
quatre , plus ou moins , de la main gauche, par le
bout qui doit faire la pointe , placé entre le pouce
& l’intervalle de la troifième & de la fécondé jointure
de l’index ; de les tenir divergentes , & d’en
applatir fur l’enclume l’autre bout. C e bout fera le
cul de l’aiguille. Voyez fig. 4 , un ouvrier qui palme,
ou applatit l’extrémité de l’aiguille qui doit être
percée. Voye\ la même manoeuvre repréfentée plus
en grand, même planche , fig. 16. (K ) eft la fituation
de la main de l’ouvrier palmeur. (L) font les aiguilles
à palmer fur l’enclumeau.
On conçoit aifément que ce petit applatiffement
fera de la place à la pointe de l’inftrument qui doit
percer l’aiguille ; mais pour faciliter encore cette
manoeuvre , on tâche d’amollir la matière. Pour cet
effet , on paffe toutes les aiguilles palmées par le
feu , on les laiffe refroidir ; & un autre ouvrier ,
nommé le perceur3 tel que celui qu’on voit, fig. 2 ,
affis devant un billot à trois pieds (fi) , prend un
poinçon à percer, l’applique fur une des faces appla-
ties de l’aiguille, & frappe fur le poinçon ; il en fait
autant à l’autre face applatie, & l’aiguille eft percée.
La fig. 10 repréfente féparément ce billot à trois
pieds, au milieu duquel eft un tas ou petite enclume
qui fert au perceur d’aiguilles ; & fur les bords ,
divers autres petits tas qui fervent au dreffeur pour
dreffer les aiguilles au marteau, après qu’elles font
trempées.
On voit encore la même manoeuvre du perceur ,
même planche , fig. 13. n , eft la main de l’ouvrier
armée du marteau à percer : m, eft l’autre main avec
le poinçon. On apperçoit dans le poinçon l’aiguille,
& l’aiguille eft pofée fur l’enclumeau. On tranfporte
les aiguilles percées fur un bloc de plomb, ou un
ouvrier qu’on v o it, fig. 3 , ôte, à l’aide d’un autre
poinçon, le petit morceau d’acier refté dans l’oeil
de l’aiguille, & qui le tenoit bouché. Cet ouvrier
s’appelle le troqueur ; & la manoeuvre, troquer les
aiguilles.
Les aiguilles troquées paffent entre les mains d’un
ouvrier , fig. 7 de la vignette, planche 1 , qui pratique
à la lime cette petite rainure qu’on apperçoit
des deux côtés du trou & dans fa dire&ion : c’eft ce
qu’on appelle les évider.
Quand les aiguilles font évidées, & que la canelle
ou la rainure , ou la railure eft faite , & le cul de
l’aiguille arrondi, ce qui eft encore de l’affaire de
Xèvideur 3 on commence à former la pointe à la lime,
ce qui s’appelle pointer l’aiguille ; & de la même
manoeuvre on en forme le corps, ce qui s appelle
drejfer l’aiguille.
Quand les aiguilles font pointées & dreiïées, on
les range fur un fer long, plat, étroit, & courbé
par le bout. Voye£ ce fer en (p ) , fig. 13, avec la
pince dont on prend ce fer quand il eft chaud. Quand
il eft tout couvert , on fait rougir fur ce fer les
aiguilles à un feu de charbon. Rouges, on les fait
tomber dans un baflin d’eau froide pour les tremper.
Cette opération, que fait l’ouvrier trempeur, même
planche, fig. ƒ 3 eft la plus délicate de toutes ; c’eft
d’elle quô dépend la qualité de l’aiguille. Trop dè
chaleur brûle l’aiguille ; trop peu la laiffe molle. Il
n’y a point de règle à donner là-deffus. C ’eft l’expérience
qui forme l’oeil de l’ouvrier, & qui lui fait
re'connoître à la couleur de l’aiguille, quand il eft
temps de la tremper.
On vo it, fig. u , le fourneau de fer , compofé
d’une grille fur laquelle on fait le feu de charbon
qui fert au trempeur pour faire rougir les aiguilles fur
la plaque de tôle, fig. 13 , & les jetter enluite dans
le baquet plein d’eau froide qui eft devant la fig. $
de la vignette.
Après la trempe fe fait le recuit. Pour recuire les
aiguilles ,on les met dans une poêle de fe r , fur un feu
plus ou moins fort, félon que les aiguilles font plus ou
moins fortes. Voyez fig. 6 de la vignette l’ouvrier
recuifeur, Scfig. p la poêle qui fert pour faire recuire
les aiguilles fur une plaque de tôle. L’effet du recuit eft
de les empêcher de fe caffer facilement. Il faut encore
avoir ici ’grande attention au degré de la chaleur*
Trop de chaleur les rend molles & détruit la trempe ;
trop peu les laiffe inflexibles & caffantes.
Il arrive aux aiguilles dans la trempe oh elles font
jettées dans l’eau fraîche, de fe courber, de fe tordre ,
& de fe défigurer. C ’eft pour les redreffer & les
reftituer dans leur premier état qu’on les a fait recuire.
On les redreffe avec le marteau. Cette manoeuvre
s’appelle redrejfer les aiguilles avec le marteau.
Il s’agit enfuite de les polir. Pour cet effet, on en
prend douze à quinze mille qu’on arrange & étend
en petits paquets les uns auprès des autres fur un
morceau de treillis neuf, couvert de poudre d’émeri.
Quand elles font ainfi arrangées, on répand encore
deffus de la poudre d’émeri qu’on arrofe d’huile ; on
roule le treillis, comme fait l’ouvrier, fig. 8 de la
vignette,planche 1 ; on en forme une efpèce de bourfe
oblongue, en le liant fortement par les deux bouts,
& le ferrant par-tout avec des cordes : opération de
la fig. 1 de la vignette de la planche II.
La fig. 13 (bis) de la première planche, repréfente
le treillis étendu fur lequel font les aiguilles rangées
& faupoudrées d’émeri à l’huile ou avec du fayon ;
& lajîg. 12 , le treillis roulé & mis en bourfe.
On prend cette bourfe ou ce rouleau, on le porte
fur la table à polir ; on place deffus une planche
épaiffe, chargée d’un poids. Un ou deux ouvriers
font aller & venir cette charge fur le rouleau ou la
bourfe pendant un jour & demi , & même deux
jours de fuite. Par ce moyen les aiguilles, enduites
d’émeri, font continuellement frottées les unes contre
les autres , félon leur longueur, & fe poliffent
infenfiblement. Voye^ cette manoeuvre , planche I I , '
fig. 3 Sc 6 de la vignette. / eft la table , m eft la
planche, n eft le poids dont elle eft chargée, p font
les ouvriers.
On a répété plus en grand cette machine , fig 2
de la même planche. L eft la table de la poliffoire.
M , la planche qui repofe fur les rouleaux de treillis
R T , remplis d’aiguilles, que l’ouvrier, fig* 8 de 1$
planche 1 , a formés , & que l’ouvrier ; fig. 1 de la '
planche I I , a ficelés. C , poignées verticales qu’un
des ouvriers, fig. 3 &. 6 de la olanche I I , faifit pour
tirer ou pouffer la poliffoire. À & B , poignées horizontales
qui fervent au même ufage. D D , deux contrevents
affemblés par le bas dans la traverfe du
pied, & par le haut dans la table L ; ils contribuent
a la folidité du pied. Lorfqu’on ne met qu’un feul
rouleau de treillis T , fous la planche M , chargé
du poids N , un feul ouvrier fuffit -, mais alors on
fufpend.la planche par fon autre extrémité A B , ;
avec deux cordes attachées au plancher , lefquelles
paffent dans les pitons que l’on vo it, le rouleau R
étant fupprimé : on ne met jamais plus de deux
rouleaux de treillis à-la-fois fous la poliffoire.
On peut donc polir de plufieurs manières , à deux
ou à un : à deux, le poids eft ordinairement fufpendu
par quatre cordes égales, & la table eft horizontale ; à
un , il n’y a que deux cordes, & la table eft inclinée.
L ’ouvrier tire la charge , & la laiffe enfuite aller. En
Allemagne on fait aller ces machines ou autres fem-
blables , par des moulins à eau.
Lorfque les aiguilles font polies, on délie les deux
extrémités du rouleau.Le rouleau délié , on jette les
aiguilles dans de l’eau chaude & du fa von ; ce mélange
détache le camboui formé d’huile, de parties d’âcier
& départies d’émeri dont elles font enduites; & cette
manoeuvre s’appelle lejfive. Voyez planche I I , fig. 2
de la vignette , un ouvrier qui déroule les treillis
& laiffe tomber les aiguilles dans la leiîive, après
quelles ont été polies à la poliffoire.
Lorfque les aiguilles font leflivées , on prend du
fon qu’on étale ; on répand les aiguilles encore
humides fur ce fon ; elles s’en couvrent en les
remuant un peu. Quand elles en font chargées, on les
jette avec ce fon dans une boîte ronde qui eft fuf-
pendue en l’air par une corde, & qu’on agite jufqu’à
ce qu’on juge que le fon & les aiguilles fontfecs &
fans humidité. C ’eft ce qu’on appelle vanner les
aiguilles ; mais il eft plus commode d’avoir pour van
une machine telle qu’on la voit fig. 8 de la vignette,
flanche II. C ’eft une boîte , a , b, carrée, traverfée
par un a x e , à une des extrémités duquel eft une
manivelle qui met en mouvement la boîte avec le
fon & les aiguilles qu’elle contient. La fig. 3 eft
l’ouvrier qui fait tourner le van. La fig. 7 (bis) eft
le pied ou le fupport. La fig. 8 (bis) eft le van féparé
de fon fupport, où l’on voit diftinâement la feuillure
qui reçoit la porte. La fig. 9 eft cette porte du van.
La fig. 10 , la barre ou verrou qui affujettit la porte
dans la feuillure deftinée à la recevoir.
Après que les aiguilles font nettoyées par le van,
on a eu foin de les faire paffer par deux ou trois
fons differens ; on les en tire en ouvrant la porte b
du van qui eft tenue barrée. Voyez fig. 8 de la
vignette,planche II. On les met dans des vafes de
bois ; on les tire. On fépare les bonnes des mau-
vaifes ; car on fe doute bien qu’il y en a un bon
no" ’ " re ^ont ta pointe ou le cul s’eft caffé fous la
PQliffoire &. dans le van.
Ce triage & Taélion de leur mettre à toutes la
pointe du même côté, s’appelle détourner les aiguilles.
C ’eft l’opération repréfentée par l’ouvrier, fig. 4 de
la vignette de la planche II.
Il n’eft plus queftion que d’empointer les aiguilles
pour les achever. C ’eft ce qu’un ouvrier placé comme
dans la fig. 7 de la vignette , planche I I , exécute fur
une petite meule de pierre à polir, qu’il fait tourner
avec un rouet, comme on voit même figure, tenant
la manivelle de la roue d’une main, & de l’autre ,
tenant entre le pouce & le premier doigt plufieurs
aiguilles dont on fait rouler les pointes for la pierre
à polir qui eft en mouvement. La fig. 12 , planche 11,
repréfente plus en grand le rouet de l’évideur. Voilà
enfin le travail des aiguilles achevé. La dernière
manoeuvre que nous venons de décrire, s’appelle
l’affinage.
Lorfque les aiguilles font affinées, on les effuie
avec des linges mollets, fecs, & plutôt gras & huilés
qu’humides. On en fait des comptes de deux cents
cinquante , qu’on empaquete dans de petits morceaux
de papier bleu que l’on plie proprement. De
ces petits paquets on en forme de plus gros qui contiennent
jufqu’à cinquante milliers d’aiguilles de différentes
qualités & groffeurs ; on les diftingue par
numéro. Celles du n°. 1 font les plus groffes ; les
aiguilles vont en diminuant de groffeur jufqu’au
n°. 22 qui marque les plus petites.
Les cinquante milliers font diftribués en treize
paquets; douze de quatre milliers , & un de deux
milliers. Le paquet de quatre milliers eft diftribué en
quatre paquets d’un millier, & le paquet d’un millier
en quatre paquets de deux cents cinquante. Chaque
paquet porte le nom & la marque de l’ouvrier.
Le paquet de deux cents cinquante eft en gros
papier b leu, les autres en papier blanc ; tous font
encore couverts de gros papiers blancs en fix ou
fept doubles qui font leur enveloppe commune :
cette enveloppe eft bien ficelée ; on la recouvre de
deux veffies de cochon qu’on ficelle, & les veflies
de cochon d’une groflè toile d’emballage. Toutes ces
précautions font néceffaires, fi l’on ne veut pas que
les aiguilles fe rouillent. Le paquet, tel que nous
venons de le former, eft marqué à l’extérieur avec
de l’encre, des différens numéros des aiguilles qui y
font contenues.
Les aiguilles à tailleur fe diftribuent en aiguilles à
boutons , à galons & à boutonnières ; & en aiguilles
à rabattre, à coudre & à rentraire.
L’aiguille dont le tailleur fe fert pour coudre ,
rentraire & rabattre, eft la même ; mais entre les
tailleurs , les uns font ces manoeuvres avec une
aiguille fine, les autres avec une aiguille un peu
plus groffe. Il en eft de même des aiguilles à boutons ,
à galons , & à boutonnières ; il ne feroit pourtant
pas mal de prendre l’aiguille à boutons & à galons
un peu plus forte que l’aiguille à boutonnières, parce
quelle a plus de réfiftance à vaincre.
Aiguilles des chirurgiens. Les chirurgiens fe
fervent d’aiguilles ordinaires pour coudre les bandes
A ij