
témoin de l’activité de ses Iiabitans, concevoir, dès son arrivée, les plus grands
projets sur ce pays, et jeter les fondeinens d’une ville qui devoit devenir le centre
des relations commerciales de l’univers. En effet, les premiers rois Lagides- leur
imprimèrent un mouvement qui s’est soutenu- jusqu’aux derniers princes de leur
dynastie. Un canal fameux rétabli pour faire communiquer la mer Rouge au Nil,
de nouvelles routes ouvertes à travers les déserts de la haute Égypte, sont les grands
résultats qui ont signalé leurs efforts. Alexandrie devint, sous leur empire, la ville
la plus opulente du monde, où l’on étaloit, dans des pompes magnifiques, les productions
les plus rares de tous les pays connus. Mais, avant ce période éclatant, les
habitans de l’Égypte n’avoient point négligé de s’appliquer au commerce : comprimés
sous le'gouvernement tyrannique des Perses, ils s’y livroient encore, et on
les voit, sous Darius fils d’Hystaspe, développer de grands moyens maritimes; on
voit ce prince lui-même continuer les travaux entrepris pour l’extension et la
prospérité de la navigation. * r
Sous les derniers Pharaons, le commerce jouissoit encore d’un assez grand éclat.
Amasis, Apriës son prédécesseur, et Nécao, sur-tout, paroissent avoir fait les plus
grands efforts pour le favoriser. Si, sous leurs règnes, Memphis est parvenue au plus
haut degré de puissance et de richesse, elle le doit, ainsi qu Alexandrie qui lui a>
succédé, aux entreprises de ses nombreux habitans. C’est Nécao qui fit creuser
le canal de jonction dés deux mers, dont la première pensee est due, suivant les
historiens, à Sésostris. Ce dernier prince, le plus célèbre héros qui ait occupé le
trône d’Égypte, paroît être de tous les Pharaons celui qui a le plus fait pour la
gloire et pour l’accroissement des relations commerciales de son pays. Les immenses
conquêtes et les hauts faits que les historiens (i) s’accordent à lui attribuer,
les grands travaux qu’il a entrepris pour 1 amélioration de 1 Égypte, et les
nombreux édifices publics qu’il a fait élever, ont toujours paru tenir du prodige et
de la fable. Cependant on ne peut plus douter maintenant de l’expédition de ce
conquérant dans l’Inde (2) ; et Diodore deSicilo (3), en nous apprenant que Sésostris
fit construire un vaisseau de bois'de cèdre d une très-grande dimension, revetu d argent
dans l’intérieur, et d’or à l’extérieur, pour 1 offrir au dieu qu on adoroit a Thebes,
nous fait assez connoître combien, sous ce prince, la navigation étoit en honneur. Il
faut donc rapporter à son règne un autre période éclatant du commerce de 1 Égypte -,
sur lequel on avoit élevé des doutes qui ne peuvent plus subsister maintenant. Les
faits nous manquent pour remonter au-delà; mais il est infiniment probable que 1 art
de la navigation n’a pas é té inventé tout-à-coup, et que les Égyptiens n’ont point pris
subitement le goût du commerce. Il est à peu près certain, au contraire, que le genie
de Sésostris n’a fait que donner une impulsion nouvelle à une industrie qui existoit
déjà, et son expédition dans l’Inde a dû sans doute être dé terminée par les avantages
qu’il se promettoit de la possession d’un pays déjà connu, que des relations habituelles
avoient mis les Égyptiens à portée d’apprécier. S’il entroit dans notre sujet
( ,) Voyeiles passagesque nous avons cités d’Hérodotc (2) Vcj« j la description des monumens de Medynetet
de Diodore, dans l a description des monumens de abou, sect. j . " de ce chapitre, pag. ¡ p et suiv. .
Medynet-abou, sect. 1 . " de ce chapitre, p a g .p j et suiv. (3) Voyri la citation n.° XV, pag. 443.
de faire tous les rapprochemens tendant à prouver les communications de l’Égypte
avec l’Inde, nous pourrions citer un assez grand nombre de faits pour établir une
opinion qui n a trouvé que quelques contradicteurs ; mais nous nous bornerons à
rappeler le rapport remarquable qui existe dans l’astronomie des deux peuples,
Nous sommes donc conduits à conclure que les Égyptiens, dès l’antiquité la plus,
reculée, ont trafiqué avec l’Inde; que Thèbes est le premier comme le plus beau
résultat connu de la puissance et des richesses que procure le commerce aux
peuples qui s’y adonnent, Nous observerons enfin ( i ) que cette capitale paroît
avoir été le centre d’une religion qui étendoit au loin son influence, et attiroit, à
des époques déterminées, une foule de pèlerins ; il devoit en résulter nécessairement
une grande activité dans les relations, et les offrandes des pèlerins ont pu contribuer
à augmenter la splendeur des édifices. C’est ainsi que Rome moderne a vu le
magnifique dôme de Saint-Pierre s’élever avec le produit de toutes les riehess.es
de la chrétienté.
§. MB
Des Catastrophes que Thèbes a successivement éprouvées.
A t r a v e r s les obscurités que présente l’histoire des premiers temps de lu
monarchie Égyptienne, au milieu de toutes les contradictions des chrojiologistçs,
dont aucun ne s’accorde avec un autre, ni pour les noms des rois, ni pour leur
nombre, ni pour l’ordre dans lequel ils se sont succédés, on découvre cependant
que de grands changemens se sont opérés à diverses époques dans j’empire Égyptien.
II est certain que les peuples nomades, dont les descendant habitent encore
actuellement les déserts du sud et de l’est de l’Égypte, y ont fait des irruptions
subites, d’où sont résultés le pillage et l’incendje des villes, et toutes les horreurs
que des peuples errans et vagabonds, accoutumés à vivre de vols et de rapines j
peuvent exercer chez une nation livrée aux jouissances que procurent la civilisation
et la perfection des arts. Il y a même quelque raison de croire que des hordes
sorties de l’Arabie ne sont point étrangères à ces invasions. Quoi qu’jl en soit,
Manédion (2) indique positivement une des irruptions de ces peuples pasteurs qui
s’empalèrent du trône d’Égypte. Il est probable que, dans cette invasion, Thèbes
ne fut point épargnée ; et peut-être faut-il placer vers ce temps une des plus grandes
catastrophes que cette ville ait éprouvées. Mais, sous les rois Égyptiens qui suçcé-r
dèrent à ces bergers oppresseurs, elle brilla d’un nouvel éclat, C’est alors que Sésostris
embellit par de nouveaux édifices la capitale de l’Égypte, que les Osymandyas
et les Memnon avoient antérieurement décorée de palais magnifiques dont 011
retrouve encore les restes. II seroit curieux de pouvoir fixer le temps où ces princes
ont vécu; mais les incertitudes de la chronologie et de l’histoire ne permettront
probablement jamais d’y parvenir. Il paroît que la splendeur de Thèbes ne cessj
(1) Voyc^ les descriptions de Medynet-abou et de (2) Voye^ Flavius Joseph , 7/V. i . ,r, chap, y , dé la Ré-
Louqsor* .. ponse à Apion.