L e faucon a été embaumé di une façon très-différente. Au lieu d'abaisser la tête
comme dans les autres oiseaux, on 1 a laissée droite, et 1 on a dispose les épaules
et tout le reste du corps de la même manière que dans les momies humaines; on
y a même ajouté la saillie des pieds de ces dernieres, ce qui rend la ressemblance
plus complète (i).
Les seuls reptiles que l'on ait trouves a 1 état de momie, sont les crocodiles et les
serpenS. A Elethyia, on a déjà fait remarquer le crocodile embaume ; mais on ne 1 a
rencontré nulle part dans son entier. C est la tete de cet animal, ou meme une
seule partie du crâne, qui fait le noyau de la momie (2); on imitoit le reste du
corps avec des tiges de palmier réunies ensemble et entourées de toiles. Il existe
même de fausses momies de crocodile ou 1 on ne découvre aucune des parties de cet
animai (3)- L'embaumeur s'est applique a copier exactement dans ces simulacres
les formes de la tête, du corps et de la queue, et à leur donner leurs longueurs
relatives. A l’intérieur, sont de menues branches de dattier, autrement des palmes
dépouillées de leurs feuilles ; on les a jointes et assujetties avec dés fils et des bandes
bien serrées ; puis on -a fortifié cette carcasse par des roseaux mis en travers, et on
l’a garnie de bandelettes plus ou moins épaisses, de maniéré a imiter la masse du
crocodile. Ces momies feintes ne sont pas dues au meme motif que les fausses
momies d’homme; mais elles prouvent, comme celles-ci, 1 adresse et la subtilité
des embaumeurs.
Quant aux momies de serpent, nous n en connôissons qu un exemple (4)* Celle
qu’on a rapportée, renferme des parties séparées du corps de 1 animai, mais non
lk queue ni la tête, ce qui seroit essentiel pour distinguer lespece. Ces fragmens
étoient simplement enveloppés de quelques bandelettes, et le tout faisoit une masse
arrondie et plate, ressemblant assez à un galet.
Ces diverses momies et ces débris d animaux serviront aux naturalistes a recon-
noître les espèces qui habitoient en Égypte a une epôque reculee. 11 n existe aucun
autre moyen pour constater sûrement la différence ou 1 identité des individus actuels
avec les anciens, et pour prononcer sur une grande question ; savoir, 1 invariabilité
des formes spécifiques et essentielles des animaux a travers la duree des siècles.
3 . 0 SA R CO PH A G E S OU EN V E LO P P E S D E S M OMIE S ,
P E IN TU R E S QUI L E S D E C O R E N T , P RO C ED E S EM P LO Y E S PAR L E S P E IN T R E S .
L es enveloppes ordinaires des corps embaumés ne sont point des sarcophages
proprement dits ; ce sont des boîtes à couvercle ayant la forme exacte d une
momie, et dont la grandeur étoit proportionnée à celle du corps cjuon y dé-
posoit (j). Elles se fermoient avec des chevilles de bois et des cordes. Le dessus est
orné de peintures d’hiéroglyphes, de figures, de fleurs et de compartimens plus
ou moins riches ; à l’endroit de la tê te , est un masque ressemblant a 1 individu
( I ) Voyez la planche y * ,,fig. 4 , A . vo l I I . S # existe un sarcophage en pierre dure, découvert
(2) Voyez la planche jy ,f ig . 2 , A . vol I I . dans le Nil à Boulâq par M . Monge, et qui est également
(3) Voyez ib id .fig .i. taillé en forme de momie. On le trouvera gravé dans le
(4) Voyez ibid. f ig .? . cinquième volume d’Antiquités, planche 24.
embaumé, et ce masque est quelquefois doré entièrement. On croit que tous ces
corps, ainsi enfermés, étoient rangés debout symétriquement, et appuyés contre
les murs des galeries.
Aujourd’hui l’on ne trouve plus une seule de ces enveloppes qui soit en place
ni dans son intégrité : les Arabes les ont toutes brisées pour fouiller les momies ;
et comme iis se sont aperçus que les moindres fragmens de ces bottes peintes
excitoient la curiosité des Voyageurs, ils les ont divisées, autant qu’ils ont pu, pour
en tirer plus de profit.
Les unes sont en bois, les autres en carton très-épais. Celles-là sont toujours de
bois de sycomore (1), bois qui passe pour être le plus durable de tous les bois connus.
Le fait est que nous en avons rapporté des échantillons qui ont vraisemblablement
plus de quarante siècles d’existence, et que l’on peut regarder comme intacts. Les
cartons sont composés d’un très-grand nombre de toiles collées ensemble, et si
bien assujetties, qu’elles ont le son et la dureté du bois. Les unes et les autres sont
recouvertes d’un enduit ou stuc blanc, d’un millimètre ou deux d’épaisseur, quelquefois
verni, et sur lequel les couleurs sont appliquées. L ’épaisseur de J’enduit
se laisse voir dans les déchirures des enveloppes, d’autant plus facilement que sa
blancheur contraste avec le rouge ou les autres teintes qui le recouvrent. On ne
peut mieux comparer ces parties d’enduit écaillé qu’aux cassures de la coquille d’un
oeuf qui seroit teint en rouge.
Toutes les parties des boîtes étoient peintes, et même la partie inférieure ou
le dessous des pieds; on y fîguroit deux sandales (2), et, dans chaque sandale,
on traçoit quelquefois deux personnages fort bizarres, i’un peint en rouge pâle,
couleur avec laquelle les Egyptiens avoient coutume de se représenter, et i’autre
peint en noir. Celui-ci est d’une difformité horrible ; ses cheveux sont hérissés, sa
tête aplatie, sa bouche énorme, son nez long et horizontal. On diroit qu’on a voulu
représenter par cette étrange figure un Nègre de la côte d’Afrique, si toutefois
ce n’est pas une tête de fantaisie. Son attitude est celle d’un suppliant ; les genoux
sont ployés, les coudes sont liés par un ruban rouge. Étoit-ce un emblème religieux,
une image fantasque, ou une peinture historique (3) ! C’est ce qu’on ne peut examiner
ici : bornons-nous à décrire les diverses peintures de ces caisses.
Selon toute apparence, les momies n’étoient pas toutes dans des boîtes. Les
momies des pauvres n’avoient pas d’enveloppe, tandis que celles des riches en
avoient jusqu’à deux : la première, ou intérieure, en carton ; la seconde, ou extérieure,
en bois. Le dedans du coffre étoit enrichi de peintures comme le dehors.
On peut en voir un exemple dans les planches (4 ): la figure qui occupe le fond
de la boîte, a une grande étoile sur la tête ; elle semble être le portrait du personnage
embaumé, tandis que, sur le dessus de cette boîte, on a peint la figure
d’un dieu. Toutes les couleurs sont très-vives et bien conservées.
(1) Ficus sycomorus, espèce de figuier très-élevé, le plus volume. Ony a gravé un dessin remarquable en ce genre;
grand et l’un des plus beaux arbres de l’Egypte. Voye^ les l’original en a été apporté par M. Coutelle.
Mémoires de botanique par M. Delile, H . N . tom. I I . (3) Consultez les planches 86 et 88, A . vol. I I , où l’on
(2) Voyez p l 3 7 , fig- 3 , et pl. yp, fig. 6, A . vol. I I . voit des hommes noirs agenouillés et suppliciés.
Voyez aussi les planches d’antiques, à la fin du cinquième (4) Voyez la planche $6 , fig. 3 et 10 , A . vol IL