
ne peuvent pas fortir en entier, on ÿ parte là lame
d’un couteau fur fon plat & de biais.
L’art ne s’eft pas contenté de porter les . glaces à
leur perfe&ion par la manière de les compofer, de
les faire prendre & de les finir, on a encore imaginé
de leur donner un, coup-d’oeil agréable , en leur fai-
fant prendre des couleurs fi vraies, qn’elles repré-
fentent des fruits naturels.
Cette invention n’ajoute rien au goût ; .elle ne
flatte que la vue ; mais elle feroit dangereufe pour
la fanté, fi on n’avoit grand foin de n’y employer
que des drogues quipeuvent entrer dans les alimens.
On a pouffé l’art jufqu’à faire des glaces avec la
mouffe de la crème , avec laquelle on mêle diverfes
fortes de vins, liqueurs & ratifiats „pour lui donner
une faveur piquante & agréable.
Pour y bien.réuflir, on ehoifit de la crème douce-,
légère^ peu épaiffe, & qui ne foit point aigre , parce
que la bonté des mouffes eft toujours relative à la
douceur de la crème qu’on emploie. On la met
dans une terrine avec une fuffifante quantité de
, fucre en poudre qu’on remue avec une cuiller pour
lè faire fondre. On fouette la crème fur les bords de
la terrine afin de la rendre plus légère. & la faire
mieux mouffer. A mefure que la mouffe fe forme ,
on l’enlève avec une écumoire, on la met fur un
tamis clair qui eft au deffus d’une terrine afin dé recevoir
la crème qui dégoutte de la mouffe. On continue
dé fouetter & d’oter la mouffe à mefure qu’elle
fe forme.
Lorfque toute la crème eft en mouffe, on l'a remue
avec une grande cuiller pour lui faire prendre corps,
on en remplit les gobelets, & on les-met comme
lés glaces dans une cave à mouffe , qui ne diffère de
la cave à glace , qu’en ce qu’elle a deux goulottes,
l ’une au couvercle & l’autre en bas, pour l’écoulement
de l’eau qui provient de la glace. Partons à
quelques exemples particuliers, & aux formules- de
• plufieurs efpèces de glaces qui fuffiront, d’après les
principes & les procédés établis- ci-deffus, pour apprendre
à faire toutes celles qu’on imaginera d’ailleurs.
Nous empruntons les détails fuivans , de l’excellent
traité de M. Dubuiffon, habile diftillateur , étant le
meilleur guide que nous purifions confulter pour tout
ce qui concerne les objets de fa profeffion.
Des forbeps. •
On appelle forbets toutes les liqueurs que l’on destine
à être converties en glaces. Ces liqueurs font
compofées les unes avec la crème douce dans laquelle,
on fait entrer en plus ou moins grande quantité
, du.fucre, des amandes douces & amères, ou
bien des avelines, des piftaches, du thé, du chocolat,
du café , de la vanille, du fafran, de la canelle,
ainfi que toutes autres fubftances aromatiques qui
y font analogues ; & les autres efpèces de forbets
font.compolees avec le fuc des fruits acides, dans
lequel on fait fondre une quantité déterminée de
fucre en pain ou clarifié, & auqueion ajoute encore
fies fubftances aromatiques.
Sorbet de fraifes,•
Quand on a fait choix des fraifes, on les mondé
de leurs queues, on en pèfe 14 onces que l’on écrafe,
puis on y mêle une ..pinte d’eau ; on verfe le liquide
dans un vaiffeau, on y ajoute une grande
cuillerée à café d’efprit acide de citron, avec la même
quantité de bonne eau de fleur d’orange, & on laiffe
infufer pendant deux ou trois heures; on pèfe 18
onces de fucre blanc que l’on jette dans une autre
vaiffeau ; on le couvre d’un gros linge à travers lequel
on coule le liquide ; on exprime le marc fous
la preffe , & lorfque le fucre eft totalement fondu ,
on filtre au travers de la chauffe de drap jufqu’à ce
que là liqueur foit.bien limpide.
Sorbet de framboifes.-
On ehoifit les framboifes fraîchement cueillies ;
bien odorantes ,' d’une belle couleur écarlate , vive
un peu foncée ; on les monde de leurs queues, on
en pèfe 14 onces que l’on écrafe dans un mortier
de marbre, & l’on y verfe la même quantité d’eau
& d’efprit acide que pour le forbet de fraifes ; on
laiffe infufer pendant deux- ou trois heures ; on coule
le liquide au travers d’un gros linge ; on exprime le
marc fous la preffe : puis on pèfe dix-huit onces de
fucre blanc , & quand ce fucre eft totalement fondu-j
on filtre au travers de la chauffe de drap.
Si on écrafe 8 onces de ce fruit avec 12 onces de
grofeilles, on a encore une efpèce de forbet fram-
boifé fort agréable ; mais il convient d’y ajouter deux
ou trois onces de fucre de plus ,, & de fupprimer
l’efprit acide de citron.
Sorbet' de grofeilles & d* ép i n e- v inet te.
Quand on a fait un bon choix de la gro'feille, on
en pèfe quatre livres auxquelles on ajoute huit onces
de framboifes; on jette le tout dans un mortier de
marbre ; on écrafe ces fruits avec précaution, & on
y verfe une pinte d’eau ; on laiffe infufer pendant
une heure ; on coule le liquide au travers d’un gros
linge, & on exprime le marc fous la preffe puis on
pèfe 28 onces de fucre, on le jette dans la.liqueur ,
& quand il eft totalement fondu, on filtre au travers
de la chauffe de drap.
Le forbet d’épine-vinette fe prépare fuivant la
même méthode ,• toutefois en fupprimant la fram-
boife, parce que ce fruit abforberoit le parfum de
■ l’épine-vinette, & en n’y faifant entrer que 24 onces
de fucre.
Sorbet de cerifes.
Onjmonde les cerifes de leurs queues, on en répare
les noyaux que l’on met en réferve; on pèfe
cinq livres de ce fruit que l’on jette dans un mortier
de marbre & qfte l’on écrafe ; on y verfe une chopine
d’eau, bien limpide, avec deux petites cuillerées
d’efprit acide de citron , ou plus fi les cerifes
font bien mûres ; on laiffe infufer pendant deu^ ou
trois heures, puis ou lave & on frotte fortement les
îidyâ’üx les uné contre les antres ; & lorfque la pelli-1
Cule qui couvroit ,1e bois eft totalement détachée,
on les écrafe dans un mortier, & on les jette avec j
22 onces de fucre dans un vaiffeau de grès que l’on !
couvre d’un gros linge ; on coule le liquide au tra- :
v e rs , on exprime lé marc fous la preflje, on agite
fortement ce liquide avec une cuiller de bois ; &
quand le fucre eft totalement fondu, on filtre au travers
de la chauffe de drap jufqü’à ce que la liqueur
foj,t bien limpide.
Sorbet de crème 6e fromages glacés.
Il faut fe rappeller ici que toutes les différentes ■
'èfpèces de forbets étant converties en glace, fervent
également à former les fromages & les fruits moulés
qu’on repréfente dans leur couleur naturelle.
\ La crème qu’on emploie dans les forbets doit être
telle que les laitières appellent double ; la crème
ordinaire feroit trop maigre, & ce défaut ne pourrait
fe réparer qu’en partie par une plus grande
quantité de jaunes d’oeufs que celle qu’on doit y faire
gntrer.
Crème blanchel
On délaie les jaunes de fix oeufs frais dans deux
jpintes de crème, on y jette une cuillerée de fleurs
d’orange confites au liquide, puis on met le vaiffeau
fur le feu, & quand cette crème a fait un bouillon
couvert, on la coule au travers d’un tamis ; on écrafe
les feuillesvde la fleur de manière à les faire également
paffer au travers du tamis, & on fait fondre
io onces de fucre blanc dans ce liquide qu’on met
en réferve dans un lieu frais, jufqu’à ce qu’on le fou-
jnette à la congélation.
Crème brûlée.
On délaie le jaune de fix oeufs frais dans la même
quantité de crème ; on y jette deux onces de fleurs
d’orange grillées ou pralinées & une cuillerée de ca- :
ramel, puis on met le vaiffeau fur le feu ; on agite
fans difcontinuer avec une cuiller de, bois ; & quand
ce liquide a jette quelques bouillons , on le coule
dans un tamis, on écrafe la fleur, on y fait fondre
j 2 onces de fucre, & on le met en réferve pour le
glacer en fon temps.
Crème aux piflaches.
On ehoifit les piftaches de l’année, qui foient bien
vertes & nouvellement caffées ; on eh pèfe trois
onces & demie que l’on jette dans l’eau bouillante ;
& quand la peau fe détache des amandes .en froif-
farit avec leà doigts, on les jette fur un tamis; on les
inonde de leurs écorces, on les broie fur la pierre,
en obfervant d’y ajouter une once de fucre,
& de les arrofer avec une quantité fuffifante d’eau
de fleur d’orange. Lorfque cette opération eft finie,
on délaie le jaune de fix oeufs frais dans deux pintes»
de crème ; & quand elle a jetté quelques bouillons,
on'U coule, comme on l’a dit , dans un tamis;
on fait fondre dix onces de fuçre, on délaie la pâte
de piftaches avec une cuiller , en y ver faut peu à
peu une chopine de la même crème toute chaude ;
on paffe ce iiquide.au travers d’une étamine ; on
exprime avec les doigts, jufqu’à ce qu’il ne refte plus
rien, on mêle le tout enfemble , & on met en réferve
dans un lieu frais pour glacer au befoin.
Crème ait chocolat
On verfe deux pintes de crème dans une choco3
latière ; on y jette demi-livre de chocolat à. deux
vanilles qu’on a préalablement coupé par morceaux ;
on ajouté quatre onces de fucre ; on approche le
vaiffeau du feu, on échauffe & on entretient le liquide
pendant une-heure au degré de chaleur d©
l’eau bouillante , en obfervanr d’agiter fouvent &
fortement avec le mouffoir : on éloigne le vaiffeau
du feu , & quand la liqueur eft à moitié refroidie ,
on y délaie les jaunes de quatre oeufs frais, puis on
échauffe ce fucre jufqu’au même degré , & on agite
fans difcontinuer, parce que le mouvement qu’on,
donne à ce liquide fert à réunir plus intimement,
toutes fes parties. On met au frais jufqu’au moment
de la congélation.
' Crème à. la vanille.
On délaie les jaunes de fix oeufs frais dans deux
pintes de crème; on met le vaiffeau fur le feu, on
agite continuellement le liquide avec une cuiller de
bois ; & quand cette crème a jetté un bouillon couvert
, on la coule au travers d’un tamis de crin ; on
y fait fondre dix onces de fucre avec deux onces de
paftilles de vanille ; on met le liquide dans un lieu frais
pour le glacer au befoin.
Les crèmes à la canelle , au gérofle, à l’oeillet
géroflé & au fafran, fe fabriquent fuivant la même
méthode que celle à la vanille , à l’exception qu’on
fait bouillir dans celle au fafran demi-once de tige
d’angélique confite.
Crème aux amandes.
Lorfqu’on a fait.choix de quatre onces d’amândes
douces de Provence, & de demi-once de celles
d’abricots, on les jette dans l’eau bouillante, &
quand la peau fe détache en froiffant avec les doigts,
on les jette fur un tamis, on les monde de leurs
écorces , on les broie fur la pierre avec le cylindre
d’aoier, en obfervant d’y ajouter une once de fucre,
& d arrofer avec une quantité fuffifante d’eau fimple ;
enfuite on délaie les jaunes de fix oeufs frais dans deux
pintes de crème^auxquelles on fait jetter un bouillon
couvert & que l’on coule comme il a été dit : on y
fait fondre douze onces de fucre, & on délaie cette
pâte d’amandes avec une cuiller, en y verfant peu
a peu environ une chopine de la même crème toute
chaude qu’on paffe enfuite au travers d’une étamine ;
on exprime jufqu’à ce qu’il ne refte plus rien. On
mêle le tout enfemble, & on met au frais pour être
glacé en fon temps.
On fait la crème aux amandes par une autre méthode.
On fait fondre fix onces de fucre dans une
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