
M. Hume, qui croit Marie Stuart coupable ,
• oble rve que pour qu’il fut poflîble de rejetter les
lettres attribuées à Marie Scuàrt, dans cette affaire
il faudroit fuppofer de trois ch Tes l’u:e, ou que
fes fcréc.ie« -, par un zèle ir.dii'crvt, auraient
condi.i feuls toute la négociation , fans lui en faire
part, afin de' lui «ménager la furprife de l’événement,
ou que ces riiêmes fe rétaires é-:oient des
maîtres vendus à Walfingham ^ ou enfin que ces
lettres n’etoient ni de la reine d’Eco fié $■ ni de
^fes fecrétaires 3 mais que Walfingham ayantintercepté
dMiiffé' la première lettre de Babington , le
lervic du même ehiftre peur faire fabriquer lés.
'réponfes. dans fes bureaux, & qnalors la dépolît*
0^ des fecrétaires-aura été- arrachée ou par les
torturés dii par- là crainte- des tortures. M. Hume
Remarque ‘ que les partifans de Marie Stuart n’ont
point'fait de choix entre - ccs trois fuppofitions 3
il demande laquelle, ils préféreraient & quelles
raiforts plaufibles de cette préférence, ils pourraient
alléguer. -
- Je réponds .qu’ils, n’en. préfèrent - aucune & qu'ils
les adoptent toute« 3 ils ne font point forcés de choifir ;
il leur fufnt qu’il y ait trois différens cas qui pulifent
concilier l’cxiftcncc de ces lettres" avec la dénégation
confiante de Varie Stuart, jointe aux autres circonstances
de l’affaire.
M. Hume difeute en détail chacune des trois fup-
pofi:ions. Dans la première, dit-il , les fecrétaires
s’expofoient au plus grand danger» fi la conjuration
étoit découverte.
Sans doute , mais c’étoit pour leur reine ; le
zèle a fouvent été jufques là , & Walfmgham lui-
même uniquement pour fcivir la haine d’Efifabeth,
s’expofoit à une diffamation éternelle dans la postérité
, en écrivant à Pawlet la lettre qu’on a
vue plus haut. Si quelqu’un par ies vernis & fes
malheurs a pû infj-irer un grand zèle a fcs fujets
& à fes domefliques , c’eft certainement Marie
Stuart.
Mais fes fecrétaires s’éxpofoient àfa difgrace, même
en ca§ de fuccès.
M :rie eut fan s-doute b'âmë un zèle pouffé jufqu’au
régicide 5 mai- elle n’eût pu s’empêcher de favorr gré
à fe!s libérateurs , & elle eût jugé que la reine d’An*3e-
terre n’av >it pas eu p!iis de droit fur la liberté de la
reine d’Eéoffé, que celle-ci n’en avoit fur la-vie d’Elifabeth.
Nau & Curie pouvaient du moins fe flatter
■ qu’elle penferoit ainli.
Quant à la fécondé fuppofition , M. Hume, au
Heu de la réfuter , la fortifie , en rapportant, d’après
Camdem , la demande faite par ce miniftre.
Sur le troifîème , il répond qu’un gouvernement
capable de commettre un faux pour donner la mort
à une reine innocente, feroit un gouvernement
. monftrueux. < .>
5 II a trop raifon , fans doute 3 mais il fufnt de le
renvoyer à ce qui précède & à ce qui fuit, de lui
rappelle^ les difïîmularions perfides d’Elifabeth , dans
toute .c.ett'e affaire & la juftification même de' W a l-
fir ig k am , qui n’exblut aucun moyen dé TerVir la
reine 3 la partialité inj.ufte de cette • reine dans le
grand procès de Mûrie Stuart contie le triumvirat
d’Ecoffe au fujet dè la mort de Dainley (
les articles L es le y , Morton & Murrài)N oüs
demanderons fi les fuifi’cs lettres adrclfées au nom
de Marie Stuart, Toit à Pothvel, pour la changer
du meurtre de fon mari, foit aux catholiques
d’Angleterre, pour trouver, & même créer dés
coupables, nelont.pas du même genre. Voilà pour
ce qui précède , & quant à ce qui fuit, . ce qu’il
y eut de plus honteux dans la conduite d’Elifabeth ,
c’eft que par une hypocrific déteftable , elle vouloip
ayoir à la. fois le plaific de la vengeance & le
mérite de la généralité. ; elle ne ceffoit de plaindre
Marie , de répéter tendrement le nom de coufine
8c dt . foe u r , jamais elle ne fouferiroit à la perte
de f a c h è re , de fo n aimable parente , la main- fe
refuferoit à la confirmation de farrêt 5 elle, pre-
noit la défenfe de Marie contre Walfingham. 8c
fes autres miniftres 5 elle leur prduvoit la nëceflité
de laiffer vivre cette princeffe 3 elle s’irritoit de
leurs remontrances ; mais ceux qui, comme W a l-
fiifgham , ofoient s’irriter à leur tour de f a fo ib le jfe ,
de f a fanefte g é n é r efit é ; qui lui reprochoient de
facrifier la religion & l’état à une parente coupable,
n’étoient pas ceux qui lui faifoient le plus mal leur
cour.
~ Cependant elle paroiffoir balancer encoie ; elle
aurait voulu éviter l’éclat d’une exécution publique ,
elle chargea Davifon , nouveau fecrécaire d’état ,
de fonder encore Crury & Pawlet, à qui la garde
de Marie S:i a/t étoit confiée , pour favoir fi Marie
étant condamnée , ils ne confentiroient pas à la
faire périr en fecrer. Sur leur refus , Elifabeth
faifîe de la plus violente colère , les appella traîtres
& parjures ; les accufa de violer leur f erment d’o-
béiffance. Tantô elle paroifloit avoir pris fon parti 5
d autres y difoit-ell * , fe ro n t moins fcrupuleux 3
tantôt elle en revenoit à dire 3 ce Voilà des gens
bien incommodes avec leur probité ». Enfin elle
dit à Dav fon d’expédier fecrettement l’ordre pour
l’exécution de Marie, elle le figna gaîmenc, &
1 dit de le faire fceller. ce Allez, lui dit-elle,
» apprendre ceci à Walfingham qui éft malade.
m Je crains cependant, ajouta-t-elle en fou riant,
» que cette nouvel’c ne le faffe mourir de chagrin ».
Plaifanterie abominable par laquelle elle applaudiffoic
à l’acharnement connu de Walfingham contre
Marie.
Elifabeth redoubla d’hypocrifîe après l’exécution
el e parut frappée comme d’un coup de foudre en
r$ceva,nt Ja- nouvelle de la mort de Marie ; ellq
ne £e montra plus que vêtue de deuil, & ibaignée
de larmes;5 ellp accufa hautement les miniftrçs.&
fes co.Teillers de l’avoir, trahie , .elle » leç chuffa
de fa préfence 3 elie, écrivoit au roi d’Ecqffe-*
Jacques VI, fils de Marie 3 « JevQudroisque vous
» puflîez connoîtie & 71e pas Tentir la douleur dont,
»1 je ifuis pénétrée » y elfe ;ofai pendre jàtémoin
,, que tout s’étoit fait fqns> faparticipatiop.j.
& fajhs' qu’elle en eut pu, cqnnoiff.nce, & fai fane
fervir à la, juftification tout cp qui jar cQ;n.qamnoit
» Je ne. fuis., dit-elle , ni., a fiez... fojble , ni . alîez
» lâchç ppur défavoucr un ordre que j’auiois, donné5;
» ma cour peur attefter que jamais je n’ai donné
» celui-ci , & ma douleur l’attefte plus fortement
» encore : ajj... ,
Pouf donner quelque vraifèmbjance à cette éttàng’ç
apologi’è ‘ elle, fît arrêter Davifon , & lui fit faite
fon procès il préféra une fou’miffion politique'' a
une apologie dailgereufe,- s’avouà;:coupable , .’demanda
grâce & ne put l’obtenir’5 il fut‘côridamrié
à une amende qui le réduiloit. à l’indigence- Eli^
faberh voulût qu’il la payât,* elle lui envoyaTeule-
.ment .de'tems en terns quelques légers feedurs pour
l’empêchcir de,périt de mifèrê , rou plutôt pour pré-,
venir les effets" de fo'n défefpoir. Davifon ne-’pofiv'ant
fe; jfiftifier piiblitjuement envoya du moins à Walfingham',
fon ami, une apologie fecrètte qui contient
tous ces détails.
Jacques refufa l’ambaffadeür d’EI fabeth, &
rappella les fiens d’Angleterrè 3 il jura de venger
fa mère 5 la nation , & Tur-tout la nobleffe , partagea
fon indignation 3 le jour que la cour d’E-
cofl'e prit le deuil ,. le lord Sainclair parut en
armes chez le roi : « voilà , dit-il, le deuil qu’il
» faut prendre pour la reine ». Cependant Walfingham
ayant écrit comme de lui-même , au lord
Tniriftone , fecrétaire d’état d’Ecoffe, pour lui re-
préfenter l’impuiffance où étoit ce dernier royaume de
fe venger par fes propres forces , & le danger d’ap -
peller des fecours etrangers, Jacques, loit qu’il
cédât à ces raifons ou aux dernières volontés de
fa mère, qui en mourant, l’avott exhorté à la
paix , foit plutôt qu'il fuivît fon averfion naturelle
pour la guerre & fon amour pour le repos, ceffa
de parler de vengeance , 8c pour fuccéder un jour
à Elifabeth en Angleterre , il crut qu’il devoit
continuer de paraître vivre en bonne intelligence
avec elle.
Walfingham affermit’en Angleterre la religion pro-
teftante , & engagea la reine à prendre part aux guerres
des Pays-Bas contre l’Efpagne.
Les fervices les plus criminels que les miniftres
ont occafion de rendre à leur maître, font toujours
ceux fur lefquels ils fondent l’efpérance de
la plus fol,idc faveur 3 après ceux que Walfingham
ayoit rendus à Elifabeth dans l’affaire de Marie
Çtrjat't, ilTç-cifqyoit au-deffu? jde, toutes les vicif-.
fitudçs du. fpjrt ;jil fe trompa., il tomba çjans la dif-)
graçej& fut, qbligé i c quitter le miniftère, & foit
qu’il çut.eu le mérité de ne .p^int profiterde fa faveur
po.ur.s’ehrichif , foit qu’il eut .eu la folie de difiîper
fâ, fortune , il fut réduit à une telle pauvreté, qu’à
fa - tijort ,i arrivée en 15^0 tout fon. bien fuffic à,
peiuOi^M? frais dje fes funérailles ; il,ne lui reftoitpour
tqutefortune<ju$fjji bibliothèque.
;iOna:de lui plufieurs ouvrages, dpnt le principal
ajjéçé traduit eu françois , fous le titee de Mémoires &
inftrukiôn-s pour. Us ambaffadeurs. Le traducteur fe
nomme Bonlefteis de la Contie.. Çèt ouvrage qui'
n’a été. connu par cette tràdudion qu’en 17x5 , a
fait regarder Walfingham comme le d'Offat de l’Angleterre.,.
On a traduitraufli Ion livre intitulé : M a x i-
mes, politiques ou fecret des çqprs* ,
WÂLSTÈIN ( Albert ) ( h iß . d 'Allem. ) l’un des.
héios. de la guerre de, trente ans en Allemagne,
étoit un gentilhomme de Bohême , né en 1584, qui
avoit eré dans fon enfance, page chez le marquis
de Burgau , fils de l’archiduc Ferdinand d’Infpruck.
Il voyagea en-Italie, en France , en Efpagne , en
Angleterre 3 lorfqne l’empereur Matthias fe fut laifle
engager par le roi 'd’Efpagne Philippe II, l’aîné, de
fa maifon , à préférer à fon propre frère Albere
d’Autriche , fon coufin Ferdinand, archiduc dé
Gràtz & à réunir toutes Tes couronnes fur cette tête
éloignée , la Hongrie , la Bohême , les écats-même
d’Allemagne prétendirent que leurs privilèges
avoient été violés dans l’éledion ou dans le couronnement
de^Ferdinand 3 les états d’Allemagne vou-
loient retirer le feeptre impérial des mains de la
maifon d’Autriche , pu il étoit, difoient-i!s , refté
trop long-tems. La Flongrie voulut oppofer à Ferdinand
Betlem-Gabor , & la Bohême l’eleéèeur Palatin
Frédéric ; les divifîons du parti catholique, à la
tête duquel étoit la maifon d’Autriche , & du parti
proteftant , à la tête duquel fe mit le comte de
Mansfeld Erneft ( voyez M a n s fe ld ') éclatèrent de
nouveau & la guerre de trente ans commença. W u lf -
tein , que fon mérite avoit rapidement élevé aux
premiers grades delà milice, forma une petite armée ,
comme les Condottieri d’Italie , & comme faifoient
alors dans le parti contraire , le comte de Mansfeld
8c un prince de Brunfwick, adminiftrateur d’Hal-
berftat, & vint offrir fes fervices à l’empereur Ferdinand
I I , & à la maifon d’Autriche. Les turcs & les
vénitiens, fi long-tems divifés d’intérêt & de parti ,
. & avant cette guetre & encore depuis , réunis alors
fous la même bannière-, fecondoient Betlem Gabor
dans le projet d’enlever la Hongrie à la maifon
d’Autriche 3 Walftein , malgré les efforts de la Porte
& de ’Venif ., foiça Gabor d’évacuer la Hongrie.
Il revint aufll-tôt défendre la Bohême, où le comte
de Mansfeld foutenoit avec affez de peine le parti
déjà très-affoibli de Frédéric , il trouva dans Manf-
feld un ennemi digne de fon courage , 8c quiaYoic