
Quand on eft content du premier degré de blancheur
, on porte la cire au magafin pour la mettre
en gros tas, comme l’on amoncelle du fable. Elle
demeure un mois ou fix femaines en cet état, où
elle fe rm en te& forme une maffe affez'folide pouf
qu’on foit obligé de fe fervir de pioche quand on
veut la retirer. 'Cette fermentation la difpofe à
prendre un plus beau blanc dans le regrêlage, que
li on la regrêloit au forrir de la toile.
En Provence , & particulièrement à Marfeille,
on ne blanchit pas la cire fur des toiles, mais fur
des banquettes de brique, qui ont la même forme
que les bâtis de charpente ci-deffus, qui foutiennent
les toiles. Pour éviter que la brique échauffée ne
faffe fondre la cire, on l’arrofe fouvent ; & ces banquettes
ayant une pente douce, & étant trouées par
un bout, l’eau n’y féjourne qu’autant qu’il faut pour
rafraîchir. Quelques-uns même établiffent un petit
filet d’eau qui , traverfant continuellement la longueur
des banquettes, y forme une nappe très-mince.
On couvre ces cires avec des filets, afin qu’elles
foient à l’abri des coups de vent.
On pourroit, avec les mêmes précautions pour
rafraîchir, fe fervir de tables de pierre. Ces ouvrages
folides obvient à la nécellité de renouveller fréquemment
les toiles ; ce qui eft une dépenfe con-
iidérable.
Le regrêlage eft une répétition des procédés ci-
deffus a pour donner à cette cire une nouvelle fluidité
, la faire dépofer, la grêler, ôçcf
A cette fois, on commence par mettre l’eau dans
la chaudière ; puis on allume le feu ; on y jette la cire
peu à peu , & comme en faupoudrant , pendant
qu’un ouvrier braffe fans celle. Quand la chaudière
eft pleine, & la cire à demi-fondue réduite en une
efpèce de bouillie, on augmente un peu le feu, & on
continue de brader, jufqu’à ce qu’étant entièrement
liquide , elle puiffe paffer dans la cuve & y dépofen
Dans quelques manufactures, avant de couler, on
met dans la chaudière , foit de l’alun, foit du criftal
minéral, foit de la crème de tartre, .qui pâroît con-?
venir davantage que les autres fels, pour que la-cire
fe clarifie mieux : quatre onces de crème de tartre
fuffifent fur un quintal de matière , & ces fels ne
doivent pas tre regardés comme des fophiftications.
Qn gouverne la cire dans la cuve comme la première
fois ; on l’y laiffe cependant moins long-rtemps.
Puis on obferve ce qui a été dit ci-deffus pour- la
mettre ea rubans , l’arranger & gouverner fur les
toiles, & la remettre encore en tas dans le magafin.
Après quoi -on lui’ donne une troifième fonte L
de la même manière que la précédente. Quelques
blanchifTeurs y ajoutent alors trois à quatre pintes de
lait fur un millier de cire ; ce qui occafionne dans la
cuve un dépôt ou déchet plus confidérable d’environ
deux livres par cent de cire , que lorfqu’on
n’en met pas ; mais il paroît que la ciré en eft mieux
purifiée ; ainfi, on ne peut regarder cette autre pra-
ique. comme une fophiftication. Pendant qu le
dépôt fe forme, on emplit d’eau la baignoire ; on y
met les planches à pains ou à mouler, deftînées â
mettre la cire en petits pains : enfuite on les
arrange toutes mouillées fur des châfïis ou pieds
de table, & on établit fous la canelle de la cuve
une paffoire, à travers laquelle la cire tombe ,
dans un coffre de cuivre carré long, dont les côtés
font garnis de cendre chaude lur la longueur.
Lorfqu’il y a dans ce coffre une certaine quantité
de cire., on en ouvre le robinet pour emplir
des vaiffeaux à bec , nommés éculons, figure 6,
planche 1 1 1 , dont la forme varie, & que l'on va
fur le champ vider dans les moules. On relève ces
moules à mefure que la cire y eft congelée, & on
les met dans une baignoire pleine d’eau, où les pains
fe détachent d’eux-mêmes & furnagent, &. on les
enlève avec un tamis foncé de ficelle, pour les
porter fur les toiles. Ils y demeurent expofés à l’air,
rangés les uns à côté des autres, pendant trois ou
quatre jours , ou même davantage , félon que le
temps eft ferein ou couvert ; après quoi on a foin
de les enlever bien féchement, & les ferrer dans
des armoires, ou dans des tonneaux garnis de papier,
afin d’empêcher les ordures de s’attacher à la cire,
& la garantir du.contaftde l’air qui la jauniroit.
Elle eft alors parfaitement clarifiée & blanche : ce
font ces pains que les ciriers refondent pour faire
de la bougie, des cierges, &c. Voyeç les planches
qui concernent le blanchiment des cires.
Si l’on n’a qu’une petite quantité de cire à faire
blanchir , on peut le faire par le procédé fuivant,
qui eft très-facile.
On fait fondre la cire dans un poêlon fans bouillir:
pour rendre fa blancheur plus parfaite & plus luftrée,
on y ajoute du criftal de tartre qui la clarifie; on
prend enfuite un pilon de bois ; on le trempe dans
la cire jufqu’à la hauteur de deux doigts , &. l’on met
auffitôt le pilon dans l ’eau fraîche pour en détacher
la cire, qu’on expofe fur l’herbe à la rofée jufqu’à
ce qu’elle foit blanche; puis on la fait refondre , &
on la paffe à travers un linge pour en ôter les ordures
s’il y en a.
Manière de tirer la cire des entorfes.
Les entorfes ou marc de mouches, auxquelles on
donne différens autres noms dans diverfes pro?
vinces, ne font autre ohofe que les mouches & les
craffes qui reftent dans la chauffe après qu’on en a
.tiré la belle cire , & on en forme à volonté des
boules à peu près de la groffeur du poing. Il y en
a qui jettent ces entorfes, dans la perfuafion où ils
font qu’on ne fauroit en rien tirer :.ce qui eft très-
vrai, quand on ignore la manière dont il faut s’y
prendre. La première opération qu’on fait allez
communément, c’eft d’étendre les entorfes fur un
plancher , pour les faire fécher. Comme elles font
fujettes à moifir & à s’échauffer, il faut avoir foin
de les retourner de temps en temps, jufqu’à ce
qu’on en ait une certaine quantité pour en tirer la
cire. Plus on les laiffe vieillir, moins elles rendent»
Si l’on veut réuflir, voici la méthode qu’il faut
fuivre.
Ayez un preffoir à maillet, une grande bafline
ou chaudière de cuivre, une grande fpatule de bois
pour remuer la matière, un grand baflin pour la
retirer quand elle eft cuite ou affez échauffée , &
au moins quatre ou cinq fapines. Si la bafline étoit
entourée d’un fourneau , on épargnéroit beaucoup
de bois , & l’ouvrage iroit beaucoup plus vîte qu’en
mettant fimplement la bafline fur un trépied. On
écrafe les entorfes , & fi elles font en grand nombre
On les fait écrafer fous une meule.
Rempliffez la bafline d’eau, jufqu’aux trois quarts
& demi, félon fa grandeur ; faites bon feu deffous, &
jettez-y pour la première fois feulement, deux demi-
mefures rafes d’entorfes. La demi-mefure eft de vingt
à vingt-une livres. Faites - les bien bouillir en les
remuant toujours avec la fpatule.
Pendant ce temps-là, un homme garnit le preffoir
avec de la paille : il commence par mettre au fond
de l’auge , trois ou quatre morceaux de bois ronds ,
entaillés par deffous, pour que la paille ne touche
pas le fond de l’auge, & que la cire puiffe avoir jeu
pour couler. On met deffus une affez bonne poignée
ae paille qu’on couche, l’épi en dedans de l’auge,
directement fur le milieu du derrière de l’augê , de
forte qu’elle ne forte en dehors que d’environ fix ou
fept pouces : on prend une fécondé poignée de
paillé que l’on ajufte directement fur le milieu du
devant de Fange, toujours l’épi en -dedans ; & on
vient à une troifième poignée & à une quatrième,
que l’on met dans le milieu des deux côtés de l’auge,
a droite & à gauche. Enfin, il faut encore quatre
poignées de paille pour les quatre coins, les épis
toujours en dedans , & l’on en éparpille une petite
poignée fur le fond de l’auge. Voila le preffoir garni:
cela fait, on met une fapine deffous le preffoir pour
recevoir l’eau qui en fortira.
L’homme qui remue, apporte une fapine d’entorfes
bouillantes, qu’un autre reçoit, & dont il
verfe un tiers dans l’auge. Une troifième perfonne
jette un peu de paille deffus. On verfe cependant
un autre tiers & on éparpille’un peu de paille ; on
verfe alors le refte de la fapine, après quoi on
ajoute encore un peu de paille. On apporte une
fécondé fapine d’entorfes bouillantes, qu’on verfe
de Ja même façon que la première, & qu’on a foin
d’appuyer fur l’auge, pour faire prendre le pli aux
pailles & en faire fortir l’eau en partie. On en vient
enfuite à une troifième fapine, & l’on opère delà
même façon que pour les deux premières. Quand
la fapine de deffous eft pleine d’eau , à moitié, on
la retire pour la verfer dans la bafline, & la fapine
eft auflitôt remplacée par une vide. Cela fait, on
pouffe & renverfe en dedans de l’auge , -la. poignée
de paille qui eft fur le devant du milieu, puis la
poignée de la gauche & celle de la droite ; enfuite
celles du milieu des côtés de l’auge, après, celles des
coins de derrière, & enfin, celle du milieu de derrière
, qui a été la première poignée mife dans le
preffoir. Toutes ces poignées de paille fe croifent
les unes fur les autres , & l’on a foin de les tenir en
refpeet. On fait gliffer par deffus le billot qui doit
entrer dans l’auge, & fur ce billot on fait gliffer
l’aiguille. On frappe alors avec les maillets, mais à
petits coups & par intervalles. Si Ton frappoit trop
fort, tout crèveroit. Quand il n’y a plus guère d’eau
& que la cire vient à couler, on redouble les coups.
Quand enfin on fent de la réfiftance & que le pain
eft déchargé de toute fon eau , il faut frapper plus
fort & plus vîte , jufqu’à ce que la cire ne coule plus.
On achève de remplir d’eau froide la fapine où la
cire à coulé. Par-là le pain de cire fe refroidit plus
promptement, il vient au deffus , & on a foin de le
tirer quand il eft froid. Pendant ce temps-là l’homme-
qui fait chauffer la matière a eu foin d’y remettre
feulement une demi-mefure d’entorfes ; car ce n’eft
que la première fois qu’on met deux mefures , ÔC
toutes les autres fois une demi-mefure fuffit.
Dès que la matière eft affez échauffée , on defferre
le preffoir ; après avoir débarraffé l’aiguille & le
billot, on tire la paille qui eft fur le derrière; le
pain fe renverfe fur le devant ; en appliquant la main
gauche par deffus le pain , & la main droite par
deffous , on l’enlève pour le jetter avec force dans
un van. Gette fecouffe détache des grumeaux de
cire attachés à la paille. Ayant enleve la cire qui
peut être reftée dans l’auge, on y arrange les morceaux
de bois ronds ; on tire toute la paille qui a
fervi ; on l’arrange de la même manière que nous
avons dit ; & l’on continue les mêmes opérations
jufqu’à c(f qu’on n’ait plus d’entorfes.
Quand l’ouvrage eft achevé, on fond la cire avec
beaucoup d’eau à caufe des craffes & de l'a paille
on la laiffe bien dépofer, après quoi on la tire ain
clair dans des terrines.
Quand on veut retirer la cire des vieux cierges Sc
flambeaux , on brife les bougies & les cierges qui
n’ont été brûlés qu’en partie , on en retire la cire
par morceaux & on la fait fondre dans de l’eau ; oiï
la rubanne, on la pofe fur les toiles, on en forme
des pains dont on fait des cierges & des bougies ;
mais il faut avoir foin de ne point mêler enfemble
les cires de différentes qualités.
Quant à la cire qui refte attachée aux mèches
on ne la retire qu’en mettant ces mèches dafts de
l’eau fur le feu, & les faifant énfuite paffer à la.
preffe.
La cire alliée de réfine ne doit pas être mêlée avec
de la cire plus pure, & cette cire alliée ne peut être
employée que pour la compofition des flambeaux.
Fonderie cCAntony.
On appelle fonderie, l’àtelier o.ù fe fait la fonte
que nous venons de décrire.
La belle fonderie d3Antoivy , près de Paris, eft
plaeée au bout d’une grande pièce à peu près carrée.
On monte aux chaudières, au nombre de. trois
par un efcalier de dix pieds ou environ. Elles fon-
placées fur la même ligne , au deffus chacune d 1