
»> lui dit-il & nombrez , fi vous le pouvez, toutes
» ces demeures- des malheureux mortels ; fongez de
» combien de chagrins ils ont autrefois été le fé-
» jour , combien de chagrins les habitent en ce
» moment , combien de chagrins les habiteront
» dans la fuite des temps ; voyez vos ennuis per-
n fonnels noyés & abîmés dàns cet Océan d’ennuis
« divers , & tirez-en l’avantage d’affoiblir en vous
»> le fentiment particulier d’un malheur qui vous
» eft commun avec tous les hommes, w Ces idées
philofophiques font vaftes 6c belles fans doute, mais
elles font bien peu confolantes. Suis-jé moins malheureux
, parce que d’autres l’ont été , le font
ou le feront ? Le temps qui démolit en filence, qui
affaiblit ou efface tous les fouveniis , voilà le con-
folateur le plus sûr , fi en emportant- tous nos cha-
glins, il ne nous empört oit pas nous-mêmes.
SOLTAN ou A L -SO L TAN , (Hiß. des Arab.)
première dignité chez les Arabes. Les hiftoriens
orientaux nous apprennent que Mahmud Gazni,
fils de Sabcktekin, fut le premier à qui Khalef, fils
d’Ahmed, gouverneur du Ségiftan, donna ce titre.
Ce fut alors qu’on le fubftitua au titre d’émir, qui
jafques-là avoit été conftamment en ufage.
Le mot de foltan eft commun à la langue chal-
daïque , fyriaque & arabe, & fignifie roi, prince ,
jeigneur, empereur. Les princes des Dynafties, qui
ont précédé celle des Gaznévides, comme des Thahé-
riens, des Soffariens, des Samanides , des Deyla-
mites , ne portoient que le titre d'émir ; mais les Gaz-
nevidés, les Khowarafmiens, les Selgiucides, & les
princes mahométans qui font venus depuis , ont généralement
porté le titre de foltan ou fultan. Aujourd’hui
encore c’eft celui que prennent plufieurs
princes mahométans d’Afie & d’Afrique ; aüfii-bien
que le grand-feigneur. (£>. / .)
SOMAISE , ( Antoine Baudeau, fieur de ) ( Hiß.
litt. mod. ) il déchira Molière & mit en très-mauvais
vers fa comédie des Précieufes ridicules » ce qui étoit
une autre manière de le déchirer, & ne fortant plus
de ce cercle , il fit les véritables Précieufes, le Procès
des Précieufes, le Dictionnaire des Précieufes.
SOMMISTE y f. m. ( Chancel. rom. ) c’ eft le
principal miniftre de la chambre romaine, pour l’expédition
des bulles ; il en fait faire les minutes, les
feit recevoir & plomber. {D . J.)
SOMMONA-CODOM, ( Hiß. des cultes relig.
Pagan. ) Koempfer a une opinion fingulière fur
l’origine de Sommona-Codom, ou Sommona-Khutama,
comme il écrit. C ’eft i’inftituteur de la religion de
prefque tous les peuples de l’Afie , au-delà de l’Inde,
connu des Chingulois , fous le nom de Budhum,
Budha ^a) ou Budhou ; Ô£ des Chinois & des Japo-
nois fons celui de $aka ou Siaka. Tous ces peuples
ne s’accordent point fur le pays de la naiflance de
£3) Voyez la ReUtisn de Ceylon» par Knox,
ce dieu, héros ', faint , impofteur ou Iégiflateuf J
tout comme on voudra l’appeller. Koempfer conjecture
qu’il étoit Egyptien ou Maure , chaffé
d’Egypte par Cambyle. Voici les raifons qu’il allègue
en faveur de fon opinion, elles ne nous paroif-
fent pas deftituées de vraifemblance.
i°. La conformité fur différens points effentiels
entre ce paganifme oriental & celui des anciens
Egyptiens : l’un 6c l’autre très-differens de celui des
Chaldéens & des P.erfes, qui étoient placés entre
les Egyptiens & les Indiens. Deux des principaux
articles de la religion des Egyptiens, & qui fubfif-
tent encore parmi les Orientaux , c étoit la tranf-
migration des âmes , dont une conféquence affez
naturelle eft le fcrupule de faire mourir aucun animal,
6c l’adoration des vaches. Ce qu’il y a de remarquable,
c’eft que plus ces païens font proches
de l’Egypte, plus ils font paroître de zèle fur ces
deux articles. Ceux qui habitent à l’oueft du Gange ,
noferoient tuer les infeéfes les plus chétifs &. les
plus nuifibles ; 6c dans les royaumes les plus orientaux
, les prêtres même ne font aucun fcrupule de
manger de la chair de vache , pourvu qu’ils natent
pas donné occafion , ni confond qu’on les tuât.
20. 536 ans avant l’ere chrétienne, Cambyfo tua
Apis & perfécuta les prêtres : or l’ere des Siamois ,
qui commence, à ce qu’ils difont , à la mort de
Sommona-Codom , eft plus reculée que l’ere chrétienne
de 543 ou 544 ans; d’où notre auteur infère que
ce légiflateur étoit quelqu’un de ces prêtres égyptiens
fugitifs qui établit dans les Indes la feéle qui' y
fubfifte encore.
Pour que cette conjeéfore foit recevable , il faut
fuppofer quelque erreur dans l’un ou dans l’autre
de ces nombres ., fans quoi Sommona-Codom foroit
mort 7 ou 8 ans avant la mort- d’Apis ôt la perfé-
cution de Cambyfe. Il y a plus encore, c’eft que,
fuivant toute apparence, l’époque Siamoife eft purement
(£) aftronomique , & n’a aucun rapport avec
la mort de Sommona-Codom qu’en vertu d’une tradition
plus que fufpeéte. Enfin, les Japonois, fuivant
notre auteür même , placent la mort de Siaka
près de 950 ans avant J. C . , & nous avons vu
qu’il prétend que Siaka & Sommona-Codom ne font
que des noms différens du même homme.
30. Ce faint eft repréfonté avec des cheveux crêpés
comme un Maure, d’où l’on peut conclure qu’il
étoit plutôt né en Afrique, que dans les Indes , dont
les peuples ont les cheveux longs, droits 6c très-peu
frifés.
On fait que Sommona - Kodom eft un per-
fonnage. fameux , qui eft l’objet de la véné-
| ration, & même du culte des Siamois , des habit
ans de Laos , & du Pégu. Suivant les tala-
(b) C’eft le fentiment de MM. de la Loubere. &c Cdffiui.
Voyez le Voyage de. Siam, .delà Loubet« , Tom, l » page
i? 7 , & Tome I I , page ze$.
poins,
poirifc ; <5ü prêtres fiamois, le nom propre de cet
homme eft Kodom , & fommona fignifie le foliaire
ou le religieux des bois», parce que ce légiflateur,
devenu l’idole des Siamois , étoit un farmane ou
fimmane, de la cote de Malabar ou de Cot oman-
'Jel , qui leur apporta la religion qu’ils fuivent aujourd’hui,
6c qui eft prêchée par les talapoins fes difciples.
On croit que cet homme , ou ce dieu, eft le même
que Poutifat ou Èudda, nom qu’on lui donne
en différentes parties de l’Inde : on préfume auffi
que ceft lui qui eft adoré par une foéle de Chinois
qui l’appellent S/iaka » ou She-kia. Quoi qu’il en fcit
de ces opinions , les prêtres fiamois font une h.ftoire
non mùins mérveilleufe que ridicule , de leur légiflateur
, ils difent qu’il eft né d’une fleur , fortie du nombril
d’un enfant qui mordoit le. gros doigt de fon
pied , & qui lui-même n’étoit que la feuille d’un aibre
nageant à la furface des eaux. Malgré cela, les Siamois
ne laiflent pas de donner à Sornrnona-kodom , un
père qui étoit roi de Tanka, ou de Ceyïan, une
mère appellée Maha » ou Mary a , ou fuivant d’autres,
Man-ya. Ce nom a attiré l’attention des miflïonnaires
chrétiens qui ont été à Siam ; il a fait croire aux
Siamois que Jefus-Chrift étcit un frère de Sommona-
kodom, qu’ils appellent le méchant Thcvetat » qui,
félon ces aveugles idolâtres , éft tourmenté en enfer ,
par un fupplice qui a du rapport avec celui de la
croix.
Sommona-kodom mourut , fuivant les annales de
Siam, 544 ans avant l’ere chrétienne; les talapoins,
dont le but principal eft de tirer de l’argent du peuple
, qu’ils féduifent , affurent que non-content d’avoir
donné tout fon bien aux pauvres, n’ayant plus rien,
il s’arracha les yeux, & tua fa femme & fos en-
fans , pour les donner à manger aux talapoins. Ces
charités fi inouies dégagèrent le faint homme de tous
les liens de la vie : alors il fe livra au jeûne , à la
prière, 6c aux autres exercices qui mènent à la per-
teélion ; il ne tarda point à recevoir la récompenfe.
de fes bonnes oeuvres ; il obtint une force de corps
extraordinaire, le don de faire des miracles, la faculté
de fe rendre aufli grand 6c auffi petit qu’il
youloit, celle de difparoître ou de s’anéantir , &
d’en fubftituer un autre à fà place ; il favoit tout,
connoiffoit le paffé & l’avenir ; il fe tranfportoit avec
une promptitude merveilleufe, d’un lieu dans un autre,
pour y prêcher fes dogmes. Suivant les mêmes traditions
,. ce prétendu prophète eut deux difciples,
qui partagèrent avec lui la vénération 6c le culte des
Siamois ; l’un d’eux pria un jour fon maître d’éteindre
le feu de l’enfer, mais il ne voulut en rien faire, di-
fant que les hommes deviendroient trop méchans ,
fi on leur ôtoit la crainte de ce châtiment. Malgré
fa fàinteté, Sornrnona-kodom eut un jour le malheur
de tuer un homme ; en punition de ce crime, il
mourût d’une colique, qui lui vint d’avoir mangé de
la viande de porc : avant de mourir , il ordonna
qu’on lui érigeât des temples & des autels , après quoi
il alla jouir du n reupan, c’eft-à-dire, de l’état d’anean-
tiflemcnt dans lequel la théologie fiatfloife fait çon-
Hifoire. Tome V,
fifter la félicité fuprême ; la, il ne peut faire ni bien
ni mal ; cela n’empêche point qu’on ne lui adrc-fle
des voeux. Les Siamois attendent la venue d’un fécond.
Sommona-kodom » prédit par le premier; ils le
nomment Pra-narotte ; il fera fi charitable, qu’il donnera
fes deux fils à manger aux talapoins ; aéfion
qui mettra le comble à fes vertus. Vjye^ la Loubere,
hifl. & defcr.pt. de Siam. ( A . R )
SOMTOU , ou SOMTOC, C m. ( Hiß. mod. )
ceft ainfi que les Chinois nomment les vice-rois des
provinces. C eft une des plus éminentes dignités de
l’empire. Ils ont deux provinces fous leurs yeuxf
qui ont outre cela des gouverneurs nommés
fii-yen. (.A . R.)
SONGES , fêtes des ( Hifl. mod. ) les fàuvages
de l’Amérique feptentrionale appellent fête des fonges
ou du renverfement de cervelle, une eipèce de bac- !
chanale qui fe célébré parmi eux vers la fin de l’hiver
& qui dure ordinairement 15 jours. Pendant ce tems , .
il eft permis à „chacun de faire toutes les folies que'
la fantaifie lui fuggere. Chaque fauvage barbouillé ou
déguifé de la manière la plus bifarre , court de cabanes
en cabanes , renverfe 6c brife tout fans que per-
fonne puifte s’y oppofer ; il demande au premier
qu’il rencontre l’explication de fon dernier rêve, ÔC
ceux qui devinent jufte, font obligés de donner la.
chofe à laquelle on a rêvé. La fête finie , on rend
tout ce qu’on a reçu, & l’on, fe met à réparer les
defbrdres qu’une joie licencieufe a caufés. Comme
l’ivreffe eft fouvent de la partie, il arrive quelquefois
des tumultes & des cataftrophes funeftes dan»
ces fortes d’orgies, où la raifon n-eft jamais écoutée.
SONNA, f f. ( Hiß. mod. ) c’eft le' nom que les
Mahométans donnent à un recueil de traditions contenant
les faits 6c les paroles remarquables de Mahomet
leur prophète. Quoique ce recueil foit rempli
de rêveries les plus abfût des & les plus deftituées de
vra femblance , ils l’ont en très-grande vénération ,
& c’eft après le koran ou l’al-koran, le livre qui a
le plus d’autorité chez les feciateurs de la religion
mahométane.-La forma eft, pour ainfi dire, un fup-
plément à cet ouvrage ; elle contient, outre les traditions
dont on a parlé , les réglemens 6c les déci-
fions des premiers califes ou fucceffeurs de Mahomet ;
ce qui conftitue un corps de Théologie dont il n’cft
point permis de s’écarter. L’attachement des Mahométans
pour cet ouvrage leur a fait donner le nom
de Sonnites ou Traditionites. Quelques-uns des faits
merveilleux qui y font rapportés , font même alteftés
& confirmés par l’al-coran , & deviennent par-là des
articles de foi. Tels font les miracles de Mahomet,
fon voyage au ciel , 6c d’autres événemens merveilleux
dont le prophète fait attefter la véri-é par la
voix de Dieu-même. Les Sonnites regardent l’al-co-
ran comme coéternel à Dieu. Us ont encore des opinions
relatives à la politique , par lefquelles ils différent
de ceux qu’ils appellent Shutes ou feêlaires Jchif-
matiques : ces derniers regardent les califes ou fuc-
cefleurs de Mahomet qui ont précédé AU, gendre