
de mettre en levain à un degré beaucoup plus chaud-
dans l’hiver que dans l’été. Il faut dans cette dernière
faifon que la bière foit prefque froide ; il n y
a qu un long ufage 6c une grânde expérience qui
puiffent inftruire la-deffus, ou les obfervations au
thermomètre ; c’eft affurément ici une des occafions
où cet infiniment peut être très-utile.
Lorfque la bière eft prête à être mife en levain, on
en fait couler dans la cuve qu’on appelle cuve guilloire,
par le moyen des robinets qui font aux bacs ; on
en fait couler, dis-je , une certaine quantité| dans
laquelle on jette de la levure de bière , plus ou
moins fuivant la quantité de bière qu’on a à mettre
en levain. La levure eft la caufe 6c l’effet de la fermentation
; de forte que celle que l’on met dans la
bière y occafionnant la fermentation, engendre de
nouvelle levure, &. ainfi fucceffivement : il faut environ
la produâion de levure de quatre à cinq pièces,
pour en mettre en levain la quantité de trente
pièces.
La levure étant mife dans la quantité de bière que
l’on a fait paffer des bacs à décharger dans la cuve
guilloire, on a ce qu’on appelle le pied de levain ; on
ferme les robinets, 6c on laide le pied de levain
environ une heure ou deux dans cet état; pendant
ce temps le principe de la fermentation s’établit. On
connoît que ce principe eft fuffifamment établi, aux
crevaffes qui fe font à la moufle, en différens endroits
de la furface de la cuve ; ces crevaffes représentent
affez au naturel une patte d’oie ; pour lors
il faut de nouveau faire couler de la, bière des bacs
à décharger dans la cuve guilloire , afin d?entretenir
la fermentation , obfervant néanmoins de ne pas
lâcher les robinets d’abord à plein canal; car on
s’expoferoit à fatiguer, & peut-être à noyer le pied
de levain : au lieu que fi l’on modère les avois pendant
quelque temps , la fermentation fe conferve
vigoureufe, & il vient un moment où l’on peut en
sûreté ouvrir les robinets entièrement.'
Quand toute la bière a paffé des bacs à décharger
dans la cuve guilloire , la fermentation continue ; •
elle augmente jufqu’à un certain point de force .ou
de maturitéi auquel on peut entonner'la bière. On
connoît que le levain eft mûr, lorfque les rochers de
moufle que la fermentation a engendrés, commencent
à s’affaiffer & à fondre fur eux-mêmes , & ne
fe reproduifent plus, & qu’on ne remarque plus'à
la fiiperficie du levain qu’une groffe écume extrêmement
dilatée ; pour lors il faut frapper fur cette
écume avec une longue perche, 6c la faire rentrer
dans la liqueur ; c’eft ce qu’on appelle battre la
guilloire.
Lorfque la guilloire efl battue , on entonne la bière
dans des tonneaux rangés à côté les uns des autres
fur des chantiers , fous lefquels font des baquets ou
moitiés/de tonneaux ; c’eft dans ces vaiffeaux que
tombe la levure au fortir des tonneaux. L’endroit
de la brajjerie où font rangés les tonneaux, s’appelle
Yentonnerie. Voyez planche V , une entonnerie.
■ La levure ne fe forme pas auflitôt que la pièce
eft entonnée, quoique la fermentation , félon toute
apparence, n’ait pas ceff£; il ne fort d’abord que de
la moufle qui fe fond promptement en bière : ce
n eft guère qu’au bout de trois ou quatre heures
que la levure commence à fe former. On diftingue
facilement le changement ; alors la moufle ne fort
plus fi promptement : elle devient plus graffe &
plus epaiffe ; mais bientôt après la fermentation fe
ralentit : pour lors on pure le baquet , c’eft-à-dire,
quon en retire la bière provenue de la fonte des
•moufles, & on en remplit les tonneaux. Mais comme
le produit des baquets ne fuffit pas pour le rem-
pliliage, on a recours à de la bière du même baflin
mife en réferve pour cet effet.
Les tonneaux ainfi remplis, recommencent à fermenter
avec plus de vivacité que jamais , 6c jettent
pour lors dé la vraie levure. On a foin de foutenir
*& de cultiver la fermentation , en rempliffant de
temps en temps les tonneaux ; c’eft-à-dire, que deux
heures après qu’on a fait le premier rempliffage ,
on en fait un fécond , mais fans purer les baquets. Les
baquets ne fe purent qu’une fois; après deux autres
heures, on fait un troifiëme rempliffage ; au bout
d une heure, le quatrième ; 6c à peu près à même
diftance de temps , le cinquième & dernier.
^ Tous ces différens rempliffages faits , on laiffe la
bière tranquille fur les chantiers ; & ce n’eft que
vingt-quatre heures après le dernier'rempliffage
qu elle peut être bondonnée. Si on fe hâtoit de bon-
donner , la fermentation n’étant pas achevée , on
expoferoit les pièces à s’entr’ouvrir en quelque endroit.
La^ levure vient donc de la bière nouvellement
bradée qui fe gonfle en fermentant, 6c d’où il fort
une ecume par le bondon de la futaille ou pièce
dans laquelle on l’a entonnée.
On met fous chaque pièce de bière une petite
cuve ou baquet pour recevoir cette écume , qui
s épure 6c qui dépofe ; ce qu’on nomme levure.-
O n f é p a r e c e t t e l e v u r e , e n v e r f a n t p a r in c l i n a i f o n
l e l i q u i d e q u i f u m a g e , & q u i e f t u n e b i è r e b e a u c o u p
p l u s a m è r e q u e c e l l e r e f t é e d a n s l a p i è c e .
C e t t e é c u m e d e l a b i è r e f o u r n i t a u f î i d e u x f o r t e s
d e le v a in ^ : 1 u n e f t l a l e v u r e q u i f e r t a u x b o u l a n g e r s 6c a u x p a t i f l î e r s ; 1 a u t r e e f t l a l i q u e u r a m è r e q u i
f e r t d e ^ le v a in a u x b r a f f e u r s p o u r f a i r e t r a v a i l l e r
l e u r b i è r e .
La bière pourroit fermenter d’elle-même fans y
ajouter de levure , comme la pâte pourroit lever
d elle-meme fans y mettre de levain , & comme le
moût travaille fans qu’on y ajoute de ferment ; mais
la bière ne fermenteroit pas bien , ou elle ne le fero.it
pas affez promptement d’elle-même ; & la bière &
la pâte ne feroient pas affez fpiritueufes ; elles de-
viendroient aigres , fi on les laiffoit fans les exciter
par un ferment.
La levure sèche fe prépare en mettant la levure
liquide dans des facs à égoutter ; enfuite on la met
a- la prefle ; puis on la partage en petites mriffës
qu on moule. Cette levure eft molle, mais sèchel ’
- La levure de bière eft très-utile aux boulangers
& pâtifliers auxquels on la vend. Cependant on a
voulu prétendre que la lev u r e étoit mal-faine pour
le pain $ & cette fauffe idée a été renouvellée depuis
peu par un auteur à paradoxes ; mais l’expérience ,
le fentiment des bons phyficiens, 6c celui des médecins
éclairés ont levé toute difficulté là-deffus , &
établiffent la propofition contraire ; c’eft-à-dire, que
la levure de bière eft très-faine pour l’ufage auquel
on l’emploie.
La bière étant faite, & en état d’être mife en
cave, fi l’on eft, preffé d’en faire ufage , 6c que l’on
n’ait pas le temps de la laiffer éclaircir naturellement,
ce qui ne s’exécute pas trop promptement,
on y remédie en la collant.
On colle la bière, ainfi que le v in , avec de la
colle de .poiffon qui fe prépare de la manière fui—
vante : prenez la colle de poiffon, battez-la avec”
un marteau , afin de pouvoir la déchiqueter plus
facilement ; mettez-la en pièces les plus petites qu’il
eft poflîble; faites-la tremper dans de l’eau pendant
vingt-quatre ou trente heures; renouveliez l’eau ,
fur-tout dans les temps chauds, pour prévenir la corruption
: après que la colle aura trempé , retirez-la
de l’eau ; maniez-la fortement jufqu’à ce qu’elle foit
devenue comme de la pâte ; délayez-la enfuite dans
de l’eau claire, & faites-en comme de l’orgeat très-
épais ; après cette première préparation , elle ne
tarde pas à prendre une autre forme, 6c à devenir,
de lait qu’elle fembloit être , une gelée de viande
très-forte , en verfant deffus. une quantité fuffifante
de vin blanc, ou de bière t rè s -v ie ille& remuant
bien le tout enfemble ; plus on remue , plus on
s’apperçoit que la gelée prend de confiftance ; quand
elle en a- fuffifamment , on la laiffe dans cet état
jufqu’à ce qu’on veuille s’en fervir.
Quand on veut éclaircir la bière par le moyen
de la colle , on prend de cette gelée dont on vient
de parler; on la délaie dans de l’eau; on paffe ce
mélange à travers un linge : il ne faut pas qu’il y
ait trop d’eau ; fi la colle étoit trop délayée , elle
ne produiroit plus d’effet. On prend environ une
pinte de colle délayée 6c paffée pour un demi-muich;
quand on a verfé la colle dans la pièce, on y introduit
un bâton de la longueur du bras ; on agite
fortement la liqueur pendant environ, une ou deux
min.; tes, 6c on laiffe le tonneau environ douze heures
fan§ le reboucher ; cela fait avec foin, au bout de
vingt-quatre heures-on aura de la bière très-claire.
Nous rapporterons ici de fuite l’explication des
cinq planches de la brafferie, pour rappeler ce que
nous avons dit des procédés de cet art, & pour ne
rien laiffer échapper de ce qui le concerne*
1.Planche I. Fig. 1 , la touràille*-
A,B , C , D, la trémie , les côtières & autres
parties avec le fourneau en deffous*
Fig. 2 » intérieur du fourneau.
Fig. 3, coupe du fourneau,
ï G H K L y figures 1,2, y, partie inférieure du
fourneau..
KLM'., bouche.
N , O , P , Q , enclumes.
P Q R S , partie du milieu du fourneau.
RS T V , communication de la partie du milieu;
avec la partie fupérieure*
T V X Y , partie fupérieure.
P , q, r , s , fig. / , la truite*
Z , Z , fig. 1 6c 2, ventoufes.
4 , châifis de la truite.
5,, intérieur de.la truite.
6 , bouche du fourneau avec les touraillons AA*
Planche II. Fig. 1, vue perfpeélive des chaudières
montées fur leurs fourneaux.
Fig. 2 , conftruâion Sc bâtiffe des trois chaudière#
avec leurs fourneaux.
A A A A , maffif de pierre.
B B B , fond du fourneau.'
C C C , embouchure.
Fig. 3 , chaudron à cabaret*
Fig. 4 , jet.
Fig. ƒ , tinet.
s Fig. 6 , vague.
Fig. 7 , faürquet.
Fig. 8 , fourche.
Fig. 9 , coupe d’une chaudière & d’un fourneau
Fig. 10 , entonnoir.
Fig. n , chaudron à remplir*
Planche I I I , manège 6c moulins*
On voit dans cette planche un rndulin à double
tournure.
A A A , aiffelîers*
B , arbre debout*
C 5 grand rouet.
D , grande lanterne*
E , arbre de couche.
F , petit rouet.
G , petite lanterne du petit rowet.
H , mêule courante fur là meule giflante*
K,. trémie.
I , fac.
La partie inférieure de la planche s’appelle le
manège1
M , étoile.
N , canal de la chaîne à chapelet.
O , réfervoir.
On ne pouffe pas le détail de cette planché plus
loin j parce que le mouvement s’exécute à la partie
fupérieure de la planche comme à l’inférieure ; que
le mecanifme eft le même , 6c que les-chofes font
exprimées par les mêmes noms 6c défignées par les
mêmes, lettres*
Planche-IV, le germorr avec la trappe & la roue
d’où l’on monte le grain à la touràille
La partie inférieure de la planche montre le ger-
m©ir*
La partie fupérieure -, le grenier où- le grain paffe
paH^trappe de la partie inférieure ou germôir. L é
fond de ce lieu eft la touraiHe*