
sculptures en sont très-variées. Un des plus simples et des plus agréables§ est
celui qui est formé de feuilles de palmier : il est impossible de concevoir rien
de plus élégant. Aux feuilles de palmier le sculpteur a joint les régimes de dattes,
et le haut de la colonne représente en même temps l’écorce du palmier : l’imagé
de cet arbre est donc complète dans cette colonne, et jamais imitation ne fin
moins déguisée et plus heureuse. D ’autres chapiteaux sont ornés des feuilles du
lotus dans 1 état où elles sont avant d’être entièrement ouvertes ; on y voit aussi
la fleur de cette plante sacrée.
Larchitecture Égyptienne offre ce caractère qui lui est tout-à-fàit particulier,
que sa décoration n’avoit jamais rien de capricieux, et qu’elle étoit toute composée
de symboles auxquels il y avoit un sens attaché.
^ Mais ce que les chapiteaux de ces colonnes offrent encore de remarquable,
cest que, n étant pas tous terminés, ,ils nous apprennent comment les Égyptiens
ébauchoient leurs sculptures. Ces ébauches sont polies comme si elles eussent dû
rester sous la forme qu’elles ont, et servir elles-mêmes de chapiteaux : il y a
en effet de ces ébauches qui pourroient former des chapiteaux d’un goût original
et d’un style assez pur (i).
Au-dessus des chapiteaux sont des dés carrés, sur lesquels porte l ’architrave.
Cest une chose pleine de raison d’avoir fiùt en sorte que des architraves, qui
offrent toujours une apparence de pesanteur, ne portent pas immédiatement sur
des chapiteaux composés de feuilles, de fleurs et d’ornemens délicats. Les Égyptiens
n’ont jamais manqué à cette convenance, et il est étonnant que les Grecs
ne^les aient point imités ; car il n’en résulte aucun effet désagréable : au contraire
même, les chapiteaux se trouvant par-là un peu éloignés de l’architrave, les
grandes lignes n’éprouvent aucune interruption; ce qui est toujours une source
de beautés dans l’architecture.
Les colonnes de ces galeries, comme toutes celles d’Égypte, diminuent de la
base au chapiteau d’une manière uniforme; c’est cette sorte de diminution qu’on
remarque aux colonnes Doriques élevées en Grèce dans le plus beau siècle de
architecture. La diminution des colonnes suivant une ligne courbe, et leur
renflement au fiers de leur hauteur, sont d’une époque-où le goût dés choses
simples commençoit à se perdre.
Au-dela des deux colonnades est le grand pylône, l’un des édifices les piuS
importans de l’île; nous en parlerons avec détail. Disons d’abord quelque chose
des deux obélisques ainsi que des deux lions qui étoient placés au-devant de cette
première entrée des temples, et qui sont actuellement renversés.
Les obélisques sont d’un seul morceau de granit rouge, et portent sur chacune
de leurs faces une colonne d’hiéroglyphes, comme on le voit à celui d’Heliopolis.
Ces obélisques, plus grands de moitié que ceux de l’extrémité de l’île, sont cependant
encore fort petits, comparés à ceux de Thèbes, d’Heliopolis et d’Alexandrie.
v i y t z v l 8 fie i e . 1 uempl°y°ient les artistes pour l’exécution des divers
v oyez pl. 8,fig., et ,o , 2 et et 8 , &c. où il est genres de chapiteaux,
tacile de reconnoitre les différentes manières d'ébaucher
Les deux lions, également en granit, paroissent avoir été placés au-devant des
obélisques; ils sont assis sur leur croupe, les deux pattes de devant étant droites.
Cette attitude, qui n’est reproduite dans aucun autre lion ou sphinx de ronde
bosse, se retrouve assez fréquemment dans ceux qui sont en bas-relief. On en
verra un exemple à Philæ même.
Le pylône a environ quarante mètres de largeur et dix-huit mètres de hauteur;
son épaisseur est d’environ six mètres : mais elle ne forme point une seule masse de
pierre; dans l’intérieur sont pratiqués plusieurs chambres et des escaliers. On
pénètre dans le massif droit par une petite porte située à l’extrémité de la galerie
qui conduit du premier au second pylône. L ’escalier de ce massif s’élève, par une
pente très-douce, jusqu’au sommet de l’édifice, en tournant autour d’un noyau
carré. Il n’y a point de marches dans les angles, qui sont tous occupés par des
paliers. C est ainsi que 1 on voit encore quelques escaliers dans les tours carrées
de nos anciens chateaux. On est entré dans deux chambres au bas de l’escalier,
et dans trois autres vers le milieu de la hauteur de l’édifice : quelques-unes de
ces chambres sont, ainsi que 1 escalier, éclairées par des ouvertures petites au
dehors, qui s élargissent dans 1 intérieur, mais qui donnent néanmoins peu de
lumière, à cause de la grande épaisseur des murs.
La distribution du massif gauche est différente : pour parvenir à son sommet,
il faut d abord monter 1 escalier du massif droit, et, traversant toutes les chambres
supérieures, passer sur la porte dentree entre les deux corniches, qui forment de
ce dessus de porte un couloir découvert et une communication entre les deux
parties du pylône. A lextremite de ce couloir, on trouve, dans le massif gauche,
un escalier qui monte aù sommet par une seule rampe.
La porte latérale pratiquée dans ce massif, vis-à-vis du temple de l’ouest, donne
entree à deux chambres obscures et encombrées, qui peut-être avoient quelque
communication avec deux autres chambres supérieures dans lesquelles on n’est
entré que par une ouverture forcée. Trois de nos collègues ont trouvé une grande
quantité de langes et d enveloppes de momies dans ces deux chambres supérieures,
que nul autre qu’eux n’a visitées. Ce fait, sur lequel il a été impossible de recueillir
plus d’éclaircissemens, méritera de fixer l’attention des voyageurs qui se rendront
un jour dans J île de Philæ ; néanmoins nous ne croyons pas que ces constructions
aient dû, en général, servir de tombeaux.
Ce qui nous paroît le plus raisonnable à dire sur l’usage des pylônes, dont la
hauteur domine de beaucoup les temples et les palais au-devant desquels ils sont
construits, c’est qu’ils servoient d’observatoires. Les diverses chambres intérieures
peuvent avoir servi à mettre les instrumens, et peut-être aussi à loger les gardiens
a qui le dépôt en étoit confié. A cette supposition, que justifie l’étude particulière
que les Égyptiens faisoient de l’astronomie, nous ajouterons celle-ci, qui sert à
expliquer la forme et la situation de ces observatoires, toujours divisés en deux
parties, au milieu desquelles se trouve une porte d’entrée : c’est que long-temps
avant quil y eût en Égypte une astronomie et des observatoires, on avoit certainement
fait la guerre et construit des forteresses. Nous croyons voir dans les deux