
ce genre à notre concert fpirituel j mais peut-être
ferqic-il à defîrer que ces cflais fuffenc pouffes plus
loin;, & :qu’au lieu de fe borner à des fcènes détachées,
on prélematune aélion entière, régulière ,
lufceptible d’intérêt. Telle eft la forme que M. Zéno
a fait p endre aux O ra to r io , qui, avant lui , n’a-
voient ni régularité ni aétion;
Dans ces O ra to r io principalement dans Jofeph
& dans Jo n a th a s ,. l'écriture eft fui vie avec la plus
grande exaôitudê , non-feulement pour J.’prdre destai
es & de leurs moindres, circonftances;, mais encore
pour l'exprellion; l’auteur s'aide quelquefois
des interprétations des pères. Les idées aceeffbires
dont il enrichit les différentes (cènes , foit pour
ménager les liaiferis dramatiques , (o t pour com-
pletter l’aftion , s’affortiffent pref]ue toujours au
liijet , & ne font qu'une paraphrafe naturelle du
texte de l’écriture. Elles achèvent de rendre ces
poèmes également édifians & iotérefians. Jofeph
fur-toüt, eft plein de l’incërêcTe plus touchant : le
ledeur partage Pattendriffement généreux qui pénètre
te'coeur de ce patriarche, loifqu’il voit fes
frères humiliés devant lui, lorfqu’il entend leurs
plaintes, lorfqu’il' jou’t de leurs remords.
Les grandes pièces;ont plus d’intérêt encore}
il y en a une dont le titre & le füjet eft Mérope.
Cete Mérope d’Apoftolo Zén o a des différences
eflentielles avec les autres Méropes italiennes &
francoifes qui ont paru foit fous ce titre , foie (ous 1
des! titres différens. Elle a d’abord une reffemblance j
avec le fujet d’OE d ip e . Un monftre dont ie fthinx
a évidemment fourni l'idée , ravage les campagnes
de Me fis ne en vangeaiice du meurtre de Cresfome. ;
Ce m inftrt eft tué par. un jeune inconnu qui arrive
d’Etolie , c’eft Ëpitide j E!s de Cres for.te & de Métope.
Mérope , chez M. Z é n o , eft beaucoup plus mal-
heureufe que dans toutes les autres Méropes connués;
elle eft fortement (ôupçonnée d’avoir armé l’af-
faflin de fon mari. Poiiphonte, fçélérat beaucoup
plus habile , tyan plus odieux que tous ceux qu’on
a introduits jufqu’à prêtent d--ns ce fujet, s’eft
fervi pour tuer Cresfome , de la main d’Ariaxandre,
un des efc laves de la reine : cet efclave a difparu ,
Poiiphonte la caché dans fon palais , le réfervant
à d’autres crimes. Il fait retirer fa garde , il ouvre
une pore fecrette , & Anaxandre à fa voix fort d’un
«abinet ignoré ; Poiiphonte l’engage par l’efpérance
de parrager avec lui la couronne , à fe mettre dans
les fers pour accufer Mérope devant tous les Mef-
féniens, Tandis que ce complot affîepxfeprépare,
un ambafladeur du roi- d’Etelie, à la cour duquel
Epitide avoit été élevé , vient annoncer qu’Epitide
eft mort , qu’on a trouvé Ton corps.rnaflaçré en Pho-
cide , dans l’endroit ojj le chemin de-Daul.s & celui
de Delphes fe féparent ; l’ambafladeur réclame
en même-tems Argie, princeffe d’Etolie, que Poliphonte
avoit. enlevée , & qu’il gardoït comme
otage. Cette pi jncrlfe , fous le règne de Cresfoive,
avoit. été promife à Epitide, fon, fils. Cependant,
Epitide vainqueur du monftre, paroît devant Po-
liphorte, devant Mérope & devant l’ambafladeur
d Etolie, qui n’avoit annoncé fa mort que pour 1 aider
à cacher fa n ai fiance & fes projets. Epitide qui
fe conpoît & qui agit de concert avec l'ambafiadeiJr,
imagine une fable pour confirmer lamortd’Epitide,
il dit à Mérope , en préfeoce de Poiiphonte, qu’il
a trouvé dans le lieu & dans le tems indiqués par
rambaffadeur d Etolie, un jeune homme que des
brigands avoient percé de-coups , & qui près d’expirer,
l’av.oient chargé de porter à Mérope une ceinture
& une bague, que cette reine reconnoî c pour
avoir appa1 tenu a fon fils 5 Mérope ne pouvant plus
douter de fa mort, tourne tous fes foupçons contre.
Cléon lui même , c’eft le nom qu’Epitide avoir;pris ;
elle prelfe Poiiphonte de le livrera fa vengeance,
Poiiphonte,-la refuie en;; a-Mègüànt: le (ervic-e important
que ce jeune hq mpe( vient de rendre à
Meffène en la dé iv.raptu(du,monftre ; mais en effet
c’eft le meurtrier d Epitide, qu’il protège en lui;
pour le récompenfer, il Lui pioptfc l’hymen d’Argie,
qu’Epitide accepte avec tranfporc ; il aimoit cette
princeife & il en éçoit aimé. Pendant tous ces mou-
vemens , Anaxandre fe cache de manière à être vu ;
il eft pris, enchaîné, amené devant Mérope , qu’il
a l’infolence d’accu fer de la mort de C restante :
Poiiphonte, fur cette accufatiôn , s’érige en juge de
Mérope, & veut qu’elle périlfe: Epitide, témoin de
toutes ces horreurs , J aille éclater fz tendrefle pour
Mérope , & infultc Poiiphonte. L’oeil fubtil de ce
tyran pénètre le myftère qu’on lui cache , & découvre
Epitide dans Cléon. Di vertes circon fiances
babil ement combinées le mènent à cette découverte.
La haine que Cléon lui a témoignée, l’amour qu’il a
laifîe çclater pour Mérope, le refus qu’Argie avoit
fait d’époufer Cléon lorfqu’il lui avoit été propofé
fous ce nom , la. facilité avec laquelle elle avoit
rétra&é ce refus, après avoir vû Cléon , voilà Tes
preuves. Il s’en explique avec Algie, il tire avec
une adrelie fatale cet aveu de fa bouche, il fiir-
prend, à tarce d’étaler de faufles vertus, toute la
confiance de cetre indiferète amante, il lui peint
Mérope eomme une époufe impie, comme une
mère dénaturée, fouillé e du fang de fon mari & de
fes fils, avide encore du fang du dernier fils qui
lui refte ; il avertit Argie de cacher avec foin à
Mérope qu’Epitide eft à Meffène , & d’affeéter de
le meconnoître fi elle le voit devant Mérope ; fon
deflein eft que Mcrope elle-mênïe fafle périr Epitide,
en croyant punir l’affaffin de fon fils ; il envoie
Epitide à Mérope, Epitide lui déclare qu’il
eft fon fils ; Mérope voulant s’affurer de la vérité,
fait venir Argie, qui, malgré-' tous les difeours
cl’Epiride , fcfouvienc de ce que lui a dit Poiiphonte,
& perfifte à méconnoître fon amant. Mérope ,
que Poiiphonte avoit fait prévenir qu’il alloit lui
envoyer l'^iïaftin de fon fils, avoir donné fes ordres
pour qu’en lorlant de fon appartement, Cléon reçut,
la mort. Mcrope, après l’entrevue d’Epiüde avec
Argie, eft convaincue que ce jeune homme éft
un impofteur 5c que c’eft 1 afiafiin d Epitide , elle le
renvoie avec indignation, & reftant avec Argie ,
elle lui dit les ordres, qu elle a donnés. Alors
Argie , faifie d'effroi, révèle fon fecret; Mérope ,
non moins épouvantée, ouvre précipitamment ,
& court révoquer fes ordres s’il en eft tems encore
au lieu d’Epitide , elle trouve Poiiphonte qui l’accable
de nouveaux reproches fur la mbit qu’elle
vient dé donner au dernier de fes fils, & qui la chargeant
à-Ia-fois de la mort de tous lès autres & de
celle de fon mari, lui annonce que les plus affreux
fupplicès vont expier tant de forfaits. On ne peut
rien ajouter à l’horreur, de la fîcuation de Mérope ,
ni à l’atrocité des crimes de Poiiphonte ; mais le
moment que les dieux ont choifi pour manifefter
l’innocence de Mérope, & pour entraîner Poiiphonte,
dans l’abîme qu’il avoit creufé lui-même , eft enfin ;
arrivé ; ce monftre, plus cruel que celui qu’Êpitide |
avoit abattu , veut offrir à Mérope le fpeéïàcle hor-
tib'e de Ion fils'ego'gé-, ..il fait tirer un rideau
qui do't couvrir le coips de ce prince; on voit'
Epitide , mais Epitide vivant & accompagné d’A-
naxandre ; ce coup de théâtre s’explique naturellement.
L’ambaffadeur d Etolie nlavoir cefïe de veiller
(ur le prince & d'obferver tous fes pas; il avoit
arrêté les bras levés fur lui, au moment ou il for-
toit de la chambre de la reine. D’un autre côté;,
Poiiphonte n’ayant plus bdfoin d’Anaxandre , avoit
voulu brifer ce dangereux. infiniment de tous les
cr mes , il Pavo t fait attacher à un arbre dans
l’iptérieur de f m palais, & après avoir ordonné
à des foldats de le percer de flèches, il s’éroit retiré
; l’ambafladeur d'Etolie étoic arrivé dans ce
moment-, il avoit fait fufpendre le fupplice d’A-
naxandre , en (è pla gnant de ce qu’un crime public
ne s’expioir pas publiquement ; Anaxandre n’avant
plus rien à ménager & connoifl'ant mieux encore
quel homme il avoit fervi, révèle tout à l’ambalfi- j
fteur , Se crie aux fo.dats , qu avant. quTi maire,
1 intérêt de l’état exige qu’il publie un fecret importun:
à la face de Melfène entièré ; l’ambafla-
dear ayant en uire fauvé Epitide, a voit fait venir
Ao.-xarcdre devant lui. Ainli Epitide,, de vidime
de Poiiphonte, .ét-tnc devenu fon mai ire & fbn juge ,
envoie ce fcéjérat au fupplice 8 t ne condamne
.Anaxandre qu’a l'exil.
Nitocris, qui donne fon nom à une des pièces
d’/\poftolo Z é io y eft une i;e ne d’Egypte , dont les •
hifloriens gre‘s'ont célébré' la vertu & la beauté. ;
C’eft la première femme qui a t régné eh Egypte.
EJle fit conftruire hors des murs de Memphis , une
de ces fam.eufcs'pyramides', mifes au noiribre dès
merveilles de l’Univers, avec un val te fouterrairi.
Le roi Aménophis, fon frère, ayant été aflafliné ,
elle vengea fa mort & lui fuccédà. Voi à tout ce
que rhijfloire a fourni à M. Z é n o . Ceft fur ces
(fondemens qu'il a cpnftruît fa fable , à laquelle il
donné des traits de reffe^nbla^ce^marqués avec.ç.elle
de notre comte d’£/Tex. Mirtëe,.par une fuite de
circonftahces expoféês dans la pièce,, eft coupable
en apparence & innocent en effet ; la reine qui
l’aime , & à laquelle il préfère iinp rivale, veut le
fauver,,& eft obligée, dé le condamner. Minée
a la fermeté du comte d’Effcxavec plus de douceur.
Rarefès, prince iflu des anciens rois d’Egypte, &
Manétes (on gendre, reffemblent à Céc.il ; c’edl
Ratefes qui eft lui même coupable de tous les
crimes qu’il fa:t imputera Mirtée} Manétès , qui
paroît fervîr fes fureurs, fert en effet la reine &
l’état; mais ce trait de fon caractère ne fe développe
qu’à la fin , & il reffemble encore à l’Exu-
père d ’H é r a c l iu s , en ce qu’il produit un heureux
‘dénouement par un coup qu’on n’attendoit pas de
lui.
Dans le fujet de V a p iriu s , tiré du huitième
livre de la première décade de Tite-Live , l’auteur
a fu retracer avec énergie les vertus vigoureufes
des âmes romaines dans les plus beaux tems de la
république ; il a fur-tout réufli à peindre avec des
couleurs fortes & nobles , l’héroïque inflexibilité
de Papiriüs , dans le maintien de lâ-dîfcipiine .militaire
& des droits de la didatiire. •
L‘Andromaque d e M. Zéno îjéflemblë à’-Tâ-fois à
TAndromaque d’Euripide , aux f ro y e n n e s du même
poe'te, à la Troàde de Sénèque', à Y Andromaque
de Racine , à VHéraclius de Corneille.
1°. A Y Andromaque d’Euripide. Dans la pièce
moderne, comme dans’lapie.ee ancienne, Andromaque,
livrée par iVofencè dé Pyrrhus aux fureurs
jaloufes d’Heimionë , fe réfugie au pied d'un autel
qu’elle embraffe , afile facré, qui feul peut défend'e
fes jours ; en même tems elle ènvoie avertir Pyrrhus
du danger qui la menace ; Hermione &: ceux qui
fervent la naine emploient d’abord l’artifice pour
la tirer de fon afile : la prudence d’Andromaque
rend inutile cet artifice ; ils veulent employer la
violence:; Pelée chez Euripide, Hélénus chez
M. Z é n o , arrive avec la garde. de Pyrrhus pour
fauver Andromaque.
i°. Aux Troyennes d’Euripîde, en ce qui concerne
le péri! d’Aftfanax, l’ardeur des greçsà pour-
fliivre la more, la douleur d'Andromaque, lorfque
ce fils fi cher eft arraché de fes bras.
3°. A la Troade de Sénèque. M. Zén o a rend«
avec beaucoup de forcé' une (cène terrible. 8t admirable
de la Troade de Senèque. Andromaque , pour
dérober fon fils à la fureur des g;ecs & aux artifices
d'Ulyffe, le càchè 'èaus le tombeau d'Heâor.
Ulyffe vient & interroge d’-un ton cruel cette mère
tremblante fur le fort d’Àftyanax , éèle, répond
par une équivoque adroite qu’il habite le féjour