d illusion et de prestige le ciseau d un homme de génie. Mais les Grecs et les
modernes ont-ils feit des cariatides un emploi aussi sagement motivé et aussi
convenable que les Égyptiens 1 c est une opinion que nous ne pouvons partager.
En effet, on remaiquera que les cariatides Égyptiennes ne nous offrent point,
comme celles des Grecs, le spectacle affligeant de figures accablées de poids
énormes; ce qui détruit toute apparence de solidité. Elles ne portent rien; elles
sont la représentation d’une divinité grave qui n’est là que comme ornement,
mais comme un ornement bien motivé , et rappelant à tous ceux qtji le voient
le respect ut le recueillement que doit inspirer le lieu qu’elles décorent. L ’apparence
de la solidité est augmentée par cette disposition même, puisqu’à la grosseur
réelle des piliers, qui est suffisante pour porter l’édifice, se joint encore l’illusion
produite par la masse des statues. Rien nctoit plus convenable que l’emploi
des cariatides pour donner aux édifices Égyptiens ce caractère de grandeur et
d’mdestruftibilité que leurs architectes se sont proposé de leur imprimer. Tout
se réunit donc pour persuader que les figures cariatides sont en Égypte dans leur
pays natal; et dans la disposition d’esprit des anciens Égyptiens, on ne pouvoit
mieux satisfaire a la loi des convenances générales qu’en en faisant un fréquent
emploi.
Si le peiistyle qui nous a entraînes dans la petite digression que nous venons
de faire sur les cariatides, inspire, par sa seule vue extérieure, une si grande admiration
aux voyageurs, les nombreuses sculptures dont les parois de ses galeries
sont couvertes, n excitent pas moins leur intérêt par la manière dont elles sont exécutées
et par les sujets qui y. sont représentes.
A droite, en entrant sous le péristyle, sur le mur de la première galerie, on
voit un tableau qtfi paroît représenter une initiation ji). L ’initié est conduit, par
quatre prêtres qui se donnent la main, devant un temple que semble lui montrer
un homme à tête d’ibis, et où sont renfermées trois divinités Égyptiennes. Plus
haut, on voit la purification de l’initié : deux prêtres tiennent penchés sur sa tête,
des vases d où sortent des bâtons auguraux à tête de lévrier et des croix à anse ;
un vautour (2) plane sur la tête du personnage. Audessus du temple, on voit, se
donnant la main, trois hommes à tête de chacal et un personnage à figure humaine,
dont la tete est surmontée d une mitre. On y remarque encore une figure colossale
assise, tenant un sceptre de la main droite et une croix à anse de la main gauche.
Derrière elle sont deux femmes, debout, avec une croix à anse et un bâton augurai.
En avant est un homme a tete d ibis, vêtu d’habits courts. Ensuite viennent neuf
figures colossales qui se donnent la main. Les trois premières ont des têtes d’éper-
vier; les trois dernières, des têtes de chacal; et les trois intermédiaires, des têtés
humaines dont la coiffure est surmontée de mitres.
A gauche de lentree et sous la meme galerie, se trouve une figure colossale
eoiffee dune triple mitre, a laquelle sont suspendus, en avant et en arrière, des
C1 ) Voyez JJ> fié- *> A . vol. 11. ' Gniel.). Voye^ses Observations sur le système des .oiseaux
(2) M. Savigny k prouvé que le vautour des Egvp- de l'Egypte et de la Syrie, imprimées en 1810.
iiboeus. Elle a dans la main gauche trois cordons dont les extrémités se terminent
en forme de fleurs de lotus, et qui se distribuent sur trois rangées de cinq prisonniers
quils tiennent liés. Les uns ont les mains attachées par-dessus la tête et
repliées vers les épaulés, d autres les ont liées derrière le dos. Ces prisonniers pa-
roissent être offerts par le personnage que nous venons de décrire, à une divinité
de grandeur colossale, qui est assise et qui tient dans ses mains une croix à anse
et un sceptre. Derrière laAIivinité est une figure de femme, coiffée d’une mitre et
vetue d’un habit long et serré.
Tout près, de l’entrée, on remarque un bas-relief f i) composé de plusieurs
personnages qui portent sur leurs épaules une sorte de brancard, où sont placées
sept petites figures d’hommes tenant en main une branche de lotus, à la suite desquelles
est une figure de femme agenouillée. Celle-ci paroît soutenir un étendard
qui repose sur les têtes des petites figures, et qui se termine par une fleur de lotus
surmontée de plumes. Ces porteurs se font remarquer par leur costume compose
d une ample robe d’étoffè rayée, et leur chaussure qui ressemble à des espèces
de patins. Le personnage qui est au milieu, et qui paroît commander la marche,
est couvert de la peau d un lion dont la tête retombe à la hauteur du nombril et
cache le noeud de la robe.
Le mur de fond de la galerie sud du péristyle offre des sculptures d’un grand
intérêt. On y voit d’abord quatre rangées de prisonniers enchaînés, disposées les
unes au-dessus des autres. Les artistes Égyptiens n’ont pas trouvé d’autre moyen
pour suppléer.aux effets de la perspective qu’ils ignoroient, que de représenter ainsi
une longue suite de personnages qui s’avancent en colonnes. La planche 12 (2)
ne représente, que trois rangées de captifs ; la quatrième n’a pu être dessinée ,
la partie de 1 édifice où elle se trouve étant trop encombrée ou trop dégradée.
La colonne inférieure offre d’abord deux prisonniers à longue barbe, dont les
mains sont liées dans des positions différentes ; ils sont conduits par un militaire
Égyptien, vêtu d’une longue robe, et tenant un arc dans la main droite. II
lève le bras gauche, comme pour faire signe qu’il amène des prisonniers. Trois
autres captifs, dont les mains et les bras sont diversement liés dans des positions
extrêmement gênantes, suivent, et sont également conduits par un officier Égyptien.
Ils sont vêtus, comme les précédens, de manteaux longs sur lesquels on voit
des espèces de broderies , qui sembleroient annoncer que ces captifs ne sont pas
de simples soldats. Sous ces manteaux, formés de pièces d’étoffe alternativement
bleues et vertes, ils ont une jupe courte de couleur blanche, avec une bordure
inférieure, formée de raies bleues. Cette jupe s’attache au-dessus des reins, et ne
dépasse point le haut du genou. A la suite, viennent encore trois autres prisonniers
et un Égyptien qui les conduit. En avant de cette colonne de captifs, est un groupe
de neuf Égyptiens qui ont les mains élevées, comme pour demander le silence,
afin de prêter l’oreille à l’énumération qui se fait devant eux, des mains coupées
aux ennemis morts sur le champ de bataille. Un homme courbé et vêtu d’une
longue robe les compte lui-même en les prenant une à une. Un écrivain, placé
(i) Voyez pl. 9 , fig. i , A . vol. I I . (2) Voye^ le second volume de l’Atlas des antiquités.