
raboteux, Si on polit enfuite avec de la pierre
poncé & du tripoli broyés.
Le tout ainfi difpofé, on grave avec un burin
fur le relief, qui a été formé fur le mordant, foit
des figures, foit des animaux, des payfages, des
montagnes , des maifons, ou tel autre deffin.
On repolit encore de nouveau ce qu’on vient
de graver, & l’on paffe fur ces reliefs une couche
ou deux de vernis à l’ambre , ou d’un vernis de
gomme-laque à l’efprit-de-vin , dans lequel on a
mis du noir d’ivoîre.
Cependant on ne doit mettre -ainfi en noir, que
les endroits dont on veut biffer pénétrer les fonds,
comme pour les deffins de têtes , de pieds, de
mains , d’oreilles , & toutes les extrémités des
figures.
Quant aux draperies , elles fe font ordinairement
en rouge avec du vermillon , & rarement en brun.
Les Japonois y introduiraient auffi des burgos, des
nacres de perles, des lames d’or, incruftés au moyen
d’un vernis plus épais que le vernis ordinaire, qui
fervoit à les retenir , & qu’on repoliffoit après
avoir encore paffé quelques nouvelles couches de
vernis fur tout l’ouvrage.
C ’eft là le procédé des vernis de boîtes de carton
ornées de. nacre de perle, dont le fieur Martin
ÔL fes frères avoient amené la mode.
Pour orner ces vernis d’or ou d’argent, on couvre
d’un mordant la partie qu’on veut dorer ou argenter
, on renverfe deffus l’or ou l’argent en poudre
, lorfqu’elle eft sèche à moitié ; on fait enfuite
fécher au foleil ou à l’étuve ; enfin on polit avec
la dent de loup ou le bruniffoir.
Des ors& argents employés dans les ouvrages de Chine,
L’or en chaux, l’or en poudre, l’or vert, l’or
en coquille , l’or faux, l’or d’aventurine., l’or rouge,
l’argent fin en poudre, l’argent en coquille , la limaille
d’argent & l’aventurine d’argent, fervent le
plus communément aux ouvrages de Chine & du
Japon ; ces ors demandent des préparations que
M. Watin nous fait eonnoître.
Pour l’or en chaux , on acheté à la monnoie
quatre gros d’or en chaux, qui eft l’or de départ,
on le réduit èn poudre , on le broie fur une pierre
de porphyre ; on le lave dans de l’eau jufqu a ce
qu’elle en forte très-claire, on le fait fécher au
loleil ou dans une étuve ; on jette de cette poudre
fur cè qu’on a peint, & autant que le mordant en
peut prendre ; on le fait fécher enfuite avant que
de brunir*
Or en poudre. On a un livret d’or fin, on le renverfe
fur une pierre à broyer enduite de miel ; on
broie ces feuilles d’or comme des couleurs ; on
ramaffe le tout avec un couteau à broyer ; on jette
ce mélange dans un vafe , & on lave dans plufieurs
eaux^ jufqu’a ce que l’or foit dégagé de toutes
matières étrangères : lorfqu’il eft pur, on le fait
fécher.
.C’eft le même procédé à fuivre pour les feuilles
«Tôt faux, & pour des feuilles d’drgent; on fubftîtuë
auffi quelquefois l’étain à l’argefit : mais en général
dans ces chofes d’ornement, il faut employer de
l’or & de l’argent fins, pour que le folide & l’agréa-;
ble fe trouvent enfemble.
L’or vert, eft de l’or battu qui fe vend en livrets
fous cette couleur, & qui fe prépare comme on
vient de le dire avec le miel.
L’or & l'argent en coquilles, fe vendent ainfi préparés
chez les marchands ; mais il faut préparer l’or
& l’argent broyés au miel.
L’or & l'argent aventurine, fe vendent en livrets,
doivent fe broyer au miel, mais très-legérement,
en forte que la poudre foit en petits grains.
Quand on veut aventuriner des fonds , on met
une couche de vernis d’ambre pur fur la pièce,
on jette deffus de la poudre d’aventurine, à une
cartaine diftance, avec beaucoup d’égalité & de
précaution ; on procédé enfuite comme à l’ordinaire.
L'argent en chaux, eft une poudre fine que l’on
obtient à la lime, d’un lingot qu’on broie , qu’on
lave , & qu’on emploie fur le mordant commeffor.
La limaille, foit de cuivre rofette, foit de cuivre
rouge ou jaune , fe prépare de même.
Pour imiter la manière du Japon , il faut fe fervir
de lo r en chaux, & on imite la manière de la
Chine avec l’or en feuille préparé au miel.
Si l’on travaille d’imagination, il n’y a rien ji
prefcrire au goût du compofiteur ; mais fi l’on
imite ; alors le modèle ou l’ouvrage chinois ou japonois,
indique affez ce qu’il faut faire; il en eft de
même quand il s’agit de raccommoder des laques ;
il faut fe conformer au modèle*
Ordinairement lorfqu’on travaille en faux laque ,
on n’emploie que du vernis'à l’efprit-de-vin , &
l’on ne met point fécher à l’étuve ; mais il faut
avoir attention de vernir avec un pinceau les bronze
& or faux.
Nous avons vu qu’un des principaux procédés
du verniffeur , étoit de polir avec de la pierre ponce
& du tripoli réduits en poudre. Les pierres ponces
font des pierres légères & poreufes, calcinées ,
d’un goût falé & marécageux , de couleur grife ou
blanchâtre ; on les tire de Sicile vers le mont
Yefuve.
Le tripoli eft auffi une pierre légère calcinée,
d’une couleur rougeâtre, que l’on tire de plufieurs
endroits de Bretagne, d’Auvergne , d’Italie.
# Quand on veut polir les vernis, il faut que la
pierre ponce foit en poudre impalpable , que l’on
imbibe d’eau, dont on frotte légèrement & également
avec une ferge.
Le tripoli doit être également réduit en poudre
très-fine, & on la prend avec un morceau de drap
blanc imbibé d’huile d’olive, pour polir; on effuye
enfuite l’ouvrage avec des linges doux ; & quand
le tout eft bien fec, on décrafle avec du blanc d’amidon
ou du blanc d’Efpagne , en frottant avec la
paume de la main &. effuyant avec un linge, ce
qui s’appelle lufrer.
Four
Pour rafraîchir ou raviver des couleurs ou vernis, J
& leur enlever la craffe & la mal-proprete\ on le
fert d’une eau de leffive faite avec de la potajfe &
des cendres gravelées. "
Si l’on n’a pas la facilité à. la campagne d avoir
ces 'Tels » On peut fe les procurer de la manière
fuivante. ,
La potajfe ou vèdaffe fe fait en brûlant des rameaux
d’arbres dans des foffés garnis en dedans de briques
, en manière de fourneau ; on continue longtemps
la calcination des cendres de ce bois , & on
les arrofe à plufieurs reprifes avec de la leffive commune
, afin qu’elles forment des blocs & morceaux
durs bien cuits & bien imprégnés de fel. La Pologne
, l’Allemagne, la Ruffis fourniffent beaucoup
de potaffe« ,
La cendre gravelée eft une lie de gros vin quon
fait fécher & calciner ; Ü faut la choifir en pierres
bien sèchesôc nouvellement faites,de couleur blanche
ou verdâtre, jSc d’un goût falé amer. La cendre gravelée
doit fe garder dans uiv vaiffeau clos &. dans
un lieu fec, parce que l’humidite de lair diffolve-
roit le fel alkalin qu’elle contient.
O r , pour faire cette eau de leffiv^, qui eft ici
recommandée ; on prend fix pintes d’eau de riviere,
on y met tremper trois livres de potaffe & une livre
de cendre gravelée, & l’on peut s’en fervir peu de
temps après; cette eau eft violente & mordicante;
on l’appelle communément eau fécondé, qu’il ne faut
; pas confondre avec un autre eau fecorude, qui eft
une eaii forte ou efprit de nitre affoibli.
Pour lejjiver ou décrajfer les couleurs fales, on
met un demi-feptjer de Yeau fécondé que nous avons
décrite dans une pinte d’eau ; on l’étend également,
en prenant garde de faire des coulures , & trois
ou quatre minutes après, il faut laver avec de l’eau
de rivière à la nage , pour emporter la craffe & 1
l’eau fécondé : les couleurs paroiffent franches après
cette opération ; quand tout eft fec, on donne une .
ou deux couches de vernis.
Si la peinture étoit gâtée , foit par un grand frottement
, foit par le feu, il faut tâcher de raccorder
la couleur nouvelle, en la tenant d’une teinte un
peu plus claire que l’ancienne, & y mettant moins
d’huile, laiffant enfuite le temps ôt l’air agir pour
lui donner lé même ton. .
Pour détruire les couleurs & les vernis, on imbibe
le fujet d’eau fécondé, on leffive , on lave avec
de l’eau, on enleÿe avec des grattoirs &. des fers i
à réparer.
Moyens de rafraîchir les couleurs d'un tableau.
Si l’on veut donner de la fraîcheur & de la vivacité
aux couleurs d’un tableau , oh fait fondre
gros comme une aveline de fucre candi dans un
demi-poiffon d’eau-de-vie ; on.bat vivement unblanc
d’oeuf, & on y introduit peu-à-peu l'eau-de-vie ;
Le tout étant mêlé on le bat encore , & avec une
éponge douce & fine, on paffe légèrement de cette
liqueur fur le tableau, s’il eft nouveau.
Arts & Métiers, Tome II, Partie L
Si le tabjeau eft ancien, on le nettoie légèrement
avec te bout d’une broffe un peu rude, quon trempe
dans une leffive tiede, compofée d’une pinte d’eau
de rivière & d’un quarteron de favon noir ; il faut
furtôut avoir attention que cette leffive ne fejourne
pas trop long-temps, &. ne morde pas trop fort.
Le tableau étant bien la v é , bien- nettoye, bien
fe c , on y applique une ou. deux^ couchçs de boa
vernis. - ■ ’ . ■ ■ 1 >
Cette leffive ainfi compofée, convient mieux pour
nettoyer les anciens tableaux, que les leffives com-
pofées de potaffe, de cendres gravelees , d eau fécondé
avec de l’urine-, ôcc.
Il y en a qui ne fe fervent en cette occafion que
de l’eau pure de rivière, qu’ils laiffent quelque
temps fur la peinture : mais L eau, en fejournant,
peut détremper & gâter les couleurs, & elle devient
dangereufe, s’il y a déjà des vernis dont on
ignore la nature. • ,
Nous terminerons cet article , par le Mém o ir e
INTÉRESSANT DU PERE d 'InCARVILLE , SUR LE
FAMEUX VERNIS DE LA CHINE.
« On fait maintenant en Europe que le vernis de
la Chine n’eft point une compofition, mais une
gomme ou réfine qui coule d un arbre que les Ch*K
nois appellent Tft~chou ou qrbre du vernis. U
Cet'arbre croît dans plufieurs provinces méridionales
’de la Chine : il croît fans culture dans jes
montagnes; onjen trouve dont le tronc a un pied
& plus de diamètre : ceux que l’on cultive dans les
plaines & fur quelques montagnes , ne viennent
guère plus gros que la jambe 1 les Chinois les
épuifent, auffi ces arbres cultivés ne durent pas plus
de dix ans. É
L’arbre de vernis reprend facilement de bouture :
dans l’automne on remarque les branches dont on
veut fe fervir pour_ tranfplanter ; on les entoure de
terre détrempée un peu ferme à quelques pouces
au deffus de l’endroit oh on veut couper la brançhe ,
on forme de cette terre une boule groffe comme la
tête ou environ , on l’enveloppe de filaffe ou de
linge , pour contenir le tout jufqu’au temps des gelées
; on arrofe de temps en temps la boule de terre
pour l’entretenir fraîche : la branche pouffe des ra-
; cines ; au printemps, on fcie la branche au deffous
de la boule de terre, & on la tranfplante. ^
Cet arbre vient également bien en plaine campagne
comme.fur les montagnes, & le vernis eft
en tout auffi bon, pourvu que le terrein foit bien
fitué j les arbres qui n’ont pas une bonne expofition
ou qui font pius à l’ombre , donnent plus de vernis,
mais moins bon. Cet arbre ne demande d’autre t
culture que de remuer la terre au pied, & d’y raf-
fembler desieuiffes, qui, en poiyriffant, lui fervent
de fumier.
Le vernis fe recueille en été ; fi c eft un arbre
cultivé, chaque année on en tire trois fois du
vernis.; celui de la première fois eft meilleur que
celui de la féconde, &. celui de la fécondé meilleur
que celui de la troifième. Si ce font des arbres qui