
Henri IV ; 41 cabala & conspira même quelquefois
contre lui. Mort le 25 mars 1623.
7°. Il eut pour fils le duc de Bouillon Frédéric
.Maurice de la Tour * qui, étant entré , ainfi que
le grand Ecuyer Cinq-Mars , dans un traité que* le
•duc d’Orléans Gallon faifoit avec l’Efpagne , fut
ar. eie au milieu de l’armée qu’il commandoit en
•Italie. La duchefïe de Bouillon, la femme, lui fkuva
la -vie , en menaçant de remettre la place de Sedan
• aux Elpagnols, il en tut quitte pour la remettre au
roi 5 & il en reçut, en 1651 , un dédommagement
confidérable. Il eut en échange "la Duché-Pairie
d’Aiûret-, la.Duché-Pairie de Château-Thierry, le
comté d’Auvergne , le comté d’Evreux , &c. le
rang oc toutes Tes prérogatives de princes étrangers
allures à la maifon par le contrat d’échange , mais
elle n’en a point joui, & c’eft un droit à faire valoir.
C tft ce même duc de Bouillon , qui joua, ainfi
que la ducheffe , fa femme, un grande rôle dais les
ttoübj. s de la Fronde , ôc chez qui cependant le cardinal
Maz^rin, obligé de quitter la cour pour la
fécondé fois, fe retira ên 1652. Mort le a août de
J4 même année 1652, -
8°. Il eut pour fi ère ce vicomte de Turenne ,
le plus grand homme de fa maifon , le plus grand
de la France peut-être, cet homme qui, félonl’ex-
preffion de MontécucuUi , fon rival, faifoit honneur
& l'homme. «
Turenne de Condé le généraux rival,
Moins brillant , mais plus fage , ôt du moins
fon égal.
Il etoit né à Sedan en 16 1 1 , avoit fait fespre-
fnières campagnes en Hollande fous les princes
d’Orange , fes oncles maternels. Il fervit en Lorraine
au fiège de là Mothe en 1634 , 6c fut fait maréchal
de camp ; il fut blefle en 1636 au fiège de Saverne;
il fe distingua au fiège de Brïfack en 16.38. E11
1640, à peine guéri d’une bleffure, il acquit beaucoup
de gloire au fiège de Turin , par l’habileté avec
laquelle il fit entrer des convois dans le camp. En
1645, au fiège de Trin , le vicomte de Turenne
mérita le bâton de maréchal de France à trente-
deux ans. Tout ce qu’il fit contre les ennemis de
l’état, foit foui, foit réuni avec le grand Condé ;
tout ce qu’il fit contre le grand Condé lui-mêuie ,
dans fe guerre civile , forme le plus bel ornement
du règne de Louis X IV , 8c eft connu de -tout le
monde par tous les mémoires, du temps' auxquels
il foffit de renvoyer.
Ma s il a paru en 3782 , une colleélion des lettres
& mémoires trouvés dans les porte-feuilles du maréchal
de Turenne, en deux volumes in-folio, qui
confient des particularités moins connues, dont les
unes confirment , les autres peuvent fervir à modifier
fur quelques articles, le récit des biftoriens.
Cette correspondance commence en 1627 , 6c
finît en 1675 * c*eft-à-ditt avêc, la vie de M. de
Ttyenne,
L’abbé Raguenet 6c M, de Ramfay ; qui fe font
difpeftfés ( c’eft l’éditeur qui parle s M. le comte
de Grimoard ) de mettre en ordre les mémoires
du vicomte de Turenffe, n’ont pu en eonfuiter qu’une
très-petite partie.
Il paroît donc qu’on a commencé par où on
auroit dû finir, c’eft-à-dire , par écrire l’hîftoire de
M. de Turenne, avant d’en avoir àflèmblé âc mis
“en ordre les matériaux ; auffi , dit l'éditeur , les opérations
militaires de M. de Turenne , font à peine
reconnolffables dans cas écrivains».
Après l'échec de Mariendal, on ne vît point M,
■ de Turenne chercher ces exeufes, ces prétextes , ces
palliatifs que l’amour-propre fuggère toujours aux
généraux vaincus .pour tromper les autres , 6c fe
tromper eux-mêmes. M. de Turenne ne parle que
de fon malheur 6c de fà raute ; il étoit honteux, il
n’olbu écrire^ à fes plus chers païens jufqua ce qu’il
eut pleinement réparé cet échec, P: ès de deux mois
après , il mandait à fa feeur : a je ne vous ai écrit
» qu’une fois depuis le malheur qui m’eft arrivé , ne
» doutànt point de votre'amitié , je fais bien en quelle
»L peine -vous avez été de moi. Depuis l’avantage
” que les ennemis ont eu , ils n ont fait nul progrès
» que la prifo d’une petite place , que l’on leur a
» forprife depuis deux mois ; cela ne me confole
» pas pour cela , n’étant pas fi aifé à me fatisfaire
” moi-même. , . . . S’il plaît à Dieu que l’on puifie
» faire.,quelque .chofe d’importance, c’eft la feule
» chofe qui me puiffe oter de l’efprit ce malheur
» arrivé»
Cette lettre 'eft du 17 juin, 6c l'affaire de Ma-
riendal , du 5 mai.
Le 30 juin il écrivoit encore à là foeur : « je vous
» avoue qu’i u commencement, je ne pouvois me
” réfoudre à vous rien écrire de mon malheur s
» fachant â quel point cela vous toucheroit ; car ,
» je vous peux jurer que j ’ai toujours cru nu’il
» vous feroit auffi fenfible qu’a moi-même , & pour
v vous tout dire , j’euffe bien défiré de pouvoir
» marcher auffi avant que nous étions , avant que
» vous fuffiez de mes nouvelles, f . , je voue prie
de témoigner aux perfonnes qui ont de la bonté
» pour moi dans ce malheur , à quel point ja leur
» fuis, obligé, v
Le 4 juillet : « J’étois auffi honteux du malheur
v que j’avois eu à Mariendal, pour vous que pour
» moi, 6c quoique ce foit une »îaifante raifon, je
» vous jure que ne pouvois me réfoudre de vous
» l’écrire moi-même. Si après un malheur qui m’eft
n arrivé par compaffion pour les troupes, qui éioient
» fort fatiguées, 6c trop de complaifance pour les
» officiers, on fe peut confoler en quelque chofe,
» ce feroit que les ennemis .'n’ont profité en rien de
» leur viélcàre,. . . . . . . l e fais' à quel point je fuis
» obligé à M. le cardinal-Mazarin en cette.rencontre;;
» on m’a dit auffi que M* le Tellier a témoigné
» être fort de mes amis, »,
T O Ü
On a dit que c’étoit contre l’ayîs de M. de
Turenne, que le duc d’Enghien ( le grand Condé)
-avoit attaqué le général mercy à Nortlingue. On
ne voit aucune trace de çstze oppofition de M. de
Turenne , dans la lettre qu’il écrit , à fa feeur , le fur-
lendemain de cette bataille , ni dans aucune autre lettre
de ce recueil, Tout annonce au contraire le plus
parfait concert entre les deux généraux, « On donna,
dit-il, » avant hier, près de Kortlinghen , la plus
j» grande bataille qui fe foit vue depuis la guerre,
p La cavalerie Françoife avoit l’aile droite, 6c moi 1
v la gauche avec ma cavalerie ( Allemande ). La
p droite a été entièrement défaite, comme auffi i’in-
v fanterie Françoife ; nous avons eu, Dieu merci ,
&? plus de bonheur à la gauche, 6c y avons gagné
v le champ de bataille, pris prefque tout le canon
© de l'ennemi , 6c Gléen , qui commandoit l’aile
© droite deè Bavarois, y a été fait prifonnier. M,
$ le duc, par le plus grand bonheur du monde, après
« avoir eu deux chevaux tués fous lui, un peu blefle
t> au bras, s’en vint du côté où j’étois, un peu de-
© vant que le côté où il avoit réfolu de tenir, fût
rompu ; il témoigna être allez fatisfait de ce que
>7 j’ai fait en cette aétioa................Je fuis bien afi>
foré que l’on ne dira pas autrement à Paris, que
» la cavalerie Allemande n’ait entièrement gagne la
>7 bataille. M. le duc m’a fait là deffus plus de com-
v plimens devant toute l’armée, que je ne vous fau-
v roîs dire , ni auffi exprimer ce qu’il a fait en cette
n occafion de fa penonne, & de coeur 6c de con-
w duite. Mon neveu a eu deux chevaux tués fous
» lui, 6c un peu de cheveux brûlés. ..............M. le
n duc ne favoit affez fe louer des Allemands , 6c en
» effet 3 il leur a obligation de la vie 6c de la li-
»> berté. Il n’eft pas croyable comme il me fait l’hon-
n neur de bien vivre avec mon- Je vous fopplie de
» témoigner à madame la Princeffe 8c à madame
h de Longueville combien je lui en fois obligé. »
S’il n’y a point d’erreur, foit de manüfcrit , foit
d'imprimé, dans la date de cette lettre , elle doit
fervir à réformer la date que tous les auteurs donnent
à cette bataille, qu'ils placent au 3 août 1645 > &-
qui doit être du 6 , car la lettre eft du 8 , 6c commence
par cas mots : on donna avant hier$
On a cherché à répandre des nuages 6c des foup*
çons de vues humaines 6c intéreffées for l’abjuration
de M. de Turenne , comme for celle de
Henri IV. M. 1« préfident Hénault a parlé de cet
article avec plus de juftice 6c de fageffe. « M, dé
» Turenne, dit-il, commençoit depuis long-temps
w à entrevoir la vérité ; mais il tenoit encore à Ter-
» reur par les préjugés de l’éducation 6c par l’at-
m tachetnent qu’ il portoit à madame de Turenne ,
n fit femme , fille du duc de la Force , calvinifte
» de bonne foi. Sa mort, arrivée en 1666, 6cles
.»y inftruâiom de M. de Meaux, achevèrent de dé-
» cider M. de T urenne ;foe fut pour lui qu’il com-
»7 pofa fon livre de Yexpofjion de la foi , ouvrage
99 Eaifonnable & folide que les proteftans laifîerent
n fans réplique, 6c qui juftifie for-tout l’églife rc-
T O U 3 2 3
M maine des fuperftitions ridicules qu’orî lui im-
v pute, j>
Ce que dit ici M. le préfident Hénault des dif-
pofitions de M. de Turenne fur la foi nous paroit
juftifié par une lettre de M. de Turenne lu‘-même
à fa femme, du n juin 1660 : « J’ai lu ce matin ,
lui dit-il, » un livre que je trouvai hier chez M.
77 Dupleffis, fecré taire d’état; c’eft un recueil en
» François, fait au Port Royal, de ce que les pères
» des premiers fiècles ont dit de ï’Euchariftie ; il y
» a les paffages entieis avec les difeours qui les pré- •
» cèdent 6c ceux qui foivent, 6c rien de l’auteur
n du livre; fi cela n’eft pas v r a io n peut le con-
» tredire; mais je vous affure que ce n’eft pas ce
77 que nous difons. Je penfe que tous tes difeours que
77 je fais dans 'mes lettres, m’ont un peu attiré ce que
jj vous me dates ; mais je vous prie d’en faire la
77 différence. -
Pour entendre cette dernière phrafe, il faut fop*
pofer que madame la vicomtefle de Turenne, calvinifte
zélée-, trouvoit que fon mari inclinoit au
cathohcifme, 6c lui en faifoit de temps en temps
la guerre. En effet , cette phrafe nous paroît expliquée
par quelques-unes qui précédent. « J’ai été qnelque-*
77 temps à entendre , dit M. de Turenne, ce que
77 vous voulez dire dans un trait que vous donnez ;
» fi c’eft ce que je penfe , cela n’eft pas bon , 6c
v certainement je né le mérite pas ; ôc à des per-
77 fonnes qui vont fi fincèfement au fond , les petites
77 égratignures n’y valent rien ; devant Dieu toutes
77 chofes font criminelles, mais devant les hommes,
75 je n’ai affurément rien à me reprocher. Je fai?"
77 bien que m’aimant comme vous faites, vous ferez
77 extrêmement affligée de ce que je fens fi fort
j> ce que vous me dites ; mais auffi frétant queftion
77 de rien approchant de cela , 6c n’ayant, Dieu
77 merci, pas befoin de remontrances là deffus, j’aime
77 mieux m’en décharger un peu le coeur avec vous,
7» que de l’y garder trop. 5?
Cette lettre , comme nous l’avons dit , eft de 1660;
la . mort de madame de Turenne eft de 1666, 8c
l’abjuration de M. de Turenne eft du 2.3 octobre
1668. Il eft difficile fans doute de connoitre lès vrais
motifs qui peuvent déterminer un hommè à changer
de ^religion. On a dit que M, de Turenne voulôit
être connétable , parce que le duc de Lefdiguières
avoit été fait connétable après avoir abjuré ; mais
quoique M. de Turenne, depuis fon abjuration, ait
fait les plus grandes chofes 8c rendu les fer vices les
plus importants, il ne paroît pas qu’il ait été queftion
de renouveller pour lui une dignité que Louis XIV
ne vouloit renouveller pour perfonne, & il n’êia't
pas dans le caraélère de M. de Turenne de faire
.un pareil aéle par des vues intéreffées.
Obfervons qu’il étoit maréchal général dès le 6
avril i-66@, 6c qu ainfi le défit d'obtenir cet honneur
n’a pu entrer pour rien dans les motifs de fa -eon?
■ verfion. 11 nous femble que les lettres mêmes de M.
de Turenne, prouvent que M, Fléçhîcr u’& rien dit
j que d’exaél eh parlant de cet événement
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