
 
        
         
		toutefois  d’en conclure que ces  deux classes de lettres  sont  de  formes entièrement  
 différentes,  et  n’ont  aucun  rapport  entre  elles  ( t ). 
 Quand  cette  explication  ne  seroit  pas  regardée  comme  rigoureuse,  quand  il  
 seroit  en  effet impossible de  concilier  les  auteurs  (car  je n’ignore  pas  les  efforts  
 qu’on  a faits  jusqu’ici  pour  en  venir  à  bout),  il  resteroit  toujours  le  témoignage  
 invincible  des  monumens,  où  l’on  ne  voit  absolument  que  deux  espèces  de  
 caractères,  les  hiéroglyphes  et les  lettres  courantes.  Ces dernières,  à  la vérité,  ne  
 sont  pas  conformées  entièrement  de  même  dans  la  pierre  de  Rosette,  dans  les  
 bandelettes  de momie  et dans  les papyrus ; mais on  peut  en  saisir  aisément la  ressemblance, 
  malgré  la  diversité  des  temps  et  la  variété  dont  une  écriture  cursive  
 est susceptible.  La dissemblance des  formes  dans ces  différentes  espèces de monumens  
 est de beaucoup moindre que  celle qui  existe  entre notre écriture  actuelle et  
 celle  des  anciens manuscrits  Français, lesquels  pourtant  ne  remontent  guère  quà  
 dix siècles. 
 L ’invention  d’un  alphabet s’attribue  communément  aux  Phéniciens,  sur  la  foi  
 de  quelques  auteurs ;  mais  les  Égyptiens  peuvent  revendiquer  leurs  droits  à  la  
 gloire  d’une  aussi belle  découverte.  Sans  parler  des passages  connus  de  plusieurs  
 écrivains,  tels que  Platon, Tacite, Pline,  qui en font honneur  à lÉgypte,  n est-ce  
 pas  un  fait  qui  dépose  pour  elle,  que  l’existence  de  tant de manuscrits  alphabétiques  
 trouvés au  fond du  Sa’yd  et  sur les  plus  anciennes momies  des  catacombes  
 de Thèbes! Selon Lucain,  qui  à  la vérité, comme  poëte, n’étoit  pas tenu à l’exactitude  
 historique,  Memphis  ignoroit  encore  l’art de  préparer  le  papyrus,  quand  
 les Phéniciens,  les premiers,  osèrent  peindre la parole  par  des  caractères  (2). Mais  
 Thèbes, comme capitale, étoit bien antérieure à Memphis ; et les papyrus écrits dans  
 la plus  ancienne  de  ces  deux  villes  ont peut-être  devancé  autant l’écriture  Phénicienne  
 que  celle-ci,  dit-on,  a  devancé  toutes  les  autres.  Pourquoi  faut-il  que  les  
 historiens  nous  aient  laissé  si  peu  de  détails  sur  l’alphabet  Égyptien !  Plutarque  
 nous  apprend  qu’il  étoit  composé  de  vingt-cinq lettres ; mais, si  1 on  compte tes  
 formes  que nous  présentent les  manuscrits, on  en trouve  davantage,  soit  que  les  
 lettres  eussent  plusieurs  configurations,  soit  qu’on  ne  puisse  encore  les  demeler  
 exactement,  soit enfin que  le nombre des  lettres  Égyptiennes  dépassât  reellement  
 vingt-cinq. Mais if ne  suffit  pas  de  reconnoître  et de  classer toutes  ces  différentes  
 formes;  il  faut  encore  les  comparer  avec  l’inscription  intermédiaire  de  la  pierre  
 de  Rosette.  Le  défaut de-caractères  d’imprimerie propres a  représenter  les  lettres  
 des  papyrus ou  celles  de  la pierre  ne me permettant  pas  d’en faire ici  un  rapprochement  
 commode pour  le  lecteur, je  dois  le renvoyer aux planches memes  (3)  et  
 rapporter seulement le résultat que j’ai trouvé. La pierre de Rosette  fournit environ 
 aucun doute ;  et alors  les  raisons  qu’on  a  données  pour  (s)  Phxnicts primi.fame  si creditur,  oust  
 appeler  hiératiques  les  lettres  de  la  pierre  de  Rosette  MaesuremrsMus rocem signarefy",s 
 r  •  y  >  .  1.  ■  .   •  Nondum fiumiaeas Memphis  contexere  biblos et  en  faire  des  caractères  particuliers,  paraissent  r  très-  Nouerai ; Je t saxts.  tantu,m    vol,u cresq ve  Je/r- aq_u_c 
 foibles.  ,  ,  ,  ,  t "   Sculptaque  servabant magicas animalia  linguas. 
 ( 1 )  II  existe entre les lettres alphabétiques et les hiero-  PIlQKaf.  iib, n i , v. **>. 
 glyphes une analogie qui  sera  exposée  dans un Mémoire 
 particulier : ce Mémoire doit être nécessairement accom-  (3)  Voyez les planches 60 a 7 i ,  A . vol. I I ,  et la gravure  
 pagné de  figures.  de la pierre de Rosette,  dans  le  cinquième  volume  des 
 une soixantaine de lettres, en y comprenant, à la vérité, les variantes : or les soixante-  
 une pages de papyrus gravées  dans  cet ouvrage en fournissent à peu  près  le même  
 nombre, sans compter les hiéroglyphes que ces papyrus renferment, soit isolés, soit  
 mêlés avec  les  caractères  cursifs, La comparaison  que  j’ai  faite  entre les caractères  
 de  ces  deux  espèces  de  monumens,  est  loin  d’être  complète  et  sans  erreur;  et  
 cependant  elle m’a  déjà fourni  vingt-huit formes, communes à la pierre et aux papyrus. 
   Si  l’on y  trouve  une  différence  presque insensible,  c’est  que  les  unes  sont  
 tracées  a  la plume,  et  les  âuties  sculptées  ou gravées  au  ciseau. On  pourra  aisément  
 trouver un plus  grand nombre de figures semblables. Au reste, ces vingt-huit  
 formes paroissent les plus importantes,  à  en  juger par leur fréquente répétition. 
 On  a dit plus haut  que  l’écriture  des  papyrus  doit  se  lire  de  droite  à  gauche.  
 S’il  falloit  le  démontrer,  l’on  ne seroit  embarrassé  que  du  choix  des  preuves.  En  
 effet,  que  le  lecteur jette  un  coup-d’oeil sur  telle page qu’il voudra  des manuscrits  
 gravés, et constamment il verra qu’elle s’aligne du côté droit, et non du côté gauche.  
 La dernière  ligne  de  la page se termine,  suivant  le  cas, au tiers, à la moitié ou en  
 bas.  Quand une  phrase  n’est pas  terminée  en  bas,  le  haut de  la  colonne  qui  succède  
 à gauche en  renferme la suite ;  et il  est aisé de  s’assurer  que  cette suite  est la  
 véritable,  en  examinant  les  colonnes  où  cette même  phrase  est  comprise  toute  
 entière.  La  direction  générale  des  traits  de l’écriture  annonce  encore  le  sens-  où  
 se  portoit  constamment  la  main  qui  les  a  tracées.  Ajoutons  que  le  témoignage  
 d Hérodote est entièrement conforme à cette opinion, et que les langues Orientales  
 s’écrivent  aujourd’hui  de  droite  à gauche. Enfin  on  verra  bientôt  que  c’est  également  
 le sens de l’écriture hiéroglyphique. 
 Au commencement  des  différentes  pages  de chaque papyrus,  on  reconn-oît les  
 mêmes mots;  et  ordinairement  ces  initiales  sont  écrites  en  rouge,  comme  on  le  
 voit dans  les  manuscrits  modernes  des  Orientaux. Elles annoncent  probablement  
 de  certaines  formules,  constamment  employées  dans  ces  volumes.  Il  s’y  trouve  
 aussi de légères différences,  et ces variétés  seront  un  secours  de  plus  pour l’étude  
 de  la  langue.  On  trouve  quelquefois  les  premières  lignes  des  pages  totalement  
 pareilles  ( 1 ).  Comme  ces  pages  sont  en  même nombre  et de même  étendue que  
 les  stations  du  personnage  principal  qui  est placé  au-dessus  et  que  l’on  a  précédemment  
 décrit (2), et qu elles varient suivant les dieux,  les cérémonies  et les actes  
 d hommage et d’adoration,  il  est  naturel de penser qu’elles  sont  relatives à chaque  
 scène,  et  qu’ainsi  elles  contiennent  des  prières  :  mais  cette  conséquence  seroit  
 poussée  trop  loin, si l’on  induisoit  de là que le  reste  de l’écriture  ne  contient pas  
 autre  chose. 
 Quelque  ressemblance  qu’il  y  ait  entre  les manuscrits,  chacun  présente  des  
 circonstances  qui lui  sont  propres ; c’est ce  qu’un peu d’attention  fera discerner au 
 planches d Antiquités. On  peut aussi consulter la gravure  pierre, et alors le lecteur pourra les comparer avec facilité  
 de cette même pierre publiée  à Londres. Dans  le  travail  "  à ceux des manuscrits. 
 dont  M. Marcel  et moi  sommes chargés,  et  qui  a  pour  (i)  Voyez les planches 62',  63,  64, A .  vol. I I . 
 objet  la rédaction  et la  continuation  des  recherches  de  (2)  iJans la planche 63, A .  vol.  I I ,  l’écrivain a fait les 
 feu M. Raige sur la pierre de Rosette, nous aurons occa-  pages  très - étroites,  pour  se  conformer  à l’étendue  des 
 sion  d’employer  fréquemment  les  caractères  de  cette  figures  qui leur correspondent dans-la  bande supérieure.