
d’un chevalier romain qui avoit commandé les
gardes prétoriennes. Étant morte fans lui donner d’enfans
il contraria un fécond mariage avec Maria Fulvia,
aufli illuftre par fa naiflance que par fa modeftie : il
fit divorce avec elle après qu’il en eut eu une fille.
Cette inconftar.ce fit juger qu’il n’étoit point indifférent
au plaifir de i’amour ; mais dans ces fiècles corrompus y
l'impudicité avoit, tellement infeélé tous les coeurs ,
qu’on ne la mrttoit plus au nombre des vices. Titus
accompagna fon père en Judée , où il eut le
commande ment d’une légion ; les deux plus fortes
villes de cette province furent fubjuguées par ffs
armes. Il fut arrêté dans le cours triomphant de lès
. prolpérités, pour aller à Rome féliciter Ga’ba fur
fon avènement à l’empire. Étant abordé à Paphps,
l’oracle de Vénus lui prédit fa grandeur future , &
fur la foi de cette piomefl'e, il n’ofa continuer fon
voyage, dans la crainte que cette prédiction ne lui
devin: funefte à Rome. Son père parvenu à l’empire ,
lui Iaiffa la conduite de la guerre de Judée qu’il termina
par la conquête de Jérufal=m. Les légions témoins j
de fon courage , le proclamèrent empereur. En vain I
il rejetta cet honneur , il n’en fut pas moins ibupçonné
d’avoir prétendu à l’empire d’Orient ; d’autant plus
qu’en abordant en Egypte , il avoit ceint fon front
dii diadème des rois, le jour où l’on fit la ccnfécration
du boeuf Apis dans la ville de Memphis. Ce fut pour
difliper ce foupçon i njurieux à fâ gloire qu’il s’embarqua
furtivement fur un vaiffeau marchand pour fe rendre
fans foire & fans efeorte à Rome , où fon père fut
agréablement furpris de fon arrivée imprévue. Depuis
ce moment, i,l fut affocié au gouvernement de l'empire ;
il exerça conjointement avec. Vefpafien la charge
de tribun, & il l’eut pour collègue dans fes fept
confultats. Ce fut le feul tems de fa vie où il ne
ménagea point allez les intérêts de fa gloiçé ; févère
jùfqu'à la cruauté, il fit affafliner tous ceux dont la
fidélité lui paroiffoit fùfpede. Au'us Cinciuna,
perfbanage confulaire , qu’il avoit invité à louper ,
fut maffacré par fes ordres, en entrant dans la lalle
du feftin. Tant de meurtres rendirent leur auteur
Texecràtion du public. Titus fumant du fang des
principaux citoyens, fut élevé à l’empire dais ces
odieufes circonftances. Rome tremblante crut qu’on
alloit reneuveller les mêmes horreurs qu’elle avoit
éprouvées fous Caiigula & Néron. Ces fi uftres
impreffions furent bientôt effacées; Titus devenu homme
nou ve au fe dépouilla de toutes les aff.éli :-r,s vicieufês;
fes profufions modérées ne furent plus que des libéralités
iüdicieufes & réfléchies ; fesfoupe.-s qu’i1 pro.'ongeoit
jufqa’au milieu de là nuit avec les plus iofignes débauchés,
n’offrirent plus que des exemples de frugalité & de
tempérance : maître de fes paffroas, il fit taire fon
amour pour Bérénice, qu’il renvoya dans fes états
par délicatêffe pour les Romains qui auroient murmuré
d’obéir à une reine étrangè'e. Lesimpofitiôns furent
adoucies, & chacun jouit fans inquiétude de fes héritages.
Sa magnificence éclata par un nouvel amphitéâtre qu’ il
fit élever, & par lés dépenfes des combats de
gladiateurs contre lefquels il fit lâcher cinq mille
bêtes farouches , dont ils firent un horrible carnage:
il offrit encore le fpeéhcle d’un combat naval.. Les
nouveaux céfars avoient coutume de reprendre les
biens que leurs prédéceffeurs avoient cédés à leurs
favo ris; il abolit cette avare coutume , chacun
refta poffeffeur tranquille des biens qu’il avoit obtenus.
Jar nais on ne l’aborda fans fè retirer comblé de
fes bienfaits; il avoit coutume, de dire qu’on ne
devoit pas sVn aller trifte-, quand on avoit parlé
â fon prince. Un jour qu’il le fou vint de n’avoir obligé
peribnne, il décria : mes amis , fai perdu la journée.
Les malheurs dont l’Italie fut frappée par l’embi âfement
du m'ont Véfuve, & l’incendie de Rome furent réparés
par les largeffes de ce prince. Il dépouilla fes maifons
de plàifance des ornemens les plus précieux, pour
embellir les temples & les bâtimens publics. Les
ravages de la pelle défolèrent Rome & l’Italie,. il
employa les fecours de la religion & des hommes
pour en arrêter le cours. Il fournit gratuitement aux
malades tous les remèdes qui pouvoient les foulager.
Les délateurs qui julqu’alors avoient été accrédités,
tombèrent dans l’infamie; les uns furent battus de
verges dans la place publique, les autres furent exilés
dans des îles mal faines , .afin de purger la terfe de
ceux qui en troubloient l’harmonie. Sa clémence ingé-
nieufe lui fit rechercher la dignité de grand pontife qui
défendoit de fe fouiller du fang humain : il ne
prononça depuis aucun arrê: de mort , & quoiqu’il
s’offrît plufieurs occaiions de fe défaire de fes ennemis ,
il protefta qu’il aimoit mieux périr qne punir. Deux
patriciens furent convaincus d’avoir alpiré à l’empire,
il fè contenta de les faire avertir de fe défifter de
leur entreprife, en leur remontrant que côtoient les
dieux & les deftins qui difpofoient des empires. Dès
qu’il fut inftruit de leur repentir, il les invita à
fouper avec lui, & le lendemain il les mena au *
combat de gladiateurs, où lés ayant fait affeoir à
côté de lui , il leur remit les glaives des combaitans
pour effayer s’ils oîèroient en faire üfage contre lui.
Tant de confiance lui gagna tous les coeurs,* il n’eût
qu’un ennemi , ce fut Dorriitien fon frère qui lui
tendit plufieurs embûches, & qui follicita les armées
à la révolte. Au lieu de l’en punir , il le déclara
fon fucceffeur & fon collègue , & l’ayant entretenu
en fècret, il le conjura., les larmes aux yeux, d’avoir
pour lui un retour fraternel. Il alloit pour prendre
quelque dékffement dans letpajs des Sabins, lorfque
fur fa route il fut attaqué d’une fièvre qui le mit au
tcmbèau , dans le même village où fon père
çtqit mort. Avant dé rendre le dernier fbupir, il
lança fes regards vers le ciel en fe plaignant des
dieux qui l’enl-voient dans le midi de fa vie. Il
fut pleuré comme un père par le peuple 6c
le fénat : il n’avoit que quaranté- chux ans , dont
il en avoit régné deux & près de trois mois. On
I’accufa d’avoir eu commerce avec la femme de
fon frère „ nommée Demiiia ; mais elle jura qu’elle
n’avoit jamais commis d’adultère avec lui j on crut
devoir
devoir l'en croire far fa parolë, d'aufâiih plus qtTè
'dette femme effrontée aimoit à groffir la lifte de
fès amans adultères. ( T— N. )
TITE -LIV E „ ( Hijl. Rom. ) Hiôorien latin ,
très-grand peintre & très-éloquent orateur , étoit de
Padoue., oc Afinius Pollio lui a reproché, comme
on fait , fa pâtavinité; mais on ne fait ce que c’eft
que cette patavinité, &. probablement on ne le faura
point ; les farants s’épuiient en vaines conje&ures à
cet égard. Il n’y a pas d’apparence que nous parvenions
jamais dans la cqmToiïïance d’une langue
morte, à ce dégré de finefle qui peut faire diftïnguer
‘un provincial d’un habitant de la Capitale , fur-tout
■ au bout de dix-huit fièdes. Le reproche d’abonder
en prodiges & de paraître y croire, eft plus à la
porté.-: de tout le monde, &. on Voit qu’il eft mérité.
Tite-Live fur accueilli d’Augufte. 11 partageoit fa vie
comme Virgile , entre Rome &. Naples , c’eft-à-dire,
qu’il alloit travailler -à Naples , & qu’il revenoit jouir
à Home de fa gloire & du fruit de fes travaux. Après
la mort d’Augufte , il retourna dans le lieu de fa
naiflance , & il y mourut la quatrième année de
l’empire de Tibère j la vingt-unième de Jefus-Chrift,
le jour des Calendes de Janvier, c’eft -à-dire , le
prenver Janvier. On crut, en 1413 , avoir découvert
à Padoue, le tombeau de Tite-Live , dans un jardin
de l’abbaye de Sainte-Juftine , bâtie fur les ruines
du temple de la Concorde ; une infeription trouvée
dans fo vorfinage , & qui portoit le nom de Tite-Live,
fembloit favoriler cette idée. Mais divers favans pen-
ient que ce riionument eft celui d’un affranchi d’une ,
fille de Tite-Live. On connoit le travail des Sigonius,
des Gronovius , père & fils , des Doujat , des
Freinshemius , des Hearne , des le Clerc , des Grevier, '
ccc. sur Tite-Live, foit pour en épurer lé texte. ,
foit pour l’éclaircir , foit pour en remplir les lacunes
par des fûpplémens. Ce travail fuffit aux favans &.
a tous ceux qui font en état de lire Tite-Live dans
l’original. Mais un écrivain ■ aufli éloquent, aufli né-
• ce flaire que Tite-Live , mérite dette lu desfemmes,
des gens du monde , & de tous ceux qui ne peuvent
connoîrre les anciens que .par les .traductions.
Une verfion qui feroit paffer dans notre langue la i
majefté , l’énergie des grands tableaux , dont Tite-Live
. eft rempli , l’é'oquence dont fes harangues font
animées, fèro’t un ouvrage précieux & agréable à
tous les ordres de leéteur?. La vieille traduction que
Blaifè de/Vigénère fit de Tite Live au féiz’ème fiècle,
n’empêcha pas Durier, d’en faire paroître une nouvelle
dans le fiècle fuivant. Celle-ci n’ayant pas plus
que la première-, un mérite qui l’empêchât de vieillir,
tomba peu-à-peu dans le mépris & dans l’oubli, &
l’on pouvoit regarder Tite-Live comme refté fans
tradûétion , lorlque M. Guérin j ancien profeffeur
d'éloquence dans l’Uniyerfité de Paris , entreprit de
nous en donner une. Sa traduction , louée par M.!
Rollin, & par quelques favoris V ! vivement critiquée!
par d’habiles cenfeurs , n’a p'as empêché M. l’abbé
Brunet d’en entreprendre Une riôüvelle qui'1 jOu.it' ’dd
quelque eftime; mais nous n’en connoiffons que la première
Uijîuire Twttç ^
décade ï & nous iiè croyons pas qüè cetfe tradu«9:oit
ait été achevée. M. Coffon profeffeur au Collège
Mazarin, ai adonné celle de M, Guérin, avec des
correCtioro* néçeffaires. Il n’a point touché à la froi-i
fième décade , qui contient l'hiftoire de la fécondé
guerre punique , & qui eft la partie que M. Guériit
avoit traduite avec!.le plus de foin; c’etoit aufli la
première qu’ il eût traduite. Son talent fe refroidit
dans la fuite, ou fon attention fe relâcha. La première-
décade ,. qui avoit été la fécondé partie du travail de
M. Guérin, a été revue & corrigée par M. Coffon.
La féconde décade confifte dans lés fûpplémens de
. Freinshemius. Ici le travail de M. Coffon a été con*
fidcrable ; il a retranché des latiniûnes & des ex--
predions vieillies; il a rajeuni .le ftyle , l*a rendu
plus léger & plus rapide, il a rapproché les réfié—
xions du tour fententieux & lèrre du texte ; il a
même rétabli le fens de quelques paflages, mal (àilt
par M. Guérin ; mais la quatrième décade eft prefque
entièrement l’ouvrage de M. Coffon ; c’eft une tra-
duél on nouvelle, où il ne refte prefoue plus riea
de M. Guérin.
La découv:rte faite, il y a environ une vingtaine
d’années à Rome, dans la bibliothèque du Vatican,
,d’un fragment manuferit de Tite-Live , fut une
nouvelle importante pour les amateurs de l'antiquité*;
ce qui la rend plus importante encore , c’eft l’efpé-
rance qu’elle fait naître de recouvrer de même par
quelque hafard heureux, ou par des recherches per-
févérar.tes, tout ce qui manque de Tite-Live. On
fait que fon hiftoire alloit jufqu’à la mort de Drufus
en Germanie , &. qu’elle contenoit cent quarante livres,
.dont nous n’avons plus què trente-cinq , encore ne
-font-ils pas complets.. Cçs trente-cinq livres ne font
pas de fuite ; la fécondé décade manque toute entière,
elle a été foppléée par Freinshemius. On n'a donc
que les dix premiers livres, & depuis le vingtième
jufqu’au quarante-cinquième inclufivement. Le fragment
trouvé à Rome, eft du dix-neuVième livre ;
-fl y eft queftion .de la guerre de Sertorius en Ef-
Pagnei lei fragment' n’a ni oommencement ni fin ,
& a d’ailleurs quelques lacunes ;. on l’a publié fous
deux formes diffeientes, d’abord imprimé & ponctué
comme il doit l’être ; on a donné enfuite une copie
figurée de ce même fragment , tel qu’il a été découvert.
Une lettre adreffée au favant M. Keunicott,
contient l’hiftoire de cette découverte, & une def-
cription détaillée du manuferit où fe trouvoit le fragment
dont il s’agit. Ce fragment, par malheur, eft
- très-court, & ne tient que lèpt pages d’un caraâère
t-rès-gros 6L très- écarté.
T 1T I , ( Robert ) ( Hifl. lut. mod. ) littérateur
Tofcan, du feizième fiècle , fit une chofe fort édifiante
pour ce fiècle. Il avoit compofé fur de* paflages Id anciens nuteurs ^ qui partagent les favans relative-
- ■. s.';ûn. ouvrage intitulé ; loçôrurn controverforum
l'îbri deccm. Jofeph Scaiiger l’attaqua , &
félon l’ ufage , ne lui , épargna pas les injures. Titi
* -tepOndié -, '.défendit fon bpmion , ôc ne rendit pas une