
Mufchembroeck , célèbre phyficien , nous en-
feigne la manière de faire un ma flic propre â coller
le verre: ce procédé confifte abattre pendant longtemps
du fromage dans de l’eau , ou à mettre du
fromage dans de l’eau bouillante & à l’agiter en
le preffant quelques momens ; on le verfe en fuite
fur une pierre lorfqu’il eft réduit en efpècë de bouillie
& on le mêle avec une quantité fuffifante de chaux
vive. Il en réfulte, dit-il, un excellent maftic pour
coller le verre ; il ne vaudroit rien pour coller i’a-
gathe , dont le véritable gluten eft le vernis de
la Chine.
On dit auffi que pour recoller le verre , on peut
employer utilement la liqueur glutineufe des limaçons
: pour l’obtenir , on prend des limaçons qu’on
expofe au foleil; om. reçoit dans un vaiffieau la liqueur
qui en diftilîè ; on prend du fuc de tithy.-r
male qu’on mêle avec ce fuc de limaçon ; cm recolle
avec cette fubftance les verres, on les expofe
çnfuite au foleil poty fécher.
On fe fert encore avec füccès pour cet effet, de
la gomme arabique délayée dans de l’efprit de vin
C e maftic eft propre à recoller les verres & les
criftaux ; il eft bon de faire chauffer les pièces.
Pour faire un maflic propre à recoller les porcelaines,
on prend de la chaux éteinte à l’air, que l’on mêle
avec du blanc d’oeuf ou du fromage mou.; on en
fait une efpèce de colle, dont on enduit les bords
brifés du vafe de porçelamë que l’on veut réunir.
Les morceaux adhèrent fi bien 3 qu’on peut fe fervir
d’un vafe de porcelaine ainfi raccommodé.
On prétend que fi l’on frotte avec le fuc d’une
tête d’ail pilée les morceaux d’une porcelaine caffée,
& qu’on la faffe bouillir dans du lait, en affuje.t-
tiffant la pièce , elle fera parfaitement recollée,
fans laiffer le moindre trait de fraéture.
Le majliç pour la faïençç fe fait de la manière
fuivante.
11 faut faire calciner des huîtres, les réduire en
poudre impalpable, faire avec cette poudre & du
blanc d’oeuf une efpèce de polie, en frotter les pièces
brifées, les affujejttir en cet état, lorfqu’elles font
fèches, elles font alors parfaitement bien recollées.
Le mpriïer ou le ciment employé dans les bâtimens,
eft une compofition de chaux, de fable mêlés avec
de l’eau, qui fert à lier les pierres.
Les anciens avaient une efpèce de mortier fi dur
& fi liant, que, malgré le temps qu’il y a que ,ccs
bâtimens durent, il. eft impoflîbie de féparer les
pierres du mortier de certains d’entre eux; il y a
cependant des perfonnes qui attribuent cette force
exceffive au temps qui s’eft écoulé depuis qu’ils font
conftruits, & à l’influence de quelques propriétés
de l’air, qui durcit en effet certains corps d’une manière
furprename.
On dit que les anciens fe fervoient pour faire leur
chaux, des pierres les plus dures, & même de fragment
de marbre.
Le ciment n’eft autre chofe que de la brique
ou-de la tuile conpaflee ; mais cette dernière eft plus
dure & préférable : à fon défaut, on fe fert de la pre-
mière, qui étant moins cuite, plus tendre & plus
terreufe, eft beaucoup moins capable de réfifter aux
fardeaux.
_ Le ciment ayant retenu après fa chiffon, la cauf-
ticite des fels de laglaife dont il tire fon origine, eft
bien plus propreà faire de bon mortier que le fable. Sa
dureté le rend auffi capable de réfifter aux plus grands
fardeaux, ayant reçu différentes formes par fa pul-
vérifation. La multiplicité de fes angles , fait qu’il
peut mieux s’encaftrer dans les inégalités des pierres
qu’il doit lier , étant joint avec là chaux dont il
foutient l’aftion par fes. fels., qui l’ayant environné
lui communique les fiens.
On voit aux environs de Cologne & près du Bas-
Rhin en Allemagne , une efpèce de poudre grife,
.que l’on nomme terraffe de Hollande, faite d’une terre
qui fe cuit comme le plâtre, que l’on écrafe & que
l’on réduit en poudre avec des meules de moulin.
Il çft allez rare qu’elle foit pure & point falfi-
fice ; mais quand on en peut.avoir , elle eft excellente
pour les ouvrages qui font dans l’eau , réfifte
également à l’humidité, à la féchereffe & à toutes les
rigueurs des différentes faifons. Elle unit fi fortement
les pièces enfemble, qu’on l’emploie en France &
aux Pays-bas, pout la conftruftipn des édifices aquatiques.
On fe fert, dans îe même pays, au lieu de terraffe
de Hollande, d’une poudre nommée cendrée de
Tournay , que l’on trouvé aux environs de cette
ville. Cette poudre n’eft autre çho.fe qu’un compofé
de petites parcelles d’une pierre bleue & très-dure,
qui tombe io.rfqu’on la fait cuire , & qyi fait d’excellente
chaux. Ces petites parcelles, en tombant fous
la grille du fourneau, fe mêlent avec la cendre du
charbon de terre ; & ce mélange compofe la cendrée
de Teurnay, que les marchands, .débitent telle qu’elle
fort du fourneau,.
_ On fait affez fouvent ufage d’une poudre artificielle
, que l’on nomme ciment de fontàinier ou ciment
perpétuel, compofé de pots & de vafes de grès caftes
.& pilés, de morceaux .de mâche-fer, provenant du
charbon de terre brûlé dans les forges , auffi réduit
en poudre, & mêlé d’une pareille quantité de ciment,
de pierre de meule de moulin & de chaux , dont on
compofe un mortier excellent, qui réfifte parfaite-
-ment dans l’eau.
On amaffe encore quelquefois des cailloux ou galets
que l’on trouve dans les campagnes ou fur le bord des
rivières ,.que l’on fait rougir, & que l’on réduit enfufte
en poudre ; :ce qui fait une efpèce de terraffe de Hollande,
très-bonnç pour la cpnftruélipn.
# mortier ou le ciment des bâtimens eft, fuivant
Vitruve, l’union de la.chaux avec le fable , le ciment
ou autres poudres ; ç’eft de cet alliage que dépend
toute la bonté de la eqnftru&ion. Il ne fuffit pas de
faire de bonne chaux , de la bien éteindre, & de la
meler avec de bon fable ; it faut encore proportionner
la quantité de l’un 8c de l’autre à leurs qualités ,
les bien broyer enfemble, lorfqu’on eft fur le point
Je les employer ; & , s’il fe peut, n’y point mettre 4e
nouvelle eau, parce qu’elle furcharge & amortit les
efprits de la chaux. Perrault, dans les commentaires
fur Vitruve , croit que plus lachaux a été corroyée
avec le rabot, plus elle devient dure.
La principale qualité du mortier étant de lier les
pierres i«s unes avec les autres, & de fe durcir quelque
temps après, pour ne plus faire qu’un corps folide,
cette propriété venant plutôt de la chaux que des
autres matériaux , il fera bon de favoir pourquoi la
p erre, qui dans le four a perdu fa dureté , la reprend
étant mêlée avec l’eau & le fable.
Le fentiment des chymiftes étant que la dureté
des corps vient des fels qui y font répandus, & qui
fervent a lier leurs parties ; de forte que, félon eux ,
la deftru&ion des corps les plus durs qui fe fait à la
longueur des temps, vient de la perte continuelle de
leurs fels qui s’évaporent par la tranfpiration ; & que
s’il arrive que l’on rende a un corps les fels qui! a
perdus , il reprend fon ancienne durete par la jonction
de fes parties.
. Lorfque le feu échauffe & brûle la pierre , il emporte
avec lui la plus grande partie de fes fels volatils
& fulfurcs qui lioient toutes fes parties ; ce qui la
rend plus*poreufe & plus légère. Cette chaux cuite
& bien éteinte, étant mêlée avec le fable, il fe fait
dans ce mélange une fermentation caufée par les parties
falines & fulfurées qui reftent encore dans la
chaux, & qui, faifant fortù du fable une grande
quantité des fels volatils, fe mêlent avec la chaux ,
& en rempliffent les pores; & c’eft la plus ou moins
grande quantité dé fels qui fe rencontrent dans de
certains fables, qui fait la différence de leurs qualités.
De-là vient que plus la chaux & le fable font broyés
enfemble, plus le mortier s’endurcit quand il eft
employé, parce que les frottemens réitérés font for-
tir du fable une plus grande quantité de fels.-C ’eft
pour cela que le mortier employé auffitot, n eft pas
fi bon qu’au bout de quelques jours, parce qu il faut
donner le temps aux fels volatils du fable de paffer
dans la chaux , afin de faire une union indiffoluble.
L’expérience fait encore voir que le mortier qui a
demeuré long-temps fans être employé , & par con-
féquent dont les fels fe font évaporés, fe deffeche ,
ne fait plus bonne liaifon, & n’eft plus qu une matière
sèche & fans onêluofité ; ce qui n’arrive pas étant
employé à propos, faifant fortir de la pierre d’autres
fels, qui paffent dans les pores de la chaux, lorf-
qu’elle-même s’infinne dans ceux de la pierre ; car,
quoiqu’il femble qu’il n’y ait plus de fermentation
dans le mortier lorfqu’on l’emploie, elle ne laiffe pas
cependant que de fubfifter encore fort long-temps
après fon emploi, par l'expérience que 1 on a den
voir qui acquièrent de plus en’plus la durete par les
fels volatils qui paffent de la pierre dans le mortier,
& par la tranfpiration que fa chaleur y entretient ;
ce que l’on remarque tous les jours dans la démolition
des anciens édifices , où l’on a quelquefois moins
ijg pçine à rompre les pierres qu’à les aéfunir , fur-
Arts & Métiers, Tome /, Partie IL
tout loffque ce font des pierres fpo.ngieufes, dans leu*
quelles le mortier s’eft mieux infinué.
Plufietirs penfent que la chaux a la vertu de brûler
certa'ns'corps, puifqu’elle les détruit. Il faut fe garder
de croire que ce foit par fa chaleur : cela vient
plutôt de l’évaporation des fels qui lioient leurs parties
enfemble , occafionnée par la chaux , & qui font
paffés en elle , & qui n’étant plus entretenus fe dé-
truifetlt, & caufent auffi une deftruêlion dans ces
corps., -,, ,
La dofe du fable avec la chaux eft ordinairement
de moitié; mais lorfque le mortier eft bon, on ƒ
peut mettre trois cinquièmes de fable fur deux de
chaux, 6c quelquefois deux tiers de fable fur un de
chaux, félon qu’elle foifonne plus ou moins ; car
lorfqu’elle eft bien grade & faite de bons cailloux,
on y peut mettre jufqu’à trois quarts de fable fur uni
de chaux ; mais cela elt extraordinaire, car il eft fort
rare de trouver de la chaux qui puiffe porter tant de
fable. Vitruve prétend que le meilleur mord r elt
celui où il y a trois parties de fable de cave, ou deux
de fable de rivière ou de mer , contre une de chaux,’
qui, ajoute-t-il, fera encore meilleur, fi à ce dernier
on ajoute une partie de tuileau pilé, qui n eft autre
chofe que du ciment. • > f
Le mortier fait de chaux 8c de ciment fe fait de te
même manière que le dernier ; les dofes font les memes
, plus ou moins , félon que la chaux foifonne. 0*1
fait quelquefois auffi un mortier compofe de ciment
& de fable, à l’ ufage des bâtimens de quelque importance.
' C c • {Ci
Le mortier fait avec de la pozzolane , le tait aulii
à peu près comme celui de fable. Il eft, comme nous
l’avons dit ci-devant, excellent pour les édifices aqua-.
T e 5'mortier fait de chaux & de terraffe de Hol-
lande, fe fait en choififfant d’abord de la meilleure
chaux non éteinte , & autant que Ion peut en employer
pendant une femaine ; on en étend^ un pied
d’epaiffeur dans une efpèce de baffin, que lonarro.e
pour l’éteindre ; enfuite on le couvre d’un autre lit
de terraffe de Hollande , auffi d’environ un pied
’d’épaiffeur : cette préparation faite, on la laiffe repo-
fer pendant deux ou trois jours , afin de donner a la
chaux le temps de s’éteindre, après quoi on la brouille
8c on la mêle bien enfemble avec des houes & des
rabots, & on en fait un tas qu on laiffe repoter pendant
deux jours , après quoi on en remue de nouveau
ce que l’on veut en employer dans 1 efpace d un
jour ou deux, la mouillant de temps en temps jufqu a
ce qu’on s’apperçoive que le mortier ne perd point de
En plufieurs provinces le mortier ordinaire fe prépare
ainfi, cette manière ne pouvant que contribue^
beaucoup à fa bonté. _ . ,
Comme l’expérience fait voir que Va pierre dure
fait toujours de bonne chaux , qu un mortier de
cette chaux, mêlé avèc de la poudre provenant du
charbon ou mâche fer que l’on tire des forges, eic
uoe excellente Uatfon pour les ouvrages qui font daaa
f j g g !