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ton menaçant, <Sc. vous rendra compte au Sénat de
votre f'iiicU-i.o. Ce miniftre, ( t’éloitSailufte, petit-fils
<fo fû die ri en,} ar,a tout.épouvatué implorer le feçours
de Livre , qu: fit aifornenî. fenùr à fcfo fils de quelle
conléquer.ce il ieroit pour un,tyran , de né plus trouver
personne qui cilu ièrendre le tnimfire.ouj.exéat-
teur de ûs crimes feçretg. L'affaire. jen . refta ' là, &
le bruit ie répandit .qu’Augufte lui-même avoit donné
i’erdre^dê faire tuer fon petit-fils.
Tibère convoque le fénat -, non comme empereur,
car il vouloir feindre de re Infor l’empire, mais, difoic-
i l , en vertu \de la puÜTançe tribunttien.ne , qui lui
av oit été jdéférée fous Augufte ; il parut à l’aliVmblée,
an fi que Drufos, fou fils,. en ro.be noa-e ,■ là ns aucune
marque de dignité. Une douleur à laquelle personne
ne pouvoir croire , l’empêcha d’achever la
kcliire d’un diseurs à la louange d’Au gulle : les
laimes ôc les finglots le foff ■ •quoient. ; D* ufus, par
Ion ordre , acheva cette leélure.
Tibère déclara enfoite que.le fardeau de l’empire!
itoir trop :péfant pour lui, qu’ij avoir conful.é lès'
forces Ôc qu’il, ne pouvoir abfolumem s’en charger;!
cette déclaration ne fit que lui attirer , de la part !
des fénateurs., toutes les flatèries Ôc toutes les inftan- i
ces de garder l’empire, fur lefquelles il avoit compté.
11 vouîoit pouvoir dire que la république & le fénat
ï’avbient'forcé d’accepter l’empire ; il voüloit du
moins qu’on ne pût pas dire qu’il ne le dé voit qu’à
la foiblefle d’un Vieillard cbi'édé par une femme ar- ,
tificieufe. Déjà ingrat envers fa mère , il n’aimoit pas à lui avoir tant d'obhgatipn-; c'étoit d’ail'eurs un
piège qu’il' tendoit aux lénateurs pour çonnokre ou
deviner leurs difpofitions à fon égard ; il obferyoit
leurair , leur ton, leurs mou venions 9 leurs d’fcours,
leur filençe , ca’culoit jufqu’aux moindres dégrés de
' leurs inflances, & donnoit à tout l’interprétation la
plus fmiflre. Le prefToit-on foiblement ?' On ne le
vouloir pas po.ur empereur. Infiftok-on fortement ?
On ne croyôit pas à la fineérité de les refus-; on
Ta voit rpéftétré , & c’eft un crime que l’hypecrifie
ne pardonné jamais. Il eit vrai qu’il éioit d.fliciie de
croire ces refus bien fincères quand on somparoit
fa conduite a fes difçours , ôc qu’a travers tdute cette
| mode file apparente § on vovöit' les aéles de fou-
‘ vërainëüé qu’il exèrçoit hautement dar.STOut l'empire.
Quelques fénateurs perdirent patience, .& on entendit
d e s vchx . s’écrier : q î i l f in i j f e , q f i l accepte , au qu’ i l
fc dêjîfm. Un fénajeur ofi ici fine en. façe : « d’autres
» tardent à exécuter ce qu’ils ont promis ; pour vous,
»»-vous tardez bien à promettre ce que yous ayez
» exécuté d’avance. ’
Tibère parut enfin ypulpjr entrer èh ccmpofition,
ÔC fe plaignant toujours del l’enofputé du fardeau
i f piqipofa . de le parragçr ., & convint que fi on
yoyioit lui afiigner un 'département particulier , il"
tâcheroit de .s’en acquitier.” Ç’ étoit encore un nouveau
piège qu'il tendoit, ce.ok le partage du Liçn quhl :
propofoiï 1
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E%o prirtutm tôlfo, n-ominor qmd leo * _
SecunJam, quia fini fortis, tribuetis mihi ,
Tirai quia plus vatro , me feqitetur ter tut,
Male (ffjïcieiur , f i quis quartam tetigent.
» Je vous demande, Ce far, lui dit Âfinius Gallus,
l- » quel eft le département dont il vous fera le plus
I ”< agréable d’être chargé ? » Cette queftion imptevue
; & cependant bien naturelle-, déconcerta Tibère , il
fe tut, & après-un moment de réflexion ce feroit,
dit-il, montrer peu de modeftie que de m’emproier
à choifir ma part, qui peut-être conviendroit beaucoup
mieux à d’autres. Pour moi , ce qui me conviendront
le mieux, ce feroit d’être difpenfe de tout.
Afinius’Gallifs, remarquant de l’altération fur fon
vifage & dans fa voix , fentit cju’il avoit eu le
malheur deblcfîer fa ' délicateffè ombrageufe. « Ma
» quefiion, dit-il, ne tendoit pas à partager ce qui
». eft eflèntiellement indiv fible , je ne voulois que
» faire avouer à Céfàr lui-même, que la republique
» ne forme qu’un feul corpS , qui ne doit avoir qu ua
! >» chef ôc qu’une aine , & quel autre chef pour-
» rions^nous lui défirer, que celui qui , forme au
» commandement par Augufte , accoutume a porter
>» avec lui le fardeau de l’empire, a îlluftrç ce meme
J » empire par fes viéïoires & fès triomphes , & a fi
» bien prouvé d’avance qu’il fauroiî en foutenir le
» poids ôc en augmenter l’éclat ? » il eut beau dire ,
I le coup étoit porté , & il eft rare que dès expl ca-
tions ferment la plaie qui a été faite par un propos
hazardé. On fient que vous voulez-réparer , vous aviez
donc bleflé. Tibère le fit périr dans la fuite de faim
& de m'fere^
L. Arrun ius ayant parlé à-peu-près de même,parut
encore plus coupable à Tibère-, parce qu’il avo:t plus
de mérite ôi de réfutation.
Augufte , fans le fa voir, les avoit condamnes toiis
. deux à îa mort, par un propos qu’il avoit cru fans
conféquence. S’entretenant avec fes ara s fur divers
fujets , on vint- à parler de ceux qui pourroient avoir
des vues fur l’empire : « Je vois, dit Augufte, dans
» Man’uî L'Didus, les talens nécéffairës , mais plutôt
» de l’éloignement que du goût pour la première
7? place. Âfiniçs Gai lus en eft avide »mais incapable.
» L. Arruntius ne manque affufément pas de tal'ens,
j» & peurroit ne pas manquer d'ambition, s’il tro.u-
v voit «.me occafion favorable ; quelques - uns , au
lieu •d’Artunijùs nomment Pifôii. Tibère les fit
tous mou-.ir , excepté Manius Lépiiiuç.
Mamereus Seaurus, ayant obfervé , comme pour
raflurer le fenat 'fur la crainte d un refus perfévérant
de Tibère , qu’il y avoit lieu d’elpérer qu'il fe laideron
fléchir, pulfquil n’ayoit point empêché, comme
il le pouyoit par le'droit de la puifTa ice Tribuni-
tienne dont il étoit revêtu , que les confiés ne roiflent
î affaire en délibération, Tibère , qui pourriffeit au
fond-du coeur contre ce fenateur une ha’-ae im-
plaçable ,• que ce dijeou^ enveoimoit encore ne
revendit
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Répondit pas un feul mot ; Quintos Hatérius, lûi
ayant dit d'un ton affectueux c jufqu'à quand, Céfar,
fouffrire^vous qu’il manque un chef à la République ?
îl s’emporta contre lui avec une telle violence qu’Hatérius
fe crut perdu i au fortir de l’affemblée il courut au
palais pour lui faire des exeufes & tâcher" de l’ap-
paifer ; Tibère étoit à la promenade , Hatérius fe jetta
d’abord à fes genoux , Tibère voulut s’éloigner , mais
fes jambes s’étant embarraflees entre les bras d’Hatérius,
il tomba , ce qui mit Hatérius dans le plus grand
danger, les foldats de la garde étant accourus èc
ayant penfé lé tuer fur le champ.
Tibère çccepta enfin,-pour un temps feulement,
mais fins fixer de terme ôc jufqu’au moment , dit-
il , où il pourra paroître jufte d’accorder quelque
repos à ma viellleffe. Ad id tempus que vobis aquum
pojjit vider i , dure vos aliquam JensEluli me a requiem.
Il refufa, fous prétexte de modeftie , la couronne
civique dont on avoit coutume d’orner les portes du
palais de l’empereur. 11 avoit raifon, il n’étoit pas allez
• citoyen ; il refufa le titre de père de la patrie , il
fe rgndoit juftice encore , il n’étoit point ÔC il ne fe
propofbit point d'être le père de la Patrie.
Quant au titre de feigneur ou de mailre , il le
refufa plus fenfément en difant : je fuis le maître
de mes cfclaves, le général des foldats, & le chef
des autres citoyens.
Son principal motif, en refufant les divers titres
^_4h°nneur qu’on lui offroit, ctoit d’acquérir le droit
de refufer à l’ambhion de Livie , fa mère, la multitude
des titres que la flaterie des Romains s’em-
preffoit déjà de lui prodiguer.
Leur prompte fèrvitude a. fatigué Tibère,
dit Racine ; mais c étoit fur-tout lorfquc cette fer-
vitude voulait honorer fa mère, qu î Tibèr: en étoit
. fatigué. L’ennemi de la fervitucle auroit dû être l’ami
de la liberté ; Tibère les déteftoit l’une & l'autre ; mais
fa haine pour l'adulation fervile n’étoit que de l’+ju-
meur ; fa haine pour la liberté fdrmoit le fond de
fa politique. De ces deux haines contraires fe formoit
une tyrannie capricieufe avec laquelle on étoit toujours
embarraffé de fes difeours ôc de fa conduite ;
An gu fa & lubrica oratio fub principe qui libertaîhn
me tue bat, aeylaiiorism odera1. Tac.
Quelqu’un donnant aux occupations de l’empereur-
l’épitnète de facrées ou de divines, dites laborïeufcs,
dit le prince. . Un autre lui difant qu’il s'étoit p-é-
fenté au fénat par fes ordres, dîtes par mon couftil,
lui dît-i1; ’ ■ | ' ' - ‘ * "
Ses démor.ftrat-ons de poltefje ôc de déférence à
l’égard du lcnat ôc de chacun des fénateurs, paffoient
'quelquefiis la mefîire Ôc tenoient tant de; l'adulation,
quelles pouvoient êtie fufpeéles d’ironie.
Un jour , ouvrant un avis contra’re à celui
d’Ha érius : je votis prie de me pardonner , lui dit—
jj., fi je me déclare contre votre fentiment avec
Hifoire. Tome V.
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liberté d’un fénateur. 11 difoit un jour dans le fénat,
que le prince devoir être l’humble efclave du fénat
ôc même de chaque citoyen en particulier , ôc il
ajoutoit qu’il avoit toujours trouvé dans les fénateurs
des maîtres pleins d’indulgence Ôc de bonté ; c’eft
ainfi qu’il fe peimectoû l’adulation pourvu qu’il fût
le maître, ÔC qu’il la défendoit aux autres pourvu
qu’ils fuflènt efclave s.
Tibère étant allé faire un voyage dans la Campanie
pour fa faute ou pour fon plaifir , on reçut
en fon ab’fence la nouvelle de divers avantages remportes
dans la Thrace, ôc de la défi te de Julius
Sacrovir. dans les Gaules ; un fénat:ur d’un nom
iiluftre-, Cornélius Dolabella, fit fériéufement la pi o-
pofition ridicule de décerner à Tibère l’Ovation pouf
honorer fon entrée dans Rome à fon retour de la
Campanie ; il reçut quelque temps après une lettre
dans laquelle ce prince lui difoit : « vous parois-je
» donc fi dépourvu , fi incapable ôc fi avide de
» gloire, qu’après avoir autrefois dompté des na-
» jions très-bell queufes, après avoir tantôt reçu. ,
>; tantôt dédaigné, toujours mérité tant dé triomphes
» dans ma jeuneffe je veu lie à mon âge extorquer
» un vain Ôc fri volé honneur pour une promenade
j) que ma fanté m’a obligé de faire à la campagne i
A force d’efprit ÔC de politique, il fè conduifoit
fouvent très-bien ; il y avoit peu d’affaires for lesquelles
il ne prît la précaution de confulter le fenat,
ôc même, pour l’expédition des affaires preffées ou
qui n’etoient pas d’une allez grande importance pour
être rapportées au fénat, il ne faifoit rien qu’avec '
un confoil compofé de quelques fénateurs , for - tout"
de ceux qui avoient commandé dans les provinces
que ces affaires concertèrent, ôc qui en avoient -le
plus de connoiffance. Il avoit plus que des égards
pour les confols, il leur rendoit des refpeâs , il. fe
îevoit à leur approche, lèur cédoit le pas. Dans les
cérémonies, il alloit les recevoir à la porte de fon
appartement, ôc les recondu’fc t lorfqu’ ils prenaient
congé de lui. Des confolaires chargés du commandement
des armées, lui ayant écrit pour lui rendre
compte de leurs exploits, il leur fit des reproches de
ce qu’ils ne s’étoienc pas i^dreffés au fénat , félon
l’ancien ufage ; mais ces reproches ctoietit doux, ÔC
il auroit ■trouvé fon'mauv ; qu’ils ne 1;:s enflent rras
mérités. 5>i d’autres fois > h génér;aux ls: confoltdiênt
fur de certains dons militaires dont ils croyoient deV'oir
lui biffer la difpofition : < /ou i lie connoiffez patè ,
leur difoit - i l , toute l’éîé ue de votre pouvoii
» vous etes feu's arbiti'Oo d.i ce. fortes de fécouipenlfes*.
Il fe rendoit fouvent dan; es ti jbunau.X , U a/litiOit
aux auditirees pour furvei!k r liS jf j l f ôc mainte.iviv
Texécuricn des loix ; il le métroit hors de rang ôc
n’ôteie ja:mais au prêteur 1;a ;race de préfHent ; mmis
s'il crcycit les juges préviér-us ou mal diî'pofés p<>ur
la juftice , il bs rappelloit à leur <devoi r car 'les avis
ÔC fes e.vihorta'ions j fi en c-;;1 à , cl:t Tacite , il fa :fo t
refpeéïer les -drci;s de la j lice , jl ’aftb bliffo t-iî pat
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? Dpm veriîatî co.1 ditur ,, Itbertas corrtîmr -
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