
le tableau du poids des différens pains. ( Voyez le
tableau de la fécondé expérience ). On y verra en général
moins d’inégalité que dans la première expérience
; cependant on y remarquera que pendant
qu’il y a une égalité de poids entre les pains n°. 3 & 8
du premier quartier du four , il y a une différence de
deux onces cinq gros entre ces deux numéros, &
le pain puméro 5 du même quartier ; qu’il y en a
également une de trois onces entre le pain numéro
1 , & le pain numéro 7 du fécond quartier ; on ob-
fervera encore que des fix pains longs, aucun n a
lé poids de quatre livres ; qu’un d’entre eux a perdu
jufqu’à trois onces; trois autres ont déchu de plus
de deux onces ; Ôc les deux autres ont perdu deux
onces juftes. Le pain rond, au contraire , a un excédent
de poids, comme nous l’avions prefume ,
de deux onces quatre gros. On verra moins de variation
dans les pains numérotés ; l’excederit inégal
de poids en pâte que portoient ces douze pains,
s’y annonce fenfiblement & d’une manière affez oro-
greflive, depuis le numéro 4 jufqu’au 12. On eit un
peu furpris que le pain numéro 1 pèfe quatre livres
quatre gros, quoiqu’il n’ait eu que neuf onces en
excédent de poids en pâte, tandis que le numéro 1
fécond quartier, qui'a eu dix onces d’excédent de
poids avant que d’être friis au four, ne pèfe cependant
que trois livres treize onces fix gros , c eft-a-
dire , deux onces fix gros de moins que le premier
de ces pains numérotés.
Un particulier qui auroit été témoin de la pefée
de ces quarante-cinq pains, & qui auroit vu l’inégalité
de poids qui régnoit entre eux , auroit héfité
lans doute de les prendre fur le pied de quatre livres
l’un dans l’autre, & auroit craint d’éprouver une
perte de quelques livres de pain ; cependant le poids
de tous ces pains de forme différente , de pefanteur
affez inégale entre eux , étoit de cent quatre-vingt
livres deux onces quatre gros , tandis que quarante-
cinq pains de quatre livres chacun, ne pèferoient en
total que cent quatre-vingt livres juftes (<2). Des-lors
on lent que les réglemens n’ont plus de bafe fixe
(a ) Il eft vrai que nous devions efoérer quelque excédent
de poids fur le pain , après la cuiffon , & compter fur une
augmentation de plus de deux onces quatre gros , parce^que
les deux pains numérotés , pris enfemble, avoient eu en excédent
de pâte , fix onces au delà de là quantité qu’ ils en auroient
reçue fur le pied de dix onces pour chaque pain ; mais les trois
onces quatre gros qui manquent, pour que ces fix onces d excédent
de pâte reparoiflent en entier, font un très-petit objet
fur quarante-cinq pains de quatre livres chacun , & n en forment
que la huit cent vingt—deuxième partie, t a perte a été
plus confidérable dans la première expérience : les cinquante,
pains qui en dépendoient auroient dû pefer enfemble deux
cens liv res, fur le même pied de quatre livres chacun ; cependant
on voit que le total de leur poids n’eft que de cent quatre-
vingt-dix-fept livres quatre onces quatre gros , & qu’il fe
trouve foible par conféquent de deux livres onze onces quatre
gros : fans parler même de fix onces d’excedent'de poids en
pâte que les pains numérotés de cette expérience avoient
reçues comme ceux de la fécondé , & qui-, fi on y a^ égard ,
font monter la perte fur les cinquante pains donc il s’agit ici
à trois livres une once-quatre gros, c’eft-à-dire, a une once,
ou à peu près, fur chacun de ces pains.
pour prononcer fur la précifion du poids de chaqué
pain ; que l’art feul eft en défaut, fans qu’on voie
encore le moyen de le perfectionner ; Ôc qu’un boulanger
ne peut être condamné par la loi, pour avoir
diftribué quelques pains d’un poids plus foible qu’il
ne faudroit, ôc tels qu’il s’en eft trouvé dans cette
dernière expérience, tandis que la fournée entière
décideroit en fa faveur., & annoneeroit fa bonne foi.
Le moment le plus favorable au poids, eft celui
où il fort du four : nous avons reconnu qu’en le
gardant huit jours, il perdoit peu-à-peu une partie de
fon poids, ôc qu’au bout de ce temps, la perte pou-
voit être de quatre à cinq onces fur un pain de
quatre livres, Ôc de la forme ordinaire : ce déchet
doit varier fuivant le degré de cuiffon qu’on a donné
au pain, & le plus ou le moins de fur face qu’il
préfente.
Après avoir retiré du four , dans notre première
expérience, tous les pains qu’il contenoit, nous en
choisîmes un bien cuit ôc qui pefoit quatre livres
juftes ; nous le refîmes fur le champ au milieu du
four, ôc nous l’y laiffâmes pendant dix minutes ; après
ce temps, nous le pesâmes de nouveau ; il avoit
perdu deux onces fur fon poids : il perdit encore
une once dans une fécondé épreuve , ôc fe trouva
réduit à trois livres treize onc.es.
Nous nous bornons à ces détails des deux expériences
que nous étions chargés de fuivre , ôc dont
on fe forme, au premier coup-d’oeil, une idée affez
exa&e , en confidérant les deux tableaux du poids
des pains que ces expériences nous ont fournis. Il
en réfulte que, malgré toutes les précautions que
nous avons prifes pour obtenir des pains d’une pefanteur
égale, nous n’avons réuffi qu’à l’égard de
quelques-uns, ôc fans être mieux inftruits de la caufe
de Cette égalité, que nous n’avons connu la raifon
de l’inégalité de poids de la plupart des autres.
Il en réfulte, en fécond lieu, que cette variation
du poids des pains ne tient pas précifément à l’endroit
où ils font placés , puifqu’elle a été remarquable
, ôc dans les deux quartiers , ôc dans le coeur
du four : fouvent même deux pains placés l’un à
côté de l’autre, ôc d’une forme pareille, ne fe trouvent
pas d’un poids égal au fortir du four, quoique
tirés de la même pâte, Ôc réglés fur le même poids
avant la cuiffon.
Il fuit de ces expériences, en troifième lieu, que
plus les pains présentent de furface, foit par leur
longueur , foit par l’applatiffement auquel on les
réduit pour fatisfaire au goût des particuliers, plus
ils perdent de leur poids au four; tandis qu’au contraire
, les pains très - arrondis Souffrent beaucoup
moins de déchet, ôc n’ont pas befoin de tout l’excédent
de pâte qu’exigent les pains de la forme ordinaire.
Il réfulte enfin des faits que nous avons confiâtes,
que le féjour du pain dans le four pendant quelques
minutes au-delà du temps convenable pour la cuiflon,
y occafionne une diminution fur le poids, ôc l’y produit
d’une manière plus ou moins marquée, fuivaiit
que le pain fe -trouve placé dans les endroits du
four qui, vers }a fin de l’opératiotn , ont plus ou
moins perdu de la grande chaleur qu’ils avoient ac-
quife.
Lorfqu’on fe plaint de l’inégalité du poids des
pains de quatre livres de la forme ordinaire , les
boulangers repréfentent qu’elle a fouvent lieu par
des inconvéniens dont il leur eft très-difficile de fe
garantir; ils font obferver que la pefée de la pâte eft
confiée à des; ouvriers qui n’y partent pas toujours
l’attention qu’elle demande ; que ces ouvriers, dont
le travail fe fait avec beaucoup de célérité, ôc qui
font fouvent excédés de fatigue, manient la balance
fans précaution, y laiffent quelquefois une portion
de la pâte qui appartient au pain qu’on vient de
pefer, ôc fe réunit à celui dont on établit enfuite
le poids; que ces ouvriers, lorfqu’ils ont pefé la
pâte de .chaque pain , la jettent fur une table où
d’autres ouvriers la tournent pour la placer dans les
pannetons , Ôc l’y- jettent avec fi peu de précaution,
qu’elle s’y trouve fouvent adhérente à celle d’autres
pains qui n’ont pas encore été tournés, ôc qu’alors
il peut y avoir une inégalité de poids dans les pains
qui, en réfulteront, parce que l’ouvrier , chargé de
tourner la pâte, n’àura pas fu féparer exaélement
celle qui étoit deftinée pour deux pains, ôç aura
par conféquent rendu l’un plus pefant aux dépens
de l’autre.
Les boulangers infiftent encore fur la difficulté de
régler comme il faut la chaleur du four, ôc de con-
noître le point précis de la cuiffon du pain ; fur le
danger qu’il y. a de l’y iaiffer un peu trop longtemps
pour le poids qu’il doit avoir au fortir du
four : ils ajoutent que les pains placés dans ce même
four, y font quelquefois trop ferrés, s’y collent l’un
à l’autre , donnent lieu par-là à ce qu’on nomme
baïfure, ôc qu’en les détachant, après la cuiffon ,
on ne les fépare pas toujours avec affez d’exaélitude ,
pour qu’une portion de quelques-uns des pàins ne
refte pas attachée à ceux des autres pains qui s’y
trouvoient adhérèns, ÔC n’occafionnent pas alors quelques
inégalités fur le poids : Hs repréfentent enfin ,
qu’ordinairement ils trouvent très-peu de reffource
dans leurs ouvriers pour une manutention auffi délicate
que la leur; qu’ils y veillent à la vérité , mais
que le fort du travail, fa continuité, les'veilles qu’il
exige ne peuvent pas les regarder feuls, ôç qu’alors
leur vigilance a bien fon utilité,.mais qu’elle ne fauroit
obvier à tous les inconvéniens dont leurs opérations
font fufceptibles, fûrtout entre les maiqs-d’ouvriers
peu inftruits, ôc plus laborieux par état, que jaloux
par goût de bien faifir l'art du parfait boulanger. .
Nous avons évité, je crois, dans nos expériences,,
toutes les caufes d’inégalité de poids dans les pains
fur lefquelles le*s boulangers fe fondent, pour prouver
combien il leur eft difficile de parvenir, fur cet
objet, à la précifion qu’on exige d’eux : nous nous
en fommes d’autant mieux garantis, que nous en
étions prévenus, qu’elles fixoient fpécialement notre
attention; ôc «cependant cette même inégalité de
poids fubfifte dans nos expériences. : dès-lofs , toute
réflexion ceffe fur les caufes que les boulangers ont
alléguées; elle ceffe également fur ce qu’il y auroit
à déduire des faits dont nous avons été témoins :
il n’y a encore que des conjeélures à former fur la
caufe réelle de cette variation dans le poids du pain,
en fuppofant toujours qu’on a pris, pour l’éviter,
toutes les précautions que l’art du boulanger peut
admettre, ôc que l’efprit d’obfervation peut fuggé-
rer. Nous nous bornerons donc à faire obferver dans
ce moment-ci, qu’il a été employé pour les quarante-
cinq pains de la fécondé expérience, deux cent
huit livres huit onces de pâte ; que ces pains ne
pefoient plus en total, au fortir du four, que cent
quatre-vingt livres deux onces quatre gros , ôc qu’ils
y ont éprouvé par conféquent une perte de vingt-
huit livres cinq onces quatre gros. L’air gazeux, les
vapeurs aqueufes qui s’en font élevées àmefure que
la chaleur les faififfoit, ne l’ont pu faire, dans un
temps donné, qu’à raifon de la furface des pains ôc
des iffues plus ou moins faciles qu’elles s’y font pratiquées;
c’eft même par une fuite de l’effort que font
ces vapeurs pour s’échapper , ôc de, l’obftacle que
leur oppofe la furface du pain , en commençant à
fe durcir, que l’intérieur du pain fe dilate en tout
fens, fe tuméfie , devient cellulaire ôc acquiert de la
légéreté. Si un pain conferve fa rondeur dans le
four, ôc s’y trouve environné d’une croûte qui ne
laiffe aux vapeurs aqueufes qu’une iffue difficile ;
alors il pourra arriver que ce pain perdra un peu
moins de fon poids, dans un temps limité ; tandis
qu’un autre pain, où la furface fera gercée, où la
mie aura été mile à découvert, en prenant cette
couleur dorée ôc appétiffante connue fous le nom
àegrigne^ perdra quelque chofe de fa rondeur, s’ap-
platira un peu, au.moins du côté où la gerçure fe
fera faite , laiffera échapper plus facilement l’air gazeux,
les vapeurs aqueufes qu’il contenoit, ôc pourra
fouffrir un peu plus de perte, dans le même temps
limité, que le pain enveloppé parfaitement de fa
croûte , ÔC maintenu dans toute la rondeur que les
vapeurs aqueufes lui ont fait prendre en s’échappant.
Nous ne donnons ici cette obfervation que comme
une fimple conjecture : c’eft en examinant avec attention
les pains de nos expériences , que nous avons eu
occafion de faire cette remarque, dont il fera difficile,
nous en convenons, de tirer quelque avantage,
dans le cas même où il fero.it confiant que l’inégalité
du poids dans les pains, tient aux accidens légers
qu’ils éprouvent à leur furface pendant qu’ils font
dans le four.
Quoi qu'il en foit de la caufe de cette inégalité, il
eft certain , par nos expériences, qu’elle a eu lieu
d’une manière plus ou moins marquée , ôc que nous
l’avons reconnue fur quatre-vingt-quinze pains fortis
de deux fours 'différens , quelque s précautions que
nous ayons prifes pour la prévenir.
. Nous nous repofons fur la fageffe de l’adminiftration
pour les conféquences qui naiffent des faits que