renseignemens plus satisfkisans a cet égard, il auroit fallu faire des fouilles considérables
: mais le temps nous a manqué pour les exécuter. Elles se lioient à un projet
plus vaste, qui étoit de démolir toutes les maisons qui environnent le temple :
on 1 auroit ensuite débarrassé de tous les décombres qui y ont été accumulés La
position de ce monument, au milieu d’une des villes les plus peuplées de la haute
Egypte, et qui étoit devenue un quartier des Français, auroit beaucoup facilité
cette entreprise; on auroit trouvé autant d’ouvriers qu’on auroit pu en desirer;
ils auroient été continuellement surveillés; et il ne leur auroit pas été possible de
combler successivement nos fouilles, tomme cela est souvent arrivé dans les lieux
où les mouvemens de l’armée ne permettoient pas de laisser de garnison : mais
les circonstances de la guerre obligèrent le général en chef à concentrer toutes les
forcés aux environs du Kaire, et à laisser le gouvernement de la province d’Esné
à Mourâd-bey. La ville d’Èsné fut évacuée, et avec elle nous perdîmes l’espoir de
voir le temple sortir, pour ainsi dire, des décombres, d’examiner ses fondations,
son élévation au-dessus de la plaine et du Nil, et d’acquérir, sur l’art de bâtir
des Egyptiens, des renseignemens précieux.
Nos regrets étoient d’autant plus Vifs que nous ne pouvions nous dissimuler
que ce monument, qui s’ensevelit tous les jours davantage, aura bientôt disparu
pour jamais.
Un jour peut-être quelque nouveau voyageur tournera ses pas vers la haute
Egypte. S i , profitant des avantages que peuvent lui offrir et nos premiers travaux
et la position dun monument placé au milieu d’une ville considérable, il se livre à
de nouvelles recherches, nous ne doutons pas qu’il n’obtienne encore de précieux
résultats. Il trouveroit à Ësné des ressources qu’il chercheroit vainement ailleurs.
T E M P L E A U N O R D D ’E S N É .
A trois quarts de lieue au nord d’Esné, et à deux mille cinq cents mètres environ
du fleuve, nous avons trouvé les restes d’un temple Égyptien. Ce monument,
beaucoup moins considérable que celui qui existe dans l’intérieur de la ville, est
aussi dune conservation moins parfaite. Ses ruines ne portent pas l’empreinte
d’une dégradation ancienne : letat dans lequel il se trouve, ne paroît point être
üh effet de sa vétusté; il semble plutôt provenir d’un travail récent, auquel ont
échappé plusieurs patties de 1 édifice. Les habitans dEsné nous ont effectivement
assuré qu’on devoit l’attribuer aux fouilles multipliées faites dans ses fondations
par les ordres d’Ismây’l-bey, qui avoit conçu l’espoir d’y trouver des trésors. Les
memes habitans d Esné nous ont dit qu’avant cette époque le temple étoit presque
entier, et que les couleurs dont les sculptures sont encore en partie couvertes,
étoient très-brillahtes et très-bien conservées.
Ce temple doit avoir été Construit sur une butte factice, assez élevée, puisque,
maigre 1 exhaussement considérable de la vallée du Nil, son sol est encore un peu
supérieur a celui de la plaine; il est entouré de pierres qui proviennent de la
démolition des parties supérieures de l’édifice, et de débris de briques et de
poteries. Tous ces débris doivent être aussi anciens que le monument; car ses
environs ne paroissent pas avoir été habités postérieurement a lepoque où il
étoit en vénération. Sa position, à une distance eloignee du fleuve et sur la
lisière du terrain cultivé, n’a jamais pu, sous aucun rapport, être avantageuse pour
l’établissement d’une ville : c’étoit sans doute un lieu de dévotion, que quelque
circonstance religieuse aura consacre, ou peut-etre il se rendoit des oracles, et
que les prêtres du grand temple d’Esné avoient intérêt d’entretenir avec soin. A
cette époque, les prêtres pouvoient, soit par un canal, soit par tout autre moyen,
y faire arriver une assez grande quantité d’eau pour l’usage des conservateurs de
ce lieu révéré , et des caravanes qui s’y rendoient en pèlerinage; mais, depuis
l’anéantissement de la religion Égyptienne, ses environs ne sont plus habites.
Des Arabes qui ont leurs camps dans les environs, près de la chaîne Libyque, y
font seulement quelquefois des excursions.
Le temple dont nous nous occupons, paroît avoir été construit a la hate et
avec beaucoup de négligence. Il a été mal fonde : 1 appareil des pierres est on ne
peut plus irrégulier; les assises ne sont pas toujours dans le même plan, et les joints
ne sont presque jamais verticaux. Dans l’épaisseur des murs, on avoit pratique sans
précaution, entre la quatrième et la huitième assise, dont les pierres forment parpaing
(1) , des couloirs qui ont beaucoup nui à la solidité : les pierres n ayant
point assez de liaison entre elles, plusieurs de ces murs se sont partagés dans toute
leur longueur.
Dans l’intérieur du portique, une colonne s’est enfoncée verticalement de près
d’un mètre. Les pierres du plafond ont encore trouvé un aplomb suffisant, et
restent ainsi suspendues. Deux colonnes de la façade n ont pas conserve le meme
équilibre, et leur chute a entraîné celle d’une partie du plafond. La corniche et
l’architrave sont tombées, et forment, devant le temple, un amas considérable de
grosses pierres, sur lesquelles on retrouve les décorations de ces diverses parties
de l’édifice, et particulièrement le disque ailé de l’entre-colonnement du milieu.
Enfin ce séjour, autrefois si mystérieux, est actuellement accessible de tous côtés,
par des ouvertures nouvellement faites et par des brèches multipliées.
Devant le temple, à quelques mètres de distance, nous avons trouve des
restes de constructions en grosses pierres de grès, qui ont été mises à découvert
depuis peu de temps. Nous avons cru d’abord que c’étoit une partie de la fondation
d’un propylée ; mais la position de ces constructions, et leur direction
vers le Nil, nous ont fait soupçonner ensuite que ce pouvoit etre 1 extrémité
d’un aqueduc qui auroit amené les eaux du Nil. Toutefois nous avouons que
les recherches que nous avons faites sur les lieux pour eclairer notre opinion a
ce sujet, ne nous ont procuré aucun résultat satisfaisant. Nous avons pousse des
fouilles jusque par-dessous ces constructions, et nous avons seulement reconnu
qu’elles sont posées sur un lit de décombres et de débris de poteries.
Le portique du temple est soutenu par huit colonnes de im.23 de diametre,
(1) On appelle parpaing, dans les constructions, les pierres qui présentent un parement à 1 intérieur et à 1 exté-
rieur du mur dont elles font partie.