
C om p o s t e u r ; il fert à donner aux lettres les
dernières façons ; ce font des morceaux de bois de
dix - huit à vingt pouces de long fur un de large.
D ’un côté 8t dans toute la longueur eft un petit rebord
pour arrêter le pied de la lettre qui eft arrêtée
aufli au commencement par une petite languette
de bois menu de deux pouces de long, qui eft collée
fur le compofteur qui fert à le tenir. Depuis cette
languette jufqu’à un pouce de 1 autre extrémité , on
arrange les lettres à côté les unes des autres , pour
pouvoir enfuite les faire tomber toutes à-la-fois dans
le juftifieur, les couper & les reprendre de même
à-la-fois. C ’eft aufli fur des composteurs qu’on leur
donne la dernière façon , & qu’on les apprête.
C ontre-poinçon ; c eft la figure intérieure de
l a lettre à laquelle le graveur ne donne pas trop de
talus , de peur quelle ne devienne trop épaiffe par
le long ufage.
C o r p s . Les caraélères d’imprimerie ont une épaif-
feur jufte & déterminée , relative à chaque caractère
en particulier , & fur lefquels ils doivent être
fondus : c’eft cette épaiffeur qui s’appelle corps , qui
fait la diftance des lignes dans un livre ; & on peut
dire qu’il y a autant de corps dans une page qu’il
y a de lignes : c’eft ce corps qui donne le nom au
caraélère , 8t non l’oeil de la lettre. Cependant pour
ne rien confondre, lorfque l’on fond, par exemple.,
un cicéro fur le corps de faint-auguftin , pour donner
plus de blanc entre les lignes de ce cicéro,
pour les ouvrages de poéfie ou autres , on dit pour
lors oeil de cicéro fur le Corps de faint-auguftin.
On dit corps foible & corps fort, par un abus qui
vient de l’ignorance des premiers temps de i imprimerie
, qui n’a été remarqué qu’en 1742 par le fleur
Fournier le jeune , graveur 8t fondeur de caractères
à Paris. Il a donné un plan qui afligne au corps des
caractères une épaiffeur fixe & déterminée , & une
correspondance générale entre eux. N’y ayant point
de règle sûre pour exécuter les carafteres avant que
le fleur Fournier en eût donné, il eft arrivé que
chaque imprimeur a fait faire ces caraéteres fuivant
les modèles qu’il a trouvés chez lui, ou qu il a voulu
choifir : ai nu , il commande , par exemple , un caractère
de cicéro , fans connoitre la mefure déterminée
& exaCte que devroit avoir ce corps ; un
autre a le même caraCtère , dont le corps ^ eft un
peu plus fort ; un troifieme en a un plus foible, &
ainfi des autres» D’un même caraCtere ainfi different
de corps , on appelle le plus épais 1 corps fort,
&. les autres corps foible. Ces corps ainfi confondus,
n’ont ni mefure , ni jufteffe , ni correfpondance ;
ce qui jette une grande confufion dans 1 imprimerie
, & elle fubfiftera tant qu’on n’exécutera point
les proportions données par ledit fleur Fournier.
C o u p o ir ; inftrument fervant aux fondeurs de
caraCtères d’imprimerie , pour couper aux corps des
caractères certaines parties qui nuiroient a limpref-
flon , & pour les rendre plus propres. De ces inftru-
fnens il y en a de deux façons, de bois & de fer.
Ceux de bois font les plus anciens, ôc ils fubfiftent
depuis l'origine de la fonderie. C ’eft un billot de
bois d’un feul morceau , affujetti à hauteur d’appui
fur une efpèce de banc fermé à j ’entour , pour recevoir
les rognures des lettres. Ce billot eft entaillé
dans toute fa longueur de trois à quatre pouces de
profondeur. Dans cette entaille , aux parois du côté
gauche , on met le juftifieur aufli de bois , qui contient
deux ou trois cent lettres plus ou moins , fuivant
leur groffeur , arrangées à côté les unes des
autres ; puis entre ce juftifieur 8c les parois à droite
du billot, on place un coin de bois qui en remplit
le vide , & qui, frappé à plufieurs coups de maib-
le t , ferre les lettres dans le juftifieur, pour pouvoir
fouffrir l’effort d’un rabot avec lequel on les
coupe.
Le coupoir de fer eft d’une invention moderne >
beaucoup plus compofé , plus propre & plus commode
, & avec lequel on fait l’ouvrage plus diligemment
& plus sûrement. Celui-ci eft d’autant
mieux inventé , que l ’autre eft bruyant, 8c fuj,et à
fe déranger par les intempéries de l’air qui tourmentent
le bois.
Il fut inventé à Sedan par Jean Janon , graveur,
fondeur & imprimeur de cette ville , qui rendit public
en 1621 un cahier d’épreuves des cara&ëres
qu’il avoit gravés. Voici quelle fut l’occafion de
cette découverte. Janon avoit depuis long-temps fa
femme malade & comme entreprife de tous fes
membres : le bruit réitéré des coups de maillet pour
ferrer le coin qui tient les lettres fermes dans ce
coupoir de bois , venant à retentir à fes oreilles , lui
caufoit une grande douleur , fuivie d’un accès de
mal de tête. Cet homme chercha le moyen de fou-
lager fa‘femme , 8c fit part de fon deffein à un habile
armurier de la même ville ; 8c tous les deux
enfemble, après plufieurs recherches, inventèrent
cette machine pour la fin qu’ils s’étoient propofée
d’éviter le bruit, 8c ajoutèrent à cela tout ce que
l’art put leur fournir pour en faire une belle çom-
pofition , commode 8c aifée ; en quoi ils réuflirent.
L’auteur ne. jouit pas long-temps du fruit de Ion
invention ; il mourut peu de temps après. Sa fonderie
paffa après lui entre les mains de plufieurs fondeurs
qui ne connurent point l’ufage de ce nouveau
coupoir : cela fit qu’il refta inconnu jufqu’au temps
que cette fonderie ayant paffé des mains du fleur
Langlois, imprimeur 8c libraire , 8c depuis fyndic
de la librairie de Paris, dans celles du fleur Cot ,
fondeur dans la même ville , celui-ci en raffembla
les pièces ; 8c reconnoiffant l’utilité de cette nouvelle
machine , en fit faire une par un nommé La-
brune , armurier à Paris , qui l’exécuta fuivant ce
modèle, 8c avec quelques légers changemens.
M. de la Chapelle, fur-intendant des bâtimens du
r o i, ayant été inftruit de l’utilité de ce nouveau
coupoir, en a Fait faire un fur le modèle du fleur Cot
pour la fonderie du roi au louvre. En 1739 , le fieur
Fournier le jeune en a fait faire un pour fon ufage r
où il a changé 6c tranfpofé plufieurs pièces > pour le
rendre plus parfait 8c plus commode. C ’eft d’après
le flen qu’on a defliné celui de nos planches.
C ourtes j'terme dont on fe fert pour diftinguer une
lettre dont le corps doit être coupé des deux côtés à
l’extrémité de l’oeil pour le laiffer ifolé. Toutes les lettres
qui n’occupent que le milieu du corps , font appelées
courtes , comme on appelle longues un d , un y,
dont les traits plus alongés que ceux de l'm , occupent
une plus grande partie du corps , 8c ne doivent
être coupés que d’un côté.
C r an ; eft un petit enfoncement ou brèche faite
au corps des caractères, vers les deux tiers de leur
longueur du côté du pied. Ce cran fe forme en fondant
les caractères , & fert à connoître le fens de la
lettre : le compofiteur mettant avec foin le cran de
chaque lettre du même côté, eft sûr qu’elles fe trouveront
en leur fens. On place ce cran deflùs ou deffous
la lettre, fuivant le pay s , 8t fuivant la volonté
des imprimeurs,
C rener ; eft une façon que les fondeurs de caractères
d’imprimerie donnent à certaines lettres ,
comme par exemple aux f , f , ff , f f , des caraCtères
romains, & beaucoup plus à ces lettres en ca.raCtè-
res italiques. La partie fupérieure & tournante en
excède le corps 8c porte à faux. La façon eft de
dégager légèrement avec un canif cette petite partie
d’un peu de matière qui l’environne , afin qu’elle
puiffe fe loger facilement dans le vide que lui pré-
fentera une autre lettre qui lui fera contiguë.
C renerie ; c’eft la faillie ou l’excédent de la fonte
fur la tige d’une lettre.
C r o ch e t s ; pièces du moule fervant à fondre
les caraCtères d’imprimerie. Ce font deux fils d’archal
de deux pouces environ de long , 8c crochus par
un bout ; l’autre bout qui eft pointu, eft piqué 8c enfoncé
dans le bois du moule. Lorfqu’on a fondu la
lettre 8c qu’on a ouvert le moule , ces crochets fervent
à féparer la lettre dudit moule , ce^qui s’appelle
décrocher.
C u iller ; cette cuiller a un petit baflin au bout
d’une queue de trois à quatre pouces de long, le
tout de fer. Cette queue eft piquée dans un petit
manche de bois pour la tenir, 8c que la chaleur n’incommode
point la main du fondeur. C ’eft avec cette
petite cuiller que l’ouvrier puife dans la grande où eft
le métal fondu,- pour jeter cette petite-portion de
matière dans le moule.
La cuiller du fourneau a huit ou neuf pouces de
diamètre , 8c eft perpendiculairement divifée en
deux ou trois parties comme autant de cellules ,
pour contenir la matière forte ou foible à-la-fois ,
quon entretient fluide par le feu qui eft continuellement
de flous, 8c qui peut en contenir trente ou
quarante livres à-la-fois , chacune de ces réparations
pour chaque ouvrier. Ils font deux ou trois, fuivant
la forme du fourneau, qui puifent dans la même
cuiller, mais chacun dans la réparation qui lui eft
deftinée. *
D é chausser 9 c’eft enlever avec un canif les
bavures que la lime a occafionnées fur le cuivre de
la matrice.
D é c r o c h e r ; . c’eft féparer la lettre du moule
dans lequel elle a été fondue. Pour cet effet l’ouvrier
fe fert d’un des crochets de fer qui font au bout du
moule : l’ayant ouvert , l’ouvrier accroche la lettre
par le jet, 8c il la fait tomber fur le banc qui eft vis-
à-vis de lui ; après quoi il referme le moule, fond
une nouvelle lettre , 8c recommence l’opération.
Ébarb er; c’eft ôter avec un canif les bavures
qui s’échappent quand le moule où l’on a fondu la
lettre n’eft pas exaétement fermé , 8c que le viflteur
content de la fonte de la lettre en a fait la rompure,
c’eft-à-dire qu’il a affez paré le jet de la lettre qui n’y
tient que par un petit lien gros à peine d’une demi-
ligne. Lorfque la lettre a été ébarbée, on l’écrène, fl
elle eft de nature à être écrenée.
E c r en e r ; c’eft évider le deffous des lettres qui
font de nature à être évidées du côté de l’oe il, avec
l’écrenoir, qui eft un canif ou un autre petit inftrument
d’acier bien tranchant, lequel a un petit manche
de bois. On évide ces fortes de lettres, de manière
que le maflif des lettres voifines puîffe fe placer def-
fous. On xiécrène que les lettres longues, comme les
f i 8c les ƒ, ce qui fait qu’il y a davantage de lettres
à ècrener dans le caractère italique que dans le caracr
tère romain.
É mo nd er • c’eft couper avec un couteau l’excédent
qui eft fur la tige de fonte.
É q u e r r e a d resser ou É q u e r r e m o b il e ;
outil de graveur de poinçons à lettres: c’eft un
morceau de bois ou de cuivre plié en équerre ,
{ftg- s3 5 planche I î l de la gravure ) ; enforte que la
ligne qui eft l'angle ou jonttion des deux parties de
Y équerre, foit perpendiculaire au plan ou face de la
pierre à l’huile fur laquelle on la pofe. Le deffous
de l’équerre eft garni d’une femelle d’acier, qui
gliffe fur la pierre à l’huile. Lorfqu’on s’en fert pour
dreffer un poinçon par la face de la lettre, on place
le poinçon dans l’angle de l’équerre où on le tient
affujetti avec le pouce, pendant que les autres doigts
preffent extérieurement Y équerre. OnfaitglHTerle tout
fur la pierre qui ufe à la fois la femelle d’acier de
Y équerre, 8c la face du poinçon où la lettre eft gravée,
qui par ce moyen eft parfaitement dreffée» Voyeç
l’article gravure des poinçons à lettres , & la ftg. ƒ/ %
qui repréfente le poinçon dans l’équerre à dreffer,
qui eft pofée fur la pierre à l’huile»
F in a n c e ( caraâère de ):; ce ca-raélère eft de
M. Fournier le jeune, graveur 8c fondeur de ca-
raâères à Paris, pour imiter l’écriture ordinaire , &
imprimer certains ouvrages particuliers , comme
lettres circulaires , épures dédicatoires , placets. .
lettres-de-change, &c.
Cecaraâère eft fait fur deux corps différées--, dont
l’un peut fervir (ans l’autre, mais gravés 8c fendus
de façon qu’ils fe trouvent en ligne enfemble, 6c
ne forment qu’un feul cara&ère en «deux parties. La
première qui a l’oeil plus fort „ 8c qui eft deftinée aux
premières- lignes , eft appelée bâtarde - trif mégi fie g.