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percé d'an javelot & bleffé à mort. I l fe livre
alors un violent combat autour de fon corps ,
à la manière des te cas héroïques. Publius &
Marcus Valêrius- , tous deux , fils de Publicola ,
parviennent à enlever des mains de l’ennemi le
corps de leur oncle , & le font porter au camp
par leurs écuyers , puis fe rejet tant dans la fnêlee ,
ils y péri fient -eux - mêmes percés de traits. Ce
Marcus Valêrius frère de Publicola , avoit été
conful l’an de Rome 249»
7,c. Un autre frère de Publicola , Manius Vé-
lérius , fut fait diâateur l'an de Rome -z60 , &
l’hiftoire remarque qu'il en fut principalement
redevable à fon caraftère doux & modéré , qui
parut être le contrepoids & le remede naturel à
l ’autorité impérieufc & abfolue qu’on lui confioit.
Cura fu it confulibus & fenioribus patrum , ut imperium
y fuo vehemens 3 manfutto permitteretur in-
gtnio. Il vainquit les Sabins & en triompha. On
lui accorda, outre les honneurs ordinaires du triomphe
, une place diftinguée dans les fpedacles du
cirque, pour lui & pour fes defcendans. avec la
chaire curule.
Ce fut encore par fa conduite un troifiëme Publicola.
Il fit entrer dans l'ordre des chevaliers
quatre cent des principaux perfonnages pris paimi
le peuple s ce qui déplut beaucoup au fénat il
propofa! de nouveau en plein Ténat la queftion
des dettes & propofa, comme Marcus fon frère,
de donner fatisfaûionfur cët objet au peuple &
aux pauvres , la faâion des jeunes & des riches
fit rejetter fa proportion, & s’emporta jufqu a
fui reprocher de trahir les intérêts du fénat four
faire fa cour au peuple : » je vous donne, leur
» dit Valêrius ,d e s confeils de pa’X & de con-
» corde, vous les rejettez , un jour viendra ou
» vous de tirerez au peuple des défenfeurs aufïi impar-
« tiaux 5c aufïi modérés que moi; vous voulez pou-er
» ce peuple à la révolte , vous n’y réuflirez que trop
» bien; j’aime mieux voir ces maux,fimple par-
» ticülier que didaceur ». U fort à liofiar.t du
fénat, convoque l’affembléc du peuple, y paroi.t
avec toutes les marques de fa dignité- » On me
* traite publiquement, ditril, d’ennemi du fénat,
» on me fait un crime de mes vues pacifiques &
» bienfaifantes, on méprife un vieillard plus que
». feptuagénaire , je ne puis parvenir z faire ren-
» dre juftice au peuple romain ; je depofe ici u.-e
» dignité , qui me devient à charge , puilqu ei«e
» vous eft inutile ». Le peuple le teconduilit dans
fa maffon avec des acclamations & un concert de
louanges, & fe retira mécontent fur le mont-
facrc.
■ Lo-roue trois ans après, le même Valêrius vit
éclater la fameufi querelle des tribuns contre Co-
ribian , fruit de la contettafron entre les «cires &
les pauvres, entre les patriciens & les plébéiens,
touché des malheurs dont U voyc-it ferai meurtre,
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fl fît dans le fî nat le difeours le plus pathétique
& le plus touchant , il propofa toutes les voies
poflïbles de conciliation , il demanda tous les (a-
crifices réciproques que la çonjondure rendoit convenables
, tous les balancemens de pouvoirs propres à
entretenir l ’harmonie de l ’état , il dit tout ce que
l’amour de la patrie & de la paix pouvoit infpirer
à un vrai citoyen, à un homme de b ien ; il
preflà , il pleura , il invoqua les dieux dô-rnef-.
tiques, les dieux protefteurs de Rome, il piqua
d’honneur Corioian lui-même, il le combla d’éloges,
il le conjura de joindre q tant de vertus ,
à tant de talens, un peu plus de douceur & de
condefcendance , de faire plier la fierté patricienne,
fous la fatalité 'des conjonctures, de confèntir enfin
à être jugé par le peuple, en prenant d’ailleurs
toutes les précautions nécefiaïres & qu’il indiqua*
contre l ’iniquité que la paflïon & la prévention
pourroient mettre dans le jugement ; il parvint
[ enfin à perfîiader & le fénat & Corioian,
4° Lucius Sç Publius Valêrius furent deux fois
confuls : le premier l’an de Rome 271 & l ’an 284,
le fécond l’ an de Rome 279 & l ’an 294.
Le p'emier confulat de Lucius fut troublé pat
des orages ; il falloit faire la guerre aux Vciers
& aux Volsques , & le peuple refufoit dé s’en-
roller jufqu’à ce. qu’on lui eût donné fa1 isfaélion
fur une demande qu’il avoit formée pour la répartition
des terres & qu’un tribun àppuyoit de
toute l ’autorité de fa charge. Les conîuls imaginèrent
alors un expédient qui paroit n’avoir-été
employé que cette fois & qüi .pëut-ctre en effet
ne pouvoit réuffir qu’une fois ; la jurifdiéfion
des tribuns ne -s’étçndoit point hors des. murs.,
de la ville; les confuls pour y échappe/, tranfc
portèrent leur tribunal dans la campagne ; ils y
citèrent les citoyens pour être enrollés , on n’obéit
pas, les confuls prononcèrent des amendes contre
les réfraffaires , démolirent leurs fermes , enle-t
vèfent leurs troupeaux & leurs charrues.
Cette exécution militaire produifît fon effet. Lg
peuple rentra dans le devoir.
Les compilations fur la loi agraire remplirent
aufïi le fécond confulat dé Lucius Vàlêrius ,
mais fans trou b1 es & fans révoltes.
5e. Le premier confulat de Publius Valêrius ,
fut, affez tranquille; le fedond fut très-orageux.
Le Sabin Herdonius s’étoit emparé du capitole
à la tête d’une troupe d’exilés & d efeiaves ; du haut de
cette fortereffè i) jettoit dans la ville des billets pour .
a;tirer à lui les efeiaves & les mécontcris, & il appelait
à fon fecours tous les ennemis de Rome,
tant ceux du dedans, que ceux du dehors; cependant
des tiibuns féditieux e'mpêchoient le peuple
de s’armer pour la défenfe de Rome , & publioient
que l’expédition: d’Herdonius n’étoit qu’un artifice
.des patriciens pour faire divçrfîon, & pour éludée
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la demande des tribuns & du peuple au fujet de
la loi agraiie. Valêrius. indigné de cette mauvaife
foi ou atfl'gé de cet aveuglement , la fie fon collègue
dans le fénat, fe tnnfporte dans l ’affembléç du
peuple, parle au peuple, parle aux tribuns, leur demande
s’ils font devenus complices d’Herdonius,
s’ils ont refolti de livrer à des efeiaves le boulevard
de Rome & la demeure des dieux. ? Jupiter,
Junon, Minerve , tous les dieux, toutes les déciles,
tous les objets de votre culte & de votre vénération,
font la proie de brigands & d’efclaves,
pre.s à ouvrir toutes les portes de Rome aux Sabins,
aux Veiens, aux Eques, aux Volsques , vos éternels
ennemis, & vous pofez les a'mes , & vous quittez
vos polies, & vous tenez des affemblées & vous
méditez des loir finillres contre vos citoyens 1
que vos tribuns qui vous empêchent de .pri ndre
les aimes contre Herdonius, vous les faffent pcen-
dre contre votre conful, contre Valêrius, contre
l’héritier de ce titre de Publicola 3 qui devrait être
ici le gage de votre confiance. Oui, peuple aveugle
& trompé ! je vous deffendrai contre vos préjuges
& vos erreurs, contre vos tribuns , contre
vous même, & ce que mes ancêtres ont ofé contre
IeL r°is, je l ’oferar contre des tribuns coupables
• qui vous perdent, quand leur devoir eft de vous
defendre & de vous fauver. Il pofe par-tout des
fentinelles , la garde des. portes ell confiée à Ion
collègue, Valêrius marche vers le capitole , y
entraîne le peuple malgré l’oppolîtion des tribuns,
la crainte & le défordie commençoient à fe mettre
parmi les affiégés, lorfque Valêrius combattant
.vail’amment à la tête de fes troupes , & leur
donnant l ’exemple, eft tué; Volumnius,.perfon-
nage confulaire, qui le voit tomber, fait couvrir
;lbn corps, cache fa mort , prend fa place , le
capitole eft forcé , Herdonius eft tué, Rome délivrée,
le peuple apprend alors que fon vaillant
libérateur a été enfèveli dans fon triomphe & n’a
joui-que des préfages & des commencemens de la
viéloire ; il s'acquitte envers lui Corinne il peut,
par de magnifiques obsèques^
6°. Lucius Valêrius Poiîtus , defeendu de Valêrius
r Publicola & Marcus Hofatius Barbatus ,
petit-fils de Marcus Horatius , qui l’an 24? de
Rome avoit été conful avec Publicola, firent
contre la tyrannie des décemvirs , l’an 30) y ce
que leurs ayeux avoient fait contre celle des rois.
Ils furent les premiers qui osèrent attaquer de
front cette énorme puifiance fous laquelle Rome
gémiffoit, fans ofer encore s'en plaindre.
Les décemvirs s’étant vus forcés d’affembler le
fénat, pour y propofer la guerre contre les Sabins
& les Eques , gueireque la mauvaife conduite des
décemvirs avoit attirée aux romains, à peine Appius,
le premier des décemvirs, avoir commencé fa pro-
pofition , que, fans lui donner le tems d’achever,
Valêrius le leva pour parler hors de rang. Vous
répondrez à votre tour, lui dit Appius, U s’a-
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gît bien de vous répond' e ! répliqua Valêrius ;
J'ai à dévoiler vos manoeuvres, vos cabales 3 vos
attentats contre la liber té de Rome. Les Sabins
& les Eques font nos moindres ennemis, les
vrais ennemis de Rome font dans fes murs , &
ce fent eux que j ’attaque. Qu’ils' fe 'fouviennent
que je m’appelle Valêrius. Il s’adr-efia enfuite à
Quinrus Fabius Vibulanus, le feul des décemvirs
auquel on croyoit encore des fentimens dé citoyen ;
& qui avoit été trois fois conful ; il l ’exhorta au
nom de ces fentimens, au nom de ces trois con-
fulats & de l ’eftime de Rome , de répon dre-à
cette eftime , d’embiaflér la caufe du peuple &
de fe féparer de fes col'ègues. Ceux-ci l’environnèrent
pour prévenir fa reponfé & empêcher qu’il
ne fe biffât entraîner. Valêrius fur fortement appuyé
par Horatius Barbatus. Ceci Ce palfoit avant
l’attentat d Appius contre Virginie.
Appius, après la mort de fa déplorable vidimej
ayant eu l ’imprudence de convoquer l’affèmblée
du peuple , Valêrius- & Horatius l ’y fuivirent 5c
eurent foin de faire placer le corps de Virginie
dans un lieu élevé d’où il pouvoit être vu de tout
le monde. Ce fpe&àde remplit le peuple de com-
paffion pour Virginie , pour fon père , peur cec
Icilius qui alloit être fon mari, & dhorreur pour
Appius & les décemvirs, Valêrius & fes partifans
firent à l ’inftant abolir le décemvirar. Les décemvirs
eux-mêmes furent obligés de fe ^émettre , & demandèrent
feulement qu’on les dérobât à la fureur du
peuple ; ils repréfentèrent au fénat que c etoit
l’intérêt commun de ce grand corps, de ne pas
biffer le penple s’accoutumer par le fupph'ce desdécemvirs
à répandre le fang des fénateurs » mais
il falloit négocier avec l ’armée & le peuple qui
s’étoient retirés fur Je mont-facré, jufqu’a ce qu’on
les eut facisfaits fur tous leurs griefs & toutes
leurs demandes ; on leur envoya Valêrius
Horatius qu’ils avoient demandés & qui à voient
pr n.ipalement leur confiance ; ils trouvèrent les
foldats & le peuple très-échauffe.s , demandant que
les décemvirs leur fufient livrés & fe propolant
de les brûler vifs.» Prenez garde, dirent les fages
députés , que vous voilà devenus cruels en haine
de la cruauté & prêts à tomber, dans le ciime
que voulez" punir. Cette réflexion, les frappa , ils
furent difpofés à tranfiger à des conditions plus
raifonnables > on leur accorda de nouveaux tribuns
, ils revinrent & le calme fe rétablit.
Valêrius St Horatius furent nommes confuls pour
l ’année fuivance (306 de Rome,) ees deux ma-
giftrats , populaires^ par leur nature & par Je fou-
venir de leurs ancêtres , & regardant la popularité
comme un titre & un - devoir dans leurs fa-1
milles , fe piquèrent’ de diflinguer leur confulat
par des loix favorables au peuple : ils renouvel-
lèrent toutes celles qui a voient été portées en fâ
faveur par Valêrius Publicola & dont l’inéxécu-
on, avoit caafé beaucoup de troubles, ils §’atta.-