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Sarragofle. La même année il défendit vaillamment
onhuega, mais cette place ayant été prife d’affaut
îe _9 décembre, par le duc de Vendôme, Stan hope
reita pnfonn;er avec les cinq mille Anglois qu’il
avoit introduits dans Brihuega. Echangé en 1712 ,
contre le duc d’Efcalone , vice-roi de Naples, il
lut lecré aire d’Etat & membre du confcil privé
feus le roi George 1. U sî'a en Ambaflade à Vienne,
& t* étoit nommé plénipotentiaire au congrès de
Vambrai, lorfeuïi mourut à Londres, en 1721.
STANISLAS LESZCZINSKI, (H i ß . d e P o lo g n e .)
roi de Pologne, duc de Lorraine & de Bar : il naquit
a Leopold le 10 célobie 1677 ; une éducation dure,
male & fimple , lui donna les forces que la nature
lui a voit refufées - mais en prenant loin du corps
on n’oublia pas la culture de l’efprit ; le droit public
«e Pologne fut fa principale étude ; fcn amour peur
la patrie dirigea ceiui qu’il avoit pour les fciences ;
il voyagea-en Italie 5 à Iba retour il trouva !e grand
oebieski ion ayeul maternelprêt à defeendre dans
la tombe ; U reçut fes derniers Ibupire ; ,fe mort
fut lui vie a un interrègne • orageux-j les préfendans
a la couronne ne furent po;nt.effrayés par le fardeau
ÿ ; 1» s’impoKJient en fïiccèdant à Sobieski : enfin |
t r e d é r i c Augufte, éleéleur de Saxe , l’emporta fur
les rivaux , 6c fut couronné le 15 -feptembre 1607.
L a 'fems année la Suède perdit Charles XI, plaça
inr le trône le jeune Charles X I I , & le déclara
nu!}-, ur a quinze ans. Les rois de Pologne & de
Daaemarcît & te czar de Ruffie ne crurent point
oue cette majorité précoce déférée par les~états fût
une preuve des taiens prématurés de Charles ; résolus
de^ le dépouiller d’upe partie de fes domaines,
Î:S formèrent une ligue oôenfive contre lui ; Charles
attaqua les Danois dans leurs foyers , écrafe les
RIctecvites à Narwa , & tourna fes armes centre ,
Prederic-Augufle. La république n’avort -point approuvé
les projets ambitieux de celui-ci ; Charles
par-tout vainqueur & conquérant, trouva aifémert
en Pologne une facl'cn contre fbn ennemi, & la
diète affembîée a Varfovie , le 14 février 1704, déclara
Augufte dc-chu du trône. Charles, qui avoit eu
allez de force pour ôter un roi aux Poloriois , prétendit
avoir le droit de leur en donner un autre- I
il avoit nomme d abord Jacques Sobieski ; mais, ce
prince & Çonitantin fon frere furent arrêtés par des
parti'ans d’Auguftc ; S a n iß a s engagea Charles à monter
fur ie trône, ce fur en vain ; le jeune Alexandre
Sobieski montra le même défintérefîlment S 'a r .is -
l a s , député près de Charles , avoit inlpiré à ce
prince une éflime fende; fes manières- douces & nobles,
fon efpnt aét.'f S i pénétrant, la jufteffe avec
laquelle il apprécioit les hommes , fon éloquence
mâle & fans art, la candeur qui règnoit clans fes
réponCs ; toutes ces qualités Télé voient d autant plus
àu-dduis dé fes rivaux, qu’il ne vouloir ê:re lui-
meme le rival de perfonne ; il n’avoit point brigué
le feeptre , & Charles le mit dans fes mains : «voilà ,
» d it- il, le roi qu’auront les Polonoîs » '.S ta n is la s
(pbjea a que Jes pr inces Jacques S i Conftentin étaient |
$ T A abfens, Si qu’on ne pouvoit faire une éleâion fans
eux ; « il faut une éleélion pour fauver la républi-
” 9l!f * lep°ndit Charles XII ». Le primat qui avoit
intérêt de différer l’éleélion pour perpétuer fbn autorité,
-eiiaya de perdre Stanislas, & dans l’efprit
de Charles Si dans l’efprit de la nobleffe polonoife.
Stanislas ne lui oppofa d’autre brigue que l’eftime
pudique. Le prélat ne put la détruire, ni même
laffoiblir : on saffembia auColo : Charles, s’y gliflà
fecrètement ; cria vivat Stanislas , & à ce cri le
prince fut proclamé par toute l’affemblée ; le primat
oc fes autres ennemis vinrent lui rendre hommage.
Le roi ne fit paroître aucun reffentiment dans lès
rii(cours , parce qu’il n’en avoit aucun dans le
cceur.
Stanislas etoit élu, mais il n’étoit point couronné;
le pape, qu’Augulle avoit mis dans .les intérêts,
voulut traverfsr cette cérémonie: La Pologne fut
mondee de brefs , par lefquels tous les prélats qui
aflifteroiaut au fecre , étoient menacés des foudres
ou Vatican \ La nouvelle Rome a cru. long-temps
avoir hérité de l’ancienne, du droit de donner &
d cter les couronnes. Le primat tefufe de couronner
Stanislas, mais il mourut peu- de jours après ; l'ar-
chevèque de Léopold remplit les fibnéhons du primat ;
ce fut en piefènce de Charles XII qu’il couronna
Stanislas 6c Char lotte-Catherine Opalïnska, fou
époufe. Augufle vaincu partout n’obtint la paix
qu’en renonçant à la couronne : Charles XII le
força de féliciter Stanislas fur fon avènement au
trône ; ce prince lui répondit en ces termes
« Moniteur & frère , la correlpondance de votre
» majefté efl une nouvelle-obligation que j’ai au roi
» de Suède ; je fuis- fènfible , comme je le dois ,
» aux complïmens que vous me faites fur mon
» avènement : j’efpère que mes fujets n’auront point
» lieu de me manquer de fidélité, parce que j’ob-
» ferverai les loix du royaume. »
Tandis cu’Augufle, par des intrigues feerettes
effayoit de foumettre des places, Stanislas conqué-
roii des coeurs par fes bienfaits:il fut bientôt uni-
|-verfeîlement reconnu; les cours d’Allemagne, de
I France, d’Angleterre Si de la Porte , joignirent
leurs fuffrages à ceux des Polonois ; mais Bientôt
l’appareil effrayant de l’armée du czar , les menées
lourdes d’Augufle , l’or que fes émiffares vèrfoient à
pleines mains , ahèr.oient quelques faélienx qui don-
noient leur eftime à Stanislas , & leur fan» à fon
rival. Pour comble de malheurs, Charles XII fut
battu à Pultava , le 2.8 juin 3709 , Si s’enfuit en
Turquie. Tous les princes du Nord fe liguèrent pour
partager la dépouillé du vaincu ; Augufle rentra en
Pologne, & réclama contre la cefficn foicée qu’il
avoit faite de la couronne : ce fut alors que Stanislas
fît éclater toute la nobleffe de fon ame ; abandonné
par des amis fbibles, n’ayant plus de finances pour
acheter des créatures , il le retira en Poméranie, pour
défendre les états de fon bienfaiteur. Jufqu’a!©rs on
l’avoit connu prince généreux, bon citoyen , ami
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fidèle ; à Stralfund,à Stetin, à Roflcclc, à GuffrO’W
on le vit foldat intrépide , habile général ; ne pouvant
plus Té maintenir en Poméranie , il paffa en
5 tiède pour raflurer la*-.fidélité du peuple , ébranlée
par les malheurs & par l’âbfence de fon maître, ré-
fojut enfuite de rendre la paix à la Pologne, en descendant
du trône : il courut à .Bender pour faire
confentir Charles XII à cette abdication , mais il fut
arrêté en Moldavie, conduit de.prifons en prifons ,
Si ne put voir Charles XII : aès qu’il fut remis
en liberté , il traversa l’Allemagne , arriva à Deux-
Ponts , & y fit venir fa famille. Çe fut là que la
mort lui enleva fa fitle aînée en 17 14 ; cette perte
lui fut plus fenffbîe que celle de la couronne. La
fortune n’avoit point changé : mais le czar avoit
changé de deffeins & d’intérêts. L’ennemi de Charles
étoit devénu fon allié, Si tous deux vouloient replacer
Stanislas fur le trône , ou Augufle étoit monté
une fécondé fois. Les ennemis de Stanislas effayè-.
fent de l’enlever ; mais la confpiration fut découverte
, le roi fit venir les coupables , fe vengea par
un pardon généreux, & leur donna de l’argent pour
retourner dans leur patrie, tandis qu’il en manquoit
lui-même pour foutenir fa maifon. La mort de Charles
XII renverfa toutes les efpérances que les amis de
Stanislas avoient conçues pour lui-même ; il fe retira
à Veiffenbôurg l’an 1718 , & y demeura juf-
qu’au mariage de Louis XV avec Marie fa fille ,
célébré à Fontainebleau le 7 feptembre 1725 :
Stanislas lui donna les confeils les plus fages; il ne
pouvoit lui en donner un plus beau que l’exemple
de- fa. vie. Ce prince fixa fa cour à Chambord,
ou Louis XV lui donna de quoi foutenir fbn rang ,
Si fàtisfaire la douce habitude qu’il avoit contrariée
de faire des heureux. Sur ces entrefaites .Frédéric-
Augufle mourut le premier février 1733 , Stanislas
quitta fa paifible retraite pour, remplir ce qu’il de- '
voit à fa patrie , à Louis XV , à lui-même : il arrive
déguifé à Varfbvie , fe montre au peuple & eft
encore proclamé roi par plus de cent mille bouches ;
quelques palatins railemblèrent des troupes peur
traverfer cette éleélion ; on prella Stanislas de prendre
les armes pour diffiper cet orag-e. « Non, non,dit--
» i l , je ne fuis pas venu pour faire égorger mes
» .compatriotes, maïs pour les gouverner : s’il faut
» que mon trône foit- cimenté de leur fang, j’aime
,» mieux y renoncer pour jamais. »
Cependant Fr.édéi ic-Augufle IIÏ , éîeéleur de Saxe
éfc fils de Frédéric-Augufle II, fut élu par un parti
puâffjirit : - il avoit époufé la nièce de Charles V I ,
6 cpt empereur joignit fes armes à celles de Ruffie
pour captiver les. teffrages des Polonois. Le roi de
France lui déclara la guerre ; Dantrik bit afiiègé
par les Mofcoyites. Les habitons de..cette ville
iddiâtroient Stanislas ; il fe jwtta parmi eux; ils
montrèrent ainfi que lui un courage au-deffus des
plus grands périls ; mais enfin voyant le feeours qu’il
attendoit de France intercepté , la ville .démantelée ,
la garriifon menacée d’une mort certaine, les biens
des habitahs prêts à être livrés au pillage, enfin fe
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tête mîfe à prix , ( & ce dernier malheur étoit celui
qui le touchoit le moins, ) il réfolut de s’enfuir pour
laiffer aux Dantzikois la liberté de capituler ; il partit
déguifé en payfan-; un centumvir, en apprenant fe
fuite, tomba mort fur les genoux du comte de
Poniatowski. Il efl peu de rois fans doute à qui on
ait donné de pareilles preuves d’attachement : mais
il en efl moins encore qui les aient autant méritées
que S ta n is la s , u Je vous embraffe tous bien tendre-
v ment, écrivoit-il à fes partifens, & je vous con-
» jure par vous-mêmes & par conféquent par ce que
» j’ai de plus cher, de vous unir plus que jamais
» pour foutenir les intérêts de la chère patrie qui
» n’a -d’autre appui qu’en vous feu’s : les larmes qui
» effacent mon écriture m’obligent de finir. » Il donna
aux Dantzikois les mêmes témoignages de recon-
noiffance 6c d’amitié : fes lettres ainft que fes discours
portent l'empreinte de la vérité S i du fendillent
; de tous les talens il ne lui manquoit que celui
de tromper , & s’il avoit eu celui-là , il n’auroit.
peut-être jamais perdu la couronne. L e s bornes de
, cet article ne me permettent pas de le fuiyre dans
fe fuite ; errant au milieu de fes ennemis, a la merci
de quelques guides mercenaires & peu fidèles, ex-
pofe àtoutes Tes injures de l’air, rencontrant la mort
à chaque pas, trahi quelquefois par cet air de nobleffe,
qui le faifoit recbnnoître fous les haillons qui
1e couvroient, tournant fens ceffe fes regards atten- ~
dris vers Dantzîk ; enfin reçu dans les états du roi-
de Pruffe avec tous les égards qu’on devoit à fcn
rang , à fes malheurs, S i fur-tout à fa vertu , il quitta
bientôt fon nouvel afyle pour revenir en France.
Enfin la paix fut fignée ; on laifl'a à S ta n is la s le titre
& les honneurs de roi de Pologne & de grand duc
de Lithuanie : il abdiqua la couronne, S i entra en
poffefîion des duchés de Lorraine S i de Bar , qui
dévoient après fa mort être réunis à la couronne de
France. Il fe forma depuis un parti en Pologne pour
le replacer fur le trône, mais il fe hâta de difliper
cette faélion par une lettre oit il fait éclater S i le
paîricîifine le plus pur S i le défintéreffement le plus
héroïque; il ne s’occupa plus que du bonheur de fes
nouveaux fujets, & ne fe permit d’autre délaffement
que l’étude ; des hôpitaux fondés , des églifes bâties ,
clés manufaétures établies , la ville de Nancy ornée,
celle de Saint-Diez ruinée par un incendie S i re-
conûruite par fes foins ; les établiffemenç les plus
fages pour l'éducation de la jeuneffe, font autant de
monumens de fa bienfeifance S i de fon goût pour
les arts .- enfin il félicita le comte Poniatowski fur
fon avènement au trône l’an 1763 ; cette démarche
fut libre , & fait plus d’honneur à la mémoire de
S ta n is la s qu’une pareille lettre diélée par Charles X îï
ne fait de tort à celle de Frédéric-Augufle. Il fit
plus, il engagea les cours de France S i ,de Vienne
à reconnoître 1e nouveau roi. Il fevoit que fa nation
avoit fait un choix éclairé, S i que te mérite de ce
prince avoit feul brigué les fuffrages. La mort de
ton épouie & celle de monfeign'èur le dauphin jettè-
rent une amertume profonde fur fes dernières années^