
-n *2 T A L
Les b rançols étoient déjà en mouvement, lorfque ce
ifimiftre de paix s’avança entre les deux armées-pour
lüfpendre leurs -coups ; rôle fûblime, à quelque motif
qu’on veuille l’attribuer. L’infléxible roi Jean , ne
-i attribua qu’à la pré iileétion qu’il fiippofoit au pape
peur les Anglois, Le cardinal conjura le ro i, les mains
jointes y de laiffer agir fon zèle. Il alla & revint plusieurs
fois d’un camp à l’autre -, fans rien obtenir,
mais fans fe rebuter- Le roi ne voulqit rien entendre ;
■* *s prince de Galles ne demandait que des conditions .
raisonnables ; il offrait de rendre tout, places & pri- j
fontv.ers, & de ne porter les armes de fept ans contre
la France. Le roi n’biant rejetter entièrement la mé-
d atîon du légat, demanda que le prince fe rendît
prifonnier , avec cent des principaux chevaliers :
» Si jamais je perds ma liberté , dit le prince, ce
•n ne fera que les armes à la main. jj La nuit furvint,
le cardinal rentra dans Poitiers , ayant du moins
gagné un jour. Le lendemain il reparoît encore :
croira t-on que les François pouftèrent la férocité
jufqu’à le menacer ? on lui dit en propres termes,
que s’il ne (e retirait il. lui en pourrait mal prendre.
Il a’ia trouver le prince de Galles : Beau-fils , lui
dit-il y il faut combattre. Eh bien ! dit le prince ,
ZÂteu. veuille aider au droit ! En effet le droit étoit
pour lui dans ce moment, puifqu’U ne faifoit plus que
fè défendre. Ceux qui veulent excufèr le procédé
des François à l’égard du cardinal dans cette occafion,
açcufent celui * ci de partialité ; ils obfervent que
ce jour qu’il gagna par les négociations , perdu pour
les François, fut employé par les Anglois à fortifier
de plus en plus leur camp.
Le cardinal de Périgord perdit à la bataille de
Poitiers, Robert de Duras , fon neveu. Le prince
Noir lui renvoya le corps fur un boucher , _ en lui
faifant faire quelques reproches de ce qu’il fouffroit que
les parens ôc les gens de fa fuite , au lieu de relier
neutres , fefviffenr contre les Anglois. Ainfi les deux
partis âccufoient de partialité ce cardinal, qui aurait
épargné tant de maux, fi là médiation eut été acceptée.
Pendant les guerres des Anglois en France, U arriva
fouvent aux comtes de Périgord, dont les domaines
fôuchoient à ceux des Anglois, cfe s’allier avec eux.
Archambaud I V , neveu du cardinal de Périgord ,
prit ce' parti, & il en fut puni par un arrêt du
parlement du 18 avril 1396 , qui le bannît du royaume
& cônfifqua fes biens. Archambaud V , fon fils, .
ayant perfifté dans la. même alliance , & ayant, in- ;
traduit les Anglois dans le Périgord , le maréchal de
Bcfucicaut* Iui fit la guerre, le prit dans fon château
de Montignac, l’amena prifonnier à Paris , où on
lui fit fon procès, & par- arrêt du parlement du
.9 juillet 1399:, il fut condamné à perdre la tête , Si.
&s biens furent eonfifqués. Le roi Charles VI lui fit
grâce de la vie-, mais la confifcation eut lieu & fut
donnée par le roi au duc d’Orléans, fon frère.Le I
comté de Périgord a paifé depuis, tant par vente que I
par fucceflgm, dans, la maiion de Bretagriç , dans celle j
T A K
d’Albret, dans celle de Bourbon ; Henri IV le réunit
à la couronne; quanta la maifon de Périgord, aujourd’hui
fubfiftante, elle defeend des comtes de
Périgord - Tallerand. De cette même maifon des
Tallcrand-V èàgord, étoit ce jeune & infortuné comte
de Chalais Henri, décapité en 1626.-
M. l’Abbé AnquetU , dans l'Intrigue du cabinet,
s’exprime aînfi : « On ne fait ce que les commif-
» faires demandèrent à Chalais , s’il y eut des té-
n moins, s’ils furent confrontés : enfin il ne refie
jj aucun détail de cet étrange procès, dont lés pièces
»> ont été enlevées ôc foùftraites à la connoiffancé du
» public.
I Les pièces de ce procès on» été publiées en 1781 ,
| dans un recueil de pièces intérejantes pour fervir à
* thifloire des régnés de Louis X I I I 6* de Louis XIV.
I Elles ont été tirées de la bibliothèque de feu M.le.
| maréchal de Richelieu , oh elles étoient en original.
Il parait en réfulter que le comte de Chalais étoit
coupable tout au plus d’être entré dans lesintriguçs
de ceux qui vouloient traverfer le mariage, de M.
( Gallon ) avec Mademoifelle- de Montpenfier , &
à la tête defquels étoient la jeune reine Anne d’Autriche
, ôc la duchefïe de Chevreufe, fur-intendante
de fa maifon. Chalais étoit amoureux de la duçheffe
de Chevreufe, la duchefïe ne l’aimoit pas & n’en
avoit que plus d’empire fur lui ; ainfi elle l’attira asfé-
ment au parti d’Anne d’Autriche; voilà, félon,toutes
les apparences , tout le crime ou toute la faute du
comte de Chalais.
Ignofcenda quidem, /cirent f i ignofçere Mânes. 1
Il eft vrai que le comte de Chalais fut âccufé du
• plus grand des crimes , celui d’avoir *• attenté à la
-vie du roi, ôc d’avoir voulu profiter, pour ce régicide
, de la liberté: que fa faveur & fa charge de
maître de'-la garde-robe lui donnoient d’entrer à
touie heure dans la chambre de ce prince ; mais par
qui fut-il accufé de ce projet ? par Louvigny , fon
riyal, amoureux, comme lui de la duchefïe deGhevreufo.’
Quelle preuve Louvigdy apporta-t-il de cette açcu-
.. fàtion ? nn roman ; des chaffeurs dont il étoit féparé
par une haie, ôc qu’il n'avoit pu ni joindre ni voir,
s’entretenoient, de ce complot, en le détenant ôc en
faifant des imprécations contre le comte de Chalais
qu’ils en accufoiênt, Le duc de Retz , le duc de
Bellegarde,.Ie duc de la Rochefoucauld déoofent du
même fait, mais- tous comme l’ayant entendu, dire,
ou à M. de Louvigny , ou à des gens qui le tenoient
de. lui. Au fil ne paroît-ii pa,s qu’on ait eu. dans le
.procès du comte de Chalais;,;le moindre égard a
ces dépofitious. > * 7 / ;
- . Lamont, exempt des Gardes-du-Corps, chargé,dé
garder le comte de Chalais dans fa prifon à Nantes,
.fervoit d’efpion , & abufoit; cruellement contre lui de
,tous les traits .d’impaiience ÔC d’mdifcrétion qui lui
.échappoieht/; 4 j r- ; ,
: 1 . l i s lettres du comte, de Ghajàis au .roi ôc ,au
T A L'
cardinal de Richelieu ,• asrnoncentde la légèreté, de
l’inconféquence ; elles font pleines l'd’une obfcurité ,
qui n’étoit peut-être pas la même alors, & decon-
tradiéïions qui font les mêmes dans tous les temps ;
mais elles n’annoncent point une ame coupable ; ôc
la manière dent Madame de Chalais , la mère,
avoue qu’il l’étoit, prouve encore qu’il nçl’étoit pas,
Ôc que fa légère faute avoit été expiée d’avance
par fes ‘fervices. Cette lettre de Madame de Chalais
au R oi, vaut mieux que toutes celles de fon fils ,
elle eft pleine à la fois d’adreffe ôc de fenfibilité.
>> Sire , j’avoue que qui vous offenfè, mérite avec
« les peines temporelles , celles de l’autre vie, puif-’
» que vous êtes l’image de Dieu. Mais quand il
» promet pardon à ceux qui le demandent avec-
jj une digne repentance, il enfeigne aux rois comme
» ils en doivent ufer ; car , puifqué les larmçschan-
» gent les arrêts du ciel, les miennes , Sire, n’au-v
» ront-elles pas le pouvoir d’émouvoir votre pitié ?
» La juflice eft un moindre effet de la puiffance des
jj rois que la miféricorde , le punir moins louable
» qne le pardonner. Combien de gens vivent au
jj monde , qui feraient fous la terre avec infamie,
jj fi Votre Majeflé ne leur eût pardonné ; Sire, vous
9 êtes roi, père ôc maître dé ce malheureux pri-
v fonnier. Peut-il être plus méchant que vous n’êtes
jj bon, & plus coupable que vous n’êtes mifériccr-
» dieux; ne feroit-ce pas vous offenfer que ne point
jj efpérer en votre bonté- ? Les meilleurs exemples
m pour les bons font de la pitié ; le méchants dêvien-
jj tient plus fins ÔC non pas meilleurs pour les fup-
n pljces d’autrui : Sire , je*vous demande, les genoux
jj en terre , la vie def mon fils, ôc de ne permettre
n point que celui que j’ai nourri pour votre fervice,
jj meure pour celui d’autrui : que cet enfant que j’ai
jj élevé fi chèrement, foit la défolation de ce peu
jj de jours qui me refient, enfin que celui que
jj j’ai, mis au monde me mette au tombeau : hélas !
jj Sire, que ne mourcit-il en naifîaut, ou du coup
» qu’il reçut à Saint-Jean , ou en quelques autres
jj des périls oh il s’eft trouvé pour votre fervice ,
jj tant à Montauban, Montpellier qu’autres lieux, ou
jj de la . main même de celui qui nous a caufé tant
jj de déplaifirs ! ayez pitié de lui, Sire , fon iii-
jj gratitude paffée rendra votre miféricorde d’autant
jj plus recommandable ; je vous l’ai donné à huit
jj ans, il eft petit-fils du maréchal de Montluc, ôc
jj du Préfident Jeannin, par alliance. Les fiens vous
jj fervent tous les jours, qui n’ofent fe jetter à vos
jj pieds de peur de vous déplaire, ne laiiTant pas de
» demander en toute humilité ôc révérence , les larmes
jj à l’oe il, avec moi , la vie de ceNmiférabîç, foit
jj qu’il la doive achever dans une prifon perpétuelle ,
jj ou dans les armées étrangères en vous faifant fer-
» vice. Ainfi, Votre Majeflé peut délivrer les fiens
jj de l’infamie & de la perte , fatisfaire à votre juflice
m ÔC relever vôtre clémence : nous obligeant de
jj plus en plus à louer votre bénignité , Ôc prier
»> Dieu continuellement pour la fauté ôc profpérité
jj de votre royale perfonne , ôcc.
T A L |p j
L’Editeur'croit ayoir trouvé dans les pièces de ce
procès, de quoi détruire diveifes opinions établies
par les hifioriens , fer l’amour qn’on. veut que ia
duchéffe dé Chevreufe ait infpiré au cardinal de
Richelieu, fur les vifiteß que le cardinal fit, au comte
de Chalais dans la prifon , fur la mort un peu prompte
du marédhal d’Ojrnano à Vinceenes.
Rien n’éft détruit, tout eft plutôt confirmé. La
Politique fombre, que le gouvernement employois'
alors, répand plus d’ombres ôc de myfières fur les
événemens de ce temps-là, que toutes ces eleml-
lneurs ne peuvent en difliper. On fe flate toujours
trop tôt d’avoir fait une découverte, & on fe preffe
trop de démentir l’hiftoire fur la foi de quelque écrit
incorlfiu , dont on ignore les circonflances ; s’il faut
édaircir l’hifloire par les aétes , il faut auffi très-fou--
vent éclaircir les aéles par l’hifloire , ôc une tradition
confiante eft quelque chofe , jufqu’à ce qu’elle
foit démontrée faufîe.
La grâce du malheureux comte de Chalais ayant
été refufée, la dernière^reffource de fes amis fut de
faire cacher le bourreau de Nantes pour gagner du
temps ôc donner lieu à de nouvelles inftances ; cet
incident ne fit que rendre fon fepplice plus douloureux
; on chargea de l'exécution deux criminels auxquels
on accorda la grâce. Ils employèrent tctir-à-
tour ôc avec une égale mal-adreffe , lepéed’un fuifle
ôc la.doîoire d’un tonnelier; ils hachèrent en pièces
le malheureux patient, il reçut jufqu’à trente coups
avant que la tête fûtféparéedu corps, ôt cria jufqu’au
vingtième. Ce fepplice fut la première cruauté infigne
du cardinal de Richelieu.
TALHOUET , ( Hiß. de Fr. ) condamné à mort
fous la régence en 1723, pour prévarication dans
i’adminiftration des affaires de la banque ôc de la
compagnie des Indes ; fà peine fut «ommuée en
une prifon perpétuelle auxIffes de Sainte-Marguerite.
Il fut vécut long-temps à fon affaire. On a remarqué
qü ’elle avoit donné lieu à un tic fingulier auquel il
fut fojet le refte de fa vie. Comme le principal chef
d’accufation contre lui étoit d’avoir erdohne des
chofes repréhenfibles , fon -imagination avoit été
frappée de ces mots ordonner des chofes , & il les
plaçoit involontairement dans chaque phrafe qu’il
difoit, ce qui occafionnoit quelquefois des équivoques
plaçantes. ' , . ■
T A L I , f m. terme de relation , nom que les Indiens
de Carnate donnent au bijou que l’époux, dans
la cérémonie du mariage , attache au cou de l epcufe ,
ôc qu’elle porte jufqu’au décès de! fon mari , pour
marque de fon état ; à la mort du irari, le plus proche
parent lui coupe ce bijou, ôc c’eft-là la marque
du veuvage. (D . J .)
TALISMAN , ( terne de relation ) nom d’un
miniftre inférieur de mofquée chez les Turcs. Les
talifmans font comme les diacres des imans, marquent
les heures des prières en tournant une horloge
de fable de quatre en quatre heures ; ôc les jours