
Ce fut du temps de Gautier de Villebéon fon !
aïeul 3 dit le Jeune, que la charge de* chambellan
devint une des plus confidérables de France , &
cette charge fut comme héréditaire dans fa famille. Ce
Gautier fut fait prifonnier en 1 1 1 .9 , à la terre Sainte.
La branche aînée de cette meme famille pofféda
long-temps la feigmuile de Nemours, qu’e'le yendt
au roi Philippe Augufle.
VILLEDIEU, ( Marie-Catherine des Jardins)
(Jiift. litt. mod.) plusconnue tous le nomde Villedieu,
qui étoit celui de fon amant, devenu fon mari,
naquit à Alerçon vers l'an 1640 Elle devint bientôt
veuve, s'enferma dans un couvent, en fortit pour
epouferun fécond mari, & après ce'ui-tà un troihème
qu’elle perdit auflî. Elle renonça pour lors au mariage
fans, dit-on, renoncer à l’amour ; elle s’en
occupa au moins dans tous fes ouv ag^s, qui com-
pofent douze volumes in-ia : ce font les Défordres de
iamour3 le Portrait des foiblejjes humaines, Cléonice3
Carm ente, Les Galanteries grenadines 3 les Amours
des grands Hommes, Lyfandre , les 'Mémoires du
Serrait les nouvelles- Af ricaines , les Exilés de la
cour d'Augujle, les Annales galantes, pe us romans
qui ont, dit-on, dégoûté pour un temps des grands
romans donc on commençoit à Te lafler. Les Exilés
de la'courd’Augujle font de tous ces opufcuJes celui
qui a le plus réiiilé au temps j on le lit quelquefois
encore.
V IL LE FORE , ( Jofeph-François Bourgoin de)
né en 16$z , fut reçu en 1706 à 1 académie des Int-
cripcions & Belles-Le ttre'; '1 s’en 1 étira de lui-même
en 1703. Il avoit un goût dominant pour la liberté,
pour la retraite, pour l'obfcurité ; les académies
avo;ent trop d’éclat pour lui, & :mpofoient trop de
devoirs. Il a beaucoup écrit, & plufî nrs de fes
o'uvrages font connus. On a de lui une vie de Saint-
Bernard, il a d’a !Lurs trad it des lettes & des
fermons ch’ ifis de c? pere ; i a tra ui aufli p uiieurs
ouvrages de Sa nt Aug..ftinr & plufi.ursde Cicéron;
il a donné une vie de famte Thérèfe, & a traduit
auflî des ! et res choifî s dr cette fanté ; quoique
janfénifte, il ofa refà re un ouvrage fait avec fuccè-s
par un janfénifle célèbre , les vies des pères des
deferts, par M . Arnauld d’Atdilly , & i, ne effaça
po;n t , il donna feu env.nt une forme par-
ticnliè e à fon ou-rage, il a féparé les pères d s
deferts de 1 orient de ceux de l’orci ent ; il en
forma deux ouvrages diff rens, chacun de tiois
volumes in- i l . 11 a écri; la vie d’u e fainte du
parti ianfénifte, qui n’a voie pas été toujours fainte ,
de la famé, lie duchefle de Longueville , en ^
volumes in-8°. e le a eu. plufîeujs édit « ns ; c’elt
lui enfin, q ui, à la follich ation du cardinal de
No tilles ,, a publié les anecdotes, ou mémoires
fecrets fur la conflitution unigenitus, eu trois vol.
in-12.0• Le confeil alors très-attentif à tous ces
grands obj ts , aujourd'hui fi néglgés, fupprima
cet ouvrage, de pour montrer de l'impartialité,
il fupprima en même tems la réfutation qui en
avoir été faite par le jéfuite Laffitau , évêque
de Siftcron. M. de Villefore mourut en 1737.
V I L L E G A G N O N . ( Nicolas Durand de)
( hiß. de France ) Calvin avoit formé le projet
d établir, au Bréfil , une colonie de fa leéte,
c’ éroit fur la fin du règne de Henri II. L’amiral de
Coligny , encore catholique à l'extérieur , mais
déjà calvimfte dans l’aine , féconda ce projet, &
fit partir quelques vailleaux fous la conduite de
Nicolas Durand de Villegagnon, chevalier de
Malthe , vice-amirai de Bretagne, nouveau calvi-
nilte.
Les minières difputèrent tant, & fur mer,
& fur terre, qu’ils feandalifèrent la colonie qui
le rit catholique, au01-bien que Villegagnon. Ce
capitaine s’étoif déjà diftingué dans plu rieurs expéditions
célèbres, nommément dans celle d'Alger *
en 1541. Il fe d Itingua encore dans la fuite à
la défenfe de Malthe , fous le grand-maître de
la Valette-Parifot, en 1565. Il mourut en 1571«
V IL LEH A R D O U IN , ( Geofroy de ) ( hiß. de
France ) maréchal de Champagne , chevalier &
homme de lettres. Au commencement du treizième
fiècle , il écrivit l’hiftoire de la prife de Constant.
nople, en 1204, par les françois & les vénitiens.
C’cft le premier hiftoren qui ait écrit en fran-
çois. Du Cange a donné une édition de cette
hftoire.
VILL’ENAGE, ( droit de) (hiß. mod.} c’éfoît
un droit que les feigneurs s'étoient arrogé dans
les riècles de barbarie, de vendre les uns aux autres
leurs vilains ou payfans, qu’ils regardoient comme
une efpèce d’efelaves. Ce droit regnoit en Allemagne
, en France , en Angleterre, en EcofFe , &
ailleurs. Nous lifons qu’en Angleterre dans l’année
1102, fous le régne d’Henri I , le concile natio-
nal fulmina , par le xixe canon , des anathèmes
contre cet ufagè , qui ne lailla pas de le maintenir
encore long-tems. Il eh relie encore des
traces dans quelques coutumes de France. (D . J.)
V IL LEN EU V E , ( hiß. de France ) nom d’une
les plus anciennes ôc des plus il lu lires mai Ions
de Provence. On croit, mais faus preuves fuflfi-
fa-téc, qu’elle doit fon origine à un ^a iet de la
maifon des comtes de Barcelone , rois d’Arragon;
elle eft du moins connue, en Provence, depuis
Raimond de - Villeneuve , général des troupes du
comte de Barcelone, en 1 1 1 4 , & qui ell qualifié
gouverneur de Prove ce.
Romée de Villeneuve, petit-fils de Raimond, fut
baron de Vence , connétable , grand-fénéchal &
gouverneur de Provence, régent & tuteur de la
princefle de Béatrîx de Provence , • qui époufa
Charles d’Anjou , frère de Saint-Louis , & depuis
roi de Sicile ; Romée de Villeneuve contribua
beaucoup à faire conclure ce mariage. Il paroît
que ce nom de Romée ou Romieu, défignoit un
pèlerin qui avoit fait le voyage de Rome, & nous
croyons que ce Romée de Villeneuve qui paroît
avoir été tout puiflant en Provence,, fous le comte
Raimond Bérenger V , père de Beatrix , eft le
même fur lequel M. de Fontenelle avoit fait Ion
hiftoire , véritable ou romanefque, du Romieu ,
dont nous n’avons que le commencement.
Cette maifon fe partagea , dans la fuite , en
deux branches principales, dont celle de Trans fur-
tout a joué un grand rôle ; c’eft elle qui a produit
Elion de Villeneuve , vingt - cinquième grand-
maître de l'ordre de Saint-Jean de Jérufalem, alors
établi à Rhodes ; il fuccéda , en 13 z 3 , à Foulques
deVillâret. Son adminiPtrarion elt célèbre par les
changemens & améliorations qu’il fie dans l’ordre.
Il mourut en 1346.
De cet‘e même branche de Trans , étoït Louis
de Villeneuve qui, à la conquête de Naples farte
par Charles V III , commandoit l’armée navale de
France, & qui depuis, fous le règne de Louis X I I ,
fut envoyé deux fo’s en ambaflade à Rome. Ce
fut pour lui que Louis X I I , en érigea la
baronnie de Trans en marquifat.
Il y eut, au feizième fiècle , une femme de
cette maifon , célèbre par fon courage & par fa
fidélité pour fes ro:s ; elle fe nommoit Suzane
de Villeneuve y & étoit fille de Gafpard de Ville- ,
neuve , baron des Arcs, chevalier de l ’ordre du
roi , & gouverneur de Fréjus. Elle époufa, e-n
i ç 7 f , Pompée de Grafle, baron de Moans &
de Bormes, zélé partifan du ro i, & qui mourut, ;
en 1588, viftime dé fon zèle ; des aflafïins !
ligueurs le maffacrèrent avec fon frère, sacca- «
gèrent fon château, en chaffèrent fa femme & fes
filles.-Ces infortunées, privées de toute reflource,
fans argent, fans habits, furent obligées de gagner,
à pied, la ville d’Hières rituée a trois grandes
lieues de leur château ; elle fe retirèrent enfuite
dans une autre de leurs terres, la baronnie de
Moans, à trois quarts de lieue de Grafle. Grafle
étoit auflTi dans le parti de la ligue , & Suzane
étoit encore plus attachée au parti des rois, depuis
que fon mari & fon beau-frère avoient péri pour
cette caufe. En , le duc de Savoye, Charles
Emmanuel, de concert avec les ligueurs de la ville
de Grafle, vint mettre le fiége devant le chateau
de Moans, ce fiége fut foutenu avec intrépidité
par Suzane, elle capitula enfin , & fe rendit fous
la cpnçlition exprefle que fon château ne feroit
point rafé, le duc de Savoye le promit ; mais
fur les înfiances des babitans de Grafle, il viola
(k promefle, & fit démolir le château. Sur les
plaintes de Suzane, dont il fentoit toute la juftice ,
il convint de lui accorder une indemnité'/ ^ ne
la paya point. L’intrépide Suzane fe préfente devant
ce prince qui marchoit à la tête de fon armee y
& qui détournant les yeux avec confufîon, feignit
de ne la pas voir & de ne la pas entendre telle
faifit la bride de fon cheval : « vous m écouterez
prince, dit-elle, « Dieu qui eft plus grand que
» vous , reçoit nos prières , & les exauce quand
» elles font juftes ; vous pouvez me manquer cie
» parole, je ne fuis qu’une femme, & je n’ai
jo po:nt d'armée J mais confîderez s il eft de votre
» grandeur & de votre intérêt bien entendu d’abufer
si à ce point du droit du plus fort *>. Le duc
fèntit la force de fes raifons, & lui fit donner à
l’in fiant 1 indemnité premife.
Lorfque Henri IV fut bien'affermi fur le trône,
Suzane vint à Paris, lui demander juftice contre
les aflafllns de fon mari & de fon,beau frère. Les
habitans de la ville de Bormes, une des baronnies
de Pompée de Grafle, étoient à la tête , de ces
aflafllns ; elle obtint un arrêt qui condamna les
confnls de Bormes à faire amende honorable dans
le château, en préfence du feigneur , chaque
année, au jour où l’aflaflinat de Pompée de Grafle
avoit été comm s. La re ne Marguerite prit cette
héroïne pour fa dame d’honneur. On ignore l’année
de fa mort.
Elle avoit deux fères, tous deux connus dans
notre hiftoire , & célèbres par leur efprit. L'un,
Arnauld de Villeneuve, connu encore pour avoir
été le gentilhomme, de Provence, le mieux fait,
étoit un des gentilshommes ordinaires de Henri III,
capitaine de cinquante hommes d’armes, gouverneur
de Draguignan, viguier de Marfeille. Il
fervit les rois contre la ligue, avec le même zèle que
fa foeur & fon beau-frère. Ce fut en fa faveur qu’en
1 6 1 1 , Louis XIII érigea en marquifat fa terre
des Arcs, dans le diocèfe de Fréjus. Il mourut
le 14 décembre 1614, à Pars, pendant la tenue
des états-généraux où il étoit député de Provence.
Son frère puîné, feigneur de la Garde de Freinet
8c de la Motte, au diocèfe de Fréjus, pafloit
pour un des plus favans gentilshommes de fon tems.
11 eft auteur d’une hifioire fainte qui ne paroît pas
avoir été imprimée ; mais qui eft fort vantée dans
une ode que Malherbe adreffe, en 1 6 1 8 , à l’auteur.
Cette ode n’a rien de remarquable que de fournir
dans une feule ftrophe, plufieurs exemples de
toutes les irrégularités qu’on fe permettoit encore
alors dans la verfification, telles que des hiatus ,
des diphtongues partagées en deux fyllabes, plu-
fîeurs fyllabes réduites en une , au mépris de toute
euphonie, &c.
Il ne doit pas quitter ce lieu
Ordonné par la loi de Dieu ;
Car l’ame qui lui efi tranfmife ,
Z z z 2