
moins de Paris, eft de faire les pains bis de douze
livres , de huit ôc de fix , ôc toujours ronds. On fait
des pains bis blancs de douze, de huit, de fii Ôc
de cinq , ôc tous ronds aufli.
Pour ce qui eft du pain blanc , on le fait de toutes
grandeurs Ôc de toutes formes.
L’expérience a appris qu’en général il faut pour
avoir un pain d’une livre, pefer une livre cinq onces
de pâte.
Que pour un pain cuit de deux livres , il a fallu
pefer deux livres fept onces de pâte.
On en pèfe trois livres neuf onces pour avoir un
pain de trois livres.
Pour un pain de quatre livres, on prend quatre
livres dix à onze onces de pâte. Il s’en perdra, en
trente-cinq minutes de four, aune chaleur convenable
, dix à onze d’eau ; il en reftera environ vingt-
deux onces dans le pain de quatre livres cuit. Ainii
il s’en diffipe le tiers par la cuiflon.
Dans un effai fait du temps de Charles V , on a
paffé quinze onces de pâte pour douze onces de
pain cuit ; ôc par le même effai, onze onces de
pâte donnoient neuf onces ôc un quart de pain. Il
faut confulter la fin de ce traité par rapport à la pefée
des pains.
L ’apprêt des pains.
On dit que les pains ont pis leur apprêt, lorfqu’ils
ont levé fuffifamment pour être mis au four.
Quand on partage la pâte en pains , elle n’eft pas
encore affez levée pour la mettre à cuire ; c’eft
pourquoi il faut la laiffer lever encore lorfqü’elle eft
en pain. '
On met les pains à prendre leur apprêt dans des
pannetons, lorfqu’ils font longs , depuis fix livres
jüfqu’à une livre.
Les petits pains longs d’une livre ôc au deffous,
fe mettent fur un long morceau de toile qu’on pliffe
entre les pains pour les féparer : ces petits pains
font, dans cette fituation, ce que l’on appelle fur
couche.
On pofe aufii fur couche les gros pains ronds de
douze livres , de huit ôc de fix. Les autres pains
ronds doivent être mis dans des plateaux, s’ils font
grands de quatre livres, de trois ôc de deux. On
place les pains ronds dans des febilles lorfqu’ils font
petits , d’une livre, d’une demi-livre, ou d’un quarteron.
Il y a des boulangers qui aiment mieux mettre
lès pains à prendre leur apprêt fur du bois que fur
du linge , parce que les couches ôc les pannetons
doublés de linge , font plus fujets à l’humidité ôc à
la mal-propreté.
On jette du fleurage fur les couches, dans les
pannetons , dans les plateaux ôc dans les febilles ,
en y plaçant les pains ; Ôc c’eft de la farine qu’on
répand fur la couche lorfqu’on y met la pâte à
prendre fon levain, parce qu’en partageant la pâte
ôc la tournant en pains , on y incorpore ainfi de la
farine ; au lieu que le fleurage ne fert fous les
pains qu’à les garantir de s'attacher aux couchés Ôc
aux pannetons.
Il faut étendre fur les pains qui font à prendre
leur apprêt, principalement fur les pains mollets ,
des couvertures ; on mouille un peu ces couvertures
d’eau froide : la fraîcheur de cette eau ne
pénètre pas en dedans ; au contraire , elle y concentre
la chaleur. Si la couverture étoit chaude , le
pain fe fendroit en cuifant, ôc s’érailleroit ; il feroit
comme déchiré à la croûte de deffus.
On tient les pains chaudement, pour qu’ils prennent
leur apprêt, ce qui dure environ trois quarts-
d’heure, qui eft le temps qu’on met à pefer, à former
les pains Ôc à les enfourner.
: Ce n’eft pas feulement pour tenir les levains, la
pâte ôc les pains chaudement qu’on les couvre, c’eft
encore pour qu’ils ne s’évaporent pas.
On laiffe les pains plus ou moins long-temps à
prendre leur apprêt, félon qu’il fait plus ou moins
chaud. Il ne faut les laiffer qu’une petite demi-heure
lorfque le temps eft chaud ; au lieu qu’il les faut
garder une heure, quelquefois une heure ôc demie,
lorfqu’il fait bien froid en hiver.
Il faut que les pains foient pris ayant tout leur
apprêt. L’odeur feule peut régler fur cela lorfqu’on
en a l’expérience ; les pains ôc la pâte , comme les
levains qui ont leur apprêt, ont une odeur fpiritueufe
particulière à chacun ; la pâte a une odeur douce ,
au lieu que les levains l’ont aigre.
Il feroit fuperflu d’entrer ici dans les détails de
la fabrication de toutes les différentes efpèces de
pain, ôc ce que nous en avons rapporté ci-devant
doit fans doute fuffire ; c’eft pourquoi qu’il nous foit
permis d’y renvoyer.
De la cuiffon du pain.
Le changement du grain enfariné parla mouture,’
l’alliage de la farine avec l’eau en pâte dans le pé-
triffage, la fermentation de la pâte par le levain, font
des préparations néceffaires pour faire le pain ; mais
elles ont effentiellement befoin de s’achever ôc de
fe perfectionner dans le four par la cuiffon.
Nous avons dit à l’article du four a quelle eft ou
doit être fa conftruétion , ôc quelle eft la manière
de le chauffer. Voyez à ces articles.
Nous ajouterons qu’il faut , lorfqu’on le peut,
brûler du bois fec ôc fendu menu pour chauffer le
four. On doit prendre de préférence le bois de
chêne, de hêtre ôc les bois blancs, qui brûlent affez
vite fans avoir befoin d’être auparavant féchés au
feu, comme les gros bois qui font fujets à noircir.
Ce qui exhale du bois eft féchant , peut donner
au four de l’odeur Ôc une mauvaife qualité. On a
l’expérience' qu’un four chauffé avec de vieux treillages
peints en vert , a communiqué au pain la qualité
empoifonnante du verdet. Les autres couleurs,
celles en blanc qui viennent du plomb, feroient aufli
très-pernicieufes.
Afin de chauffer le four à propos, il faut y répandre
quelquefois le brafier, pour que la chaleur foit égale dans
dans tous les quartiers du four ; ÔC lorfqu’on chauffe
le four avec du gros bois, on doit de temps en temps
ôter la braife, pour que l’âtre ne chauffe pas plus
que la chapelle ou la voûte du four.
Charger le four ; c’eft le chauffer : il faut deux
heures pour le bien chauffer s’il étoit tout-à-fait froid ; j
au contraire , une demirheure fuffit pour rechauffer
le four fi l’oi* vient de retirer le pain.
Il faut de l’expérience pour chauffer un four a
propos ; il faut aufli joindre de l’intelligence pour
trouver le point de chaleur le plus propre a bien
cuire le pain ; car fi la chaleur eft trop v iv e , elle
brûlera le pain ôc le faifira *, ce qu’on nomme avi,
fans, avoir reçu, par degré la cuiflon convenable. Si
a,u contraire la chaleur du four eft trop foible , la
pâte perd feulement de fon eau , elle seche , ôc ne
cuit pas affez en pain.
Il faut que le four foit par-tout fi chaud , que la
Voûte foit blanche ; fi elle étoit grife , il ne feroit
pas affez chaud. Lorfqu’elle paroît brune ou noire
par la fumée, c’eft que le four ne fait que commencer
.a chauffer.
En Angleterre, on effaie la chaleur du four en
mettant à l’entrée une pincée de farine. Si elle rouflit
fur le champ, la chaleur du four eft au point convenable;
fi la farine noircit, le four eft trop chaud;
fi elle conferve fa blancheur ,1e four neft pas affez
chaud. _ . ,
Si l’on enfourne avant que le four foit tout-a-rait
chauffé, le pain n’y cuira pas fuffifamment ; il aura
de la couleur deffus , parce que la chapelle eft la
partie du four qui chauffera la première, mais il ne
fera, pas affez cuit deffous, par le côte qui touchoit
l’âtre. ■’
Si au contraire on a trop chauffé le four ou qu il
ait été trop tôt chaud , Ôc que pour attendre que le
pain ait été prêt à enfourner*, on l’ait entretenu
chaud , en y laiffant brûler la braife , la chaleur
devient inégale dans le four , parce que la hraife
n’entretient point autant la chaleur de la chapelle
que celle de l’âtre, dans ce cas , le pain fera affez
cuit , ou même brûlé deffous, ôc en meme temps
il rie fera pas cuit deffus, il n’aura point de couleur.
Il faut , lorfqu’on brûle de gros bois , tirer la
braife vers la bouche du four quand il eft prefque
chaud ; c’eft ce qu’on nomme tirer à bouche ; ôc il
faut y remettre-à l’entrée quelques morceaux de
de bois plus iftenus ôc fecs pour faire un feu clair
qui chauffe la chapelle ; c’eft ce qu’on entend dire
par chauffer à bouche; car on commence par chauffer
plus le fond du four que la bouche , ôc d’abord plus
un côté que l’autre ; enfuite on chauffe plus la
bouche. "
La difficulté pour cuire à propos le pain , eft
d’accorder le temps qu’il faut pour laiffer lever la
pâte avec celui qu’on met à chauffer le four. Il faut
faire enforte que le four foit chaud ôc que les pains
aient leur apprêt en même temps. Cette précifion
eft néceffaire ; mais il vaut niieux que le four foit
tihaud avant que la pâte ait tout fon apprêt, que
jicts & Métiers. Tome I. Pattie l.
d’avoir la pâte prête avant que, le four foit affez
chaud, parce qu’on peut, en attendant que la pâte
foit affez levée, entretenir la chaleur du four, en y
jetant quelques morceaux de bois.
Si l’on a deux fours à chauffer , on commence a
chauffer l’un une demi-heure avant l’autre , parce
que c’eft la durée qu’il faut pour enfourner les pains
dans un four de huit à neuf pieds.
L ’enfournement du pain.
Lorfqu’pn juge que le four eft affez chauffé , on
attire dehors, avec le.rouable, la braife ôc la cendre ;
enfuite on nettoie l’entrée du four avec un balai,
ôc il y en. a qui paffent encore un écouvillon dans
le four, t .
Enfuite on place à la bouche du four ce quon
nomme Rallume , qui eft un èompofe de deux ou
trois morceaux de bois fendus ôc flambans, pour
éclairer dans le four pendant qu’on enfourne.
En nettoyant le four par parties avant d’enfourner
, on attire la braife vers le côté le plus
chaud, "qui eft ordinairement le droit, ôc enfin vers
la bouche du four. Enfuite on enfourne le pain. • ;
Pour enfourner, on divife le four par quartiers ,
Ôc on commence par le fond du four; puis venant
vers la bouche , on fuit le contour du four. Ceft
toujours à la gauche que le fournier .range les pre-
miers pains dans le four.
Lorfque les pains ne font point égaux, on commence
par enfourner les plus gros ôc les plus difficiles
à cuire ; ôc l’on finit par les plus petits , qui
cuifent plus promptement, ôc qu’on tire du four
avant les gros pains. #
Les boulangers croient que la cuiffon du pain
dépend fur-tout de la chaleur qui eft dans le quartier
oppofé à celui ou. il. eft placé dans le four. ^ ?
" Chaque fois qu’on a enfourné un rang dg pain,
on lève le bouchoir du four pour, difent les boulangers
, que le pain bouffe, ôc ne s’éVafe point. On
laiffe ainfi le four fermé environ une minute chaque
fois. t • »
On place autour du four les plus gros pains ÔC
ceux de pâte ferme ; on met au milieu les pains de
pâte molle Ôc les plus' petits.
Pour enfourner les pains qui font dans des pannetons
, on les verfe fur une planchette ; enfuite on
répand du fleurage fur la pelle , ôc l’on renverfe fur
la pelle le pain qui étoit fur la planchette , enforte
que la partie du pain qui étoit deffous dans le panneton,
fe trouve encore deffous fur la pelle ôc fur
l’âtre du four. . , .
On verfe de même fur la main , les petits pains
longs qui font fur couche, en levant chaque pli dé
la couche, ôc renverfant enfuite le pain de la main
fur la pelle. . ‘ . "
Pour enfourner lés gros pains, on attife la couche,
afin de faire tomber le pain fur un rondeau , en. fai-
fant une feçouffe du haut en bas pour détacher le J pain de la cpuche ; ôc on le je.tte tout auflitot par up