bois trop vert. Quatre mois d’été fuffifent pour
délié cher le même bois. Il en faut cinq pour defle-
^cher les bûches refendues.
On fefert donc pour faire le charbon, de jeune bois
depuis un £ pouce jufqu’àun pouce, un pouce | , deux
pouces, deux pouces & demi, &c. de diamètre ,
fur deux pieds, deux pieds quatre à fix pouces de
"longueur. Les bois blançs ne donnent point de bon
charbon. Les chênes , les hêtres qu’on appelle f o u t
e a u x , les charmes font propres à cet ufage. Il feu-
droit rejetter le bouleau & le peuplier commun : ce
qui ne fe fait pas fouvent. Il y a cependant quelques
honnêtes charbonniers qui féparent le bouleau,comme
un mauvais bois, & ne s’en fervent que pour les
planchers du fourneau, regardant le bois employé
aux planchers, comme un bois perdu qui ne donne
que des fumerons.
Quand on débite le bois, il faut avoir l’attention
de le couper le plus égal de groffeur & de longueur,
& le plus droit qu’il eft pomble ; il fera très-bien de
féparer le gros du menu, & le droit du tortu : ces
précautions ne feront pas inutiles, foit dans-la conf-
truélion du fourneau, foit dans la conduite du feu.
Si le bois eft pêle-mêle, le charbonnier le prenant
& l’employant comme il le trouve, chargera trop ou
trop peu un côté de fon fourneau, ou de gros bois,
ou de petit, ou de bois tortu ; d’où il arrivera qu’un
endroit commencera à peine à s’allumer, qu’un autre
Tera prefque confumé : inconvénient qui fera toujours
accompagné de quelque perte. Le plus petit
bois peut être employé ; c’eft une économie qui n’eft
pas à négliger, comme on verra lorfque nous parlerons
de la conftruôion du fourneau.
- Il feut que les tas de bois ne foient ni trop près
des fourneaux, de peur que dans les grands vents
le feu n’y foit porté ; ni trop loin, ce qui fetiguèroit
les charbonniers à l’aller chercher. C’eft aufti pour
éviter un incendie, qu’il faut bien-nettoyer les environs
des fourneaux , de tout branchage & autres
menus bois.
Lorfque le bois eft prêt, il feut travailler à faire la
charbonnière. On entend par une charbonnière, l’endroit
où l’on doit conftruire des fourneaux à charbon.
Les charbonniers appellent aufti le lieu où ils
affeoient leurs fourneaux, -place à charbon, fojje à charbon
ou faulde ; & ils nomment fourneau la pile de
bois quand elle eft arrangée; & quand elle n’eft que
commencée fans être enduite, & comme on dit habillée,
c’eft une allumelle. Cuire le.charbon, c’eft
brûler le bois où il doit l’être pour en faire du charbon.
Lors donc qu’on voudra faire du charbon, on
choifira un lieu égal de fa nature , on achèvera en-
fuite de l’applanir avec la pioche ou le hoyau & le
rateau : l’efpace circulaire qu’on aura ainfi applani,
s appelle ïaire du fourneau. L’aire du fourneau peut'
avoir treize, quatorze à quinze pieds de diamètre.
On prendra une forte bûche, on là fendra en croix
par un de fes bouts ; on l’aiguifera par l’autçe ; on
la plantera par le bout aiguifé au c e n t r e de l’aire ; on
ajoutera dans les fentes de l’autre bout, deux bûches
qui formeront quatre, angles droits : ces angles £er-
viront à recevoir & à contenir quatre bûches qui
porteront d’un bout contre l’aire , & qui feront
prifes chacune par l’autr.e bout dans un des angles
dont nous venons de parler ; ces quatre premières
bûches feront un peu inclinées fur celle du milieu.
Cela fait, on prendra du bois blanc allez gros Ôc
allez droit ; on le couchera par terre , enforte que
les bûches forment un plancher dont chacune foit
Gomme le rayon d’un cercle qui auroit le même
centre que l’aire ; on répandra fur ce plancher de
petites bûches, ou plutôt des bâtons de bois de
chemife. Les charbonniers entendent par bois de âhe-
mife, du bois très-menu, qui ne feroit tout au plus
que du charbon de chauffrette. Lorfqu’on aura couvert
la furfeee des grolfes bûches qui forment le
plancher , & rempli les vides qu’elles lailfent entre
elles avec ce petit bois, on aura achevé ce qu’on
appelle un plancher.
Pour contenir les bûches de ce plancher dans
l’ordre félon lequel on les aura rangées, on plantera
des chevilles à leurs extrémités , fur la circonférence
de ce plancher , laiflant un pied plus ou moins de
diftance entre chaque cheville ; car il n’eft pas né-
ceffaire que toutes les bûches foient ainfi arrêtées ;
comme elles font les plus ferrées qu’il eft poflible
les unes contre les autres , il fuffit d’en contenir
quelques-unes, pour que le plancher foit folide &
ne fe dérange pas.
Alors l’ouvrier prendra fa brouette , il ira au
chantier, & chargera fa brouette de bûches. Il pourra
apporter une corde de bois en quatre voyages. Il
fera entrer la brouette dans l’aire , prendra fon bois
à braffée, & le dreffera fur le plancher contre les
bûches droites ou un peu inclinées qui en occupent
déjà le centre , & qu’on a mifes dans1 les angles
droits de la première bûche fichée en terre verticalement
; ces premières bûches étant un peu inclinées ,
celles qu’on appuiera d’un bout fur le plancher, &
qui porteront félon toute la longueur contre les
bûches qu’on avoit déjà dreffées au centre de l’aire ,
feront aufti un peu inclinées. Ce bois ainfi rangé,
aura la forme à peu près d’un cône tronqué , dont
la bafe feroit fur Faire. L’ouvrier continuera de
drelfer du bois jufqu’à ce que ce bois dreffé couvre
à peu près la moitié de la furfeee de fon premier
plancher.
Cela fait, il prendra une bûche du plus gros bois
dont il fe fert dans fon fourneau , il l’aiguifera par
un bout, & la fichera droite au centre de fon cône
de bûches ; s’il n’a pas achevé de couvrir tout fon
premier plancher de bûches dreffées , c’eft qu’il
auroit eu de la peine d’atteindre jufqu’au centre de
ces bûches dreflees, & d’en dreffer d’autres fur elles
autour de la bûche pointue qu’il vient de ficher ,
& qu’il a fixée droite par du petit bois qu’il a mis
autour.
Q u a n d il a u r a f ic h é c e t t e b u c h fe , i l i r a c h e r c h e r cto
bois qu’il dreffera autour de cette bûcheenforte
que ces nouvelles bûches dreffées portent d’un bout
contre la bûche fichée, & de l’autre fur les premières
bûches dreffées fur le premier plancher : ces
bûches nouvelles feront auffi un peu inclinées , &
l’étage qu’elles formeront étant, pour ainfi dire, une
continuation du premier étage, prolongera le cône
tronqué.
Quand on aura formé le fécond étage , qu’on
nomme ïéclijfe ; on achèvera de couvrir le premier
plancher ; ce plancher couvert, on reprendra des
bûches de bois blanc , on arrachera les chevilles qub
contiennent les bûches du premier plancher ; on
formera un fécond plancher avec ces bûches de bois
blanc , concentrique au premier ; on répandra du
bois de chemife fur ce nouveau plancher , on en
contiendra les bûches avec des chevilles $ on ira
chercher du bois , & on' le dreffera fur ce fécond
plancher, contre le bois dreffé^qui couvre entièrement
lé premier.
On opérera fur ce nouveau plancher comme fur
le premier ; je veux dire que quand il fera à moitié
couvert, on continuera de former le fécond étage
de bûches pofées verticalement, ou un peu inclinées
fur le bout des bûches qui couvrent le premier plancher.
Quand on aura étendu ce fécond étage autant
qu’il fe pourra, on formera autour du fécond plancher
un troifième plancher concentrique de bois
blanc, comme on avoit formé les deux premiers:
ce troifième lit fe nomme le grand haut ; on dreffera
fur ce troifième des bûches jufqu’à ce qu’il foit à
moitié couvert, & alors on continuera à former le
fécond étage, comme nous avons dit. Quand ce
fécond étage aura pris toute l’étendue ou tout le
pourtour qu’il convenoit de lui donner, on achèvera
de couvrir le troifième plancher & de former
le fécond étage , &. l’on s’en tiendra à ces trois
planchers ; enforte qu’on aura, i°. trois planchers >
dont le troifième enferme le fécond, le fécond le
premier , & le premier la bûche plantée en terre
verticalement, fendue par fon autre bout en quatre,
& armée par ce bout de deux bûches formant quatre
angles droits, & ces angles contenant chacun une
bûche inclinée ; a0, fur ces planchers un fécond
étage de bûches pareillement inclinées , enforte que
ce fécond étage, moins étendu que le premier ,
continue la figure conique que le premier affe&oit
par l’inclinaifon de fes bûches.
Lorfque le fourneau aura été conduit jufque-là,
On ôtera les chevilles qui contiennent les bûches du
troifième plancher, pour fervir dans la conftru&ion
d’un autre fourneau, & on jettera tout autour de ce
plancher du petit bois de chemife à deux mains ; on
prendra une échelle un peu convexe, on l’appliquera
contre les étages , & on montera au deffus
du fécond ; on donnera quelques coups à la bûche
pointue placée au centre du fécond étage, afin de
1 ébranler ; on la tirera un peu ; on couvrira toute
fe furfeee fupérieure & plane de ce fécond étage de
bois.de.chemife, enforte que cet açias de bois de
chemife rempliffe bien exa&ement tous les interftices-
que les bûches laiffent entre elles, & achèvent de
former le cône.
Alors le fourneau étant fini, quant à l’arrangement
du bois, il feut le bouger, c’eft-à-dire, le couvrir»
de terre & de cendre. Pour cet effet, le charbonnier
amaffera.de l’herbe, & en jonchera l’extrémité fupé-
rieur.e de fon fourneau d’abord , & enfuite la plus
grande partie de fa furfeee. Il tracera an chemin
autour ; il en-bêchera la terre; il ramaffera cette
terre; il la brifera & divifera le plus qu’il pourra s-
cela lui fervira dé frafin , car il n’en a pas encore *
puifque nous fuppofons qu’il établit une charbonnière
nouvelle. Le frafin n’eft autre chofe que de
la pouffière de charbon mêlée avec quelque menue
braife & de la terre. Les charbonniers ramaffent
cette matière autour de leurs fourneaux , & ils s’en
fervent pour leur donner la dernière façon ou le
dernier" enduit. Comme elle eft affez menue, elle>
remplit exaélement les interftices que les bois laiffent
entre eux avant qu’on mette le feu, & les crevaffes
qui fe font devant, après & pendant la cuiffon.
Ils trouvent le frafin fur Faire, quand ils en ont tire
le charbon ; & c’eft la pouffière même qui couvroit
le fourneau, quis’eft augmentée pendant la cuiffon
& qui a fervi à étouffer le charbon. Au défaut du
frafin, ils font ufage de la terre tirée du chemin
avec la bêche , comme nous venons de le dire.
Quand la terre fera préparée, on prendra unes
pelle & on en couvrira le fourneau, à l’exception
d’un demi-pied par en bas, fur tout le pourtout ;
c’eft par-là que l’air fe portera au "centre quand on y
mettra le feu , & le pouffera. La couche ou l’enduit
de frafin, ou de terre ( quand on manque de frafin )
qui habillera le fourneau, n’aura pas plus d’un pouce.
& demi d’épaiffeur.
C’eft un ufage très-commun en Allemagne de
bouger les fourneaux avec des pièces de gazon carrées.
Lorque la nature du terrain le permet, cette méthode
eft préférable à toute autre ; on coupe le
gazon fur la place même où, le fourneau doit être
placé ; & fi les pièces peuvent avoir quatre à cinq
pouces d’épaiffeur , il n’y a rien de mieux pour
garnir exaélement l’édifice. On n’a prefque pas befoin
de réparer les ouvertures, le gazon battu ne laiffe
échapper aucune fumée que par les ouvertures pra-*;
tiquées exprès pour cela.
Quand le fourneau fera couvert, le charbonnier ,
montera en haut , enlevera la bûche qu’il avoit
placée au centre du fécond étage, & jettera dans
le vide que laiffera cette bûche, & qu’on appelle
la cheminée, quelques petits bois fecs & très-coin—
buftibles, & par-deffus, une pelletée de feu; alors
le fourneau s’allumera , & ne s’appellera plus four~
neau, mais feu. La fumée fortira très-épaiffe parle
demi-pied d’en bas , qu’on aura laiffé découvert
tout autour du fourneau; il en fortira aufti par la
cheminée. On laiffera le$ chofes en cet état, julqu’à
ce qu’on voie la flamme s’élever au deffus de la
cheminée ; alors le charbonnier prendra une piècç