
pas; car on nè l’ôte jamais, & tous les fours en ont.
Les bouches font renfermées dans un hangar oh fe
tiennent les ouvriers qui veillent à la cuiffon de la
brique : tout le refte d’ailleurs eft tout-à-fait fem-
blable dans les uns & dans les autres : hormis qu’on
ne carrèle jamais & que l’on ne pratique point de
lumières ; mais on arrange d’abord les briques fur
l’arrafement des banquettes.
Les fours de France ont auffi quelquefois un plus
grand nombre d’ouvertures pour les charger, que
ceux-ci. On commence à charger les premiers par
les ouvertures qui font au niveau des banquettes ;
on enfourne enfuite par la porte, & on finit de les
emplir, quand ils font découverts, par le deffus. Mais
s’ils font voûtés, on ménage tout au haut une fenêtre
par oh on achève de les remplir. Ceux de Suiffe
n’ont qu’une feule ouverture pour les charger ; elle
.eft au milieu du côté du four qui eft oppofé aux
bouches : elle commence à quatre ou cinq pieds
au deffus de l’arrafement des banquettes , & s’étend
jufqu’au deffus du four. Lorfque le four eft plein ,
on a foin de fermer, comme nous l’avons déja.dit,
toutes ces ouvertures.
Mais avant que de quitter ce fujet, nous remarquerons
que l’on ne doit employer que les briques les
plus rafraîchies, c’eft-à-dire , qui peuvent réfifter
le plus long-temps à l’aélion du feu fans fe fondre ,
pour faire les arches & tout ce qui eft expofé à la
grande aâion du feu : car il eft aifé à comprendre
que fi quelques-unes de ces arcades venoient à manquer
pendant la cuiffon, cela cauferoit immanquablement
beaucoup de défordre dans l’arrangement
des briques, au-grand préjudice de l’ouvrier.
En plufieurs endroits & pour éviter les frais , on
conftruit je s fourneaux avec des briques féchées au
foleil, & l’on s’en trouve très-bien. La voûte même
peut être faite de ces briques ; elle ne laiffe pas
d’être auffi bonne & auffi durable que fi les briques
avoient été cuites. M, Schreber ( favant Suédois )
en appelle à fa propre expérience & au témoignage
d’un économe très-entendu, qui lui a donné les détails
fuivans fur la contruclion d’un fourneau d’une
efpèce fingulière.
On peut fe procurer a bon marché & fans briques,
un four à cuire la tuile très-bon & folide. On le
conftruit de terre graffe mêlée avec de la paille bien
hachée, en égale portion. On pétrit le tout enfemble
comme pour faire des murs de torchis ; mais il ne
faut pas remployer fi mouillée. On la laiffe pendant
une demi-journée au moins au grand air & au foleil,
avant de l’employer. On la lève alors en gros morceaux
, tant qu’un homme en peut manier à-la-fois,
& on paffe ces maffes en croix l’une fur l’autre,
obfervant de bien égalifer les parois de part &
d’autre, Ces parois doivent avoir, pour la première
/couche, cinq quarts d’aune de haut, fur deux aunes
de large dans les fondemens. On laiffe repofer cette
couche pendant S à 10 jours,. après quoi on fait de
la même manière une fécondé couche d’une aune
£u cinq quarts d’ayne en hauteur. On glçve çet
ouvrage en talut dans la partie extérieure, enforté
que cette fécondé couche n’a plus qu’une aune &
demie d’épaiffeur. Ori rend l’intérieur bien égal &
perpendiculaire, & on le laiffe fécher pendant huit
jours. On continue de la même façon une troifième
& quatrième couche, julqu’à ce que le fourneau
ait atteint la hauteur ordinaire-de cinq à fix aunes ;
les parois auront encore par le haut deux à trois
quarts d’aune d’épaiffeur. Ce fourneau doit avoir
un toit comme tous les autres. Il eft aifé de faire ce
toit mobile, enforte qu’au moyen des rouleaux fur
lefquels il feroit pofé , on pourroit le mettre en
place & le reculer quand il feroit inutile. Far ce
moyen on eft difpofé de l’élever autant, & il eft à
l’abri de tout danger de feu, parce qu’on ne le remet
fur le fourneau qu’après que le feu eft éteint. Une
expérience de plufieurs années m’a convaincu que
cette forte de fourneau eft plus durable & meilleure
que les fourneaux bâtis de briques & de pierres.
Les briques fe confument bientôt, & le fourneau a
befoin de fréquentes réparations ; ce qui n’arrive
pas félon cette méthode. Les bouches & les arches
dans lefquelîes on fait le feu', n’ont pas befoin d’être
voûtées en briques. On applique fur un cintre en
demi-cercle, le même mélange de terre graffe &
de paille, & dès que le fourneau eft bien fec, on
en tire le cintre : la voûte tient auffi bien que fi on y,
avoit employé la meilleure architeâure, &*elle n’a
befoin d’aucune réparation. »
Voilà ce qui regarde les différentes efpèces de
four oh l’on brûle du bois ; nous allons voir main-!
tenant comment on y arrange la brique pour la
cuire , en confidérant d’abord ce qui fe pratique
dans les grands.
Comment on arrange les briques pour les cuire.
Le premier rang s’arrange de manière que les'
briques croifent les banquettes formées par les arcades
; & qu’elles dépaffent l’épaiffeur de ces arcades
ou arches, qui eft plus petite que la longueur de
la brique.
Le fécond rang au deffus qui répond au vide qui
eft entre les arches, eft pofé îur l’extrémité des briques
dont nous venons de parler, qui forment une
efpèce d’encorbellement ; les briques qui ont huit
pouces de longueur , ont un pouce & demi de
portée par chaque extrémité. Cette pofition s’ob-
îerve dans toute l’étendue du four ; de manière que
les briques laiffent entre elles affez d’efpace pour
que la chaleur puiffe pénétrer dans l’intérieur du
four.
Les briques du troifième rang croifent celles du
fécond : celles-là font croifées par celles du quatrième.
Les briques ainfi rangées dans toute l’étendue du
four , fe nomment un champ de brique ; & lorfqu’il
y en a dix , on forme ce qu’on appelle un, lacet,
c’eft-à-dire , qu’on arrange un rang de briques , en-
forte que le jour qu’elles laiffent étitre elles eft d’environ
trois pouces ; ce qui fe pratique toujours de
dix en djx champs. Dans tou; le refte de la. fournée ,
Jl nfy a que deux ou trois lignes de vide entre tes
jbriques. f ,
Cinquante champs de brique font une tournée
complète ; la maffe de briques excède les murs du
four de douze champs. On obferve neanmoins de
revêtir le pourtour de cette partie excedente avec
des briques cuites, pofées en pannereffe ; ainfi ce
revêtement a quatre pouces d’epaiffeur, non compris
un crépi de terre graffe dont on le recouvre.
Le deffus du tas eft couvert avec des tuiles pofées
de plat, & qui fé recouvrent par le bout d’environ
un pouce : outre cela, quand le feu fe porte trop
yivement d’un côté , on a foin d y répandre de la
jerre. Ces grands fours , tels que celui que nous
venons de décrire , fervent a cuire la brique & la
tuile; mais la plus grande partie de ceux oh l’on
fait ordinairement de la tuile font plus petits, &
n’ont que deux bouches. .
Dans les autres fours oh l’on cuit de la tuile avec
la brique, on arrange d’abord un champ de briques
fur le gril. Les briques des autres champs font rangées
tout près les unes des autres : c’eft par-deffus j
ces champs de briques qu’on arrange les-tuiles. ^ •
L’arrangement des briques dans les. fours des tuileries
de Grandfôn, eft à peu près le même que celui
que nous venons de voir. On arrange d abord
le premier champ fur l’arrafement des banquettes.
On met enfuite le fécond champ que 1 on rang^
fixaélement comme' le premier , avec cette différence
que les briques de ce champ croifent celles'
du premier : celles du troifième champ fe rangent
de même & croifent celles du, fécond , & ainfi de
fuite ; en obfervant néanmoins de faire enforte que
les ouvertures que ces briques laiffent entre elles ,
répondent direàetnent les unes aux autres dans tous
les champs. Le nombre de champs de briques que
les tuiliers mettent dans leurs fours eft affez arbitraire
il dépend du plus ou du moins de briques
qu’ils doivent cuire ; car s’ils ont beaucoup de tuiles
à cuire & peu de briques , ils ne mettent qu’un
champ. On fait dans ces tuileries une efpèce de
jbriques pour les canaux de cheminees ; elles font
plus étroites & plus épaiffes que celles que l’on fait
communément : elles ont neuf pouces fix lignes de
roi de longueur , trois pouces deux lignes de large
& deux pouces d’épaiffeur ; celles-ci fe fendroient
toutes fi on les rangeoit au fond du four , la ou la
chaleur eft la plus grande : c’eft pourquoi on les
met au-deffus quand on en a à cuire , en les rangeant
une à une , & les tuiles font au milieu.
De la conduite du feu.
Il n’eft pas poffible de donner des réglés uniformes
pour la conduite du feu ; cela dépend de la
qualité du bois que l’on emploie, de la grandeur
du fourneau , &. de la qualité de la terre quon y
doit cuire.
Il eft cependant une règle générale, favoir, qn on
doit commencer par faire un très-petit feu, c eft ce
que les tuiliers appellent enfumer ; les briques qui
jirts & Métiers* Tome J. Partie /.
pafôiffoient fechês fendent alors beaücbtip d humidité.
Au four du Havre , on ne fait à chaque bouche
qu’un feu compofé de trois groffes bûches ; on
l’entretient ainfi pendant vingt-quatre heures, apres
cela on y ajoute une bûche. La prudence exige que
l’on continue long-temps ce feu pendant trente-fix
à quarante heures , & même plus long-temps fi les
terres font fortes , pour éviter que la brique ou la
tuile ne fende & ne fe déforme ; on augmente petit
à petit ce feu , enfuite on met le grand feu. Pour
cet effet, on range un tas de bûches tout a-fi.it ait
fond des bouches ; on tire en avant la braife , oC
on met de nouveau bois par-tout , ce qui fait un
grand feu qu’on continue pendant vingt-quatre heu-*,
res : dans cet efpace de temps , on confomme juw
qu’à dix-huit,, cor des de bois. .
La grande règle pour conduire le feu , eft de
l’entretenir égal par-tout. Il feroit tout naturel de
penfer que les points oh le feu va plus vite , font
ceux auxquels il faudroit fournir le moins de matière
combuftible, mais c’eft précifément le contraire.
Le cuifeur doit jeter du charbon aux e n droits
oh il voit le feu plus près 4e gagner la fur-
face ; mais il faut obferver qu’on ne doit agir ainft
que dans le commencement de rembjafement : c eft
peut-être .parce que le feu eft plus tôt pris dans les;
endroits oh il y a moins de matières combuftibles*
‘Comme les vents retardent toujours la marche
du feu ou la rendent inégale dans l’étendue du fourneau,
il faut obvier aux inconvéniens par des abri-
vents, & éviter par-là les fouffiures.
Quand.on apperçoit que les gueules font blanches
, ou , comme difent les ouvriers , qu’elles font
de la couleur de la flamme d’une chandelle, alors
on ralentit le 'feu pour empêcher que la brique ou
la tuile ne fe fonde ; quelque temps après on ranime
le feu jufqu à ce qüe la couleur blanche foit rétablie«,
Si on apperçoit qu’il .dégoutte de la terre fondue
entre les. arches , on les débouche en pouffant^ le
bois vers le fond, & on ferme les portes du côté
. du vent qui anime le feu.
i On cèuvre auffi de terre le deffus du fourneau ,
du côté oh le feu fe montre trop violent ; & 1 on
fait des ouvertures aux côtés oh l’a&ion du feu paroît
trop lente.
On finit par fermer toutes les bouches & toutes
les ouvertures qui fe font faites, tant aux cotes qu au
deffus du fourneau ; l’ouvrage continue à fe cuire 4
fans qu’on jette de nouveau bois ; on ne tire 1 ouvrage
du four que lorfqu’i l eft refroidi. | ^
Il eft effentiel que la brique foit mouillée au for tir
du fourneau; quand elle ne l’a pas ete, elle afpire
l’humidité du mortier , qui alors ne prend point
corps & tombe en pouflière. .
Telle e ft, fuivant M. Gallon, la maniéré de faire
i cuire la' brique du Havre, dans les grands fours ;
d’autres briquetiers conduifent leur feu bien différemment,
& avec beaucoup plus de ménagement.
I Nous croyons qu’il ne fera pas inutile de rapporter
1 ici ce que M. Duhamel dit à ce fujet ; car il p e s