
& la prononciation arabe ; elle n’eft pas fi rude que
celle-ci, mais plus mâle que l’autre, excepté cependant
à Conftantinople, où on prononce aujourd’hui
le turc auffi doucement que le perfan.
Les Turcs ont fept fortes d’écritures; favoir, le
nefqhi, dont ils fe fervent pour écrire l’alcoran , &
la plupart des livres d’hiftoire. Le diwani, dont ils
fe fervent pour les affaires & dans le barreau ; les
lignes de cette écriture montent de la droite à la
gauche, mais plus fenfiblement vers la fin. Le taalïk,
qui diffère peu du nefqhi, & dont les juges & les
poètes fe fervent ; on s’en fert même en Arabie
pour écrire l’arabe: Le kirma, qui reffemble aufîi au
taalik, & dont on fe fert pour tenir les regiftres. Le
fulus ou f c h u l f i , qui fert dans les titres des livres &
des patentes impériales. Enfin, le iakouti & le rejhani,
qui font ainfi appelés du nom de leurs auteurs ,
mais dont on fe fert rarement. Ils ont encore plusieurs
autres fortes d’écritures, qu’il eft allez inutile
de détailler ici, dès que l’on n’en préfente point de
modèles fous les yeux. Il y a environ trente ans
qu’Ibrahim Effendi a fait élever la première imprimerie
turque à Conftantinople, qui nous a enrichi
d’une bonne hifloire Ottomane en turc , d’une grammaire
turque expliquée en françois, & de plufieurs
autres ouvrages utiles & curieux. Je dis imprimerie,
turque ; car nous avons plufieurs livres hébreux que
les Juifs ont fait imprimer dans cette ville , antérieurement
à cette époque.
Perfan.
Les Perfans ont emprunté leur alphabet des Arabes
; ils y ont ajouté "cinq lettres, dont on peut voir
la figure & la valeur dans la p la n ch e I V . Les anciens
Perfans avoient plufieurs langues & diale&es diffé-
rens ; favoir , le p a r f i , Tle d e r i, le p a h le v i „ le f o g d i ,
le ^abu lï , V h era v i, le k h o ù \ i ; le tartare , le fo u r ia n i
& le c a r ch o u n i. Le p a rfi ou fa r f i étoit ainfi appelé de
la province de Perfe où on le parloit. Elle étoit la
langue des favans, & des maubed ou prêtrès. Le
d e r i étoit la langue de la cour, qui étoit en ufage à
Madaïn, & dans les provinces de Khoraffan & de
Balk. Le p a h le v i étoit ainfi appelé de Pehla, terme
qui défignoit les cinq villes capitales , Ifpahan, Rei,
Hamadan, Neavend & Aderbigiane, où on le parloit.
Le fo g d i étoit ainfi appelé de la province de Sog-
diane, au milieu de laquelle eft fituée Samarcande.
Le [ a h u li étoit ainfi appelé du Zableftan , province
limitrophe de l’Indoftan, & où font fituées les villes
de Gaznah , Bamian , Meïmend, Firouzcoueh , Caboul
, &c. U h e r a v i fe parloit à Herah, dans le Kho-
rafïan. Le k h o u f i , ainfi nommé de la province de
Khoufiftan, fituée entre la province de Fars & Baf-
fora, étoit parlé par les rois & les grands, & il leur
étoit particulier. Enfin, le tartare & le fio ur ian i ou
f y r i e n , étoient aufîi en ufage en Perfe . ainfi que le
c a r c h o u n i . qui étoit un langage compofé de fyriaque
4c de perfan, & que l’on employoit dans les lettres
«niffives.
P l a n c h e V. Egyptien , Phénicien.
Nous devons à la fagacité & aux recherches de
M. l’abbé Barthelemi, la découverte de l’alphabet
égyptien, ainfi que des alphabets phénicien & pal-
myrénien. L’attention qu’il a eue de fe procurer des
copies exaéfes , & même des empreintes des monu-
mens , lui ont applani les difficultés fans nombre que
divers favans ont éprouvées à la leéîure des premières
qopies défeétueufes que l’on avoit fait gra-
_ver. Les peines que M* l’abbé Barthelemi s’eft données
, ont été 'couronnées par la réuffite, & ont
enrichi le public. Il y a lieu d’efpérer que d’autres
infcriptions qui pourront fe trouver par la fuite ,
donneront à fon travail toute la perfection que l’on
peut defirer.
Sous le n°. i eft l’alphabet égyptien d’après l’inf-
cription de Carpentras; on le nomme égyptien, parce
que l’infcription d’après laquelle il eft tiré , fe trouve
au deffous d’un monument qui eft très-certainement
égyptien. Cependant, commeia religion égyptienne
étoit reçue dans la Phénicie, il fe peut que ce monument
foit des Phéniciens, & il y a même beaucoup
d’apparence, puifque les caraétères alphabétiques
des.Egyptiens , qu’on trouve fur divers monumens,
& qu’on n’a pu déchiffrer encore, ne reffemblent à
aucun des caractères que nous connoiffons.
N°. a. Alphabet phénicien d’après des infcrip-
tion confervées à Malte depuis long-temps, & d’après
des médailles de Syrie.
N°i 3. Autre alphabet phénicien d’après des médailles,
de Sicile.
N°. 4. Troifième alphabet phénicien d’après les
infcriptions confervées en Chypre , & rapportées
par Pocoçke.
N°. 5. Quatrième,alphabet phénicien d’après unç
infcription découverte tout récemment à Malte.
Palmyrétiien.
N°. 6. Pajmyrè, ainfi nommée à caufe de la quantité
de palmiers qui étoient dans fes environs, eft la
même ville que l’écriture fainte nomme Tadmor, &
dont elle attribue la fondation à Salomon. Cette
ville étoit fituée à l’entrée du défert, fur lés confins
de la Syrie. Elle devint célèbre fous les règnes d’O-
denat & de Zénobie, qui étendit fes conquêtes depuis
les bords du Tigre jufqu’à l’Hellefpont, & prit
le nom de reine d’Orient, lorfqu’elle fe fut affujetti
l’Egypte , par Zalba, l’un de fes généraux. Cette
reine fut depuis vaincue par Aurélien, chargée de
chaînes d’or & conduite à Rome , où elle mena une
vie privée près de Tibur, & dans une maifon dont
on voit encore les ruines. La ville de Palmyre, capitale
des états de cette feine, étoit dans le voifi-
riage de l’Euphrate, & limitrophe de l’empire des
Perfes à l’orient, & de celui des Romains à l’occident.
Cette fituation étoit extrêmement,avantâgeufe
pour le commerce. En effet, Palmyre devint très-
opulente en diftribuant dans ces deux grands em-
I pires les marchandifes qu’elle tiroit de la Perfe $£
des Indes, par le moyen' des ;caravannes. Elle fut
aufîi célèbre par fon négoce,, que Batne, ville de
l’Anthémifie, fituée près de l’Euphrate, au nord de
la Méfobotatnie'; qti-e Diofcuriade Ou Prëzonde ,
port de la Colchide, dans lequel, au rapport de Pline '
& de Strabon, on voyoit aborder des nége clans de
300 langues différentes; enfin , que T y r & Alexandrie.
Les ruines de Palmyre , deffinées par quelques
voyageurs anglois, prouvent fon ancienne fplen-
deur ; elles offrent,de fuperbes colonnades-, d’une
magnificence & d’une , richeffe qui paffe tout ce
qu’on peut voir en ce genre. Les infcriptions pal-
myrénienues ont refté long-temps fans pouvoir être
déchiffrées : auffi les premières copies étoient-elles
fort défedueufes ; enforte que plufieurs favans anglois
, tels qu’Edouard Bernard, Smith, Robert
Huntington 'Halifax, ont tenté- vainement :d’en
donner des explications. Rhenferd crut être plus
heureux que'lès Anglois-, & il hafarda un alphabet ;
mais la gloire de cette découverte étoit réfervée à
M. l’Abbé Barthelemi; il trouva le moyen de lire
& d’interpréter les infcriptions . palmyréniennes ,-
copiées fidèlement par MM./d’Awkins & Robert
Wood, & il fixa l’alphabet de cette langue ; c’eft
le même que nous donnons dans cette planche. Les
élémens de cet alphabet, qui tiennent de l’hébreu,
s’écrivent de même de drpite-à gauche.
Syro- G allié en.
N°. 7. Ce que nous appelons fyro-galiléfn, eft ,à
proprement parler, l’ancien chaldéen, familier aux
prétendus chrétiens orientaux, qui prennent le titre
de Mendai Iahia , ou difciples de faintJean-Baptifie ;
ils étoient plus connus anciennement fous les noms
de Charanlens & de Sabis. Ils habitent en grand nombre
dans la ville de Baffora & dans les environs. Ces
chrétiens prétendent avoir conferyé parmi eux les
livres qu’ils attribuent fauffement à Adam, & qui
font écrits dans les cara&ères que l’on voit fous ce
n°. La bibliothèque royale poffède plufieurs manuf-
crits fabiens, qui contiennent des -.efpèces de fermons
& de litanies que feu M. l’Abbé Fourmont,
de l’académie des belles - lettres., & profefféur de
fyriaque au collège royal, a traduits én partie. Le fa-
bien eft, à proprement parler, du fyriaque, mais mélangé
de mots empruntés du perfan & de l’ancienne
langue chaldaïque. La,religion de ces peuples me
femble encore plu^ mélangée que leur langue; elle,
tient de l’idolâtrie indienne , du Judaifine & du Ma-
hométifme ; car ils n’ont de chrétien que le nom, & un
certain baptême qu’on leur confère lorfqu’ils naif-
fent, baptême qu’on renouvelle enfuite tous les ans
à trois grandes fêtes différentes, & même lorfqu’ils
fe marient. Us obfervent outre cela une forte d’ablution
foir & matin, à la façon des Mahométans.
Us font un facrifice avec de la fleur de farine, du
vin de paffe & de l’huile , dont le fchek ou facrifi-
cateur fait un gâteau, qu’i l diftribue aux alfiftans
après en avoir mangé un peu. Leur fecorid facrifice
.eft celui de la poule, que l’on lave dans de l’eau
claire, & à laquelle le fchek coupe le cou > étant
tourné du côté de l’orient, en prononçait ces paroles
: Au nom de Dieu , cette chair foit pure à tous
ceux qui la mangeront. Leur troifième facrifice eft celui
du mouton, qui fe fait avec les mêmes cérémonies.
Ces Sabis ont effuyé plufieurs perfécutions ; ils
cpmptent Mahomet, Omar & Tamerlan au nombre
de leurs perfécuteurs ; ils les accufent d’avoir brûlé
leurs livres ,& abattu leurs temples. Ils furent encore
perfécutés par le calife Almamon, qui ,furprisde l’habillement
étroit, & de la longue chevelure de plufieurs
d’entre eux qui l’étoient venus faluer, leur
demanda s’ils étoient alliés .ou tributaires ; ils répondirent
: Nous fommes Harraniens. Êtes-vous chrétiens
, juifs ou mages ,. leur demanda encore le
calife ? cè qu’ils nièrent. Avez-vous des écritures &
un prophète, répliqua le calife ? Us tergiverfèrent
dans ce qu’ils avoient à répondre à cetté demande,
& ne furent que dire. Vous êtes donc, reprit le
, calife, des fadduceèns, dès adorateurs d’idoles, &
, des compagnons du puits qui fut comblé de pierres
i fous le règne d’Al-Rafçhid. Si cela eft ainfi , ajouta
le calife , nonobftant que vous promettiez de payer ■
le tribut, il faut que vous choififliez de deux chofes
l’une, ou de fuivre le mufi-ilmanifme, ou l’une des
religions dont il eft parlé dans l’alcoran; fans cela,
je vous exterminerai tous. Le calife voulut bien différer
fa décifion jufqu’à ce qu’il fût revenu du
pays de Roum, pour lequel il partoit alors. Pendant;
cet intervalle, nombre de ces Harraniens coupèrent
leurs longs cheveux , prirent d’autres habits, & fe
firent ou chrétiens , ou mufulmans. Ceux qui relièrent
attachés à la religion de leurs pères , réfolurent
de fe dire delà religion desSabiens, dont il eft parlé
dans l’alcoran. Le calife mourut dans cette expédition
; & cela n’a point empêché que depuis ce temps-
là ils n’aient été connus fous le nom de Sabièns.
Ben Schohnach les appelle Chaldeens ou Syriens.
Pour moi, je fuis porté à croirè que leur religion
eft celle des anciens Egyptiens, des'Phéniciens Sc
'■ des Chaldeens , rà laquelle ils-auront ajouté quelques
cérémonies extérieures pour en impofer aux chrétiens
& aux mahométans, avec lefquels ils font obligés,
de vivre. •
Ils effuyèrent encore une violente perfécution de
la part des Portugais, qui, maîtres d’Ormous, & amis
du pacha de Baffora, obtinrent de ce gouverneur
qu’on forceroit les Sabis d’aller à l’églife portugaife,
bâtie à Baffora, fous peine d’amende pécuniaire &
de punition corporelle ; perfécution qui ne finit que
lorfquë les Portugais perdirent Ormous.
P l a n c h e VI. Alphabet Ethiopien & Abyffm.
La langue éthiopienne a eu le même fort que la
langue latine , c’eft-à-dire , qu’elle eft devenue une
ilangue morte qui ne s’acquiert plus que par l’étude,
& qui eft confacreë pour les livres de religion; auffi
ces peuples l’appellent-ils lefan ghaa{ , langue d^é