érudit, cette correction ne nous paroît pas devoir être admise. En effet, si l’on
conservoit.le mot de Mé/mno«, il s'ensuivrait, ce qui n’est nullement probable,
que Diodore donneroit deux norirs différens à la même statue, et intercalerait le
nom de Memnon entre deux parties de son récit où celui d’Osymandyas est employé
d une manière remarquable ; car, après avoir rapporté l’inscription pompeuse
où le nom d Osymandyas est consigné, il termine ainsi : « Telle est la description
.» que 1 on donne du tombeau du roi Osymandyas. »
Les restes du colosse que nous avons décrit, sont parfaitement d’accord avec
la description rapportée par Diodore. Cette coïncidence a motivé le dessin que
nous avons donné de la statue d’Osymandyas, dans le monument restauré ( i ). On
peut y voir, de chaque côté de la figure assise, des statues qui sont debout, et
qui ne s élèvent quà la hauteur de ses genoux. La partie inférieure du colosse
ayant etc mutilee, et les débris en étant dispersés, nous n’avons point aperçu les
restes de ces figures qui accompagnoient le colosse principal; mais nous ne
doutons point quen en faisant exprès la recherche, on n'en trouvât des vestiges.
D ailleurs, ¡analogie de la statue d’Osymandyas avec les colosses de la plaine (2)
se reunit a 1 autorité de Diodore pour motiver notre restauration.
La statue d Osymandyas est bien, comme le rapporte Diodore, la plus grande
de toutes les statues érigées en Egypte : on ne peut lui comparer que les deux
colosses de la plaine de Thebes, qui faisoient partie du Æemno.nium (3) décrit
par Strabon. Sa hauteur, estimée d’après le rapport de la largeur du colosse du
sud prise entre les bras avec la hauteur totale de ce même colosse, donne, pour
la statue assise d Osymandyas, dix-sept mètres et demi (4). Cette hauteur surpasse à
peu près d un huitième celle du colosse du sud dans le JVlemnonutm de Strabon M.
Les sept coudées de longueur données au pied de la statue s’accordent assez
bien avec les mesures prises sur les lieux. Elles fournissent un autre moyen d’évaluer
la hauteur totale du colosse. Il résulte de l’examen des dessins des figures
assises et debout, représentées dans les planches de l’Atlas, et d’un assez grand
nombre d antiques dont I authenticité nest point douteuse, puisque nous les avons
recueillies nous-memes dans les tombeaux, que la proportion des .figures la plus
généralement suivie est celle qui donne la longueur du pied contenue six fois dans
une statue debout et cinq fois dans une statue assise. Ainsi, d’après ce rapport, la
statue d Osymandyas, qui étoit assise, doit avoir eu trente-cinq coudées.
On trouve encore au milieu des débris le pied de la statué. Sa largeur à la
naissance des doigts, qui est d’un mètre quarante centièmes (6), devoit être contenue
à peu près deux fois et demie dans toute sa longueur. Ainsi*Ie pied du
colosse avoit probablement trois mètres et demi de long : en quintuplant ce
(t) Voyez la planchej j , fig. / , 2 a j , A . vol I I . de cette statue ne sont pas également antiques. II ne faut
(2) Voyez la pl. 2/ et la pl. 2 2 , fig. 1 et 2 , A . vol. I I . pas même un coup-d’ceil très-exercé pour s’apercevoir,
(l) ,a section II de ce chapitre. au premier abord, que toute la partie supérieure est de
(4) Cinquante-trois pieds dix pouces. restauration Grecque ou Romaine. Ce qui le dénote plus
(5) Voyei les cotes de la planche 2 / , A . vol. I I . particulièrement, c’est la main appuyée sur la cuisse et
(6) Quatre pieds trois pouces huit lignes. C’est la tenant une croix à anse. On voit la paume de cette main;
proportion que donne le pied de la statue Égyptienne ce que nous n’avons remarqué dans aucune statue vrai-
assise qui se voit au musée Napoléon. Toutes les parties ment Égyptienne.
résultat, on retrouve la hauteur totale de dix-sept mètres et demi, que nous avons
déterminée plus haut par d’autres rapports.
Les trente-cinq coudées de hauteur qu’aurait eues la statue d’Osymandyas, évaluées
d’après la coudéed’Éléphantine, produiraient dix-huit mètres quarante-quatre
centièmes, qui diffèrent d’un peu moins d’un mètre de la hauteur précédente.
Notre but, en faisant de pareils rapprochemens, est moins de rechercher et d apprécier
la valeur exacte de la coudée Égyptienne, que de faire voir la conformité
qui existe entre la description de Diodore et ce que 1 on voit encore sur
l’emplacement des ruines ; car nous sommes bien persuadés, avec des auteurs très-
recommandables ( i ) , que ce n’est point dans les mesures des monumens qu on
peut retrouver cette coudée avec quelque précision.
« Cet ouvrage n’est pas seulement recommandable par sa grandeur, mais il
» est encore digne d’admiration sous le rapport de l’art qui s y fait remarquer, &c. »
Tout ce qui existe sur les lieux est bien d’accord avec ce récit. Quant a 1 art qui
se fait remarquer d&ris la statue, si l’on compare cet ouvrage a ceux des Grecs,
on trouvera l’expression de l’historien un peu exagérée. Cependant la pose tranquille
et roide des statues Égyptiennes, commandée probablement par les lois, et
devenue le résultat d’une longue habitude, a quelque chose de monumental qui
est dans un rapport parfait avec le grandiose de l’architecture. D ailleurs il est bien
vrai que l’exécution surpasse tout ce que l’on peut se figurer (2).
« On y a gravé cette inscription ;
» J E S U I S O S Y M A N D Y A S , R O I D E S R O I S .
A S I Q U E L Q U ’ U N V E U T S A V O I R Q U E L J E S U I S E T O Ô J E R E P O S E ,
» q u ’ i l D É T R U I S E Q U E L Q U E S - U N S D E M E S O U V R A G E S . »
Nous n’avons aperçu sur les débris de la statue d Osymandyas que deux inscriptions
en caractères hiéroglyphiques sculptés sur les bras : ce sont de ces legendes
qui sont placées dans le même endroit sur presque toutes les statues assises. Sur
la partie supérieure du piédestal, on voit aussi les restes d une autre inscription
qui en faisoit tout le tour. Seroit-ce cette dernière qui se trouverait traduite dans
la description donnée par Diodore !
Le texte renferme, vixsÎto ti tSv I/a3* ’¿fyav, que nous avons ainsi traduit . qu il
détruise quelques-uns de mes ouvrages. 11 nous semble que le commencement de
l’inscription détermine nécessairement ce sens. On sait en effet avec quel soin
les rois faisoient cacher leur corps dans les monumens qui passoient pour etre
leurs tombeaux. Nous pouvons citer à ce sujet les pyramides de Memphis. Il est
donc bien évident que l’on ne peut découvrir le lieu où repose le corps d’Osymandyas
, sans détruire quelques-uns des grands ouvrages que ce roi a fait executer
pour le dérober à toutes les recherches.
« Près de cette statue, il en existe une autre qui représente la mère d’Osymandyas
: elle est monolithe, et a vingt coudées de hauteur. »
(1) M. Gossellip. dans ses observations préliminaires (2) Voyez ce que nom avons dit de la sculpture, dans
et générales mises en tête de la traduction Française de la section II de ce chapitre, pag. S j et 4.
Strabon, pag. 2 et j .