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Des moufles glacées.
Les moufles fe font, comme on l’a déjà obfervè,
âvec de la crème bien douce & peu épaifle ; on la
fouette, ce qui la fait moufler , & c’eft de cette
moufle qu’on fait ufage ; on peut lui donner tel
goût que l’on v eut, aromates, fleurs, fruits, vins
ou liqueurs. Pour donc faire une moufle on prend de
la crème bien douce, & légère, on la met dans une
terrine, on y jette du fucre en poudre, on remue
avec une cuiller pour le fondre ; enfuite ou fouette
la crème avec des brins de buis ou d’ofier. 11 ne faut
fouetter que fur les bords de la terrine & jamais dans
le milieu de la crème , parce que cela lui donneroit
trop de corps , & l’empêcheroit de bien moufler.
A mefure que la moufle fe forme deffus, il faut
avoir une cuiller percée ou une écumoire pour l’ôter
& la mettre fur un tamis clair , & une terrine deflous
pour recevoir la crème qui dégoutte de la moufle ;
continuez de fouetter, & d’ôter à mefure toute la
moufle qui fe forme.
Otez la crème qui eft dans la terrine fous le tamis,
& mettez - la avec celle que vous fouettez pour en
avoir fuflifamment.
Lorfque toute la crème fera en moufle, avec une
grande cuiller remuez-la dans le tamis pour lui faire
prendre corps, & quelle ne foit pas fi légère, parce
quelle ne feroit que du vent. Empliffez enfuite les
gobelets & placez-les dans une cave à moufle fur de
la glace mêlée de fel & de falpêtre *, arrangez-les de
manière que le fel ou le falpêtre ne puiffe les endommager
, couvrez la cave de fon couvercle, &
mettez deffus de la glace & du fel ou falpêtre pour
les conferver fraîchement. La cave à moufle doit
avoir au couvercle , comme en bas, une goulotte
pour laifler écouler l’eau de la glace : on fe lert ordinairement
pour les moufles, de gobelets d argent ou
de verres à cul plat. .
Pour faire, par exemple, une moufle à la vanille,
pilez un peu de Vanille avec du fucre en pain, paffez
au tamis de foie, il faut repiler ce qui n’a pu paffer,
jufau’à ce que tout foit en poudre bien fine. On fe
iert de ce fucre à la vanille pour donner le goût à la
moufle de crème ; on le fait fondre dans la crème,
& l’on en excite la moufle comme il eft dit.
Les moufles à la canelle &. au gérofle fe font
tomme celles à la vanillé. Quelques gouttes d’ef-
fence peuvent fuppleér a la poudre de canelle ou
de gérofle.
Pour faire une moufle à Vanïs, on met dans^ un
vafe qui ferme bien, une cuillerée d’anis en graines
& une pinte de crème. On fait chauffer ce vafe au
bain-marie à l’eau bouillante, & on l’ô ted u feu.
On laiffe infufer deux heures l’anis, on fait paffer
la crème au tamis, on laiffe refroidir ,• on fucre a
propos, & on excite la moufle comme .il eft dit.
Toutes les autres moufles peuvent fe faire a l’imitation
de celles que nous venons de citer.
Quand on veut faire des moufles aux vins de liqueurs
, ou aux liqueurs & ratafiats, on prend de la
crème un peu plus épaifle , paroe que la liqueur
qu’on y met la rend plus claire, & fe trouve alors au
point de bien moufler ; il faut fe fervir de même de
fucre en poudre , St fouetter comme il eft dit. On
met un verre de vin fur une pinte de crème ; & fi
l’on emploie des liqueurs ou des ratafiats, on proportionne
la quantité au goût, parce qu’il y a des liqueurs
plus fortes les -unes que les autres.
Au refte, ces fortes de glaces ou de moufles au
vin & aux liqueurs, font rarement bonnes; elles
font lourdes, mattes, molles & glaçonneufes , par
rimpoffibilité de l’union intime des parties fpiri—
tueufes de la liqueur avec la crème.
Celles pourtant qui réuffiffent le mieux, font les
glaces ou moufles compofées avec des vins ou liqueurs
qui font extraits des fleurs, fruits, bois ou
végétaux dont les goûts font très-forts ; St fi on les
mêle avec des jus de citron St de l’eau pour les pouvoir
congeler, ils perdent peu de leur goût naturel,
8c biffent un goût fuffifant au mélange , 8c avec
l'aide du fucre on peut en faire des compofitions
agréables, telles font les glaces de marafquin 8t l’eau
de créole.
Le tatafiat de fleurs d’orange auquel on joint un
: peu de marmelade de fleurs , d’oranges donne fon
; goût à la glace.
! Le vin mufcat avec une infufion de fleurs de fu-
reau , peut faire encore une bonne glace ou moufle.
Nous croyons avoir établi' dans cët article les
principes de l’art du confifeur, en avoir donné les
procédés effentiels , & rapporte affez d exemples
pour fatisfaire à cet égard , foit à l’inftruâion, foit
à la curiofité des le&eurs.Cet art peut s’exercer'fur
tant d’objets que le goût Si le caprice varient à l’infini,
qu’il feroit inutile & comme impoflible de vouloir
les parcourir tous. C ’eft pourquoi nous devons nous
arrêter ici, d’autant que nous ferons forcés de revenir
encore à des defcriptions à peu près femblables, en
décrivant d’autres arts qui font analogues & corref-
pondans à celui du confifeur.
Des marchands confifeurs.
Les marchands confifeurs font partie du corps de
l’épicerie, qui eft le fécond des fix corps des marchands.
En 1726, il a été défendu aux maîtres confifeurs
d’employer aucunes farines , amidons, & autres in-
grédiens de cette nature dans les dragées, tant fines
qu’ordinaires, & de fe fervir de miel dans les confitures
sèches ou liquides, gelées, pâtes & autres ,
• ■ fous peine de confifcation & d’amende ; & il a été
ordonné aux jurés de faire leurs vifites tous les deux
mois, pour voir fi l’on n’eft point dans le cas de la
contravention.
Les dragées- de toutes fortes paient 4 liv. du cent
pefant pour droits d’entrée, &. autant pour droits de
fortîe. Les confifeurs paient pour droits d’entrées dé
leur autres marchandifes 7 1. 10C par cent pefant,
y compris les caiffes, tonneaux, emballages & cordages,
& < 1. pour droits de fortie.
Explication
Explication des planches de l'Art du Confifeur.
Planche 1. La vignette re pré fente l’intérieur d’un
premier laboratoire au rez-de*chauffée , oh l’on voit
Un fourneau triple placé fous une hotte de cheminée ;
à côté de ce fourneau, un réfervoir double de plomb ;
& fur le pourtour un grand nombre de tables & de
tablettes contre les murs.
Fig. 1 , ouvrier qui, avec fa fourchette , charge
des fruits candis fur les grillés du moule à candi.
Fig. 2 , ouvrier qui travaille au fourneau à pralines
en blanc ou en rouge.
Bas de la planche.
Fig. 1 , égouttoire. Cet uftenfile d’office eft d’argent
, ou, par abus, de cuivre rouge, de la grandeur
d’un grand plat, & percé comme une écumoire.
Fig. 2 , écumoire ; elle .eft aufli de cuivre.
- Fig. 3 , fpatule.
Fig. 4 , fpatule carrée.
Fig. ƒ , grilles du moule d candi. Il y en a de différentes
grandeurs ; elles font faites de fil de laiton. 11
vaudroit mieux qu’elles fuffent de tout autre métal,
excepté de plomb. Les grandes fervent pour le tirage ;
on y met les fruits pour les égoutter de l’excès du
fucre. Les petites fe placent les unes fur les autres
dans leur moule. Les fruits à candis font entre deux.
Les grilles empêchent qu’ils ne s’attachent en can-
diffant.
Fig. 6 , moule à candi.
Fig. 7, chauffe à filtrer & clarifier. Cette opération
fe fait dans la vignette, derrière la fig. /.
Fig. 8 , châflis, C ’eft un cadre de bois qui porte à
chaque angle un crochet de fer. On y attache une
étamine ; on pofe le cadre fur un vaiffeau qui reçoit
la liqueur clarifiée à travers l’étamine.
Fig. 9 , poêle de cuivre à différens ufages.
Fig. 10 , chevrette ou fupport de la poêle fig. 9.
Par ce moyen, la poêle, affez éloignée du fourneau,
laiffe à l’air un accès plus libre.
Fig. n ,. 12, 13, fourneau triple. On le voit à la
partie 11 garnie de la chevrette; à la partie 12 fans
chevrette ; & à la partie 13 , fa partie antérieure
abattue pour montrer la grille & le cendrier.
Planche 11. La vignette repréfente l’intérieur d’ un
fécond laboratoire mué aufli au rez-de-chauffée. La
partie de ce laboratoire , fig. / » eft un four ; & la
partie fermée par un retranchement, fig. 2 , eft une
étuve.
Fig. 1, four muré. On l’appelle muré, pour le diftin-
guer du four à boulanger.
Fig. 2 , étuve. C ’eft un cabinet muré, garni de
barreaux de diftance en diftance pour que la chaleur
que l’on y entretient par un poêle, fe ré pande également.
par-toüt.
Bas de la planche.
Fig. 1 , manne d’ofier qui fe place dans l’étuve
fur les barreaux, & qui contient les fubftances a
étuver.
Arts & Métiers• Tome /. Partie Wm
Fig. 2 , clayon ; il eft d’ofier. Il iert à ramaffer les
confitures lorfqu’on dégarnit les fervices , à porter
des fleurs, à foutenir des fruits ou autres choies
dans l’étuve.
Fig. 3 , tamis.
Fig. 4 , gaufrier, ou fer entre lequel on fait cuire
les pâtes appelées gaufres. Il s’ouvre & fe ferme par
le moyen de fes branches & de fon clou. Il fe tient
fermé quand on en expofe alternativement les deux
plaques fur le feu, par le moyen de l’anneau qui eft
à l’extrémité d’une des branches, & qui reçoit l’extrémité
pointue de l’autre branche.
Fig. $, gaufrier à la flamande. Il y a une des deux
plaques creufée & gravée ; elle reçoit l'autre, &
l’enferme par un rebord. La gaufre eft imprimée de
la figure de la plaque gravée. - ^ A .
Fig. 6 , moule à bifcuits. Le bifcuit eft une pâté
faite de fucre, de farine & d’oeufs. Les moules font
de papier. >
Fig. 7 , four de campagne ; il eft de tôle. C eft une
efpèce de tourtière qu’on échauffé par deffus & par
deflous. ffi; .
Fig. 8 , forbetière. C ’eft un vafe d’étain ou de fer-
blanc , où l’on fait prendre en neige les liqueurs a
fervir en gobelets, ou à faire des fruits glaces. La
forbetière a , comme on v o it, fon baquet ; & ce
baquet a un trou avec une cheville pour le vider
d’eau. La diftance de la forbetière au baquet en
dedans, eft de quatre doigts.
Fig. 9 , cave. Cet uftenfile d’office eft de cuivre ;
ou de fer-blanc, ou de tôle \ il a la forme d une brai—
fière. On entoure fon couvercle de glace pilée ; on
dépofe dans fa capacité tous les fruits glacés , au
fortir de la glace, en attendant le fervice ; on les y
tient féparés par des papiers placés deffus & deflous ,
& des feuilles de vigne.
Fig. 10, couvercle de la cave.
Planche III. La vignette montre un troifième laboratoire
, où l’on fait la dragee liffe &. la dragée
perlée. , , .
Fig. 1 , ouvrier qui fait tourner la dragee dans la
bafline branlante pour la liffer. Sous la bafline eft la
braifière foutenue par un baquet. A côté de l’ouvrier
eft une poêle qui contient du fucre liquide & propre
à l’ouvrage. r
Fig. 2 , ouvrier qui fait la dragée perlee ; on voit
au deffus de fa bafline branlante le perloir fufpendu
à une corde ; c’eft du perloir que dégoutte le fucre
cuit ou perlé.
Fig. 3 , ouvrier qui fait la dragée au tonneau.
Bas de la planche.
Fig, /, bafline branlante avec fes chaînes, vue dtt
côté de l’ouvrier & de l’anfe à mener.
Fig. 2 3 braifière.
Fig. 3 , tonneau ou fupport de la braifière.
Fig. 4 , perloir. C’eft un entonnoir de fer-blanc ;
dont le trou , fort petit, laiffe filer le fucre doucement
fur les dragées à perler. On le voit garni dç
toutes fes pièces. . ^ , , . ,
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