
belle perfonhe de France. On: la crut empoifonnée ;
on accufa la dame de Villeqüier , fa coufine &
(à rivale ; le Dauphin , depuis Louis XI ,
fon ennemi déclaré , qui, dans une querelle qu’il
avoit eut avec elle, s’étoit emporté jufqu a lui donner
un foufflet ; on foupçonna jufqua Jacques
Coeur , fon ami, qu’elle nomma fon exécuteur testamentaire.
( Voye^ l’article; Coeur ) ( Jacques. )
Elle fut enterrée dans l’églife collégiale dé Lochès,-
dont elle avoit été la bienfaitrice ; lès chanoines
lui firent élever dans leur choeur un Maufôlée. Lorsque
Louis XI. fut fur le trône, ils crurent,' dit-
on, lui faire leur cour, en lui offrant de détruire
ce monument Louis XI , roi quelquefois jufte, les
fit rougir d’une telle ingratitude envers une femme
qui les avoit comblés, de bienfaits;
Cette Agnès Sorel, digne d’eftime à beaucoup,
d’égards , comme on vient de ,le voir , fut accùfée
de n’avoir pas eu pour Jeanne d’A r c , pour là fa-
tneufè Pucelle (POrléans , les fentiments qu’elle de-
voit a-la. libératrice du Roi, fon'amant , au génie
tutélaire de, la France ; elle fut même foupcannée
d’avoir contribué, par une jaloufie politique, trop
indigne d’elle , à l’indifférence coupable avec laquelle
Charles VII. laiffa périr miférablement cette
brave Amazone,
La honte des Anglois , & léfoutien du trône.
SOREL, ( Charles } HIß. litt. mod. ) fieur de
Souvjgni, neveu & fucceffeur de Charles Bernard,
hiftoripgraphe de France ( quels hiftoriograph.es I ) a
continué la généaUgïe de la mai fon de Bourbon ,
commencée par fon oncle , a donné une bibliothèque
francoife, une hißoire de la monarchie françoife ,
"un abrégé dit règne de Louis X I V , dont il n’a vu
qu’une partie ;un traité des droits des rois de France ;
il a laiffé aûffi des romans , le berger extravagant ,
Francion , dès nouvelles Françoifes. '' Né à Paris en
1 599 , mort en 1674.
SO RGUGE , f. f. ( Hiß. mod. ) c’eft ainfi que les
Turcs nomment une aigrette faite en plume, & / ornée
de pierreries que l’on porte au turban. Le ful-
tan foui a le droit d’en porter trois. Les grands pachas
ou gouverneurs d’Égypte, de Babylone &- de
Damas , en portent une feule du côté gauche; les
officiers d’un moindre rang portent auffi une aigrette,
mais elle eft toute fimple. ( A. R .)
SO R T S , ( Théologie payenne. ) fortes. Le fort
eft l’effet du hazard, ÔC comme 'la décifion ou l’oracle
de la fortune ; mais les forts font l’inflrument dont,
©n fo fort pour favoir'quelle eft cette décifion.
Les forts étoient le plus fouvent des efpèces de dés,
fur lefquels étoient gravés quelques caraélères ou
quelques mots dont, on alloit chercher l’explication
dans des tables faites exprès.. Les ufages.étoient différer^
fur les forts. Dans quelques temples on les
jettoit foi-même ; dans d’autres on les faifoit fortir
d’une urne , d’oh eft venue cette manière de parler
fi ordinaire aux Grecs, le fort efl tombé.
Ce jeu de dés étoit toujours précédé de facrifices
&^de beaucoup de cérémonies apparemment les
prêtres favoient manier les dés ; vais s’ils ne vou-
loient pas prendre cette peine, ils n’avoient qu’à les
fa:ffer aller; ils étoient toujours maîtres de l’explication.
Les Lacédémoniens allèrent un jour confulter les
forts de Dodone , fur quelque guerre qu’ils entreprennent
; car outre les chênes parlans, & les colombes
fos baffins & l’oracle, il y avoit encore
des forts a Dodone. Après toutes les cérémonies faites
, fur le point qu’on alloit jetter les forts avec
beaucoup de refpeét & de vénération , voilà un finge
du roi de Moloffes , qui étant entré dans le temple ,
renverfo les forts & l’urne. La prêtreffe effrayée dit
aux Lacedemoniens qu’ils ne dévoient pas fonger à
vaincre, mais feulement à fo fauver ; & tous les écrivains
affurent que jamais Lacédémone ne reçut un
préfage plus funefte.
Les plus célébrés entre les forts étoient à Prénefte
& à Antium, deux petites villes d’Italie. A Prénefte
etoit la fortuné, & à Antium les fortunes. Voye^
Sorts de Préneste.
Les fortunes d’Antium avaient cela de remarquable
, que c’étoient des ftatues qui fe remuoient d’elles-
mêmes-, félon le témoignage de Macrobe, l. I c.
xxiij. & dont les mouvemens différons, ou fervoient
de réponfe, ou marquoient fi l’on peuvoit confulter
les forts. '
; Un paffage de Gcéron, au ïiv. IL de la divination
, où-il dit que l’on confultoit les forts de Prénefte
par le confentement de la fortune, peut faire croire
que cette fortune favoit auffi remuer la tête , ou
donner quelqu’ autre figne de fos volontés.
Nous trouvons encore quelques ftatues quiavoient
cette même propriété. Diodore de Sicile & Quinte-
Curce, difent que Jupiter-Ammon étoit porté par
quatre-vingt prêtres dans une efpèce de gondole d’o r,
d’où pendoient des coupes d’argent qu’il étoit fùivi
dqn grand nombre de femmes & de filles qui chang
e n t des hymnes en langue du pays , & que ce
dieu porté par fes prêtres, les conduifoit en leur
marquant par quelques mouvemens où il vouloit
aller..
Le dieu d’Héliopolis de Syrie , félon Macrobe , en
faifoit autant : toute la différence étoit qu’il vouloit
être porté par les gens les plus qualifiés de la province
, qui euffent long-temps auparavant vécu en .
continence, & qui fe Ment fait rafer la tc.e.
Lucien , dans le traite de la déeffede Syrie , dit qu’il
a vu un Apollon encore plus miraculeux, car étant
porté fur les épaules de fes prêtres , il s’avifa de les
laiffer là', & de fè promener par les airs, & cela
aux; yeux d’un homme tel que Lucien, ce qui eft
confidçrahle.
Dans l’Orient les forts étoient des flèches, & aujourd’hui
encore les Turcs & les Arabes s’en fervent
de la même manière. Ezéchiel dit que Nabuchodo-
nofor mêla fes flèches contre Ammon & Jérufalem,
& que la flèche fortit contre Jérufalem. C ’étoit-là
une belle manière de réfoudre auquel de ces deux
peuples il feroit la guerre.
Dans la Grèce & dans l’Italie on tïroit fouvent
les forts de quelque poète célèbre , comme Homère
ou Euripide; ce qui fe préfentoit à l’ouverture du
livre , étoit l’arrêt du ciel. L’hiftoire en fournit mille
exemples. Voye^ Sorts à'Homère.
On voit même que quelques 200 ans après la mort
de Virgile , 011 faifoit déjà affez de cas de fes vers
pour les croire prophétiques, & pour les mettre en
la place des forts qui avoiènt été à Prénefte ; car
Alexandre Severe encore particulier , 6£ dans le tems
que l’Empereur Héliogabale ne lui vouloit pas de
bien, reçut pour réponfe dans le temple de Prénefte
cet endroit de Virgile dont le fens eft : « Si tu peux
» formonter les deftins contraires, tu feras Maicellus.
Voye^ Sorts de Virgile.
Les forts paffèrent jufques dans le chriftianifme ; on
les prit dans les livres facrés , au lieu que les payens
les prenoient dans leurs poètes. S. Augwftin , dans
I èpître cxix. à Januarius, paroît ne défapprouver cet
ufoge que fur ce qui regarde les affaires du fiècle..
Grégoire-de Tours nous apprend lui-même quelle
étoit fa pratique ; il pafloit plufieurs jours dans le
jeune & dans la prière ; enfuire il alloit au tombeau
de^fà-nt'Martin, où il ouvroit tel livre de l’Ecriture
quil vouloit., & il prenoit pour la réponfe de Dieu
le premier paffage qui s ’ ottroit /v* ' a ' les " yeux. 01 ce pa/ifj
iage
ne faifoit rien au
fujet, il ouvroit un autre livre de
l’Ecriture.
D autres prenoient pour fort divin la première
chofo qu’ils entendoient chanter en entrant dans l’églife.
y®ye{ Sorts des Saints.
Mais qui crolroit qu’Héraclius délibérant en quel
heu il feroit paffer l’hiver à fon armée , fo détermina
par cette efpèce de fort ? Il fit purifier fon armée
pendant trois jours ; enfoite il ouvrit le livre des
évangiles , & trouva que fon quartier d’hyver lui
etoit marqtié dans ^Albanie. Etoit-ce là une affaire
oa efpérervde trouver la décifion dans
I Ecriture ?
L Eglife eft enfin venue à bout d’exterminer cette
upèiftition; mais il lui a fallu du tems. Du moment
que 1 erreur eft en poff ffion dés efprits , -c’eft une
werveiPe, fi elle ne s’y maintient toujours. (D. 7.)
v/ORts d'Homère ^ ( Divinat .du p a go ni fine ) fortes
Htmçricoe ; efpèce de divination. Elle confiftoit à
ouvrir au hafard les écrits d’Homère , & à tirer à J.a
prem-ere infeription1 de la page qui fe préfentoit à la
vue, un augure ou proncftic de ce qui devpit arriver
a foi-même & aux autres , ou des réglés de
conduite convenables aux circonftanc.s dans lefquei—
- s on fe trou voit, Les Grççs donnoiçnt à ce genre de
divination le nom de > pa-^aPopcifTeiet »
pa.'l'CùS'opoiyTlXrî.
L’antiquité payenne fomble avoir regardé ceüx
qui avoient le talent fupérieur de la poëfie, comme
des hommes infpirés ; ils fe donnoient pour tels ; ils
affuroient qu’ils parloient le langage des dieux, ÔC
les peuples les ont crus fur leur parole. L’Iliade & 1 Odyffée font remplis d’un fi grand nombre de traits
de religion & de morale ; ils contiennent dans leur
étendue, une fi prodigieufe variété d’événemens, dô
fentences & de maximes applicables à toutes Jes
circonftances de la vie, qu’il n’eft pas étonnant-épie
ceux qui par hazard ou de deffein formé, jettoient les.
yeux for ces poèmes , ayent cru y .trouver quelquefois
des prédirions ou des confeils ; il aura fuflïque
lefuccès ait juftifié de tempç en temps la curicfité des
'perfonnes , qui dans des fituations embarraffantes
ont eu recours à cet expédient, pour qu’on fo foit
infenfiblement accoutumé à regarder les. écrits de ce
poète, comme un oracle toujours prêt à rendre des
réponfes à quiconque voudroit l’interroger. On ne
peut s’imaginer à quel point les hommes portent la
crédulité , lorfqu’ils font agités par la crainte, ou
par l’efpérance.
Ce n’étoit point là un de ces préjugés qui ne régnent
que fur le vulgaire; de grands perfonnagesde
l’antiquité , ceux principalement qui aipiroient à
gouverner lès autres, n’ont pas été exempts de cette
chimère. Mais ce ne fut point par xette idée fuperf-
titieufe que Socrate dans fa prifoh, entendant recirer
ces vers qu’Homère met dans la bouche.d’Achille :
j’arriverai le troifième jour à la fertile Phthie,
HjUXTt XêV TÇlTaTCi <p&'w ipificûMv TxOijUtjV ,
fe mit a dire qu’il n’avoit donc plus que trois jours
a vivre ; il badinoit for l’équivoque du mot (p&Uv3
qui fignifie le pays de Phthie, & la corruption ou
la mort ; cependant ce badinage qu’il fit en préfence
d Efchine, ne Tut point oublie, parce qu’il mourut
trois jours après.
Valere-Maxime raconte que Brutus eut le trifte
préfage du fort qui l’attendoit à la bataille de Philippe.
Le hazard lui ayant offert cet endroit de
l’Iliade, où Patrocle fe plaint que « le cruel deftin
» & le fils de Latone lui ont ôté la vie.
A Ma /ts po7p, A ïJTOvS iXTAViV v!qÇ.
L’application que^ cet illuftre romain s’en fit à lui-
même ,' fut juftifiéè par l’événement.
Si l’on en croit Lampride* l’ empereur Mscrin en*
lieux d’apprendre dans le même poète, fi fon jègne
feroit lpng ÔL heureux, tomba fur ces vers qu’on peut
rendre ainfi. « Vieillard, vous êtes furieufomènt ferré
n par de james. guerriers ; votre force eft anéantie ,
>;'ôc vous êtes menacé d’une tiifte yieilleffe.
«