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vieux , efflanqué , fans haleine. Il ordonné à un Jeune
foldat, plein d’ardeur 8c de vigueur , d’arracher
tout à là fols'la queue du vieux cheval ; & à un vieux
loldat relevant.à peine de maladie, & ayant perdu
toutes fes forces, de détacher , poil à poil, la queue
dujèune cheval.C’eft à quoi Horace paroîf faire allufion
dans ces vers >
Caudtzque pilos ut equintz
Paulatim vello , & derno unum, dcmo etiarn unum.
Le vieuxfoldat exécuta aifément fon ordre »tandis que
l’autre donna inutilement les plus violentés fecouffes au
cheval foible , fans pouvoir lui arracher un feul poil.
C ’étoït la fable du père & de lès enfants, 8c des dards
unis & pris à part ; l’allégorie étoit frappante.
Les Romains alarmés des progrès conrinuels de,
Sertorius en Efpagne, firent marcher contre lui Pompée;
mais le grand nom de Pompée n’affura pas d’abord fa
conquête. 11 fut obligé de lever le fiége d’une place
importante après avoir perdu dix mille hommes.
Sertorius ayant déjà battu Métellus, livra la bataille
de Sucrone , dont le fuccès fut indécis. Il y perdit fa
biche, 8c craignait de perdre avec elle, l’empire que
l’illufion lui avoit donné fur les efprits. Au bout de
quelques jours, tirant parti de cet incident, il annonce
a toute l'armée que fa biche va revenir, qu’il en a
eu en fonge une révélation certaine :
Pojî mediara noÜem vifus chm jomnia vera.
Un moment après la biche paraît, & vient eareffer
fon maître, aux acclamations de l’armée. On foupçon-
neroit peut - être aujourd’hui que la.fcène avoit été
préparée de concert avec ceux qui avoient trouvé la
biche ; on aima mieux alors croire au miracle : en
effet la révélation , le fonge , la prédi&ion, tout le
rapportoit, tout avoit été vérifié à la vue de tout le
monde; mais aucun politique vraiment habile. , ne
fondera fes fuccès fur l’illufion, une feule fraude apper-
çue fait toujours foupçonner la fraude* Métellus 6c
Pompée ayant réuni leurs efforts, battirent Sertorius ;
mais c’étoit ne rien faire, les reffources s’offroïent de
toute part à l’efprit actif de ce général. 11 fait alliance
avec Miîhridate , ce redoutable ennemi des Romains,
& la réunion de ces deux hommes infatigables, qu’on
pouvoit vaincre , mais qu’on ne pouvait dompter,
répandoit la terreur dans. Pvome , lorfque la perfidie
vint au fècours de Pompée , qui en pxofita en ]q
fnépri&nt & en la puniffant, Perpenna, homme de
qualité , un des lieutenants de Sertorius, jaloux de la
gloire de ce grand homme , 6c ridiculement humilié
de l’honneur dont il n’étoit pas digne, de fervir fous un
tel plébéien, laffafïïna lâchement dans un repas,
fan 679 de la fondation de Rome. Sertorius avoit
long-temps entretenu par une vie fimple, frugale &
toujours aâive, les forces & l’agilité que lui avoient
données la nature. On dit que fur la fin de fes jours, 9 étoit devenu voluptueux 8c cruel , , qu’il n’étoit
prefque occupé que ’de plaifirs, 8c qu’au nombre de
çes plaifirs, il mettait fur-tout la vengeance ; mais c’eût
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plutôt une allégation vague qu’une accûfafiôü portant
fur des faits , & il èff poffible que fes affaflins , oour
exeufer leur crime , ayent répandu ces bruits injurieux
à la mémoire de leur illuftre vidime ; car , comment
Sertorius auroit-il ainsi changé entièrement de caractère
? Il s’ëtoit compofé une garde toute de Celti»
bériens, peuple d’Efpagne * il étoit poffible que les.
Rondains biffent mécontents de cette préférence donnée
à des étrangers.
SERVÈT, (Michel) ( Hijl. du Calvinifrne) né
en 1509,,. à VillarNuova en Arragon. Son mauvais
génie le condqifit à Genève. Il exerçoit la médecine),
Ôc avoit fiiccombé dans un procès contre les médecins
de Paris, mais fur-tout il dôgmatifoit, & il fuccomba
dans un procès théologique contre Calvin. Tout eft
contradidion 6c inconfequence chez les' hommes. Ce
Calvin , qui, pour fon premier ouvrage , avoit commenté
le Traité de Sénèque fur la Clémence, et qui,
dans fon livre de XInstitution, faifoit rougir François Lr
de brûler des hommes pour des opinions , eft le même
qui ,, le 27 o&obre 155 3 , fit brûler Servet à Genève ,
pour des opinions folles fur la Trinité ; ÔC comme
les hommes ne veulent jamais avoir tort 6c que leur
raifon eft toujours au fervice de leurs pallions, 6c
prête à les juftffier , le même Calvin érigea en dogme,
ainfi que Théodore de Bèze , le prinçipe exécrable ,
qu’il faut punir de mort las Hérétiques, On dit que ce
malheureux Servét resta deux heures dans le fe.u , fans
pouvoir être confumé ni étouffé, parce que le vent
agirait trop les flammes. On l’entendoit crier : quoi ! je ne
pourrai mourir ! quoi ! avec cent pièces d’or 6* te fiche
collier quon ma pris , on na pas pu acheter ajffe^ de
bois pour me conjumer plus promptement.
SERVIEN , ( Abel ) ( Hijl. de Fr..) allez célèbre
8c affez mauvais miniftre de Louis XIII 6c de Louis
XIV. 11 avoit été procureur-général du Parlement de
Grenoble, confeiller d’Etat, puis nommé à la première
présidente du parlement de Bordeaux , puis à
yne place de fecrétaire d’Etat. Ayant été difgracîé en
1656., fous le cardinal de Richelieu, c’étoit un motif
pour qu’il fut rappellé en 1643 ? fc>us la régence
d’Anne d’Autriche ; il lç fut, il fut employé avec le
comte d* A vaux , aux négociations de la paix de
Munfter ; il y parut jaloux du comte d’Avaux , d’ailleurs
d’un efprit difficile 6c intraitable. Cettè paix de
Munfter étoit un fi gand ouvrage , qu'elle a donné
de la célébrité à tous ceux qui y ont eu part ; mais
Servien aurait pu y nuire. On raconte de lui un trait,
qui , s’il eft vrai, fait bien connoître le raffinement
ftupide du machiavellifme de ces teütps-là. Le cardinal
de Retz, dans le temps qu'il étoit prisonnier à Yin-
cennes, ayant montré, au sujet des mets qu’on lui
présentoit, une inquiétude injurieuse pour le aouverr
nement, Servien proposa, dit-on , dans le Conseil,
que pour punir cette infolençe, on la justifiât, eo
empoisonnant réellement le. cardinal dans sa prison.
Servien mourut en 1659 ’ à Meudon', maison qui
lui appartenoit, 6c qui n’étoit alors ni auffi magnifique
qu’elle l’eft devenue depuis, ni auffi négligé
qu’elle l’efi aujourd'hui,
* fcERVIN
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• SERVfN , ( Louis ) ( Hiß. de Fr. ) avocat général
au parlement de Paris, magiftrit éloquent et courageux,
mourut en 1626, martyr de son zèle patriotique
, et viéfime de la tyrannie. Lou's X ïfl tencit un
lit de juftice pour faire enregiftrer des édits bursaux j
dont fon-miniftre 6c fes courtlfans avoient befoin ;
Servin, dans fon difeours , repréfènta fortement l’in-
juftice •& les inconvénients de c:snouveaux impôts:
le roi s’impatienta, interrompit Servin, le menaça,
lüi' donna des marques de colère , auxquelles Servin
ne répondit qu’en fuppliant le roi-dans fes conclufians,
de livrer à la juftice du parlement , les fabricateurs
6c les inftigateurs de pareils édits. Alors la colère du
roi fut au comble ; Servin ne put la foutenir plus longtemps
, il tomba mort, difent les uns, aux pieds de
ce maître que la raifon irritoit ; d’autres difent qu’il
fe trouva mal dans l’assemblée , qu’on le rapporta
chez lui , & qu’il y mourut quelques heures après ,
d’une attaque d’apopléxie , caufée par une fi vive
émotion. Deux vers latins qui lui fervent d’épitaphe,
«pnfacrent la mémoire de ce fait.
Servinum una dies pro ükertate loquentem
Vidït9 & opprefsâ pro Rb îrtäte codentem.
1* Un même jour vit Servin parler pour la liberté
» -attaquée*, 6c mourir pour la liberté opprimée.
-C’eft le cas de dire, comme Caffius :
Amis, il faut tomber fous les débris des loix.
On a imprimé les plaidoyers ôc les harangues de
Servin.
trône de Rome après la mort de Tarquin 1 Ancien.
Il n’avoit encore rien fait qui pût lui mériter ce
rang , & la tache de fon origine. fembloit devoir
Ion exclure. Il ,étoit fils d’une femme efclave qui ,
par la foupleffe de fon efprit, s’infinua dans la faveur
de Tanaquil, époufè de Tatquin. Cette princeffe
bienfàîfante donna à l’enfant de fà favorite une éducation
qui fut comme le prëfàge dè fa grandeur fu-
*}ïre* Tarquin , charmé de la vivacité de fon efprit
oc de la douceur de fon caraâère , lui donna fà fille
en mariage ; 6c ce fut cette alliance qui lui fraya le
chemin au pouvoir fuprême. Le prince, en mourant,
le nomma tuteur de fes enfans. La fageffe de fa
régence prouva qu’il étoit véritablement digne de
commander., Le poids des impôts fut adouci.; -ôc le
droit de propriété fut refpeâé. L’abondance qu’il fit
régner bannit le fpedacle de la pauvreté. Il acquitta
de fes propres deniers les dettes des pauvres infol-
vables, Cette généralité toucha le peuple qui voulut
lavoir pour roi. Le fénat. qui , jufqualors , lui avoit
marqué beaucoup d’oppofition , réunit fa voix à celle
de la multitude dont il redoutoit la fureur. Dès qu’il
fut revêtu de la puiffance fouvera’me , il s’occupa du
foin de repartir les impôts avec égalité ; 6c pour
y réuffir , il fit un dénombrement des citoyens, qui lui
nt ÇWbître les reffources de l’Etat, ÔC ou il fe trouvât
Hjjloirç. Tome F.
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plus de quatre-vingt-dix mille chefs de famille. Une
fi prodigieufe population ne .lui parut pas encore
fumfànte pour être redoutable au-dehors ; c’eft pourquoi
les affranchis furent gratifiés du droit de bour-
geoifie. Après avoir rétabli la fûreté fur les routes
qui étoient infeftées de brigands , il conçut le deffei»
de former une puiffance fédérative de tous les états
d’Italie dont Rome devoit être le centre. Ce fut pour
en favorifer l’exécution , qu’il fir bâtir, en l’honneur
de Diane, un temple for le mont Aventin, oh les
différentes villes & provinces dévoient envoyer leurs
députés pour y expofer leurs prétentions avant d’en
venir aux hoftilités. Cet éfahliffetnent pacifique arma
fes voifins ; les Tarquiniens , les Véiens 6c les Tofo
cans prirent les armes , 6c commencèrent une guerre
où ils perdirent quarante mille hommes. Leur' faute
fut fuivie d’un prompt repentir : ils implorèrent la
clémence du vainqueur qui eut la généralité de leur
pardonner. Dès que le calme fut rétabli , il orna»
Rome d’édifices magnifiques ; il en étendit l’enceinte ,
en renfermant dans fes murailles les monts Quirinal
6c Viminal qui en étoient féparés. Servius avoit deux
filles qu’il maria aux deux fils de Tarquin l’Ancien.
Cette union réparait î’injuftice faite à ces'deux princes*
qu’il avoit écartés du trône. L’aînée , qui étoit d’ua
caractère altier & féroce:, époufa Lucius-Tarquin r
auiîi méchant qu’eïle. Ces deux époux, également
ambitieux 8c corrompus, ne purent attendre la mort
d’un roi décrépit pour recueillir fon héritage. Tarquin
fit affembîer le lénat , où il accula Servius d’être-
l’ufurpateur d’un trône que lui foui avoit droit d’occuper.
Le roi fe rendit au fénat „ où fon gendre.,
ians refpe&er fa vieïlleffe , le faifit par le corps , Sc
le précipita du haut de l’efcalier en bas, Il tâcha de
regagner fon palais , & dans le même moment il eft
environné d’affaffms qui le percent de leurs poignards.
Tullie, inftruite d’un parricide qui élevoit fon mari
fur le trône , s’empreffa de l’aller féliciter. Son chariot
fut contraint de paffer dans la rue où fon- père étoit
étendu. Au lieu de fë détourner, e:le ordonna àfom
cocher de paffer fur le cadavre , dont les os furent
brîfés par les chevaux 6c le chariot; Il fut affafliné;
l’an de Rome deux cent vingt-un. ( T.—N.
SESOSTRIS, ( Hiß. anc. ) un des plus pu'ffants
rois de l’Egypte 6c un des plus grands conquérants d»
monde. Il étoit l’aîné des deux fils d’Aménophis. Tou»
les enfants qui naquirent le même jour que Sesoßris,
furent amenés à la cour. par leur père , pdur être
élevés^ avec le jeune prince 6c être les compagnons des
amufements de fon enfance & des travaux de fa jeu-
neffe. Cette éducation n’eut rien de la mcâiefle de
celle des princes ordinaires , c’étoit un conquérant
qu’en vouloit former ; cétoîent des miniftres 6c des.
guerriers dignes d’exécuter fes vaftes projets, qu’on
vouloit former pour lui. On les accoutuma, dès l ’âge
le plus tendre , à une vie dure & îaberieufe ; on les-
exerça de bonne heure , par la chaffe , aux fatigues
de la guer reôç. elles ne furent peur eux qu’un jeu dans
la fuite. On ne leur donnoit à. .manger qû’apiès. qu’ils
avaient fait une courfe confidérable à pied ou à clievah