
des édifices, par la couleur des pierres et par le caractère même de l’architecture,
ce que nous indiquons ici comme ayant été lé plus récemment construit, porte
au contraire une empreinte de vétusté que n’a pas le reste du palais. Il faudroit
croire alors que le péristyle et les pylônes dépendoient d’un édifice dont une
partie, tombée en ruine, aura été relevée conformément au plan actuel. On sent
que, dans une question de cette nature, on ne peut former que des conjectures
bien vagues, et l’on ne nous fera pas un reproche de laisser le lecteur dans l’incertitude
où nous nous trouvons nous-mêmes.
Les voyageurs anciens qui ont parlé de Thèbes, n’ont fait mention d’aucun
monument de cette ville que nous puissions reconnoître àLouqsor, à l’exception
de Diodore ( i) , qui parle de l’existence de quatre principaux temples, au nombre
desquels on peut croire qù’étoit le palais que nous avons décrit. Peut-être la rive
gauche du fleuve attiroit-elle davantage la curiosité des étrangers, ou-peut-être
étoit-elle pour eux d’un accès plus facile. Il est toutefois certain qu’il nous est
parvenu des détails plus circonstanciés sur le tombeau d’Osymandyas, les colosses et
ie palais de Memnon, que sur les monumens de la rive droite.
Pococke a cru reconnoître à Louqsor le tombeau d’Osymandyas , décrit par
Diodore d’après Hécatée. Nous avons fait voir, en parlant du palais vulgairement
connu sous le nom de Memnonium, dans quelle suite d’erreurs ce voyageur s’est
laissé entraîner (2).
A trois mille cinq cents mètres au sud du palais de Louqsor, et à deux mille
mètres du fleuve, existe une vaste enceinte rectangulaire; elle a mille sept cents
mètres (3) de longueur et mille- cinquante (4) de largeur. Ses murs en briques
crues avoient au moins vingt mètres d’épaisseur : ils ne s’élèvent actuellement
que de trois ou quatre mètres au-dessus de la plaine; dans beaucoup d’endroits,
ils sont encore moins élevés, et, dans quelques-uns, ils ont même entièrement
disparu (y). La plus grande partie de ces murs est enfouie sous le limon du Nil;
et ce qui reste au-dessus du sol, fournit, depuis nombre de siècles, aux habitans des
villages les plus voisins, un engrais employé particulièrement pour la culture du
dourah. Sur les côtés ouest et sud de cette enceinte, on voit quelques maisons
modernes, abandonnées et à moitié détruites.
Après avoir constaté l’existence de ces ruines, où nous avions été seuls et presque
sans armes, et après en avoir mesuré les principales dimensions, nous quittâmes
ce vaste hippodrome, qui n’offre plus aucune construction intéressante, et qui
n’est remarquable que par son immense étendue. Nous étions alors assez près des
montagnes de la chaîne Arabique pour juger qu’il n’y existe pas de grottes.
(1.) Diod. Sic. Bibliot. hist. lib. II. (4) Cinq cent trente-neuf toises.
(2) Voyelles sections 11 et III de ce chapitre. (5) Voyez le plan général de Thèbes , planche 1 , A.
(3) Huit cent soixante-douze toises. vol. I I . ,
SECTION VIII,
P a r MM. JO L L O I S e t D E V I L L I E R S ,
I n g é n i e u r s d e s p o n t s e t c h a u s s é e s .
Description du Palais, des Propylées, des Avenues de sphinx, des
Temples et de diverses autres Ruines de Karnak.
PREMIÈRE PARTIE.
Du P a la is de Karnak.
§. I ."
D e la Position géographique des Ruines, de leur- étendue, et de l ’enceinte
du Palais.
L es ruines de Karnak sont situées à trente degrés vingt minutes trente-quatre
secondes de longitude, à l’orient de Paris, et à vingt-cinq degrés quarante-deux
minutes sept secondes de latitude boréale. Le point où les observations astronomiques
ont été faites, est le milieu de la porte du grand pylône de l’ouest, qui
fait face au Nil, et qui est une des principales entrées du palais. Ces ruines sont
à sept à huit cents mètres environ des bords du fleuve. La portion de la vallée
comprise entre le Nil et le pied de la chaîne Arabique a près de sept mille mètres de
largeur (i). Ainsi toute la butte factice sur laquelle s’élèvent les édifices de Karnak,
est au milieu d’une plaine fort étendue, quipourroit être toute entière cultivée,
si l’incurie des habitans, et sur-tout le despotisme du gouvernement, ny appor-
toient pas d’obstacle. La seule portion située en avant du village est mise en valeur;
quelques terrains à l’orient, arrosés par un canal dérivé du Nil .au-dessus deLouqsor,
présentent aussi l’aspect riant de la culture : mais, par-tout ailleurs, on ne voit que
des champs en friche, offrant seulement quelques herbes parasites, qui s élèvent a
un mètre de hauteur environ au-dessus du sol.
Nous avons voulu connoître d’abord l’ensemble et l’étendue des ruines de Karnak,
qui ne sont, comme nous le verrons bientôt, qu’une partie de 1 ancienne cité, de
Thèbes (2). Nous en avons fait le tour, au pas ordinaire du cheval, en une heure
( i j Une lieue trois quarts environ de deux mille toises. (2) Voyeçla Dissertation à L fin de ce chapitre.