
proportion qu'une cloche doit avoir, Toit qu'on la
confidère folitairement, foit qu’on la confidère relativement
à une autre cloche qu’il faut mettre avec
elle, ou avec laquelle il faut la mettre, ou à l’unif-
fon, ou à tel intervalle diatonique qu’on defirera ;
il nous refte à parler de la manière d’en former
le moule, de la fondre, & de la fufpendre.
Pour former le moule, il faut d’abord conftruire
le compas, qui eft un arbre dé fer, dont le pivot
tourne fur une crapaudine fixée fur un piquet de
fer fcellé fermement au milieu d’une foffe creufée
devant le fourneau. Cette foffe doit avoir un pied
ou environ plus de profondeur que la cloche n’a de
hauteur au deffous de l’âtre du fourneau, d’où le
métal doit y defcendre facilement. A une hauteur
convenable, on place deux bras de fer , affemblés à
l ’axe du compas : ces bras font refends^ & peuvent
recevoir une planche qui fait la fonétiorî; de fécondé
branche du compas. Il faut avoir tracé fur cette planche
trois lignes, dont la première eft la courbe de
l’intérieur de la cloche ; la fécondé la courbe de
l’extérieur de la cloche ou modèle ; & la troifième
la courbe de la chape.
On bâtit enfuite un maffif de briques qui foit parfaitement
rond, & dont le plan foit bien perpendiculaire
à l’axe du compas, ou bien horizontal ; ce
maffif s’appelle la meule i les briques de la meule font
mifes en liaifon les unes avec les autres , enforte
.que les briques de la fécondé aflife , couvrent les
joints des briques de la première aflife , & ainfi de
fuite. Il faut laiffer une ligne ou environ de diftance
entre le plan fupérieur de ce maffif, & la ligne du
compas.
Cela fait, on pofe une aflife de briques dont on
rompt les angles ; on joint ces briques avec du mortier
de terre ; elles font difpofées de manière qu’il
s’en manque une ligne & demie qu’elles ne touchent
à la planche ; ce dont on s’affure en la faifant tourner
à chaque brique que l’on pofe. On pofe desaffifes de
briques ainfi les unes fur les autres, jufqu’à ce que
cette maçonnerie foit élevée à la hauteur du piquet :
alors on ficelle les bras de ce piquet, s’il en a , dans
le corps même du noyau, & on continue d’élever
Ja même maçonnerie jufqu’au cerveau de la cloche.
On couvre alors toute cette maçonnerie creufe avec
lin ciment compofé de terre & de fiente de cheval ;
on égalife bien par-tout cet enduit par le moyen de
la planche qui eft taillée en bifeau ; ce bifeau emporte
tput l’excédent du ciment, & donne au noyau
la forme convenable,
Lorfque le noyau eft dans cet état on le fait
recuire en l’empliflfant de charbons à demi-allumés ;
ik pour que la chaleur fe porte vers les parois du
inouïe, & en faffe fortir toute l’humidité, on couvre
le deflus avec un carreau de terre cuite. Quand le
noyau eft fec , on lui applique une fécondé couche
de ciment qu’on unit, bien par-tout avec la planche ;
/cette fécondé couche appliquée, on fait fécher une
fécondé fois : on recommence & l’application des
jcouçhes de ciment , &. la defliccation, jufqu’à ce
que le noyau foit parfaitement achevé : on le finit
par une couche de cendres bien tamifées , que l’on
étend convenablement par-tout »l’aide de la planche.
Après ces premières opérations , on démonte la
planche du compas ; on l’échancre en l’ébifelant
jufqu’à la courbe qui doit fervir à former le modèle.
Le modèle eft compofé d’un mélange de terre & de
bourre dont on forme plufieurs pièces ou gâteaux ;
on les applique fur le noyau ; elles* s’unilîent ensemble
: on termine le modèle par plufieurs couches
du même ciment , mais délayé ; chaque couche
s’égalife par le compas , & fe sèche avant que d’en
appliquer une autre ; la dernière eft un enduit de fuif
& de cire fondus, qu’ofi difpofe avec le compas fur
toute la furface du modèle; c’eft là-deflus qu’on
place les armoiries & les lettres, &. qu’on trace les
cordons. Les cordons fe forment par des entailles
pratiquées au compas ; & les lettres & armoiries
s’exécutent avec un pinceau que l’on trempe dans
de la cire fondue, qu’on applique fur le corps du
modèle , & qui les y forme ; on les répare enfuite
avec des ébauchoirs : c’eft l’ouvrage d’un fculpteur.
11 s’agit maintenant d’exécuter la chape ou le fur-
tout. On fépare encore la planche du compas ; on
l’échancre en l’ébifelant jufqu’à la ligne parallèle à
la face extérieurè de la cloche, &. qui en eft diftante
de deux ou trois pouces, plus ou moins, félon que
l’on veut d’épaifleur à la chape : la première couche
de la chape eft çompofée de terre bien tamifée ,
que l’on délaie avec de la bourre très - fine ; on
applique cet enduit fur tout le modèle avec un pinceau
, enforte qu’il en foi;t tout couvert ; on laifle
fécher cette couche d’elle-même, ou fans feu : on
en applique une fécondé , une troifième, jufqu’à ce
que l’épaifleur de toutes ces couches ait acquis deux
lignes d’épaifleur ; alors on applique un ciment plus
groflier, & qu’on laifle pareillement fécher fans feu ;
on rallume enfuite du feu dans le moule , qu’on
augmente petit à petit jufqu’à ce qu’il foit aflez
ardent pour fondre les cires, qui s’écoulent par des
égoûts pratiqués au bas de la çhape , & qu’on rebouche
enfuite avec la terre.
Après que le feu qui eft dans le noyau eft éteint,
on remet le compas en place , & on achève de
donner à la chape l’épaifleur qu’elle doit avoir. Dans
les grandes cloches la chape elt fertie par des anneaux
de fer plat qui l’affermiffent : ces bandes ont quelques
crochets ou anneaux qui donnent prife pour
enlever la chape lorfqu’on en veut retirer le modèle,
qui occupe la place du métal dont la cloche doit
être formée. La chape ainfi achevée, on démonte
le compas , qui n’eft plus d’aucun ufage.
Il faut maintenant former le cerveau qui eft refté
ouvert au haut du noyau du modèle & de la chape :
pour cet effet, on commence par terminer le noyau
avec les mêmes matières dont il a été conftruit,
qu’on difpofe félon là forme convenable au cerveau,
par le moyen d’une çerce profilée fur la courbe intérieure
du cerveau ; on place en même temps l’S
ou anfe de fer qui doit porter le battant ; on l’enterrp
dans
dans la maçonnerie, du cerveau, de manière que la
partie inférieure paffe au dedans de la cloche, &
que la partie fupérieure foit prife dans la fonte par
le métal qui formera le pont.
On forme enfuite avec de la cire ’& par le moyen
d’un eerce ou d’un compas fait exprès, dont le pivot ,
s'appuie fur le centre du noyau où l’on a fcellé une ;
petite crapaudine de fer, qu’on ôtera dans la fuite 1
avec le compas ; on forme, dis-je, en cire le cerveau j
& l’onde qui le renforçit
On modèle en cire les anfes au nombre de fix ,
dont deux font les anfes latérales ; deux les anfes
antérieures , & deux poftérieures ; enfuite le pont
où le pilier placé au centre du cerveau , fur lequel
fe réunifient toutes les anfes.
Après avoir modelé & terminé en cire toutes ces
pièces, on les couvre avec le pinceau des mêmes
couches dé ciment qui ont fervi à couvrir la chape,
obfervant que cette chape particulière des anfes ne
foit point adhérente à eëlle de la cloche. Lorfqu’elle
eflr finie , on l’enlève pour la faire recuire & en
retirer la cire, q u i, en fondant, laifle un vide que.
le métal, doit remplir, pour former le cerveau & les
anfes de la cloche,.
On a eu foin de ménager à la partie fupérieure de
la chape, des anfes &. du pont, plufieurs trous, entre 1
lefquels il y en a un au deflus du pont, & qui fert
de jet pour le métal ; d’autres qui répondent aux
anfes , & qui fervent d’évent à l’air qui eft contenu
dans l’efpace laifle vide par les cires, & que le métal
fondu fait fortir en prenant leur place.
Les fondeurs en bronze font, un modèle de leur
ouvrage en cire, tout-à-fait femblabje au premier
modèle de plâtre. On donné à la cire l’épaifleur
qu’on veut donner au bronze ; ;car , lorfque dans
l’efpace renfermé par ces cires on a fait l’armature
de fer & le noyau, &. qu’elles ont été recouvertes
par deflus du moule de potée & de terre, on les
retire par le moyen du feu qui les rend liquides,
d’entre lé moule de potée & le noyau, ce qui forme
un vide que le bronze occupe.
Les. anciens ne prenoiônt point la précaution de
faire le premier moule de plâtre , par le moyen
dqguel on donne à la cire une épaiffeur égale ; après
avoir fait leur modèle avec de la terre à potier préparée,
ou du plâtre , ils l’écorchoient, c’eft-à-dire,
qu’ils en ôtoiçnt tout, autour l’épaiffeur qu’ils y ou-
loient donner au brome ; de forte que. le modèle
devenoit le noyau, & après l’avoir bien fait cuire
ils le récouvroient de cire quils terminoient, & fur
laquelle ils faifoient le moule de potée dans lequel,
le métal devoit couler. On fe fert encore quelquefois
de cette méthode pour les bas - reliefs , & les
ouvrages dont l’exécution n’eft pas difficile :. mais
quoiqu’elle foit plus expéditive , elle jette, pour
les grands ouvrages, dans plufieurs inconvéniens.
La cire qu’on emploie pour le modèle, doit être
d’une qualité qui, ayant aflez de confiftance pour
fe foutenir &. ne pas fe fondre à la grande chaleur
de l’été, ait cependant aflez de douceur pour qu’on
Arts & Métiers, Tome I, Partit II,
puifle aifément la reparer. On met fur cent livres
de cire jaune, dix livres de térébenthine commune,
dix livres de poix graffe, & dix livres de fain-doux.
On fait fondre le tout enfemble à un feu modéré ,
obfervant de ne pas faire bouillir la cire, ce qui la
rendroit éçumeufe , & empêchefoit de la reparer
promptement.
Pour retirer le modèle de la cloche qui occupe
l’efpace entre le noyau & la chape , on fouléve
celle-ci à force de bras, ou par le moyen d’un treuil
placé au-deffus de la foffe dans la charpente de l’atelier,
on ôte le modèle, on remet la charpente après
l’avoir enfumée avec.de la paille qu’on brûle deffous ,
on ne la change point de place en la remettant ; on
obvie à cet inconvénient par des repaires. Sur .la
chape de la cloche, on place celle des anfes qu’on
a repairée pareillement ; on lute bien & ces deux
chapes enfemble, 8c la chape de la cloche avéc la
meule qui foutient tout le moule qui eft alors entièrement
fini. Il ne refte plus qu’à recuire le ciment qui à
fervi à joindre fies pièces : pour cet effet, on le couvre
peu-à-peu de ‘ charbons allumés ; on pouffe le feu
. par degrés : par ce moyen on évite.des gerçures, qu’un
feu trop grand & trop vif ne manqueroit pas d’occa-
i fionner.
On remplit enfuite la foffe de terre, qu’on
corroie fortement autour du moule., qui eft alors
tout difpofé à recevoir le métal fondu dans le fourneau.
Le fourneau pour les cloches, eft le même que
celui de la fonderie des ftatues équeftres & des canons
: il n’y a de différence que dans.la folidité, qu’on
donne beaucoup plus grande au fourneau des 'fta-
tues équeftres. Au lieu d’être de brique, il eft feule-,
ment de terre corroyée.
Quant à la compofition, dont nous avons déjà
parle, la plus parfaite, d it - o n , eft de trois par-
: ties de cuivre rouge , 8c d’une partie d’étain fin.
; On ne met l’étain que quand le cuivre eft en fufion,
& qu’après avoir été épuré de fes craffes, peu de
temps avant que de couler le métal dans le moule.
Le métal eft conduit par un canal de terre recuite
dans le godet placé au-deflus du moule, d’où il fe
répand dans tout le vide qn’occupoit le modèle ,
dont il prend exa&ement la forme. On le laifle refroidir
; quand il eft à-peu-près froid, on déterre
le moule , on brife la chape , 8c la cloche paroît à
découvert; on l’enlève de la foffe par le moyen du
treuil, qui a fervi auparavant à enlever la chape ;
on la nettoie en dedans & en dehors ; on la bénit ;
on y attache le battant, & on la fufpend au mouton
qui lui eft deftiné.
La quantité de métal que l’on met au fourneau fe
règle fur la groffeur de la cloche à fondre ; mais il en
faut avoir plus que moins, pour prévenir les pertes
accidentelles qui ont quelquefois fait manquer des
fontes confidérables. On ne rifque rien d’en fondre
un dixième de plus que le poids qu’on fe propofe de
donner à la cloche.
j La proportion de trois parties de cuivre fur une
X x x x