
traverfé dans fes fuccès, tantôt Luxembourg perfécuté
pour n'avoir pas rampé fous Louvois.
On a imprimé en 1782, , une coFeâion de lettres
& mémoires trouvés dans les pore-feuüles-de M.
de Turenne , deux volumes in-folio. La correlpou-
<hmce de M. de Turenne avec M’. de Louvois, forme
là- partie principale de ce recueil on n’y apperce-
vroit que dbtffezfobles traees de-leur méfintedigence
fens certaines lettres adreffées au roi par M. de
Turenne, une entre autres de Farinée 1674, dont le
fens général reffemble beaucoup à ce mot de. M.
«fe Vilîars
Je ne crains que Verfailles,
Contre vos ennemis je marche fans effroi ;
Défendcz-moi des roiçns, ils. font près de mon roi»
Voici les termes, de la. lettre de M-. de Turenne.:
» Comme j’aurai L’honneur de pouvoir parler à
» votre majeftéici,. 8c de lui é.c; ire quand elle fera
» éloignée, je lui dirai ou lui ferai., favoir les pas
»? que M..de Louvois contipuera.de faire , pour entrer
» dans les fentimens de fqn père , qui: n’a jamais
» pardonné ; & cela joint avec la hauteur Ô£. l’anv
» bidon du fils, votre majeffé peut bien juger’ du
» danger où eft un homme éloigné, 8t quel eft le
» précipice qu’il voit à chaque pas devant foi ; puif-
4» qu’étant près, elle a remarqué quantité, de- petits
»? endroits qui ne l’àflurent que. trop dç cette vé-
■»> rite là.
Quant ait matêfchal de- Luxembourg, vcyeqvers
la fin de l’article Montmorenci, l’indigne procès que
le marquis- de Louvois n’eut pas honte de lui faire
iùfciter pour, magie ôc empoisonnement..
' G’eft à Louvois qu’on a toujours imputé le double
embrâfèment. du paiatinat en-1674. & en 1689, On
dit que Louis XIV fe repentit de ces, cruautés , &.
que lé remords qu’il en eut, fut une des caufes qui
diminuèrent.fur la fin .la , faveur de Louvois..
Madame de Sévigné rapporte unirait de Louvois 5-
qui annonce a la vérité un caraâère altier & im->-
fiérieux ,mais qui montre-en-même--ternps une févérité,.
un amour de la difeipljne très-convenable dans le
ipiniftre d’un grand roi..
M. dé Louvois- dit l'autre jour tout- haut a M7 de ..
Nogaret : « Mor. fleur, voire compagnie eft.en,fort.
» mauvais état. Monfieur, dit-il , je ne le favois.
» pas. Il faut je favoir ,. dit M. de Louvois : rayez-vous
y> vue ? non Moniteur , dit Nôgaret. Il faudroit l’avoir
Ti vue', Monfieur. Monfieur , j’y donnerai ordre. Il
» faudroit l’avoir donné : il faut prendre parti, •
v Monfieur, ou le déclarer courtifan ,. ou-, s’acquitter
» d e fon devoir, quand, on, eft - officier»
M. de Louvois s’éfoit accoutumé a.vouloir que Louis
XIV fut le maître du monde % afin de. l’être fous lui »
£t tous ceux qu’a ies yeux le fort venoiï offrir J,
Lui femh,- ojent fes -fujets,. & fahs pour obéir«..
Héinfius}créature de Guillaume III,roi d’Angleterre
-prince d’Orange , 8c qui lui devoit fa place de penfion-
naire de Hollande, avoit autrefois été envoyé.enFYanca
par ce prince, après la.paix de Nimégue,. peur traiter
d’affaires concernant la principauté d’Orange. Son zèle
pour les intérêts de Guillaume avoit déplu à Louvois
qui regardant tous les Européens comme des fujets de
fonvmaître, s’étoit emporté julqu’à.,menacer Héinfius
de la BaÛille. Long-temps après la mort .de Guillaume
& ue Louvois, Héinfius montra aux conférences de la
Haye & de Gertruydemberg qu’il' n’avoit oublié ni
les bienfaits de l’un , ni les menaces de l’autre ; &
quoiqu’il fût naturellement doux & modéré, le fàge &
modefte Torci eut quelquefois à- expier de fa part les
violences de Louvois. On accufe aufli Louvois d’âvoir
entrepris des guerres , & de les avoir prolongées, &
d’avoir embarraffe les affaires pour en tenir feul le fil,
8i fe rendre- néceflaire.. Mais la difeipline établie 6c
maintenue parmi les troupes ,. l’entretien & l’approvi-
fionn’ment. des armées ^toujours fournies avec une
fupériorité d’intelligence & d’âéfivité vraiment1 admirables
; la célèbre inftruéfion pour-le liège de Gand envoyée
au maréchal d’Humières, la conftruétion de
l’hôtel royal des Invalidés , une foule d’établiflemëns
militaires ,. ou née :flaires ou utiles, une continuité de
l'uccès, qui, ne peut appartenir qu’a, l’habileté ; voilât
les titres de gloire du Marquis de Louvois, dont le
nom.ne réveille pas moins l’idée d’un grand miniftre
que d’un homme altier & dur il é.toit ne., dit-on 9>
goutl’oppi effion & pour la.gloire.de fa pairie. J1 avoit
tellèment ranimé l’ancien efprit militaire dans les.ar-
m.ées.-Franç.oifes--s & en avoit fi bien banni la mollelfe
qu’un officier ayant paru à une alerte en robe dé.
chambre,, le général la fit brûler à la tête .du camp,,
comme une recherche de commodité, indigne d’un
homme de guerre. On.fait , avec quelle injufte rigueur,
Louyois fit traiter Dupas pour avoir rendu Naeraen..
»» Il ne tint a la vérité que quatre jours, dit l’auteur
>» du fiècle de Louis XIV ; mais il ne remit fa ville
» qu’après un combat de-çinq heures ,. donné for de
mauvais ouvrages, & .pour éviter, un affaut géné-
»? rai-,, qu’une garnifon foible & rebutée n’auroit point
. »? foutenu» Le ioi v irrité; du premier affront que rece-
yj "voient fes armes, .fi? condamner Dupas à erre traîné
»? dans Ujtrecht une.pèle à-la main, &• fon épée fut
?? rompue ; ignominie inutile.- pour les..officiers Fran-
>? cois., qui fontàflez fenfibles à la gloire, pour qu’on
»? ne les gouverne pas par lav.Grai.nte de la honte. 11
»?• faut lavoir qu’à la vérité les provifions des comman-
»? dans, des places, les obligent à foutenir trois allants ;
» maisree font de ces Ioix-,qui ne font jamais exécutées.
»? Dupas fe fit-.tueï un an après au ftége -de la petite
»? ville de Grave, où.il fervit volontaire. Son courage
»? 8c;fa mort durent biffer des regrets à. Louvois qui
»? l’a volt fait punir fi durement : la puiflance fou vôraine
»»■ peut maltraiter, un brave homme ,. mais non pas le
»? déshonorer. ?»
Qn a une lettre de. Louvois, où ibtrpuye qu’on a ufé
d’indulgence envers Dupas, ÔC que.fon crime prétendu
méritoit lâmort^
'C’éto’ent toujours les moyens lesplus durs 8c les plus
violenS’ que Louvois jugeoit les plus efficaces ; ôc^ en
Cela XcCprït, comme dit M. de la Rochefoucault, doit
che{ lui la dupe du coeur. Si P ennemi brille un village
Ze votre gouvernement , écrivoi -il au maréchal de
Bouffiers, ‘brûles-en dix du fim. On pouvoit lui répondre
: » Si l’ennemi penfe comme vous, fa réplique
»? fera d’en bzüler cent , la vôtre d’en brûler mille, &
»? ces-horreurs iront toujours en augmentant >?. Le
marquis de Louvois étoit un miniftre impénétrable.
Dans les- opérations de l’armée , dans les délibérations
du confeil, par-tout, il faifoit régner le fecret le plus
inviolable. Prêt de paitir pour un voyage, il feignit un
jour de vouloir dire où il ali oit : Ne nous le dites point-,
dit le comte de Grammont, nous rien 'croirions rien.
M. de Louvois étoit parvenu à mettre fon caradère
hautain & altier en liberté avec le roi. Le roi, qui ne
l’aunoit plus, & qui s’étoit accoutumé auffi à le lui
faire fentir , lui ayant témoigné du mécontentement
fur une affaire dont Louvois lui rendoit compte : Oh !
s’écria celui-ci, il ri y a plus moyen de vous f.rvir. Le
roi, indigné, courût prendre fa canne ; madame dé
Maintenon l’arrêta. Louvois retourna chez lui, egalement
défefpéré de fon imprudence & de fa d.fgrace;
il but un verre d’eau , & mourut fobitement le 16
Juillet 1691a cinquante-un ans. On ne manqua pas de
croire qu’il avoit été empoifonné ; mais Louis XIV
n’empoifonnoit pas, & un roi puiflant n’empoifonne
pas un miniftre qui lui déplaît, il le renvoie. On dit
.que Louis X IV , qui, fans avoir attenté à fa vie , pouvoit
fe reprocher fa mort, & qui devoit au moins
avoir "pitié lui, avoua que l’année 1691 lui avoit é é
favorable, en le délivrant de trois hommes qui lui
Ctoient devenus infupporrables, & . dont le premier
étoit Louvois. Ce fat-là le prix de tant de travaux , • 8c
le terme de tant d’ambition.
De tous ceux qui ont écrit fur Louvois, celui qui
lui eft le plus favorable eft le préfident de Lamoignon,
< Chrétien-François) fils du prem-ev préfident, 8c père
.du chancelier de Lamoignon : »? J’avois engagé , dit-il,
o) entre mon père 8c M. de Louvois une amitié qui
» auroit afliirément duré très-long-temps ; car M. de
»? Louvois a toutes les bonnes qualités de fon père,
( nous avons vu quelles étoient ces#>onnes qualités)
>» 8c y a joint une grande fidélité pour,fes amis; j’en
» ai reçu des marques fi certaines, que je m’en iou-
» viendrai toute ma vie >».
Le marquis de Louvois étoit né à Paris en 1641. Il
fut reçu en larvivançe de la charge de fecrétaire d’état
dè la guerre en 1664, 8c fon père la lui abandonna
entièrement en 1606. 11 fut fait lùr-intendant général
des poftes en 1668. En 1683 , à la mort de M. Co!-
bert, il fut fait fur - intendant des bâtiniens il
étoit d’ailleurs chancelier- des ordres du roi, grand-
vicaire des ordres de Saint - Lazare- 8c clu Mont-
Carmel.
3°. Charles-Maurice le Tellisr, fécond fils du chancelier
le T Aller, 8c frère puîné, Hu marquis de Loti-
vois, ftft aiçhevê^ue de Rejms, commandeur cle
Vordre du Saint-Efprl:, prorifeur de Sorbonne, con-
feiller d’état, &c. Il tenoit un peu du caradcrede ion
frère ; on loi reprochoit de la hauteur, du faite,
une forte de brufquerie grofftère dans les maniérés.
C’eft à lui qu’on impute d'avoir dit, en voyant le rot
d’Angleterre, Jacques II, à Saint-Germain , apres la
révolution : Vailà un bon homme qui a facrifie irait
royaumes pour une meffe ; propos peu eccléfiaftique.
La maifon de Bouillon avoit engagé l’archevcque
de Paris, Pérefixe, à demander - pour; ccadjutetn
i’abbé d’Albret, très-jeune encore, & qui fut deputs
le cardinal de Bouillon : c'étoit le neveu de M. de
Turenne. Louis X IV , qui fe fouvenoit de tout 1 embarras
que lui avoit caufé dans fon enfonce un archevêque
de Paris turbulent, ( le cardinal de Retz ) ns
.vouloir point mettre dans ce liège un jeune horr.me
ardent & de grande maifon, qui lui parotltoit être du
même caraélère. L’abbé' d’Albret, ou, comme on
l’appelloit alors, le duc d’A lbtet, fat rejette, & les
le Tellisr, ennemis de M. de Turenne, triomphèrent
de ce refus. Vers le même temps l’énorme credit des
le Tellur procuroit à Charles-Maurice 1 ai chevecl e de
Reims, 8c faifoit d’un homme à peine noble le premier
pair du royaume. M. de Turenne indigne
vouioit aller reprocher au roi, non pas le refus fait a
fon neveu, mais la grâce accordée à l’abbe le Tellur i
il voulcit, difoit-il, le faire rougir de fa fcibielre
pour fes mioiftres. Profitons de cètte foiblejfe, dit 1 abbe
d’Albret, & ne: la lui reprochons pas ; demandons un
digne dédommagement de Tarchevêcii- de Paris. Api.s
une telle grâce accordée aux. le Tellier , le roi no fera
pas refufer deux fois M. de Turenne. Il fut convenu
qu’on demanderoit au roi le cardinalat pour 1 abbe
a Albret.; le Cardinalat à fon âge! c’étoit fe relever
de la manière la plus brillante du refus de 1 ai chevêche
de Paris. Ce que l’abbé d’Albret avoit préva
arriva ; le roi trouva la grâce un peu forte, mais il ^
n’ofa la rèfufer ; il fe contenta d'exiger Je fècret: pour
quelque temps. Pendant cet interval’e , l’abbé d’Albret
8c le nouvel archevêque de Reims revenant enfemble
de Saint Germain, quàndfori fut à la montagne de
Cîiaritecoq, l’archevêque feignant d’ignorer le rerus
fait à l’abbé d’Albret de l’archevêché de Paris, 8c
ignorant en effet le dédommagement accordé, tourna
fes regards vers Paris, & dit à l’abbe, en lut mon--
trant les rours de Notre-Dame : Voilà^ deux tcu-'s qui
vous conviendraient parfaitement, & je vous les foie-
haite.de tout mon coeur. L’abbé d’Albret le femercta
auffi de tout fon coeur. Peu de temps après ^ les le
Tellier apprirent, avec dépit, que l’abbe d Albret
étoit le cardinal de Bouillon.
C’eft de-l’archevêque de Reims que madame de
Sévicrné raconte , avec fon enjouement 8c fa vivacité
pittcrefque, l’hiftoire fuivante.
» L’archevêque de Reims revenoit hier fort vite de
j) Saint-Germain; c’étoit comme un tourbillon : il
»? croît bien être grand feigneur ; mais fes- gens le
,) croyent encore plus que lui. Ils païToïent au travers
i „ de Nanterre, tfà , ira, tri. Ils rencontrent u»
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