
Obfervations ou corollaires•
Coroll. 1. Il eft évident par la conftru&ion du pont,
qu’il peut fe démonter avec la même promptitude
& la même facilité qu’il fe jette.
Coroll. II. Qu’en fuppofant qu’un homme fait un
pas dans une fécondé, & que les pas de deux hommes
qui fe fuivent, tombent les uns fur les autres ,
il pourra palier fur ce pont 36000 hommes par
heure.
Coroll. 111. Qu’il peut s’ouvrir & fe refermer
avec la même promptitude & facilité qu’on a à le
conftruire ; il ne faut pour cet effet que lever deux
travées, détacher les barres de fe r , ôter les attaches
, & relâcher un bateau ; ce qui donnera une
ouverture de cinq toifes.
Coroll. IV. Que la diftance de 4 pieds 6 pouces
qu’il y a entre le fond du bateau & la travée, permet
de marcher fur le pont, de viliter tes bateaux , &
de remédier aux inconvéniens s’il en furvenoit.
Coroll. V. Que la baluftrade joue & fe meut
comme les travées, & qu’elle n’eft pas -de pur ornement.
Tel foldat qui n'a pas peur du feu , craint de fe
noyer. Or , cette baluftrade le raffure, & le paffage
fe fait fans péril & fans trouble.
Coroll. VI. Qu’on peut par ce moyen établir une
communication folide entre un camp & un autre,
une ville & un camp, &c.
Coroll. VII. Qu’en cas qu'un pont de pierre vînt à rompre, on y pourroit fubftituer celui-ci d’un moment
à l’autre.
. Coroll. VIII. -Qu’il feroit d’une très-grande ref-
fourçe dans des casNoù quelque ouvrage public
demanderoit qu’on détournât le cours d’une grande
rivière, ou que le cours de cette rivière fut fujet
à changer.
Coroll. IX. Qu’on en pourroit ufer dans certaines
fêtes qu’il plairoit à Sa Majefté de donner.
Coroll. X. Qu’on n’applique les mâts au bateau que
pour empêcher, autant que faire fe pourroit, les cordes
de tremper dans l’eau, & que pour ôter par ce
moyen à l’ennemi la facilité de les couper, en abandonnant
au courant de la rivière des poutres armées
d’inftrumens tranchans.
Coroll. XI. Que les cordes de plufieurs bateaux
pourroientêtre coupées, & manquer en même-temps
fans que le pont en fouffrît.
Coroll. XII. Qu’en établiffant dans chaque bateau
deux hommes de garde, on garantiroit le pont & les
bateaux de toute injure extérieure.
Coroll. XIII. Que les bateaux laiffant entr’eux 12
pieds de diftance, & les travées entr’elles & la fur-
face de l’eau, 3 pieds de hauteur , il eft fufceptible
de tous les ornemens extérieurs d’un pont de pierre,
comme de former des arches. Voyez pl. XV9fig. 9.
Coroll. X IV. Que chaque bateau fervant au pont,
peut fervir auffi à porter à l’autre bord de la rivière,
le nombre d’hommes fuffifant pour faire la sûreté
de ceux qui feront occupés à la conftruéfion du
pont»
Coroll. XV. Que quoique le mécanifme de ce pont
foit fi fimple , qu’il puifîe fe .conftruire & fe retirer
par toutes fortes de bras indiftinélement, il ne faut
pas s’attendre à la dernière promptitude d’exécution
de la part de gens inhabiles à manier des inftrumens,
des outils & des bois. Qu’il feroit donc important
que, de même qu’on a formé des canonniers lors
de l’invention des canons, on formât un corps de
pontonniers à qui le mécanifme du pont ne fût pas
étranger, qui eût un exercice réglé, à qui l’on fît
faire cet exercice en temps de paix, & qui fût pref-
que toujours à portée de conftruire à Sa Majefté un
paffage sûr, lorfqu’il lui plairoit de traverfer des
rivières dans des endroits où il n’y auroit point de
pont.
Coroll. XVI. Qu’on pourroit tirer ce corps des
autres, en prenant tous les ouvriers en fer, en bois,
& autres qui s’y rencontreroient, comme charpentiers
, menuifiers, charrons, ferruriers , taillandiers,
couteliers, arquebufiers , maréchaux , mariniers,
cordiers, pionniers, &c. & le nommer royal ponton.
Coroll. XVII. Qu’il feroit peut-être à propos que
l’ennemi ignorât le mécanifme de ce pont, & qu’il
ne feroit pas impoflible qu’il ne le connût de longtemps
, en prenant les précautions convenables.
Coroll. XVIII. Qu’en levant la première des travées
qui porte des tréteaux d’un côté de la rivière
fur le premier bateau, & la dernière qui porte du
dernier bateau fur les tréteaux de l’autre côté de la
rivière, on peut, fans le moindre inconvénient,
tirer à bord le refte du pont tout affemblé..
Coroll. X lX . Que les charges fortes, loin de rompre
le pont, ne font qu’ajouter à fa folidité , en
fixant les travées & la chauffée fur les fommiers
fupérieurs ; enforte que le pont propofé formeroit
une machine inébranlable, fi on plaçoit fur chaque
travée 8000 livres ou le poids que nous avons démontré
qu’elle pourroit aifément foutenir. Si l’on
fuppofoit donc le pont conftruit fur une rivière de
210 toifes , ou de 1260 pieds de'large , il auroit
alors70 travées, & partant, il feroit chargé dans
toute fa longueur de 560000 livres , & rendu plus
folide par cette énorme charge , que quand il étoit
à vide.
Coroll. XX. Que le mécanicien s’étant propofé de
fubftituer fon pont à un pont de pierre, s’il en étoit
befoin , il a dû lui donner toute la folidité qu’il a.
Coroll. XXI. Qu’ayant fuppofé par-tout que le
pied cubique de chêne fec pefoit^éa livres au
lieu que félon les expériences que M. Deflandes a
faites, ce bois ne doit pefer que 59 livres \ lorfqu’il
eft devenu propre aux conftruélions ( voyez YEjpti
fur la marine des anciens, page. 82 ) , il a fait une lup-
pofition qui lui eft défavorable ; & qu’il s’enfuit de-là
que toutes les parties de fon pont font un peu plus
légères que le calcul ne le donne.
Coroll. XXII. Qu’U ne faut point chercher à diminuer
la dépenfe , en allégeant les parties du pont,
par plufieurs raifons : la première , c’eft que cette
diminution de dépenfe feroit trop peu confidérablë;
la fécondé, c’eft qu’en allégeant le;pont, pn lui ôte
néceffairement de fa folidité/, & l’on reftreinjt fes
ufages ; la troifième, c’eft que pour peu que l’on ôte
d’écarriffage à une pièce de bois , fa force fouffre un
déchet confidérablë, car pn peut dire que ce déchet
eft à peu près comme les carrés des bafes.
Si donc une pièce avoit fept pouces d’écarriffage,;
& qu’on ne lui en donnât plus que f ix , fa force dans
fon premier état, étant à peu près à fa force dans
le fécond , comme 46 à 36 ; le déchet de force feroit
à peu près d’un tiers. D’où l’on voit qu’on pe peut
guère alléger des bois d’une bonne force , fans s’ex-
pofer à les rendre trop foibles. La quatrième, c’eft
que ceux qui auront bien compris le mécanifme du
pont, fendront facilement qu’il eft de la dernière
importance que les pièces des travées n’arqqent.
point, ou du moins que fort peu. O r , npus fommes, j
sûrs , & par notre expérience propre ; & par les !
expériences de M. de Buffon , qu’elles n’arqueront
point fenfiblemetn, fi on leur laiffe l’écarriffage que
que nous leur avons donné.
Coroll. XXIII. Que l’exécution en grand eft l’écueil
ordinaire des machines, au lieu qu’il eft évident que
le pont propofé aura d’autant plus de fuceès, que.
fes parties feront plus grandes , & fa, charge plus
confidérablë. Eloignez la machine propofée de fa
vraie deftination , & vous lui faites perdre de fa
folidité ; rapprochez-la de fa deftination , & vous
lui reftituez fa folidité & fes autres avantages ; ce
qui eft le contraire des mauvaifes machines. Ce n’eft
ni pour tranfporter un poids de 10 livres, ni pour
traverfer un ruiffeau de deux toifes, que l’on cherche
des ponts, auffi celui que je propofé eft-il inutile
dans ces cas; fon ufage ôtfa folidité ne commencent
que quand les rivières font vaftes & les poids énormes,
c’eft-à-dire , qu’il eft de reffource où les autres
ont toujours manqué.
Tranfport d'un pont de 100 toifes, ou 600 pieds de long.
Si l’on conftruit ce pont félon les dimenfions
qu’on a prifes dans le méfiioire précédent, fur une
rivière qui auroit 100 toifes ou 600 pieds de large ,
il eft évident qu’on auroit befoin de 31 bateaux,
de 6 tréteaux garnis de toutes leurs pièces , ce qui
formeroit 34 travées, dont toutes auraient 31 madriers
, & dont, les unes & les autres feroient alternativement
de cinq & fix groffes pièces ; ce qui don-
neroit 1054 madriers , & 187 groffes pièces.
O r , il paroît par la première partie de la démonf-
tration, où l’on a fait la plus fcrupuleufe évaluation
dés parties du pont & de leurs poids , que chaque
groffe pièce de travée pèfe environ 500 livres, &
chaque madrier envfron 160 livres.
Si donc une voiture à quatre roues porte aifé-
ment 3850livres ou environ, huit groffes pièces de
travée , ou 25 madriers de la chauffée , feront fa
charge.
Il faudra donc, 1 °. autant de voitutes qu’il y a de
bateaux, ou 31 voitures dans le cas préfent ; 20.
deux vpitures pour les tréteaux & leurs pièces ; 30.
autant dé voitures qu’il y a de fois 8 en 18 7; 40.
autant de vôitures qu’il y a de fois 25 en 1054,
c’eft-à-dire , 100 voitures pour tout ce pont, ou 3
voitures par travée ou par chaque trois toifes. Cependant
ce pont a été conftruit félon des dimenfions
telles,'.qu’il peut être fubftitûé à un pont de
pierre én cas de befoin.
Dépenfe des bois néccjfaires à la confiruHlon dudit pont
: de'too. toifes! ou de éoopieds de long.
La dépenfe n’eft pas auffi confidérablë que fa foli-
dité fëmble l’exiger, ainlb qu’il va paroître par l’efti-
matiori de toutes fes parties, faites par les ouvriers
mêmes.
Revêtement d'un bateau.
' Trois platiches de coeur de chêne de 28
pieds de long, fur 13 pouces 4 lignes de
large , & un pouce fix lignes d’épais,
Six planches de 36 pieds dejong, fur 14
pouces de large , & un pouce d’épais,
Deux bords d’un bateau ,de chacun 32
pieds de long, fur 3 pouces d’épais & 6
pouces de large,
Parties intérieures d'un bateau.
Douze traverfes de 4 pieds de long,
fur 4?pouces d’écarriffage , 30
Un fommier inférieur de 28 pieds de
long, fur 6 pouces d’écarriffage, 48
Vingt-fix montans de 3 pieds 6 pouces
de long , fur 3 pouces 6 lignes d’écarrif-
fage, $0
Deux pièces prifmatiques formant la
pouppe & la proue, chacune de 5 pieds
9 pouces de long, & dont deux côtés de
la bafe font de 12 pouces, & l’autre de 9
pouces y $6
Neuf fuppotts, chacun de 4 pieds de
long , fur 4 pouces d’écarriffage, 21
Dix-huit arcs-boutans des 9 fupports ,
chacun de 4 pieds 6 pouces de long, fur 4
pouces d’écarriffage , 59
Vingt-fix arcs -boutans affemblés avec
les précédens.& avec les montans., chacun,
de 2 pieds de long, fur 3. pouces d’écarriffage,.
22
Six arcs-boutans de la pouppe & de la
proue ,, chacun de 5 pieds de long , fur 4
pouces d’écarriffage , 16
Huit rouleaux de 15 pouces de long,
fur 4 pouces de diamètre , r6
Un fommier fupérieur de 18 pieds de
long, fur 5 pouces d’écarriffage, 24
Deux mâts de fapin, chacun de 18 pieds
de long, fur 6 pouces de diamètre par le
gros b o u t i 8
1 5 0 H V .
300
90