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fait mettre fous les bornes nouvellement plantes s
pour rendre témoignage à la poftérité que ces pierres
ont été plantées pour fervir de limites.
On appelle tue-vents ou brife-vents, les claies dont
on entoure les fourneaux dans les temps venteux.
Nous avons dit que le charbon de bois étoit trois
jours entiers à fe faire ; c’eft que nous avons fuppofé
le fourneau conftruit de bois vert : il ne faut que
deux jours & demi au bois fec.
Il eft de la dernière importance de bien établir les
courans de fumée avant & pendant la cuiffon ( ce
qui s’exécute avec la pointe d’un fourgon , ou avec
la corne du rabot ) , & de bien polir & rafraîchir
après la cuiffon.
Le charbon de bois fe mefure & fé vend au boif-
feau comble. On appelle charbon en banne , celui qui
vient par charroi; & banne, la charrette dans laquelle
on le voiture.
II eft aifé d’être trompé à la qualité du charbon.
Il eft bon d’y faire attention quand on l’achète, &
l’acheter plutôt au boiffeau qu’en facs.
Le charbon eft d’un noir quelquefois terne &
obfcur ; c’eft la couleur de la braife & des charbons
trop confumés. D’autres charbons font d’un noir
violet & comme cuivré. Ils font produits par les
bois durs bien cuits. Les bois blancs & les bois ré-
fineux, donnent du charbon d’un noir pâle , tirant
quelquefois fur le jaune ; &. d’autres paroiffent verdâtres.
Le charbon qui n’eft pas affez cuit, a une couleur
£rifâtre; il produit une flamme blanche, fe rompt
difficilement, & brûle comme le bois ; c’eft ce qui
le fait appeler fumeron.
Au contraire, le bon charbon^eft léger, fonore ,
en gros morceaux brillans , & fe rompt aifément.
On eftime fur-tout celui qui eft en rondin, & qui
n’eft pas chargé d’une groite écorce.
Le bon charbon répand, en s’embrafant, des vapeurs
très-pernicieufes, & capables de fuffoquer les
animaux qui Tefpirent l’air qui en eft chargé. Les
lumières brûlent difficilement & même s’éteigpent,
quand on les expofe à un air chargé de ces vapeurs.
Les vapeurs de la braife & celles des charbons
foibles ou' qui chauffent moins, ne font pas auffi
dangereufes que les vapeurs du charbon fort qui
çhauffe beaucoup.
On n’apperçoit fur un brafier de bon charbon ,
qu’une petite flamme bleue ou violette qui caraélé-
rife le charbon bien fait ; ce qui vient de ce qu’il a
perdu non-feulement la plus grande partie de l'humidité
que contenait le bois, mais auffi fon huile
la plus groffièce.
Le charbon fe conferve mieux dans les caves que
dans un endroit fec.
11 eft défendu de faire du charbon hors les forêts ;
îl n’eft pas permis d’en faire chez foi, quand même
On demeureroit dans les forêts.
O n n ’ é t a b l i t p a s d e c h a r b o n n iè r e s p a r - t o u t o ù l ’o n
3»eut ; ç ’ e f t a u x o f f ic ie r s d e s e a u x & f o r e t s d ’e p m a r -
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quer leç places, qu’ils choififfent les plus vides
les plus éloignées des arbres. Ils en fixent communément
le nombre à une par chaque arpent de bois à
couper ; & ils peuvent obliger à repeupler les places
ravagées par les charbonnières
Lorfque le fourneau eft découvert, fi le propriétaire
ne l’enlève pas, mais le laiffe fur l’aire , on dit
qu’i/ rejle en moule.
Les réglemens de police de Paris pour le charbon ,
font i°. que le charbon qui vient par eau fera auffi
bon & de même qualité au milieu & au fond du
bateau qu’au deffus. 2°. Qu’on ne pourra mettre en
vente dans chaque port, que certain nombre de
bateaux à-la-fois; favoir, cinq bateaux d’Yonne,
& trois de Marne & de Seine au port de la Grève ,
& deux au port de la Tournelle, &. deux au port de
l’Ecole.
On ne peut point le mettre en vente qu’on n’ait
averti auparavant le bureau de la ville pour la fixation
du prix, qu’on continue ou qu’on change de
trois en trois jours de vente.
Les propriétaires du charbon font obligés de le
vendre fur la rivière & dans leurs bateaux, par eux-
mêmes, leurs femme*, enfans ou domeftiques,
non par commiffionnaires.
Lorfque le charbon vient par terre dans des
bannes ou charettes , il doit être déchargé à la place
de Grève ou autre marché publiç , pour y être
débité fur le paré : celui qu’on porte fur des bêtes
de fomme pour être vendu dahs les rues, doit être
dans des facs d’une mine, d’un minot ou demi-minot.
Il eft permis aux regratiers-fruitiers de faire le re-
grat, & vente de charbon qu’ils achètent fur les
pots; & les femmes des gagne-deniers ou garçons
de pelle, ne peuvent vendre que le fond des bateaux
que les marchands leur donnent pour falaire.
Les flumets ou ceux qui font les aides des jurés*
porteurs de charbon, qui ont une médaille devant
eux, ne peuvent point faire commerce.
Le charbon venant, tant par eau que par terre
fut exempté de tous droits par François I; mais
depuis le tarif de 1664, il paie 12 fous par banne
de droits d’entrée.
La fortie du charbon de bois pour l’étranger eft
défendue, fous peine de confifcatîoa & de mille
écus d’amende.
Il arrive à Paris du charbon par charrois, des
boquetaux de Crecy en Brie , des bois de Tournan,
d’Ozoy-la-Ferrière de Montfort-l’Amaury, &c. Il
en vient par eau du Morvant, du Nivernois, de la
Bourgogne, qu’on charge à Auxerre, à Joigny, à
Sens , à Villeneuve-le Roi. On en fait paffer par les
canaux de Briare & d’Orléans. Il en arrive par l’Oife
qui vient de Chauny, Compiègne , de Conflans-*
Sainte-Honorine, par la Marne qui entre dans la
Seinë à Conflans-1’Archevêque.
Details fur la manière de faire le charbon dèfliné aux
ujînes.
Quand les bois d’une coupe de forêt font réduits
en corde , ce qui doit être fini pour le mois d’avril,
on le laiffe fécher jufqu’en feptembre ; alors il ne
faut point perdre de temps à les faire dreffer : ce
n’eft que dans le dernier befoin qu’il faut faire de
nouvelles places à charbon. Cette partie demande
toute l’attention poffible. Ou le fonds eft arbue &
plein , alors le nettoyer & battre fuffit ; ou le fonds
eft en coteau, le mieux eft de prendre des pionniers
pour l’unir , & de bons bras pour le battre ;
ou le fonds eft pierraille & fable , quelquefois avec
des crevaffes , le mieux eft d’y faire conduire de
l’arbue & de le faire battre.
Les aires préparées , les-dreffeurs aüront foin de
mettre une partie de petits bois pour commencer ;
c’eft ce qu’on appelle Y allume ou Yallumelle ; enfuite
les plus gros dans le foyer, & les plus petits à
mefure qu’on s’éloigne du centre ; par ce moyen tout
fe trouvé dans la place qui lui convient. Le grand
point eft que le bois ne foit pas trop 'couché en dedans
ni fur les côtés ; fans quoi, au moindre affaif-
fement, tout fe dérange & caufe un défordre préjudiciable.
Le dreffage doit laiffer une égale liberté au feu de
circuler de tout côté : fi une partie eft trop garnie,
le feu pénètre avec peine; & ne l’étant pas affez,
il fe jette tout d’un coup où il trouve moins de ré-
fiftance : fi le gros bois tient une place feparée du
petit, l’un brûle , l’autre ne cuit pas ; fi la place
n’eft pas ferme, tout le bois qui entre en terre ne
deviendra jamais charbon : s’il s’y trouve des fentes,
fi elles communiquent à l’air extérieur, elles fouf-
flent ; fi elles ne communiquent pas & qu’il y ait
beaucoup d’humidité , la raréfaélion peut faire culbuter
une pièce entière ; fi le bois eft mal arrangé i
& garni, if s’y forme des entonnoirs qu’on ne bou- !
che & Remplit jamais fans perte.
Quand les fourneaux font dreffés , on les couvre
de feuilles , d’un peu de terre & frafins pour concentrer
la chaleur; Si on a affaire à un terrain pierreux ,
il faut, comme on l’a déjà dit, voiturer de la terre&
des carrés de gazon, & on fera dédommagé de cette
dépenfe. La règle pour l’épaiffeur de la terre qui couvre
les fourneaux , n’eft point arbitraire ; il faut que
la fumée & la flamme ne puiffent paffer que dans ■
les. endroits qu’on le fouhaite. Trop de terre empê- ;
chera la cuiffon de la partie qui lui eft contiguë : il
y a des fels qui s’évaporent avec les fumées ; ne
feroit-ce point ces fels qui les rendent fi dange-
reufes ? " 5
^ Quand le feu eft dans un fourneau, il faut veiller
sil marche également ; s’il fe jette d’un côté, cou-
vtez-Ie de frafins, & donnez jour dans le voifinage.
Quand le milieu commence à s’affaiffer , couvrez-
e bien , & piquez dans les environs, & au bas : fi
une partie paroît réfifter au feu tandis que le refte
paffe , ouvrez & laiffez-îa s’enflammer à l’air libre :
quand le feu y aura bien mordu, couvrez. Ne pref-
* jamais un fourneau : comme il ne peut aller
vite qu’en prenant beaucoup d’air , outre une grande
tuminution > le charbon qui refte a beaucoup perdu
^ n n 519
de fes parties inflammables, comme on le voit à
fa grande divifion & légèreté
Le charbon doit naturellement refter pénétré defc
qualités du bois ; auffi voyons-nous que celui venu
& cuit dans l’arbue réfifte long-temps au feu ; &
celui venu dans la caftine s évaporé aifément : fa pe-
fanteur eft une^ règle auffi affurée pour le charbon
que pour le bois. Il eft aifé de fe convaincre que
deux morceaux de bois fec , de même dimenfion ,
l’un venu dans l’arbue , l’autre dans la caftine , pèl
fent après Jeur réduâion bien faite en charbon,
dans la même proportion qu’ils étoient avant : le
charbon le plus lourd tient le feu le ► plus longtemps.
° ‘
, On fent bien que le bois de pied & du deffus
étant dans les fourneaux , c’eft avoir mélangé le fort
& le foible : il eft rare avec cela de n’avoir pas
v °a?s de grandes exploitations quelques efpèces de
bois léger ; en tout cas , quand vous aurez des bois
différens par la nature du fonds, le plus expédient eft
de mélanger les charbons dans la proportion du mélange
des mines : dix parties du charbon venu dans
l’arbue , quatre de celui venu dans la caftine , cela
réuffit bien à l’expérience & au travail. Le charbon
vigoureux convient bien aux fourneaux dans lefquels
on cherchera concentrer la chaleur, & où on emploie
la force de l’air ; il convient encore à la ma*
cération des fontes , &c.
Pour les fours de fonderie qui fe chauffent avec
du bois, je n’ai pas befoin de dir_e que ceux venus
dans la pierraille donnent une flamme plus paffa-
gère mais plus vive & plus prompte', & confé-
quemment conviennent mieux.
Il eft aifé de conclure qu’ayant befoin pour cuire
le charbon d’une certaine epaiffeur de terre & de frafins
foutenue par la feuille fur les fourneaux, les
grandes pluies qui entaffent, battent & entraînent
les gelées qui foulèvent, les grandes chaleurs qui
raréfient, les vents qui dérangent y font très-préjudiciables
; le plus expédient eft de choifir le temps
qui paroît le moins fujet à ces inconvéniens. Mars,
avril, feptembre & o&obre paroiffent les plus propres.'
Il faut en profiter pour faire la provifion né-
ceffaire ; pour cet effet, il faut des voituriers des
releveurs de charbon.
En général les halles doivent être au vent du
nord des ufines ; cette expofition eft moins danee-
reufe pour le feu. &
# Le^charbon craint fur.toutes chofes l’humidité *
ainfi il ne .faut point tarder quand il eft cuit à le
voiturer & le mettre à l’abri ; plus il eft brifé , plus
à l’air feul il perd de fes parties inflammables. Le
charbon recuit donne de la chaleur , mais il eft bientôt
confumé ; la raifon eft qu’ayant tous.les pores
ouverts, il eft plus difpofé à une prompte diffolu-
tion par une inflammation totale. Il eft utile que le
réfroidiffement ait refermé fes pores , pour ne fe
prêter qu’a‘une inflammation fucceffive ; fur toutes
chofes garantiffez-le de l’humidité.
Il croît dans les îles Moluques un arbre nommé