
chaux , qui après avoir été éteinte a été pilée,
paffée par un tamis, & a été mêlée avec la poudre
d’os : la poudre compofée eft devenue propre à
mouler. La fonte s’eft confervée encore plus douce
dans ces nouveaux moules que dans ceux où la
craie étoit entrée , & , ce qui mérite beaucoup
d’attention, m’ont paru moins fujets aux fouffiures.
Si la poudre d’os étoit trop embarraffante à recouvrer
en affez grande quantité , on pourra mêler
la chaux avec du fable qui a déjà fervi : la com-
pofition ne fera pas aufli parfaite ; mais elle fera
bonne. Si les expériences continuées en#grand font
suffi favorables aux compofitions où la chaux entre
que l’ont été les effais , ce nouveau fable à mouler
aura un avantage qu’on ne fe feroit jamais promis :
ce fera un fable qui reftera toujours le même ,
quelque nombre de fois qu’on le cuife & recuife :
la preuve en eft fimple. Nous l’avons fait de fable
cuit ou de poudre d’os qui ne peuvent pas changer
d’état tant qu’on ne leur donnera que le degré de
chaleur que demandent les moules ; la chaux ne
peut aufli que refter chaux, tant qu’elle ne fouffrira
que le degré de chaleur que nous faifons foutenir
à nos moules. Au lieu que les terres qui donnent
le corps à nos fables ordinaires , perdent le leur ,
expofees à un degré de feu affez léger ; la chaux t
cxpofée même à un degré de chaleur violent ne
s’altère point du tout.
Enfin , fi à notre mélange de chaux & de fable
eu de chaux & de poudre d’os , on ajoute de la
poudre de charbon , on aura une compofition à
mouler qui raffemblera toutes les qualités qu’on
peut fouhaiter.
Si l’on veut ménager la poudre compofée qu’on
aura faite , quelle quelle foit, ou fi elle n’a pas
affez de corps , on pourra, comme nous l’avons
enfeigné, pour ménager le fable de Fontenay-aux-
rofes , n’en faire entrer dans le moule qu’une couche
de l’èpaiffeur d’une ou deux lignes , pour former
les parois intérieures du-creux du moule.
Les moules dont nous venons de parler font
tous du genre des moules en fable. Les différentes
matières réduites en poudre, dont nous avons fait
ufage ou tenté de le faire, tiennent lieu du fable
ordinaire, & s’emploient de même dans des châlfis.
Nous avons déjà obfervé que ceux de terre fe
font fans châflis. Le travail en eft quelquefois un
peu plus long ; mais on en eft récompenfé par
quelques avantages. Les pots & les marmites de
ter fe moulent dans certains fourneaux en fable ;
& dans d’autres peu éloignés des préeédens ,
elles fe moulent en terre. Les ouvrages des uns
ne fe vendent pas ou guère plus cher que ceux
des autres : d’ou il fuit que le prix des façons ne
fait pas de différence fenfible. Mais les mouleurs
en terre prétendent que la fonte fort moins aigre
de leurs moules : le fait eft vrai ; les raifons en
font qu’on les fèche beaucoup mieux que ceux de
fable ; dans la pratique ordinaire , ces derniers
teftent toujours très-humides. Mais la yraie raifon,
c’eft que Ta matière des moules de terre eft bitm
moins compa&e que celle des moules de fable, &
qu’elle s’échauffe bien plus aifément. Il arrive que
les mouleurs en terre fonf contraints , en cherchant
à donner du corps à leur terre, de faire un mélange
équivalent à celui que nous avons coiffeillé de la
poudre de charbon avec le fable. Us mêlent leur
terre avec du crotin de cheval, pendant qu’ils font
fécher leurs moules au feu. Cette matière fe fèche,
& même fe brûle en .partie ; mais ii on les fait
recuire, comme nous l’avons preferit, tout le crotin
fe réduit en charbon ; la caffure d’une chape de
moule refroidié paroît alors toute noire ; de forte
que les moules de terre font naturellement excel-
lens pour conferver la fonte douce.; & on les rendra
encore meilleurs , fi on donne la dofe de crotin
plus forte, c’eft-à-dire, aufli forte que le moule la
pourra porter.
Ce feroit un examen qui nous mèneroit loin, que
celui des terres propres à mouler ; en général elles
doivent, comme les terres à creufets, foutenir une
grande chaleur fans peter, fans fe fendre elles
doivent être maniables, douces ; elles doivent être
de nature à fe retirer peu pendant qu’elles fèchent.
C ’eft pour leur donner cette dernière propriété &
la première, que lorfqu’on veut mouler avec des
glaifes ordinaires, ou autres terres à pots & à creufets
, on les mêle avec du crotin de cheval. Communément
les mouleurs prennent de la terre qu’ils
nomment d'herbue, c’eft-à-dire., une terre telle que
celle des prés , au deflus de laquelle l’herbe., croît
bien : celle-là eft ordinairement de couleur noirâtre.
Du refte, les terres à mouler ne font pas plus
rares que les terres à creufets & à pots. Mais entre
ces terres il y en a de plus convenables les unes
que les autres : quelques-unes ont naturellement
la propriété de ne fe point fendre en féchant ; mais
lôrfqu’elles la doivent à un fable groflier, avec lequel
elles font mêlées, elles ne conviennent pas
pour des pièces fines.
Où les terres naturellement propres à mouler
manquent, pourvu qu’on y en trouve de fines qui
aient du corps, on peut toujours , par des préparations
, les rendre propres à mouler les plus beaux
ouvrages ; il n’y a qu’à mêler avec ces terres un
fable fin , & l’y mêler dans la proportion qu’elles
l’exigent. Comme pour faire du fable à mouler,
nous mêlons de la terre avec du fable; fi on ne
trouve point de fable .affez fin, on- rendra tel tout
fable greffier, comme nous l’avons déjà dit, en
le pilant dans des mortiers.
Ce que j’ai trouvé de plus propre pour compofer
d’excellente terre à mouler, c’eft la mine de plomb
réduite en poudre & paffée au tamis ; on la pétrira
avec une terre à çreufet pure ; on n’emploiera de
cette terre qu’autant qu’il fera néceffaire pour donner
du corps à la mine de plomb. Les moules de
cette terre compofée pourront recevoir les impref-
fions les plus délicates : ils fécheront fans diminuer
I confidérablement de volume ; ils foutiendront parfaitement
faitement le métal en fufion. Avant de l’y couler,
on pourra les chauffer autant qu’on voudra ; mais
toujours fe fouviendra-t-on pour ces moules, &
pour tous ceux de terre , de les faire parfaitement
fécher avant de s’en fervir.
Les potiers d’étain trouvent de l’épargne à couler
leur métal dans des moules de cuivre : quoique
ces moules coûtent beaucoup, leur durée dédommage
de leur prix. J’ai auffi fongé à faire jeter le
fer dans des moules de métal, & fur-tout dafis des
moules de fer même, fans négliger pourtant d’ef-
fayer ceux de cuivre qui coûteroient beaucoup plus
cher. Ces moules durables me fembloient devoir
être très-avantageux pour une infinité de petits
ouvrages dont le débit eft grand ; mais l’expérience
m’a appris qu’ils ne convenoient nullement lorfqu’on
fe propofe de les tirer doux du moule ; & elle a
fourni de nouvelles preuves de tout ce que nous
avons établi jufqu’ici fur la denfité de la matière
des moules. Nous avons dit que plus la matière
des moules eft compade, plus elle demande que
les moules foient chauds , afin que la fonte ne s’y
trempe pas. Je fis chauffer des moules de cuivre
& des moules de fer autant & plus que j’aie jamais,
fait chauffer ceux de fable. J’y fis couler de la fonte
très-douce ; ayant été retirée de ces moules, elle
fut trouvée auffi dure.& aufli blanche que fi elle I
eût été coulée dans un moule de fable prefque froid. 1
Le métal qu’elle avoit touché étant beaucoup plus
denfe que le fable le plus compade, l’avoit refroidie
plus promptement.
Il y a diverfes circonftances que nous rapporterons
dans la fuite, où l’on met dans les moules ,
foit de terre, foit de fable, des pièces dé fer forgé,
autour defquelles on veut que la fonte s’uniffe étroitement
: par exemple , on peut fe contenter de fondre
l’anneau d’une clef, & le faire tenir à une tige
de fer forgé. Dans ce cas, on met dans le moule la
tige au bout de laquelle la fonte doit fe mouler en
forme d’anneau. Lorfque j’ai fait ainfi rapporter
des pièces de fer forgé , il-m’eft fouvent arrivé
d’obferver un fait dont le phénomène précédent
découvre la caufe. Les extrémités de la fonte qui
touchoient le fer étoient dures & hors des atteintes
de la lime, pendant que tout le refte étoit doux ;
le fer avoit trempé ce qu’il avoit le plus touché.
Il n’y a pourtant pas à défefpérer des moules de
métal ; pourvu qu’on les faffe chauffer beaucoup
plus que les autres , on pourra s’en fervir. Mais
le plus- fur fera de ne les employer que pour des ouvrages
que l’on fe propofera d’adoucir par les recuits
faits félon la méthode que nous avons indiquée ;
& ces ouvrages qui feront moulés fans frais, reviendront
à bon marché après le recuit. Ces fortes de
moules conviendront généralement pour tous les
ouvrages unis, ou peu chargés d’ornemens.
Un moule de métal, comme tout autre , eft au
moins compofé de deux parties ; il en aura fouvent
trois, quand ii demandera un noyau ; & quelquefois
en aura-t-il beaucoup davantage. L’art du po-
■ drts £ Métiers. Tome II. Partie II.
tier d’étain donnera au nôtre des exemples de refte,
des manières dont on peut tenir affemblées les pièces
dont un moule eft compofé. La pratique des
mouleurs en terre fera peut-être encore plus commode
pour la plupart des’cas ; dès que les différentes
pièces d’un moule auront été réunies, on l’enterrera
dans du famé qu’on battra à coups de pilons
ou de maillets : ce fable pourra être contenu dans
des caiffes de grandeurs proportionnées à la grandeur
& au nombre, des moules qu’on voudra remplir
tout de fuite.
La fonte fluide s’attache en bien des circonftances
au fer forgé ; c’eft de quoi même nous tirons parti
ailleurs ; elle s’attacheroit de même à d’autre fonte ;
& quoique la réunion ne fe fît pas parfaitement
dans nos moules, elle empêcherait quelquefois que
l’ouvrage ne fût retiré facilitent des creux où il
aurait pris fa forme. Pour légère que foit la couche
d’une matière étrangère qui recouvrira la fur-
face intérieure du moule, l’adhérence de la fonte
qu’elle doit recevoir ne fera plus à craindre ; & il
importe que cette couche foit légère, pour ne point
altérer la forme du moule. Avant de le fermer, il
faut donc le rêvêtir d’une très-mince co'uche de
quelque matière ; je n’ai rien trouvé de mieux que
d’y employer la même compofitiou avec laquelle
les mouleurs en terre frottent leurs noyaux & leurs
châpes dans la même vue que nous avons à pré-
fent; elle eft faite de poudre de charbon de bois
blanc, pilé & paffé par un tamis fin. Us détrempent
cette poudre avec de la lie de vin & de l’eau ;
ils laiffent enfuite repofer le tout, & verfent dans
un autre vafe ce qu’il y a de plus liquide. Avec un
morceau de filaffe qui leur tient lieu de pinceau ,
& à qui ils en donnent le nom, ils mouillent de
cette compofition toutes les furfaces contre lefquel-
les la fonte fluide pourrait s’appliquer. On enduira
de cette même compofition l’intérieur des moules de
métal, dans lefquels pourtant on ne verfera la fonte
que lorfqu’elle fera fèche.
Les potiers d’étain, en quelques endroits, emploient
au même ufage du vinaigre dans lequel ils
ont détrempé de la fuie; ils ne prennent que le
plus clair de cette liqueur : du noir de fumée vaut
: encore mieux. Enfin il fuffiroit d’enfumer les moules
de métal, comme les mouleurs en fable enfument
les leurs, c’eft-à-dire , en les préfentant à la fumée
de ces efpèces de petits flambeaux de réfine qu’il
leur a plu de nommer des bougies.
170. Suite des procédés depuis que les moules ont
été mis en recuit , jufqu'à ce' que les ouvrages
fondus en foient retirés. Manière de recuire les
ouvrages dans les moules memes.
Rapprochons à préfent les unes des autres nos
principales opérations ; parcourons-les plus brièvement
que nous ne l’avons fait dans les articles q u i,
chacun , n’en avoient qu’une feule pour objet ;
nous nous en repréfenterons mieux toute la manoeuvre
de notre art ; & les remarques qui tien-
Y y y y .