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SAURIN , ( Hiß. Litt. moi. ) nom porté par des
miniftres proteftants &. des hommes de lettres , tous
célèbres.
■ i°. Elle , né en 1639 , dans la vallée de Pragelas,
ministre de l’égüfe Wallone dTJtrecht, l’avoit ete a
Embrun, & avoit été obligé de quitter la France,
pour avoir refufé de faluer le Viatique en paflant. Il
a écrit contre Bayle, &. iur-tout contre Jurieu , qui
éçrivoit contre tout le monde , & avoit pour ennemis,
les gens même de fon parti. On a encore d’Elie Saurin,
un traitéde \ Amour de Dieu , ÖC un traité de Y Amour
du Prochain. Mort en 1703., .
., 2.0. Jacques Saurin, né à Nifmes en 1677, célèbre
parmi les proteftants par fon éloquence, que les
gens de fa; feéle ne trou voient pas affez animée, parce
qu’il ne la dégrâdoit pas par des injures bannales
contre l’églife Romaine ; il paroît que cette éloquence
produifoit de grands effets ; la première fois que le
célèbre Abbadie put l’entendre , eß - ce un Ange,
s’écria-t-ril ,ou,unhomme qui parle ? On a-fes fermons ;
fes autres ouvragés, font-de côntroverfe. Mé françois ,‘il
vécut'expatrié peur fa religion; il fait fur ce (ujet,‘
à Louis X IV , dans quelques endroits de; fes fermons,
des reproches éloquents , juftes & nobles, oùon fént
les regrets d’un citoyen, plus que* le ressentiment d’un
v ennemi &. que .le fanatii me d’un feélaire. «Et toi, Prince
v redoutable, que j’honorai jadis comme mon Roi, &
» que je refpeéle encore comme le fléau du Seigneur ,
n tu auras auili part à mes voeux. Ces Provinces que
« tu menaces , mais que le bras de l’éternel fouis
tient ; ces climats , que tu peuples de fugitifs, mais
*> de fugitifs que la charité an;me; ces murs qui renfer-
» ment mille martyrs que tu as faits , mais que la
» foi rend triornphans, retentiront encore de béné-
» dirions en ta faveur. Dieu veuille faire tomber le
» bandeau fatal qui cache la vérité à ta vue. Dieu
» veuille oublier ces fleuves de fang dont tu as couvert’
la terre, & que ton règne a vu répandre!
n Dieu veuille effacer de fon livre ces maux que
» tu nous a faits, & en récompenfant ceux qui les
» ont- foüfferts , pardonner à ceûx qui les ont fait
» foufffir 1 Dieu veuille qu’après avoir été pour nous,
»> pour T é g life le miniftre de fes jugements, tu fois
». le difpenfateur de fes grâces et le miniftre de fes
w miféricordes t , . . . . . .
» On dira, dit-il ailleurs , on dira un jour à vos
»> defeendans, que l ’année mille fept cènt neuf, la pa-
' » tience de Dieu laffée envers l’Europe , enveloppa
v dans unë même condamnation, l’ami, l’ennémi,
» prdque toute l’enceinte dé cette belle partie du
» monde. Ils diront qu’on vit tous les fléaux de Dieu,
» de concert, déchaînés pour perdre les peuples : ils
Hifioire. Tome V.
» feront parcourir à leurs auditeurs , les vaftes pays
n du Nord, & montreront le Borifthëne teint de fane ;
» la contagion allant avec rapidité, comme fur les
» ailes du vent , d’une ville à une autre ville , d-’un
» royaume à un àutrè royaume y d’une province à une
n autre province ; ravageant dans une femame tant
» de milliers de perfonnes, tant de milliers dans une
» autre. Ils parleront de ces monarchies, l’objet des
» prétentions de deux princés; & par les fanglantes
» images des exécutions qui y ont été opérées , ils
» feront douter fi c’étoit le défir de conquérir ces
n royaumes, ou le défir de les détruire , qui avoit
» armé le bras de ces rivaux.... . . _
Après avoir décrit la ' bataille de Malplaquet, il
ajoute : ' ..
<( Ils parleront de ce royaume , l’un des plus fer-
» tiles de l’Europe , & ils rappelleront cette difette ,
» en ceci plus cruelle que la famine , qu’elle faif-
» fouvent périr d’une mort plus lente. Ils feront en*
n tendre le laboureur hurlant fur les grands chemins.
» Ils représenteront «ne férocité foudainé , s'emparant
» detous les ejprits , tes hommes fe faijijfanfdes convois
>> publics , s*arrachant; le pain les uns des autres| ,•
n ne recônnoijfant plus de retenue , plus de bonne foi ,
jj plus de religion (ce qui eft ici en italique eft cité d’une
lettre paftorale de Fléchier. ) Saurin ajoute :
n Cependant il fubfifte encore cet état, grâces à tes
j» miféricordes infinies , mon Dieu ! il fubfifte encore
» cet état ; & . , quoiqu’afSigé , quoique pressé,
» quoique laffé d’une guerre longue, cruelle , il fubfifte
>1 avec autant de grandeur & autant de gloire qu’aucun
» état de l’univers »1
On peut par ces traits , juger de l’éloquence, de
Jacques Sàurin. Il mourut en 1730.
3°. Jofeph Saurin, de l’Académie des Sciences , ne
dans la principauté d’Orange en 1659 , fils de Pierre
Saurin, miniftre calvinifte à Grenoble , fut lui-même
miniftre à Lure aufli en Dauphiné. Obligé' de quitter le
Royaume pour fa religion , il fe retira d’abord a
Genève; delà il pafla dans l’état de Berne, quiiui
donna une cure confidérable dans le bailliage d’Iverdun;
Il époufaune demoifèlle de l’ancienne & noble famille
de Crouzas , dans le pays de.Vaud.La perfécution ,
dont aucune religion n’a fu fe défendre ,, lui fit perdre
fa cure. Les Gomariftes, qui sont les figoriftes de la
réforme & les plus intolèrans des Calviniftes , faifoient
ligner un de ces formulaires dont l’objet Sc l’effet dans
tous les pays du monde a tou1,ours été de mettre
obftacle au progrès de la rai ion. Jofeph Saurin , apres
avoir quelque'temps-échappé à cette tyrannie, par des
moyens qui fentoiçnt l’artifice 6c la foiblèfle « & dont
fa franchife ne put s’accommoder , pafla en Hollande ,