
gerie, MM. Bofcheron , Broc , le Roux, Garin &
m oi, de faire quelques expériences pour examiner
f i , d’après les difcumons qui fe font élevées fouvent
fur le poids du pain expofé en vente, il étoit poflible
d’établir ce poids avec exactitude, & de ne point
s’écarter des réglemens à cet égard , nous nous
fommes affemblés à l’école de boulangerie le 12 octobre
1781 , pour y commencer les expériences
qu’exige cet article de police allez curieux en lui-
même , & auffi intéreffant pour la tranquillité des
boulangers, qu’il mérite d’attention pour la juftice
qui eft.due au peuple.
Le chef de levain qui nous fut préfenté par le fleur
Lafne, chargé du détail de l’école de boulangerie ,
pefoit trois livres fept gros ; il pouvoit contenir un
•tiers d’eau ou à peu près.
11 fut délayé à fix heures & demie du folr dans
fept livres' de farine*, & quatre livres d’eau pour former
le levain de première.
A trois heures & demie du matin le levain de
fécondé fut formé de ce premier mélange, avec vingt-
quatre livres de farine & treize livres d’eau.
Enfin, le levain de troifième ou de tout-point fut
compofé à huit heures du matin de celui de fécondé,
auquel on joignit quarante-deux livres de farine ôc
trente livres d’eau.
Deux heures après ou environ , on commença à
pétrir.
Le levain de tout-point pefoit en total cent vingt-
trois livres fept gros; on le délaya dans quatre-vingt-
fept livres huit onces de farine, ôc quarante - cinq
livres treize onces cinq gros d’eau un peu chaude,
telle que la circonftance l’exigeoit : lorfque la pâte
eut été formée , on la frafa (<z) & contre - frafa ;
on la mania, on là battit en toutfens, afin d’y occasionner
ces bourfoufflures, ces gonflemens momentanés
fi avantageux pour la légéreté du pain ,
& afin de la mettre au point de féchement, fuivant les
termes de l’art, ou plutôt dans l’état de combinaifon
parfaite ou il convient qu’elle folt.
Cette pâte ainfi préparée fut mife dans le tour ,
pii elle refta pendant vingt à yingt:cinq minutes pour
■ y entrer en levain, y acquérir un peu de reffort &
la facilité de prendre un bon apprêt dans les pannetons.
On procéda enfuitè à la pefée-de cette pâte pour
en faire des pains de quatre livres de la forme ordinaire
, & de vingt à vingt-deux pouces de longueur.
' (a ) Le terme frafer ell en ufage, dans l’art de la boulangerie
, pour exprimer l’opération par laquelle, après avoir
délayé le levain d e to u t p o in t dans une quantité d’eau convenable
, on le mêle fur le champ avec la farine réfervée pour
le pétriflâge , & dans laquelle le levain doit s’incorporer.
C’eft alors que la pâte commence a fe former, que les grumeaux
6’y divifent & s’étendent fous la main de l’ouvrier ,
quelle devient plus égale & acquiert une certaine confiftance :
bientôt on la t r a v a ille avec encore plus de foin ; on la divife
en plufieurs parties qu’on pétrit féparément ; on réunit ces
portions en les pétrifiant enfemble de nouveau ; on réitère
cette opération, quelque pénible qu’elle foit ; & en c outre -
f r a f a n t aisfi la pâte , on parvient a lui donner du corps , de la
liaifon & une forte dë ductilité,
Les boulangers font dans Fufage auto ri fé d’employer
quatre livres dix onces de pâte pour chacun
des pains dont nous parlons , parce qu’on a remarqué
que le déchet qu’éprouve la pâte au four, roule à
peu près fur dix onces pour les pains ordinaires de
quatre livres * & de la forme que nous avons dé-
fignée. Nous fîmes donc préparer trente-huit pains
de quatre livres dix onces en pâte, pour nous conformer
d’abord à cet ufage, & pour avoir en même
temps un plus grand nombre d’objets de compàrài-
fon : nous nous bornâmes à douze pains pour y faire
varier l’excédent de poids fur la pâte ; de manière
que ces trois pains n’avoient, avant leur cuiflon ,
que neuf onces d’excédent de poids ; trois autres en
avoientdix ; les trois pains fuivans en avoient onze,
ôc les trois derniers douze onces : la pefée de ces
pains encore en pâte, fut faite avec exaélitude ; ÔC
ceux dont l’excédent des poids varioit, portoient
chacun un numéro.
Lorfque les boulangers, qui étoient témoins de
cette expérience T eurent reconnu que le four étoit
au point de chaleur couvenable, on y mit les pains
dans l’ordre que voici : dix-huit de ceux qui portoient
dix onces d’excédent, furent placés dans le
premier quartier du four ; feize autres pains pareils
furent mis dans le focond quartier; le coeur du four
fut réfervé pour les douze pains numérotés, auxquels
on joignit quatre autres pains femblables à ceux
qui occupoient les deux quartiers. Le four conte-
noit donc cinquante pains qui, au premier coup-
d’oe il; paroiffoient confondus , mais .que- les pgins
numérotés & placés au centre, fervoient à déügner
dans l’ordre ou nous les avions d’abord établis.
Après que les pains eurent refté trois quarts-d’heure
ou environ dans le four, & que les boulangers eurent
jugé que ces pains étoient cuits fuffifamment,
on las retira du four dans l’ordre ou ils y avoient
été placés ; ceux du premier quartier furent mis
dans un grand panier , avec une étiquette qui les,
défignoit, comme ceux du fécond quartier & du
coeur du four furent rangés dans deux autres paniers,
avec la note qui fervoit à les faire diftinguer.
Tous ces pains furent pefés par ordre au fortir
du four, & leur poids fut écrit à mefure qu’ils for-
. toient de la balance. Nous mettons fous les yeux du
comité le tableau de ces différentes pefées. (V oyez
ci-après le tableau de la première expérience.') On y voit
les variations qui fe font trouvées non-feulement
dans les pains en général fur lefquels notre expérience
à roulé , mais encore dans ceux qui, en particulier
, occupoient chacun des quartiers, ainfi que
le coeur du four : on y remarque que fi, dans le
premier quartier, un des pains a pelé quatre livres
juftes, & un. autre quatre livres quatre gros ,■ les
feize autres ont éprouvé une perte plus ou moins
marquée au deffous de quatre livres : ce déchet a
été pour l’un d’eux de deux onces & demie ; pour
d’autres, deux onces ; pour quelques-uns, d’une once
ôc demie , pendant que d’autres n’ont perdu qu’une
«flice, Si que poûr cinq d’entre eux la perte s’eft
bornée à quatre gros. ;
Lé fécond quartier offre également des variations ;
fi deux des pains qui Toccupoient pefoient quatre
livres juftes; & un autre quatre livres-quatre gros,
quelques-uns une once & demie : huit autres n’a-
voiént éprouvé chacun qu’ntîe once de déchet, &
un féu’l n’a voit perdu que quatre'gros.
L’inégalité de poids eft également remarquable à
l’égard des pains qui avoient été placés dans le coeur
du four : tandis que des pains q u i, avant que d’être
cuits , portoient dix onces en excédent de pâte , le
premier pefoit, au fo-rtir du four, quatre livres juftes,
& le fécond jufqu’à quatre ,livres- une once; il y
âvoit un'dèchet de quatre gros fur lé troifième, ôc
une perte d une once 6c demie fur "le quatrième,
c’eft-à-dire-, une différence de deux onces 6c demie
du fécond, au quatrième de ces pains, quoiqu’ils
fuffent placés au centre du four, & parurent y avoir
dû éprouver une chaleur égale.
Quant aux pains numérotés qui avoient été
placés ,auffi dans le coeur du four, on devoit ?’as-
,‘tehdre à quelques variations dans leur p'oids puif-
que , l’excédent de pâte, avant la cuiflon, n’étoit
pas le même dans ces pains , 6c qu’il devoit fe trou- !
ver au moins une différence bien marquée entre
ceux dont l’excédent de pâte n’étoit que de dix onces,
6c ceux qui en avoient douze en excédent. On remarque
cependant que fi les dixième 6c onzième
pains numérotés pefoient quatre livres une once 6c
demie au fortir du four , comme on pouvoit s y attendre
, parce que l’excédent de la pâte, avant la
cuiflon , y avoit été plus fort de deux onces .que
dans le fixiëme de cès mêmes pains numérotés; on
.remarque, dis-je, que le douzième de ces pains,
qui auroit dû pefer quatre livres une once 6c demie
, comme le dixième 6c onzième pain, puifqu’ils
étoient tous les trois du même poids avant la cüif-
fon, ne pefoit cependant, au fortir du four, que
trois livres quinze onces ôc demie, qu’il avoit perdu
deux onces de plus que les deux pains précéderis,
6c ne fe trouvoit pareil en poids qu’au fixième de
, ces pains numérotés, 6c à plufieurs autres des quartiers
du four, quoique ceux-ci euffent porté, avant
la cuiflon, deux onces de moins en excédent de
pâte que ce douzième pain numéroté. On voit par ce
détail fur les pains , que des numéros diftinguoïent,
que fi le douzième de ces pains n’avôit pas“ eu ,
dans l’état de pâte , deux onces de plus 'que le cinquième,
ils feroient revenus au même poids après
la cuiflon , c’eft-à-dire à trois livres treize onces 6c
demie. Nous faifons cette obfervatipn, afin qufon ne
foupçonne pas que le déchet affez confidérable qui
fe trouve fur le douzième pain numéroté, ait été
occafionné par quelque , accident auquel nous; n’au-
’ rons pas été attentifs,, puisque le cinquième pain
numéroté, le fécond du premier quartier , 6c le
’ quatorzième du.fécond quartier, rie pëfent égale-
. ment que trois livres treize onces 6c demie , 6c par
conséquent fe trouvent inférieurs chacun de deux
onces quatre gros, aux quatre livres juftes fur lef-
quelles nous avions lieu de compter.
. .Lefour de l’école de boulangerie étant un peu
plus grand qu’il n’eût fallu pour les cinquante pains
feulement que nous y mîmes en expérience, il
donna lieu à une obfervation de la part des bou-.
langers, à laquelle nous nous rendîmes attentifs : ils
prétendirent qu’il y auroit eu moins d’iriegalité fur
le poids des pains's’ils s’y fuffent trouvés plus près
les uns-des autres , fi en un mot la fournée eût
été complète. M. Garin , l’un d’entre eux , infifta
fur ce point, ôc nous, dit qu’il avoit été remarqué
moins de variation dans ces çirconftances, par une
épreuve-faite dans cette vue ôc avec l’attention que
demandoit la pefée de la pâte, avant que les pains
fuffent mis au four., Le defir de ne rien négliger de
tout ce qui pouvoit nous conduire à l’exàélitude ,
nous engagea à lui propofer de répéter chez lui
notre expérience : il voulut bien s’y prêter, ôc nous
nous rendîmes chez lüi de 22 oélobre à huit heures
du matin. Nous y trouvâmes la pâte dans le tour
6c prête a .être diviféê pour en former des pains.
Nous; ne nous, écartâmes point pour cette expérience
ci, dé celle que nous avions faite à l’école de
boulangerie; 6c s’il s’y trouva quelques différences,
elles contribuèrent à nous donner de nouveaux éclairci
ft'emens , fans nous faire perdre le point de vue qui
nous occupoit.
On pe'fa d’abord avec exactitude la pâte pour
douze pains, dont les trois premiers étoient de quatre
livres neuf onces., les -trois autres.de quatre livres
dix onces, les trois fuivans de quatre livres onze
onces , 6c les trois derniers de quatre livres douze
onces. Chacun de ces pains fut numéroté , 6c ne
laiffa aucune incertitude fur l’excédent de poids en
pâte qu’on y avoit mis. Quatorze autres pains per
fant quatre livres dix onces , furent préparés pour
le premier quartier du four ; on en difpofa douze
autres du même poids pour le fécond quartier -;
_ôc le coeur du four fut réfervé tant pour les pains
; diftingués par des numéros, que pour fix pains longs
i dé vingt-neuf pouces , ÔC un pain rond auquel on
| conferva cette forme le mieux qu’il fut poffible ,
j 6c qui pefoit quatre livres dix onces , comme les fix
pains longs dont nous venons de parler.
Lorfque le four eut acquis le degré de chaleur
convenable, on y mit les pains dans Tordre que
nous avions r-églé ; ôc après qu’il fut cuit, le même
ordre régna dans les pefées que nous en fîmes.
Quoique le four/de M. Garin foit plus petit que
celui de l’école de boulangerie cependant les pain-s
que nous y avions mis au nombre de quarante-cinq,
n’avoient pas fuffi pour le remplir entièrement : on
avoit rendu la fournée complète, en y ajoutant quelques
petits pains de fantaifie , qui avoient garni les
, endroits du four que nos pains n’avoient pas occupés.
Nous mettons encore fousries yeux du comité ,