 im.jo d’épaisseur [ plus de trente-quatre pieds ]. Elle est construite en briques
qui ont om.38 de hauteur [plus de quatorze pouces] sur om.20 et om. 18. Ces
briques ne sont point cuites; elles sont composées de terre forte du pays,
ou limon du N il, simplement pétri et séché au soleil, ou du moins à un feu très-
doux. Ce limon a conservé sa couleur naturelle d’un brun cendré. Comme il
falloit, pour des constructions aussi vastes, des quantités énormes de briques, et
qu’il ne s’agissoit probablement, en les employant, que de former une simple
barrière propre à marquer les limites de l’espace interdit aux profanes, ou à arrêter
les incursions des peuples nomades du désert, on a dû user des procédés en
grand, et les plus simples, pour la fabrication de ces matériaux. La chaleur
naturelle du soleil, dans ce climat, a donc dû suffire pour la cuisson de ces
briques. Nous avons remarqué, en effet, que le thermomètre^ Rêaumur), placé
sur le sol, à cette latitude, s’élevoit à 50 degrés au mois de septembre. Il faut donc
croire que les Égyptiens, qui d’ailleurs ont bien prouvé qu’ils netoient pas avares
de grands travaux, soit pour l’exploitation, soit pour l’emploi des matériaux les
plus gros et les plus durs, ne fàisoient usage de ceux-ci que dans le cas où ils
n’avoient besoin d’élever qu’un simple retranchement en terre; et la brique crue avoit,
sur les terrasses, l’avantage de pouvoir s’arranger en forme de maçonnerie et
avec un médiocre talus. Ce procédé s’est conservé par toute l’Égypte, dans la
construction des villages modernes.
Les grandes enceintes en briques crues servoient ordinairement à entourer un
temple, un palais, ou un vaste ensemble d’édifices de ce genre. Au milieu de
l’un ou de plusieurs des côtés de la clôture, s elevoit une de ces portes colossales
en pierre, qui sont quelquefois accompagnées de môles énormes, et qui souvent
nous paroissent, au premier abord, si bizarrement isolées, parce que l’enceinte,
facile à détruire, a totalement disparu ; ici, au contraire, la clôture subsiste, et
la porte principale n’existe plus. On voit par le plan, quelle a pu être sur le côté
en face de la montagne, au point I (2) ; position singulière, puisqu’elle est opposée
au fleuve. Il seroit plus naturel de supposer quelle se trouvoit en face de la
porte m (3) que nous examinerons, et que sa place a été depuis encombrée. Peut-
être a-t-il existé une autre porte au point o (4) du côté du petit temple qui est
isolé dans la plaine, et dont je parlerai plus tard.
■ Je serois porté à croire que cette grande enceinte étoit celle de la ville même
d’Elethyia, quoiqu’ailleurs ces clôtures m’aient paru en général, comme je l’ai
d it , se borner à renfermer un ensemble de monumens ou d’édifices publics.
Une ville qui auroit 2560 mètres de circuit, ne seroit pas très-petite; et nos
(1) I V j g h i k , p t . 6 e , f g . 2 . (3) V o y n pi. 6 6 2 .
W Ib,d- (4) ibid.
villes d’Europe de 10,000 ames n’ont pas plus d’étendue. On ne trouve point,
dans la plaine environnante, de ruines qui présentent une aussi grande surface,
et quon puisse supposer être celles de la ville d'Elethyia; 011 n’aperçoit pas
même, autour et au-dehors de la grande enceinte, ces monticules de décombres
qui attestent ordinairement l’existence de maisons particulières même entièrement
démolies; on les retrouve, au contraire, en-dedans de la clôture, et c’est là que
ces habitations me paroissent avoir existé. Elles ont pu être détruites depuis par
la suite des temps et des révolutions, comme il est arrivé dans toute l’Égypte,
où l’on n’en trouve plus de traces; tandis que les temples, les palais et les autres
grands édifices, plus difficiles à renverser, et dont les matériaux énormes étoient
moins propres aux constructions particulières, subsistent en partie, et laissent
toujours paroître, au moins, quelques restes en pierre.
C ’est vraisemblablement par une suite de l’existence de la ville dans cette
enceinte, que 1 usage dy habiter se sera conservé jusque dans ces derniers temps.
On voit encore le long de la face nord de cette clôture, et dans l’intérieur, les
restes d un assez grand nombre de maisons ( 1 ) ; elles présentent exactement l’aspect
des ruines des villages modernes. On y trouve beaucoup de débris de poteries
actuellement en usage dans le pays, et des voûtes, dont on peut assurer, aujourd’hui
plus que jamais, que les anciens Égyptiens ignoroient la construction (2).
Toutes ces maisons paroissent avoir été bâties principalement avec les briques
crues qui composent les murs de la grande enceinte, dont on a facilement démoli
quelques parties. Aujourd’hui, les sables de la montagne pénètrent dans l’intérieur
par les deux grandes ouvertures que j’ai indiquées, et ils encombrent la
plus grande partie de ces masures.
Il subsiste encore, comme je l’ai dit, quelques restes des édifices publics de
1 ancienne Elethyia : mais il est à remarquer qu’on n’en aperçoit pas da,ns l’espace
que j’attribue aux maisons particulières'; onj les voit tous rassemblés dans une
seconde enceinte carrée (3) qui a le même centre que la première , et dont les
cotes lui sont parallèles. On y retrouve bien sur le côté sud-ouest, opposé au Nil,
les fondations (4) d’une de ces principales portes en pierre qui s’ajustoient, comme
je l’ai observé, aux murs d’enceinte en briques. L ’existence de cette seconde
clôture confirme ce que j’ai dit de la première; l’une étoit celle de la ville , et
l’autre celle du temple. Il est donc très - vraisemblable que les anciens habitans
de la haute Égypte étoient dans l’usage de clore non-seulement leurs monumens
publics, mais encore leurs villes, avec des murs de briques crues; et si
communément nous ne retrouvons encore subsistantes que les clôtures des
temples et des palais, c’est, sans doute, parce que celles des villes étoient plus
exposees à tous les ravages, et qu’elles ont dû servir de bonne heure à construire
les habitations modernes, qui se sont, peu à peu, réduites à l’enceinte des temples
eux-mêmes. D’ailleurs, l’existence de ces dernières clôtures a dû naturellement
( ') % < Z P , P , P , p l . S S , f g . 2 . (3) V o y c iq t i t , pl. S S ,fig .2 .
(2) Les voûtes qu’on a trouvées à Elethyia, sont en (4) Voye^ 111, mêmejigure.
briques.
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