
fupeiflues j ranime le c c e u r& entretient la jeu-
iiefle. «
Bientôt en France -, l’eau - de -v ie ceffa d’être
regardée comme un médicament , & elle devint
une boiffon agréable.
Louis X I I , en 1514 , attribua à la communauté
des vinaigriers - dijlillateurs , le droit de faire de
l’eau-de-vie & de ïefprit-de-vin.
Vingt ans-après , cétteeomuïiinautéfiit fèparée
en deux , -& l’on diftingua les dijlillateurs des
'vinaigriers. ;
La réputation des eaux-de-vie de France ne
tarda point à paffer dans les pays étrangers, & à
établir une branche de commerce très - lucrative,
qui n’a fait qu’augmenter.
L’ean-de-vie de Cognac ,,dans TAngoirmois , eft
.principalement éftimee. Les autres eaux-de-vie de i
France , qui fe font dans l’Orléanois & dans XAnjou,
paffent par Nantes ; une partie va jufqu’en Afrique,
& fe vend aux nègres , qui la troquent contre
des efclaves ; une autre partie s’embarque pour
l’Amérique ; mais il a été défendu de la vendre aux
fauvages, qui la recherchent avec paflion, & que
cette boiffon enflamme & échauffe trop ail'ément.
Les eaux-de-vie de la Saintonge & de l’Angou-
mois font conduites à la Rochelle, d’où elles partent
pour être - diftribuées dans le Nord. Elles y font
jugées, avec raifon, bien fupérieures aux eaux-de-vie
de grains,_ & au tajia de l’Amérique _,qui eft fait
avec le rum ou la melaJJ'e , eau - mère du lucre.
( Hijloire de la vie privée des François , par M. le
Marquis de
Ceux qui s’adonnent principalement à la diftil-
lation ou fabrication dé cette liqueur , font aufli
nommés bouilleurs Ou brûleurs d’eau-de-vie.
Pour faire Xeau-de-vie qui eft dans le commerce,
dit M. Macquer dans fon Dictionnaire de Chimie,
©n met le vin dans de grands alambics de cuivre,
auxquels font adaptés des ferpentins , & on mène
la diftillation de manière qu’il forte du bec de
l’alambic un filet continu de liqueur, & on foutient
cette diftillation jufqir’à ce qu’on s’apperçoive que
la liqueur qui diftille commence à n’être plus inflammable.
On fent bien que cette diftillation étant fort
prompte & peu ménagée , ne peut fournir qu’un
efprit-de-vin fort impur, chargé de beaucoup des
autres principes du vin ; aufli l’eau-de-vie contient-
elle beaucoup d’eau furabondante , & beaucoup
d’huile-de-vin ; fubftances totalement étrangères à
l’efprit-de-vin proprement dit.
L’eau-de-vie fe tire du vin ; mais tous les vins,
ne font pas également propres à faire de bonne
eau-de-vie.
Les vins les plus agréables , tels que les vins de
Champagne & de Bourgogne, les vins verds, les
vins vieux , les vins doux,. les vins d’Efpagne , les
vins mufcats, enfin, les vins de liqueurs, fourniffent
peu ou point d’efprit par la diftillation ; tandis que
les vins médiocres en fourniflent çonfidérablenient»
Les vins acides ou qui tendent a l’acide 'en
fourniffent quelquefois beaucoup- ; mais les eaux-
de-vie qui en proviennent ne font pas de bonne
qualité ; c’eft donc à Inexpérience, fondée fur Fana-
ly fe , qu’il faut s’en rapporter. En générai, il faut
préférer pour cette opération les vins qui abondent
en principe inflammable ,•& les çhoifir plutôt fermes
& pénétrans, que moëlleux & agréables. Et fi l’on
veut faire un -effai ,.il faut que douze pintes de vin
rendent par la diftillation deux pintes de bonne
eau-de-vie, combinée au moins de parties égales
d’efprit & de phlegme. Si elles rendoient moins,
1e vin ne vaudroit pas lès frais de la diftillation.
Mais il eft temps que nous donnions , d’après
l’Encyclopédie , quelques détails concernant la fa-
' bricatiori'j 'la dîftilldtion & lè commerce de l’eau-
de-vie. . .
Dijlillation de l’Eau-de-vie.
La chaudière dont on fe fert pour cette diftilla-
t io n , eft un vâiflèau de cuivre en rond , de la
hauteur de deux pieds & demi, & de deux pieds
de diamètre ou environ * dont le haut fe replie fur
le dedans en talus montant, comme fi. elle devoit
être entièrement fermée , & où pourtant il y aune
ouverture de neuf à dix pouces de diamètre avec
un rebord de deux pouces ou à peu près : on appelle
l’endroit où la chaudière fe replie avec fon rebord,
le collet. Cette chaudière contient ordinairement
quarante veltes , à huit pintes de Paris la velte.
Cette mefure eft differente en bien des endroits
où l’on fabrique de L’eau-de-vie. Il y a des chaudières
plus grandes & plus petites.
• Cette chaudière eft placée contre un mur , à un
pied d’élévation du fol de là terre , dans une ma-
I çonnerie de brique jointe avec du mortier de chaux
I & de fable , ou de ciment, qui la joint & la couvre
toute entière jufqu’au bord du tranchant du collet,
fauf le fond qui eft découvert. Cette chaudière eft
foutenue dans cette maçonnerie par deux ou trois
anfes de cuivre, longues chacune de cinq pouces,
& d’un pouce d’épaifleur, qui font adhérentes à la
chaudière. Cette maçonnerie prend depuis le fol
de la terre ; & le vide qui refte depuis le fol de la
terre jufqu’à la chaudière , s’appelle le fourneau.
Ce fourneau a deux ouvertures , l’une dans le
• devant, & l’autre au fond ; celle du devant eft de
la hauteur du fourneau , & d’environ dix à onze
pouces de large ; c’eft par-là qu’on fait entrer le
bois fous la chaudière. L’ouverture du fond eft
large d’environ quatre pouces en carré ; elle s’élève
dans une cheminée faite exprès , par où s’échappe
la fumée. Il y a à chacune de ces ouvertures, une
plaque de fer que l’on ôte & que l’on replace au
oefoin, pour modérer l’aétion du feu : on en pat"
lera ci-après. v . , ..
C’eft cette chaudière qui contient le v in , ou u
bout par l’a&ion du feu que l’on entretient défions.
On ne remplit pas en entier la chaudière de vin,
parce qu’il faut laiffer un efpace à. l’élévation, du
vin ; quand il bout, afin qu’il ne furmonte pas au
defi'us de la chaudière. L’ouvrier, que I on nomme
un brûleur, ( ce font ordinairement des tonneliers )
qui travaille à la converfion du vin en eau-de-vie ,
fait l’efpace qu’il doit laiffer vide pour l’élévation
du vin bouillant. La plupart de ces brûleurs, pour
connoître ce v id e , appliquent leurs bras au pli du
poignet furie tranchant du bord de la chaudière ,
& laiffent pendre leur main ouverte & les doigts
étendus dans la chaudière ; & lorfqu’ils touchent
du bout du doigt le vin qui eft dans la chandière,
il y a affez de vin , & il n’y en a pas trop.
' Ce vide eft toujours ménagé * quoiqu’on mette
autre chofe que du vin dans la chaudière ; car il
faut favoir qu’après la bonne eau-de-vie tirée, il
refte une quantité d’autre eau-de-vie, qu’on appelle
fécondé, qui n’a prefque pas plus de force ni de
goût que fi on mêloit dans de bonne eau-de-vie f
d’eau commune ; dans laquelle fécondé pourtant
il ÿ a encore une partie de bonne eau-de-vie que
l’on ne veut pas perdre , & que l’on retire en la
faifant bouillir une fécondé fois avec.de nouveau
vin dans la chaudière : on appelle cette fécondé diftillation
, une fécondé chauffe, ou une double chauffe,
parce qu’ordinairement on remet dans la chaudière
tout ce qui eft venu de la première chauffe , foit
bonne eau-de-vie ou feçonde ; ainfi , il faut moins
de vin à cette double chauffe, qu’à la première.
Il y a des gens qui, à toütes les chauffes, mettent
à part la bonne eau-de-vie qui en vient : on appelle
cela lever à toutes les chauffes. Pour la fécondé chauffe,
ils ne mettent que la fécondé., qui eft venue de la
première chauffe : il y a quelquefois jufqu’à 60 ou
70 pintes de fécondé-, plus ou moins, fuivant la
qualité du vin. On dira ci-après comment on con-
noît qu’il n’y a plus d’efprit dans ce qui vient de la
chaudière, & que ce qui y refte n’eft bon qu’à être _
jeté dehors.
Lorfque là chaudière eft remplie jufqu’où elle
doit l’être, on met du feu fous le fourneau ; on fe
fert d’abord de bois fort combuftible, comme du
farment de vigne, du bouleau ou autre menu bois ,
q u i, donnant plus de flamme que le gros bois , a
une chaleur plus vive : on en mgt fous le fourneau,
& on l’y entretient toujours v i f , autant qu’il en
faut pour faire bouillir cette chaudière ; on appelle
cela, en termes de l’art, mettre en train. Quand la
chaudière commence à bouillir, c’eft-à-dire, quand
elle eft affez chaude pour ne pouvoir plus y fouffrir
la main , on la couvre d’un autre vaiffeau que l’on
appelle un chapeau.
Ce chapeau eft un vaiffeau de cuivre fait en cône
applati, dont la partie étroite entre dans le bord
du collet de la chaudière , & s’y joint le plus jufte
qu’il eft poflible. Ce cône , applati & renverfé ,
peut avoir douze à treize pouces. Le diamètre de
la partie étroite eft celui du collet de la chaudière ,
iauf la liberté d’entrer dans ce collet; & le diamètre
du haut peut avoir fept à huit pouces de plus. Il y
a à ce chapeau une oiiverture ronde ? de quatre
pouces de diamètre , à laquelle eft joint & bien
ioudé un tuyau de cuivre qu’on appelle la queue
du chapeau, d’environ deux pieds de lo n g , qui va
toujours en diminuant , jufqu’à la réduétion d’un
pouce de diamètre au bout
On couvre cette chaudière avec le chapeau : on
appelle cela coiffer la chaudière, pour empêcher l’ex-
halàifon de la fumée du v in , parce que c’eft dans
cette fumée que fe trouve l’elprit du vin' qui fait
l’eau-de-vie. On fait enforte qn’il ne refte entre le
chapeau & le collet, de là chaudière aucune ouverture
par où la fumée piiiffe s’échapper ; & pour y
réulfir , après que le chapeau eft entré & bien enfoncé
dans le collet de la chaudière , on met de
la cendre sèche autour du collet ,, pour la fermer
prefque hermétiquement.
Ge tuyau , ou cette queue de chapeau, va fe
joindre dans un autre vaiffeau de cuivre ou d’étain,
que l’on appelle ferpentine , parce qu’elle eft faite en
ferpent replié. G’eft un iifte nfile fait de différens
tuyaux adaptés & fbudés les uns aux autres en rond
& en fpirale, qui n’en font qu’un. Ce tuyau peut
avoir un pouce & demi de diamètre à fon embouchure
, & eft réduit à un pouce à fon extrémité ;
il eft compofé de fix à fept tournans en fpirale,
élevés lés uns fur les autres d’environ fix à fept
pouces, enforte que la ferpentine, dans toute la
hauteur, appuyée fur fes tournans, peut avoir trois
pieds & demi ou environ. Ces tuyaux tournans
font affujettis par trois bandes de cuivre , ou du
même métal dont eft la ferpentine, qui y font jointes
du haut en basjpour en empêcher l’abaiffement.
On unit la queue du chapeau à la ferpentine, en
faifant entrer le petit bout de la queue du chapeau
dans l’ouverture du haut de la ferpentine, où cette
queue entre d’un pouce & demi ou environ : on
lute l’un & l’autre avec- du linge & de la terre
graffe bien unie , afin qu’i l ne forte- point de fumée
qui vienne de la chaudière.
Cette ferpentine e ft, comme Ton doit le comprendre
, éloignée du corps dé la chaudière & de
la maçonnerie qui l’environne ,• de l’efpàce de dix
pouces ou environ : elle eft placée dans un tonneau
ou autre vaiffeau de bois fait en forme de tonneau,
que l’on appelle pipé en bien des endroits. Cette
i ferpentine y eft pofée debout & à-plomb, penchant
néanmoins tant foit peu fur le devant, pour faciliter
l’écoulement dè la liqueur qui y paffe : elle y eft
affujettie ou par des pattes de fer , des crampons 8c
des pièces de bois qui, fans l’endommager, peuvent
la rendre immobile & la tenir dans un état fiable.
Il y a à cette pipe trois trous ou ouvertures fJFuii
au haut, du côté de la chaudière, par lequel fort
de la longueur d’un pouce le bout d’en haut de la
ferpentine ; l’autre trou au bas , dans le devant de
la pipe , par où fort de la longueur de trois pouces
ou environ , le petit bout' de la ferpentine ; & un
autre trou dans le derrière de là pipe , où l’on a
ajufté une fontaine ou gros robinet.
Lorfque la ferpentine eft bien pofée dans la pipe ],
A s ij