
S . V .
D u P a la is de Medynet-abou.
A r t i c l e I . "
D e l intérieur du P a la is, et des Sculptures quon y remarque,'
D ans la direction du pavillon, et à quatre-vingt-trois mètres { 1 ) de distance,
a compter de son extrémité nord-ouest, sont les plus grands et les .plus im-
portans édifices de Medynet-abou. Le premier que l’on rencontre, est un pylône
de soixante-trois mètres (2) de long, de neuf mètres (3) d’épaisseur, et de vingt-
deux mètres (4) de hauteur. Il est enseveli sous les décombres jusqu’au tiers de
son élévation. L ’encombrement est plus considérable à ses extrémités, où l ’on
voit accumulés les débris d’un grand nombre de maisons bâties de briques
séchées au soleil : ce sont les restes du village moderne et ruiné de Medynet-
abou, mêlés à ceux de 1 ancienne ville ; ils se prolongent dans tout l’espace
compris entre le pavillon que nous avons décrit et le palais dont nous allons
parler. Ce pylône a des décorations que nous n’avons retrouvées sur aucun des
édifices de ce genre, et qui consistent en petits carrés, renfermant des espèces de
chiffres (5) composés d’unités, tantôt seules, tantôt au nombre de deux ou trois;
toute la surface de l’édifice en est couverte. Il est extrêmement probable que,
dans 1 épaisseur de la construction, il y a des chambres, et sur-tout des escaliers,
pour arriver aux parties supérieures. Une ouverture pratiquée sur l’un des côtés!
au-dessus de la porte, mais par laquelle nous n’avons pu pénétrer, y donnoit
sûrement entrée. ,• * ■
Le pylône a une porte large et élevée ; elle conduit à une vaste cour fermée
au nord-est et au sud-ouest par des galeries, et au nord-ouest par un second pylône
semblable au précédent, mais moins colossal. La galerie du nord est formée de
sept gros piliers carrés, de deux mètres (6) de côté. A la face extérieure, sont
adossées des statues de divinités Égyptiennes, terminées en gaines. Nous avons
donné le nom de piliers cariatides (7) à cette réunion de piliers et de statues. Ces
membres d’architecture sont maintenant enfouis sous les décombres, dans la plus
grande partie de leur hauteur; on n’aperçoit même plus que le^restes mutilés des
coiffures et des têtes de quelques colosses. Quoi qu'il en soit, Jjj est facile de se. représenter
par la-pensée le bel effet de ces piliers cariatides. On admire le fini de la
m £ *•“ “ nt pieds. Mes des statues de femmes habillées de longues mBes,
v re”te . “ ,ses- qu’ils ont employées, au lieu de colonnes; à supporte?
V tngt-sept pieds. des entablement Ce mot a passé dans notre langue :
(4 nze toutes. . mais l’usagé a prévalu d’ajouter le mot de figure a celui
,, „ aVO,!S . nt des rraSmFns de décorations de cariatide, qui devient alors une espèce d’aStectif
pareilles a Karnak. Voyez p l j S , fig. zS , jo e t je , A . et l’on dit figure cariatide, ordre cariatide. C’est l’anavol,
111. I I
g. . , , 10Sie de, ces expressions qui nous a déterminés dans le'
/ \ _ choix de la dénomination de piliers cariatides > Voyez
( 7 ) On sait que les Grecs ont appelé du nom de caria- ci-après, gag. 39 , ce que nous disons des cariatides.
sculpture des statues, et la richesse des ornemens de leur coiffure. Leur attitude,
quoique roide, a quelque chose de monumental et de grave qui impose, et dont
l’austérité plaît. Elles ont une hauteur de sept mètres et demi ( 1 ), depuis la plante des
pieds jusqu’au sommet du bonnet. Sur les piliers reposent immédiatement l’architrave,
qui est décorée d’une ligne de grands hiéroglyphes en creux, de plus de huit
centimètres (2) de profondeur ; elle est surmontée d’une corniche ornée alternativement
de scarabées et de cannelures.
La galerie du sud-ouest est formée de huit grosses colonnes d’une proportion
lourde et massive. Tous les entre-colonnemens sont inégaux ; mais cette inégalité
paroît être, à dessein, répartie d’une manière symétrique de part et d’autre de
l’entre-colonnement du milieu, qui est le plus large de tous; peut-être aussi n’est-
elle que le résultat d’un défaut d’exécution. Deux pilastres peu saillans terminent
les deux galeries. Comme les pylônes auxquels elles aboutissent, ont leurs pare-
mens inclinés, ces pilastres ont l’avantage de sauver le défaut, qui seroit très-choquant,
d’un entre-colonnement plus large dans le haut que dans la partie inférieure.
Les colonnes sont couronnées de chapiteaux à campanes décorées de triangles
curvilignes enchevêtrés les uns dans les autres, et de tiges de lotus avec leurs fleurs;
elles sont surmontées d’un dé carré, orné, sur chacune de ses faces, d’hiéroglyphes
creusés profondément. L ’architrave, qui est posée dessus, a une ligne de grands
hiéroglyphes, parmi lesquels on remarque des divinités assises et debout, des oiseaux,
des vases, des tiges et des fleurs de lotus, et des croix à anse. La grande profondeur
de ces sculptures produit un effet qui ne se peut mieux comparer qu’à
la vermoulure. O11 ne remarque point ici le rapport heureux que l’on trouve souvent
entre la corniche et l’architrave. Celle-ci, qui a plus du double delà première,
paroîtlourde. Si l’on prend pour module le demi-diamètre supérieur de la colonne,
qui est d’un mètre (3), on trouve que le chapiteau a un peu moins de deux modules,
et que la colonne en a un peu plus de six. L ’irrégularité de cette colonnade,
dont les entre-colonnemens sont tous différens, et dont les colonnes, plus nombreuses
que les piliers cariatides qui forment l’autre galerie (4), ne leur correspondent
point, pourroit faire croire que les architectes Egyptiens ont pris à tâche
de violer ici toutes les lois de la symétrie ; mais cette symétrie n’étoit point ce qui
les occupoit le plus, au moins pour les détails; ils visoient à produire de grands
effets, et rarement ils ont manqué leur but. Les grandes et belles lignes de leur
architecture sont ce qui frappe avant tout, ce qui excite l’étonnement à un haut
degré ; et nous l’avons éprouvé nous-mêmes, en payant notre tribut d’admiration à
cette belle cour, avant d’avoir aperçu le défaut de symétrie de quelques-unes de ses
parties.
En face de fentre-colonnement du milieu au sud-ouest, on voit une porte pratiquée
dans un mur qui est en saillie sur le fond de la galerie, et qui a sa corniche
et son cordon. C’est probablement la façade d’un grand édifice, d’un temple peut-
( i ) Vingt-trois piecjs.
(2) Trois pouces.
(3) Trois pieds un pouce.
(4) Chaque pilier cariatide correspond à un entre»
colonnement de l'autre galerie. Ne pourroit-on pas sup»-
poser quelques motifs à cette disposition!