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irauroit infailliblement préférée à celle-qu’il indique,
comme beaucoup moins couteufe, d’une application
plus facile à toutes fortes de travaux, d’une
pratique plus commode pour fournir de moment
en moment une chaux bien vive, & épargnant enfin
deux operations a la fois, pénibles & dtingcreufes,
la pulvérifation & le blutage. On doit, dit M. de
Morveau , obferver & faifir le moment de mettre en
oeuvre ce ciment, peut-être encore avec plus d'exactitude
que le plâtre. En rendant ce mortier plus liquide
avant que d’y mêler la chaux v iv e , on peut
empecher qu’il ne prenne auffi promptement , mais
c eft toujours aux dépens- de la folidité.. La chaux
fe fature d’eau , elle fait tout fon effetdans l’auge de
l’ouvrier ; il croit employer le mortier de M-Loriot
& ce n’eft plus qu’un mortier ord inaireoù fon a
mis une nouvelle portion de chaux éteinte : il faut
le prendre dans l’inflant précis, où il ne refte. plus
affez d aftion a la chaux vive pour changer fenfi*»
blement fes- dimenfions.fous la- truelle ,.où il lui en
refte affez pour opérer un mouvement intérieur qui
fe> mette en équilibre avec là ténacité du mélange,
€ eft dans ce jufte milieu qu’il acquiert la confiftance.
néceffaire quand il a été convenablement-délayé
& je me fuis bien convaincu, ajoute M. dé Morveau,.
que c’eft'de—là que dépend conftamment. lé.
fuccès.
On verra tous-les principes, & les procédés qui
viennent d’être établis , fe vérifier particulièrement
& fe. confirmer dans les qualités 8c les gréparatioijs
du ciment-de M.:d’Etienne.
Ciment impénétrable à Veau. , de M. d'Etiennei.
M. & Etienne , Chevalier de l’ordre royal &
militairedé S. Louis , a publié en 1782, un mémoire
fur fa decouverte d’un ciment impénétrable à* Veau ,
& fur l’application de ce même ciment à une terraffe.
de fa maifon. Nous allons rapporter prefque en entier
le-mémoire fi intéreffant de M. d’Etienne, fur
l’objet important dont il eftqueftion dans cet article.
C ’eft un devoir que de faire connoître cette heureufe
invention, & c’eft entrer dans les vues biénfàifantes
de l’inventeur, que de répandre la connoifTàiicg &
de multiplier l’ufage de fon utile découverte.
Les qualités que ce ciment, réunit, dit M. cfE-
tienne, font la dureté , la folidité, & une très-
grande économie, fur tout autre procédé qu’on
voudroit employer à la place. Ces avantages réels
& conftatés, feront facilement démontrés- par lès
détails ci-après.
11 eft plus dur que le fe r , & l’on peut facilement
s’en convaincre par l’expérience fuivante. En frottant
deflùs une lame de fer ou d’acier, il noircit auffitôt
en fe chargeant des parties détachées du métal,
ainfi qu’un grès fur lequel on affûte un outil. On
n’en fera point étonné , dès qu’on fàura qu’il eft
compofé en plus grande partie des matières les plus
dures, & fur lefquelies les métaux ne peuvent mordre
qu avec beaucoup d’art. Cettè grande dureté eft
fléja une forte préfomption en faveur 4e & fblidité.:
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fes parties très - dures, très - déliées & fortement
unies , ne donnant point de prife aux corps qui
pourroierit tendre à fa deftruéHon. Si l’on démohtre
auffi qu’il eft impénétrable à l’eau, on ne craindra
pins pour lui l’intempérie des fa'ifons. L’humidité
feule qui pénètre ks-corpsoccafionne leur diffolu-
tion pendant la gelée, en dilatant les particules d’eau
renfermées dans leurs pores. Si ce ciment ne prend
point l’eau, quel que foit le temps qu’elle fé jour ne
fur fa furface, il n’aura donc rien à craindre des
plus fortes gelées : les brouillards, -les temps humides,
les groffes pluies, la grêle &. la neige ne lui
feront, parla même raiforn-, par plus défavorables.
Si les variations auxquelles la température de
notre climat eft fujette , n’ont pu l’altérer en aucune
manière ; comme les moyens de deftru&ion feront
conftamment les mêmes-., quelque nombre de: fois
qu’ils-foient multipliés;,, on peut en conclure qu’il
y réfifteratoujours auffi, puifque fa compofition &
fes principes le rendent- indiffoluble à l’air, à l’eau
& aux plus fortes chaleurs de l’été ; c’eft ce que-
l’expérience démontre- parfaitement.
M. d’Etienne n’a entrepris l’effai d’une terraffe
avec un baffin qu’il a fait conflruiré au deffus de
fa; maifon-, qu’après-la réuffite complette d’un réfer»
voir fervant pour des bains & lieux .à l’àngloife,
éprouvé pendant deux années. Enfin , la- terraffe de
M. d’Etienne a été pendantdeux hivers alternativement
couverte de neige & de givre, continuellement
lavée par les-pluies. Elle a éprouvé les plus
fortes gelées : rien ne la garantit des^vents les plus
impétueux & dés plus;fortes chaleurs du foleil. Le
- ciment qui la couvre n’a été endommagé en aucune
manière, par toutes ces épreuves. C ’eft ce dont
on a pu fe convaincre par l’examen que le public
a; fait.de fa furface & du deffous des planchers qui la';
compofent. Aucune trace d’humidité, aucune dé-
compofition fur fendait extérieur. Une forte conviction
va fuivre ; elle doit diffiper tous les doutes.
Les pentes de cette terraffe font toutes dirigées:
vers le centre où eft un baffin qui reçoit toutes les*
eaux de la pluie, & qu’une pompe y adaptée remplit,
quand cès eaux font infuffifantes. Ce baffin
n’eft compofé que d’un bâti .de charpente latté, Sire
couvert au fond de carreaux à. plat, maçonnés
avec du plâtre; Les côtés* qui font de dix-huit à:
vingt -pouces de profondeur, font recouverts avec
des briques fur champ, maçonnées de même; le
tout eft enduit d’une légère couche de ciment. Ce
baffin eft. continuellement rempli , & quoiqu’il ait
été gelé prefque jufqu’au fond, l’eau n’a pu fe faire
le moindre jour à travers la couche d'une demr ligne
de ciment qui enduit fes parois. Tout le monde a
pu vifiter les deffous de la charpente & de l’aire de
plâtre qui tient aux carreaux du fond, & recon-
noître , non fans étonnement» qu’il n’y a pas la
plus légère trace d’humidité. Le ciment intérieur que
l’eau baigne continuellement, eft fi peu fufceptible
d’en être attaqué, que .fi l’on vide le baffin pour le
laver x au bout d’une hçure il eft parfaitement ftc t
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.-comme le feroit un vafe de grès ou de faïence que [
l ’on laifferoit égoutter. D ’après cette expérience,
il n’eft guères poffible de douter de fon impénétrabilité
à l’eau , & par conféquent de fon triomphe fur
la gelée & fur toutes les températures. La chaleur
ne peut rien fur lui ; & les matières qui le çompbfent
une fois mêlées, ne redoutent point fes effets. Sa
compofition eft ôn ne peut pas plus fimple » elle
.diffère même affez peu des autres ciments connus.
Son application n’eft point embarraffante, & fa
réparation, en cas de de fra&ure , eft très-prompte
& très-facile.
Ce qiïi rend ce ciment fi peu coûteux, en com- ,
paraîfon des autres propofés jufqu’à préfent, c’eft
fon peu d’épaiffeur , qui, réduite s’il eft poffible à j
une demi-ligne, n’affure que mieux fa réuffite , & ;
empêché fon altération. La raifon qu’on en peut |
donner , eft celle - ci. Plus une couche de ciment
ordinaire eft épaiffe , plus le volume d’eau employé
■ pour la former eft confidérable. Toute cette eau
doit s’évaporer , pour que le ciment acquière la
dureté néceffaire. Les autres matières, en fe refferrant
pour remplir les vides occafionnés par l’évaporation
de l’eau , forment les gerçures 8c les crevaffes auxquelles
ils font fujets. Celui-ci, au contraire, contenant
une très-petite quantité d’eau , relativement
,à fa compofition & à fon peu d’épaiffeur , ne doit
point éprouver de changement fenfible par la deffi-
.Æation ; ce qui arrive en effet, puifque étant bien
fait & appliqué avec foin, il n’eft point fujet aux
gerçures 8c. au délit. La perfeélion de ce ciment
confifte donc, i° . dans la bonté des matières employées
pour fa compofition ; 20. dans leur excellente
préparation; 30. dans lai» jufte proportion où
elles font les unes avec les autres ; 8c 4?. enfin ,
-dans l’adreffe 8c l’exaâitude des ouvriers qui en font
l’application , laquelle doit être encore fécondée par
l’intelligence 8c les foins de l’artifte chargé de leur
-direâion.
Détail de la compofition du. ciment, & procédés pour fon
exécution»
Il n’entre dans la compofition de ce ciment î rien
.'autre chofe que de la chaux, du caillou 8c de l’eau.
La chaux y eft employée de deux manières très-
différentes,, & en parties égales ; l’une anciennement
éteinte., l’autre vive & en poudre.
Il faut avoir foin de chpifir la meilleure poffible.
On fait qu’elle doit être faite avec des pierres dures,
•pleines, & d’un grain fin. Elle doit, être récemment
•cuite : elle eft infiniment meilleure fi on l’éteint en
fortant du-four.
Quoique la méthode dont on fe fert communément
ici pour éteindre la chaux ne foit pas la meilleure
, ceux qui trouveront plus commode de s’en
fervir, pourront le faire fans aucun inconvénient,
puifque le ciment de la terraffe de l’auteur eft com-
pofé avec de la chaux éteinte fuivant l’ufage ordi-
<iaire dans nos bâtimens. Ceux qui déûreroient portai;
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leurs opérations fur cet objet à la plus grande per-
feélion , pourront l’éteindre par le procédé fuivant.
Il eft indiqué au premier livre de - i’architeâure de
Philibert de Lorme. On le rapporte ici pour la com-,
modité de ceux qui n’ont point ce livre fous la main.
Il faut faire un entoifé de. la chaux fortant du
four, la couvrir d’une couche de fable affez épaiffe
pour empêcher la fumée de s’exhaler, & jetter fur le
fable de l’eau en affez grande quantité, pour que la
chaux fe fufe deffous fins fe brûler, ayant foin de
reboucher à mefure les crevaffes qui-pourraient fe
faire au fable & laiffer échapper la fumée. Comme
il eft effentiel ici que le fable dont on couvxiroit la
chaux pour l’éteindre, ne fe mêle point avec elle>
il faudroit interpofer entre la,chaux &. le fable, fur
toutes les furfaces de l’entoifé, des claies d’ofier-très-
ferrées, ou des nattes de paille ou de jonc. On ne
découvriroit alors cette chaux qu'à mefure,, & la
quantité feulement qu’on voudroit en employer ;
mais il faudroit au moins qu’elle eût quinze jours de
fufion ; le refte fe conferveroit fous le fable auffi longtemps
qu’on voudroit, & fans aucun defféchement.
La plus anciennement éteinte fera la meilleure.
La chaux vive doit être pulvérifée & employée »
s’il eft poffible , auffi-tôt après fa cuiffon. Si l’oa
vouloit en conferver pendant un certain efpace de
temps, en pierre ou en poudre, il faudroit avoir
foin de l’enfermer dans des tonneaux bouchés bien
hermétiquement, afin que fes. efprits & les particules
ignées qu’elle contient, ne puiffent point s’évà-,
porer.
Le caillou ou gravier doit être très-dur, & fans
aucun mélange de parties tetreufes , d’argile, ou de
craie. Il fera bon de le faire prendre au bord des
rivières ,, parce qu’il eft ordinairement purgé de
toutes ces matières, & l’on peut encore le laver une
fois pour plus de sûreté. Celui qu’on trouve dans les
terres , comme pierre-àvfüfil, pierre de roche ou
meulière, feroit également b on, étant bien ehoifi,
en s’affurant de fa dureré, & le dépouillant de fes
parties terreufes. La pierre tendre ou le grès ne
vaudroit rien l’eau pénètre trop facilement la première
, & le fécond ne fe lie pas affez bien ^vec la
chaux. On pourroit encore fe fervir, avec beaucoup
de fuccès , de la brique ou du tuileau de Bourgogne.
Mais .il faudroit être bien, affuré de fa qualité, &
veiller très-exa&ement à ce qu on n’y en mêlât point
d’autre.
Ï1 faut que ce caillou de rivière, pierre très-dure J
ou tùileau , fuivant le choix qu’on en fera, foit
pilé & réduit en poudre très-fine, fans être impalpable.
On aura foin qu’il foit divifé bien également, ea
le faifant paffer par un tamis fin , & pn l’enfermera
dans des lacs pareils à ceux du plâtre ; ils contiennent
un pied & demi cube, 8c chacun d’eux pourra
fournir , étant bien employé, fept à huit toifes de
fuperfi.de.
L’eau de rivière eft préférable à celle de puits;
.elle diyife mieux I3 çhaux * 8c lie davantage le$
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