tourelle 5 , on pratiquera un trou d’un pied de
diamètre, qui répondra au milieu d’une-perite voûte
6 , de quatre pieds environ de hauteur, fur deux
pieds de largeur , ouverte des deux côtés du nord
au fud , traverfant toute la maffe du bâtiment, &
defcer.dant au deffous du niveau du terrain de fix
à fept pieds : on appelle cette voûte l'ébraifoir. Pour
avoir accès dans l’ébraifoir, on déblaiera des deux
côtés, à fon entrée, félon une pente douce & une
largeur convenable, tonte la terre qu’on élevra en
glacis, afin de monter au haut de la plate-forme.
cette terre élevée en glacis, fig. première, depuis
le rez-de-chauffée jufqu’au haut de la plateforme
, a , a , a , h. A l’eft, on pratiquera une petite
porte ceintrée de cinq pieds de hauteur fur deux
pieds de largeur, pour entrer dans la tourelle.
Le four ainfi conftruit,. il s’agit d’y arranger les
pierres qu’on fe propofe de convertir en chaux.
On aura de ces pierres amaffées en tas autour du
four, on choifira les plus groffes & les plus dures ,
& l’on- en formera au centre de la tourelle une
efpèce de voûte fphérique de fix pieds de hauteur,
laiffant entre chaque pierre un petit intervalle de
deux ou trois pouces , enforte qu’elles repréfentent
groflièrement les boulins ou pots d’un colombier ;
autour de cet édifice on placera d’autres pierres, &
l’on continuera de remplir la tourelle , obfervant
de placer toujours les plus groffes & les plus dures
le plus proche du centre, & les plus petites & les
moins dures fur des circonférences plus éloignées,
&. ainfi de fuite ; enforte que les plus tendres & les
plus petites touchent la furface concave de la tourelle.
On achèvera le comblement de la tourelle
avec de petites pierres de la groffeur du poing ou
environ , qui feront"provenues des éclats qui fe font
faits fon tirant la pierre de la carrière, ou qu’on aura
brifées exprès avec la maffe. On maçonnera enfuite
-en-dehors groflièrement la porte de la tourelle , à
hauteur d’appui ; enforte qu’il ne refte plus que le
paffage d’une botte de bruyère, qui a ordinairement
dix-huit pouces en tout fens. On finira ce travail
par élever autour d’une partie de la circonférence
du débouchement, une efpèce de mur en pierres
léchés du côté oppofé au vent.
Les chofes ainfi difpofées, on brûlera un quarteron
ou deux de bruyères, pour reffuyer la pierre.
Cinq ou fix heures après, on commencera à chauffer
en règle:pour cet effet, le chaufournier dîfpofe
avec fa fourche fur l’âtre de la tourelle, une douzaine
de battes de bruyère, ce qu’il fait fig. $ ; il y
met le feu , & lorfqu’elles font bien enflammées , il
en prend une treizième qu’il place à la bouche du
four, & qui la remplit exaâement. Le feu, pouffé
par l’aâion de l’air extérieur qui entre par les portes
de l’ébraifoir, & fe porte dans la tourelle par la
lunette pratiquée au centre de fon âtre , faifit la
bourée placée fur la bouche du four, coupe fon
lien & l’enflamme : alors le chauffeur la pouffe dans
Tâtre avec fon fourgon, l’éparpille, & en remet une
autre fans interruption de mouvement, à l’embouchure
du four, qu’elle ferme comme la précédente'}
Le feu atteint pareillement celle-ci, & la délie ; 8t
le chauffeur avec fon fourgon la pouffe pareillement
dans la tourelle , & l’éparpille fur fon âtre : il continue,
cette manoeuvre avec un de fes camarades
qui le relaye, pendant douze heures ou environ,
jufqu’à ce qu’ils aient confumé douze à quinze cents
bottes de bruyères. On connoît que la chaux eft
faite, quand il s’élève au deffus du débouchement
de la plate-forme, un cône de feu dé dix à douze
pieds de haut, v if, & fans prefque aucun mélange
de fumée ; & qu’en examinant les pierres, on leur,
remarque une blancheur éclatante.
Alors on laiffe réfroidir le four ; pour cet effet,
on monte fur la plate-forme , on étend des gaules fur
le débouchement, & on répand fur ces gaules quelques
bourées. Lorfque le four eft froid, on tiré la
chaux du four ; on la met dans des tonneaux fous
une voûte contiguë au four , de peur d’incendie ,
& on la tranfporte par charrois aux lieux de fa def-
tination.
Obfervez, i° . Que quand il fait un peu de vent, que
l’air eft un peu humide , la chaux fe fait mieux que
dans les grands vents &par les pluies ; apparemment la
chaleur fe conferve mieux alors , la flamme fe répand
par-tout plus uniformément, ne s’élève point
au débouchement avec tant de violence, ou peut-
être même par quelqu’autre caufe plus fecrette.
z°. Que les bourees trop vertes nuifent & à la
cuiffon & à la qualité de la chaux.
3°. Que le chauffeur doit avoir la plus grande attention
à élancer de la bouche du four au milieu de
l’âtre fa bourrée enflammée, & de l’éparpiller avec
un grand fourgon qu’on lui voit à la main fig. y , de
dix pieds de tige de fe r , ajuftée à.un manche de bois
de dix-huit pouces de longueur. Si plufieurs bourées
s’arrêtoient d’un même côté , il pourroit arriver que
toute une partie de la fournée fe brûleroit, qu’une
autre partie ne feroit qu’à demi-cuite, & qu’il réfui-
teroit un grand dommage pour-le maître.
4°. Que le feu qu’on entretient dans le four eft
très-violent ; que le foin qu’on a de boucher la bouche
du four avec une bourée , le concentre & le
porte en haut ; qu’il blanchit le fer du fourgon en
quatre à cinq fécondés ; & qu’il écarteroit avec fra-r
cas les murs du fourneau , s’ils étoient trop légers.
5°. Qu’il faut que ce feu foit pouffé fans intermif-
fion , fans quoi la fournée entière feroit perdue , du
moins au témoignage de Palifli, qui raconte que,
paffant dans les Ardennes, il trouva fur fon chemin
un four à chaux , dont l’ouvrier s’étoit endormi
au milieu de la calcination ; & que , comme il tra-
vailloit à fon réveil à le rallumer , Palifli lui dit
qu’il brûleroit toute la forêt d’Ardennes avant que
de remettre en chausç la pierre à demi-calcinée.
6°. Que la chaux fera bien cuite, fi la pierre eft
devenue d’un tiers plus légère après la calcination
qu’auparavant, fi elle eft fonore quand on la frappe,
& fi elle bouillonne immédiatement après avoir étfe
arrofée ; & qu’on l’aura d’autant meilleure,, que les
pierres qu’on aura calcinées feront dureé: les anciens
calcinoient les fragmens de marbre , & prévoient
, quand il étoit queftion de la mêler au ciment
& de l’éteindre, toutes les précautions imaginables.
7°. Que la manière de faire la chaux que nous
venons de décrire, n’eft pas la feule en ufage. Au
lien de fourneaux, il y a des endroits oh Ton fe
contente de pratiquer des trous en terre , où l’on
arrange les pierres à calciner les unes à côté des
autres ; on y pratique une bouche & une cheminée ;
on recouvre les trous & les pierres avec de la terre
glaife ; on allume au centre un feu qu’on entretient
fept à huit jours ; & lorfqu’il ne fort plus ni fumée
ni vapeur , on préfume que la pierre eft cuite.
8°. Qu’il faut creufer un puits aux environs du
four à chaux , i°. pour le befoin des ouvriers; z°.
pour la petite maçonnerie qu’on fait à l’entrée de
la tourelle ; 3°. en cas d’incendie ; car il peut arriver
qu’un grand vent rabatte le cône de feu fur les
bourées, & les enflamme.
9°. Que pour tranfporter la chaux dans des voitures
, il faut avoir grand foin de les bien couvrir de
bannes tendues fur des cerceaux ; que les chaufourniers
allument du feu avec la chaux afféz commodément;
ils en prennent une pierre groffe comme, le
poing , la trempent dans l’eau ; & quand elle commence
à fumer , ils la couvrent légèrement de pouf-
fière de bruyère, & fou-ffient fur la fumée jufqu’à
ce que le feu paroiffe , & qu’on ne fait guéris de
chaux pendant l’hiver.
Les qualités effentielîes. de la chaux font d’être
ppfante , quelle fume comme un pot de terre cuite,
& qu’en la détrempant avec de l’eau , la fumée qui
s’en exhale foit épaiffe, & s’élève en haut avec promptitude.
Ce phénomène d’effervefcence que préfente
la chaux , dépend de ce que la pierre à chaux , dans
fa calcination ; ayant perdu l’eau qu’elle contenoit,
s’en faifit avidement lorfqu’on vient à l’éteindre
en la mêlant avec de l’eau , d’où naît néceffaire-
tnent la chaleur.
De la manière, d'éteindre la. chaux.
L’ufage ordinaire d’éteindre la chaux en France, eft
d’avoir deux baflins ; l’un tout-à-fait hors de terre, à
environ deux pieds & demi d’élévation, eft deftiné
à éteindre la chaux ; l’autre , creufé dans la terre à
environ fix pieds plus ou moins de profondeur , eft
deftiné à la recevoir lorfqu’elle eft éteinte. Le premier
fert à retenir ■ les corps étrangers qui auroient
pu fe rencontrer dans la chaux vive , & à ne laiffer
paffer dans le fécond que ce qui doit y être reçu.
Pour cet effet, on a foin de pratiquer , non-feulement
dans le paffage qui communique de l’un à l’autre
, une grille poiir retenir toutes les parties grof-
fières , mais encore de tenir le fond de ce baflin plus
elevé du côté du paffage ; afin que ces corps étrangers
demeurent dans l’endroit le plus bas, & ne puif-
(ent couler dans le fécond baflin. Ces précautions
une fois prifes, on nettoiera bien le premier qu’on
fermera hermétiquement dans fa circonférence , &
que l’on emplira d’eau & de chaux en même temps.
Il faut prendre garde de mettre trop ou trop peu
d’eau ; car le trop la noie & en diminue la force ,
& le trop peu la brûle , diffout fes parties & la
réduit en cendres. Ceci fait , on la tourmentera à
force de bras avec le rabor, pendant quelque temps
à diverfes reprifes ; après quoi on la laiffera couler
d’elle même dans le fécond baflin, en ouvrant la
communication de l’un à l’autre , &. la remuant
toujours jufqu’à ce que le baflin foit vidé ; enfuite
on refermera le paffage, & on recommencera l’opération
j ufqu’à ce que le fécond baflà» foit plein.
La chaux ainfi éteinte , on la laiffera refroidir
quelques jours , après lefquels on pourra l’employer..
Quelques-uns prétendent que c’eft-là le moment de
l’employer, parce que fes fiels n’ayant pas eu le temps
de s’évaporer , elle en eft par conféquent meilleure.
Mais fi on vouloit la conferver , il faudroit avoir
foin de la couvrir de bon fable d’environ un pied
ou deux d’épaiffeur : alors elle pourroit fe gardes
deux ou trois ans fans perdre fa qualité.
Il arrive quelquefois que l’on trouve dans la chaux
éteinte des parties dures & pierreufes , qu’on appelle
bifcuits ou recuits, qui ne font d’aucun ufage-, &
qui pour cela font mis à part pour en tenir compte
au marchand. Ces bifcuits ne font autre chofe que
des pierres qui ont été mal cuites , le feu n’ayant
pas été entretenu également dans le fourneau ; c’eft
pour cela que Vitruve & Palladio prétendent que
la chaux qui a demeuré deux ou trois ans dans le
baflin , eft beaucoup meilleure ; & leur raifon eft
que', s’il fe rencontre des morceaux qui aient été
moins cuits que les autres , ils ont eu le temps de
s’éteindre & de fe détremper comme les autres. Mais
Palladio en excepte celle de Padoue , qu’il faut ,
dit-il, employer auflitôt après fa fufion : car fi on
la garde , elle fe brûle & fe confomme de manière
qu’elle devient entièrement inutile.-
La manière que les anciens pratiquoient pour
éteindre la chaux , étoit de faire ufage feulement
d’un baflin creufé dans la terre , qu’ils rempliffoient
de chaux , &. qu’ils couvroient enfuite de fable, jufqu’à
deux pieds, d’épaiffeur ; ils l’afpergeoient em-
fuite d’eau , & l’entretenoient toujours abreuvée ,
de manière que la chaux qui étoit deffous pouvoit
fe diffoudre fans fe brûler , ce qui auroit très-bien
pu ■ arriver fans cette précaution. La chaux ; ainfi
éteinte, ils la laiffoient, comme nous l’avons d it ,
deux ou trois ans dans la terre avant que de l’employer
; & au bout de ce temps , cette matière
devenoit très-blanche , & fe convertiffoit en une
maffe à-peu-près comme de la glaife , mais fi grade
& fi glutineufe| qu’on n’en pouvoit tirer le rabot
qu’avec beaucoup de peine , & faifoit un mortier
d’un excellent ufage pour les Æpduits ou pour les
ouvrages en ftuc.. bi pendant l’efpace de ce temps
on s’appercevoit que le fable fe fendoit dans fa m-
perficie, Si ouvroit un paffage à la fumée, on avoir :
foin auflitôt de refermer les fentes avec d’autre fable»-