
pofées de quatre feuilles, fe fait à deux fois, d’abord
en blanc , puis en étreffes.
Pour mêler en blanc, l’ouvrier place deux rames
de cartier à droite , Ôc à gauche deux rames de pot
blanc ou moulé: il prend d’abord une feuille de pot,
qu’il place devant lu i, il pofe deffus deux feuilles
de cartier, puis fur celles-ci deux feuilles de p o t ,
enfuite fur ces dernières deux feuilles de cartier,
& toujours le cartier & le.pot fe diftribuent dans
le même ordre, iufqu’à ce que les tas foient épuifés:
& le m êla g e fe termine ainfi qu’on la commencé
par une feuille de'pot. 11 faut obferver que dans le
nouveau tas, les feuilles font difpofées de manière
qu’elles débordent de deux en deux alternativement
fur chacun des grands côtés.
Quand on a mêlé en blanc on mêle en êtrejjès. Pour
cela, l’ouvrier met à fa gauche le tas des papiers
mêlés en blanc, ôc à fa droite un tas d’étreffes : il
enlève la première feuille de pot, ôc la place devant
lui ; il met deffus une étreffe : fur cette étreffe deux
feuilles de cartier, qu’il recouvre d’une étreffe ; &
fur cette étreffe, il met deux feuilles de papier au
p o t , & ainfi de fuite. L’on voit clairement que par
cette diftribution, chaque étreffe fe trouve entre
une feuille de papier au pot & une feuille de cartier.
On a foin dans ce nouveau tas de faire déborder
les feuilles de cartier & celles de pot deux à deux ,
ainfi que les étreffes par les grands côtés , pour faciliter
le travail du colleur.
' Après ces différentes préparations des mêlages,
on colle en ouvrage. Cette opération s’exécute comme
le collage en feuille. L’ouvrier pofe devant lui fur un
aïs une feuille de papier au p ot, qu’il charge de
colle; il la recouvre d’une étreffe, dont il encolle la
face fupérieure ; il place deffus deux feuilles de cartier,
dont il encolle la feuille fupérieure, puis place
une étreffe qu’il charge de colle par deffus, & enfuite
deux feuilles de pot, dont il encolle la feuille fupérieure
, & ainfi de fuite, toujours fuivant l’ordre qui
a été obfervé dans le mêlage, comme on l’a vu : ç’eft
ainfi que les tas fe trouvent collés en ouvrage. On
voit par ces détails, que les cartons qui doivent former
les cartes font complets par l’affemblage exact
des quatre feuilles , dont deux font de main-brune,
recouvertes d’un côté par Une feuille de papier au
pot blanc ou moulé, ôc de l’autre par une feuille de
papier certier.
A mefure que le collage s’exécute, on porte tous
ces tas à la preffe, où ils demeurent chacun une
heure ; enfuite on les en retire, on fépare les cartons
de deux en deux, on les pique, on les épingle pour
les étendre, ôc on les abat quand ils font bien fecs.
On a foin, comme nous l’avons déjà d it, de conserver
toujours les cartons doubles pendant toutes
ces opérations : avec un peu d’attention on doit s’ap-
perceyoir que les deux feuilles de cartier fe trouvent
appliquées l’une contre l’autre, au milieu du nouveau
carton double, & que le pot eft en-dehors. Par ce
moyen, la déification & toutes les autres opérations
p’exécutenî fans que le papier cartier foit expofé à
être taché ou à perdre de fa blancheur. Tl fautfe ref-
fouvenir que le cartier fait le dos de la carte, Ôc
le pot le dedans.
A r t . V I I . D e LA p e in t u r e des têtes & des
points. .
Nous allons décrire maintenant tout ce qui concerne
la peinture ou enluminure des cartes, après que
nous aurons traité de la compofition des couleurs,
ôc de la préparation des patrons./
Toutes les couleurs deflinées pour les enluminures
, font de fimples couleurs en détrempe, c’eft-
à-dire, que les matières colorantes ne font délayées
que par des fubftances folubles dans l’eau, comme
les colles animales ou végétales, ôc les gommes,
qui leur donnent une certaine confiftance , bien
propre à fixer ôc à terminer les contours des parties
peintes. L’on va voir que toutes les couleurs qu’on
emploie à enluminer ou à peindre les cartes, font pré-,
parées fuivant ces principes.
Pour faire la couleur jaune, on pile deux livres
de graine d’Avignon, on y mêle un quarteron d’alun
réduit en poudre, & diffous- dans fix pintes d’eau :
quand ce mélange a été gardé'un certain temps, on
en exprime le fuc à travers une toile, & la liqueur
qui en fort peut être employée fur le champ : quelquefois
on abrège l’opération en faifant bouillir la
graine d’Avignon avec l’alun, ôc l’on exprime fur
le champ le fuc de la décoâiôn, qui peut être employé
pour enluminer auflitôt qu’il eft exprimé.
Le rouge fe fait avec le cinabre broyé ôc délayé
d^ns l’eau, ôc mêlé à une fuffifante quantité de colle
végétale.
Le noir fe prépare, comme nous l’avons déjà dit,1
avec du noir de fumée ôc de la colle ordinaire : on
laiffe digérer ce mélange pendant cinq à fix mois avant
d’en faire ufage : pendant tout ce temps on a foin
de le remuer quelquefois, fans quoi il auroit trop
de fluidité, s’étendroit irrégulièrement furie papier,
ÔC formeroit des contours baveux.
Le bleu fe fait avec- l’indigo broyé à l’eau fur
un marbre , ôc mêlé à une certaine quantité de
colle.
Le gris fe fait avec le bleu , dont la teinte èft
légère.
Toutes ces couleurs fe confervent dans des pots :
à mefure qu’on en fait ufage on y ajoute affez d’eau
ôc de colle pour que la peinture n’en foit pas trop
épaiffe, car elle contre-marqueroit fous la preffe, ou
s’étendroit fous la liffe.
On fe fert pour appliquer ces couleurs fur les
cartons, de différens papiers découpés ôc évidés,
qu’on nomme patrons.
Les patrons le font avec des imprimures, c’eft-à-
dire, avec des feuilles'de papier enduites fur chaque
face de cinq à fix couches d’une peinture à l’huile ,
faite avec des écaillés d’huîtres broyées ôc délayées
dans de l’huile de lin ôc de la gomme. On tire ces
imprimures toutes préparées de Rouén ; mais c’eft
aux maîtres cartiers qu’il eft réfervé de les découper
gtd*en former des patrons. Comme lé travail des
patrons pour les têtes, diffère de celui des patrons
poiy les points, no us expliquerons l’un & l’autre Séparément.
Les patrons pour les têtes , s’évident avec
un petit couteau pointu. Pour cela on prend une
faille de cartes en figures toutes peintes, on l’applique
ÔC on la fixe fur Ximprimure, ôc avec la pointe
du couteau on enlève toutes les parties de la feuille
qui font peintes d’une couleur, & enfuite celles de
Ximprimure qui fe trouvent deffous ; puis on ôte l’im-
primure évidée : elle fervira de patron pour la couleur
dont on a enlevé les parties : on en fubftitue
une autre fous une nouvelle feuille, ôc on enlève
au canif toutes les parties de cette feuille peintes
d’une, autre couleur, ôc les parties de l’imprimure
qui font correfpondant.es : c’eft un nouveau patron
de fait pour la couleur qu’on a enlevée : ©n fuit le
même procédé pour les trois autres couleurs.Comme
il y a cinq couleurs à chaque tête, il faut cinq patrons
pour compléter leur peinture, Voye^planc.l ,fig 6,
un de ces patrons, où l’on a enlevé toutes les parties j
qui doivent être peintes en jaune. Les parties cou- !
pées ôc enlevées font repréfentées par les vides
blancs : il ne faut que quatre patrons pour les deux
valets rouges, parce quon n’emploie à leur peinture ;
que quatre couleurs.
Quant aux patrons des points , ils fe préparent bien
plus facilement ; car ils font découpés & évidés à
Xemporte-pièce. On a quatre emporte-pièces différens,
pique, trèfle, coeur 6» carreau, avec lefquels on frappe
les imprimures : les bords de ces emporte-pièces font
tranchans, & coupent dans tout le contour l’imprimure.
Par ce moyen il fe fait des vides de la
forme des emporte-pièces, par-tout où l’on frappe
l’imprimure. Ces patrons ainfi évidés par emporte-
pièces , fervent à l’enluminure des points. On a
donné dans les premières figures a , b, c,d, e , f ,
g » h, i , k, l , m, n , o, p , de la planche V I , la
forme des emporte-pièces des quatre différens points,
avec celle de leurs guides, & la. forme des points emportés
: enfin un emporte-pièce pour les points ronds,
diftribués fur les extrémités des patrons. On voit
ces points ronds dans 1 es fig. i , 2 , 3 & 4 , de la plane.
V y ÔC on les a indiqués, fig.y, par a , b , c , d , ÔCc.
Nous ne parlerons pas ici de la diftribution des points
fur les feuilles, ainfi que des différens nombres de
ces points qu’on découpe fur les patrons: ces détails
de diftribution dépendent des différens jeux qu’on
fe propofe d’exécuter ou de compléter, dont les uns
renferment certains points que d’autres excluent. Le
fyftême de cette diftribution des points fur les feuilles, '
depuis Xas jufqu’au dix , [fe nomme compajfage : un
plan doit être formé & connu avant qu’on fe mette
en devoir de faire ufage des emporte-pièces pour
exécuter les patrons, qui n’en font que le réfultat :
on a donné ici dans la planche cinquième quatre fyf-
temes de diftribution des points, en carreau, en coeur,
en trefle & en pique, d’après lefquels on peut prendre
une idée des autres. Voye^fig. 1,2,3 & 4 : ainfi nous
ne croyons pas devoir multiplier les figures , ÔC
■4 ns & Métiers. Totnc L Partie 11,
les deferiptions à ce fujet. Paffons maintenant au travail
de la peinture.
Le peintre fe place devant une table , ôc met
à côté de lui un tas de cartons doubles, prejfés ÔC
redreffés ; il en pofe un devant lui qu’il recouvre
d’un patron. Je fuppofe qu’il foit queftion de peindre
des points : il prend enfuite avec un pinceau ou
goupillon , 3 , planche V I , de la couleur dans le
vafe 2^ qu’on nomme calotte à couleur, il l’étend fur -
une planche / , qu’on appelle platine : il tourne fur
cette platine une broffe oa pinceau & , pour la charger
de la couleur uniformément ; puis il paffe cette
broffe à plufieurs reprifes fur le patron , pour que
la couleur s’imprime dans tous les endroits où il y
a des points évidés ; enfuite il enlève doucement le
patron, & pofe le carton enluminé fur fa gauche,
afin que la couleur fe fèche pendant qu’il en peint
un autre : quand il a fini d’enluminer un tas de cartons
doubles fur une face, il les reprend pour les
peindre fur l’autre, face.
Pour peindre les têtes on applique fucceflivement
les patrons fur les mêmes feuilles de têtes, fuivant
l’ordre des couleurs qu’on doit appliquer. Les traits
du moulage fervent à placer convenablement les
divers patrons , de manière que les endroits qui
doivent recevoir la couleur foient bien à découvert,
ôc qu’il n’y ait pas de fenêtres, c’eft - à - dire, d’in*?,
terruptions entre les couleurs enluminées.
A r t . I X . D u c h a u f f a g e , du favonnage & du
liffage des cartons.
Quand les cartons font peints des deux côtés ,
o u , comme on dit, habillés, on fépare les doubles :
on prend pour cela un couteau de bois ou coupoir,
fig. s , planche V I , ôc après avoir déchiré un coin
de la bordure du double , on infinue le couteau
entre les deux cartons, ÔC on les fépare en entr’ouvant
le refte des bordures: de ces cartons ainfi féparés ,
on forme des tas, qu’on fait paffer enfuite fucceffi-
vement entre les mains du chauffeur ôc du favonneur,
deux ouvriers qui préparent les cartons, pour qu’on
puiffe les liffer plus facilement ôc avec plus de fuccès.
On a d’abord remarqué que non-feulement les car-?
tons ne prenoient pas un beau vernis fous la liffe ,
mais même que la peinture s’étendoit s’ils n’étoient
pas fecs ôc même fort chauds. On a donc pris le
parti de les chauffer à un certain degré , ôc voici à
quoi fe réduit cette opération.
Le chauffoir (planche 11, fig. 7. ) , eft une caiffe de
tôle carrée, placée fur des pieds e, e, e, e, affemblés
comme ceux d’une table, On pofe fur les bords de
cette caiffe une cage formée par quatre bandes de
\ i e x a a , a a , b b , b b , paffées les unes fur les autres
, ôc recourbées par les extrémités inférieures
c c, c c , ôcc. ce qui forme deux crochets fur chaque
côté du chauffoir. On établit au deffous de ces crochets
quatre planches minces,deftinées à concentrer
dans la caiffe la chaleur des charbons allumés.
Lorfqu’on veut chauffer les cartons, on commence
par les placer dans les deux crochets des çôtés, Ig.
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